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emportent les intérêts, de plein droit, du jour de la dissolution de la communauté (art. 1473 C. N.). C'est une réciproque et légitime indemnité, en faveur de l'époux ou de la communauté, du retard qui peut avoir lieu dans l'entrée en jouissance de leurs droits respectifs.

211. Après que tous les prélèvements des deux époux ont été exécutés sur la masse de la communauté, le surplus se partage par moitié (1) entre les époux ou ceux qui les représentent (2) (art. 1474 C. N.).

Il faut supposer que la communauté n'est grevée d'aucune dette.

212. Dans le cas contraire, les dettes de la communauté sont pour moitié à la charge de chacun des époux, et comprennent les frais de scellé, d'inventaire, de vente de mobilier, de liquidation, de licitation et partage (art. 1482 C. N.).

213. Toutefois, ceci n'est que le principe général.

En effet, la femme jouit d'une faveur particulière, celle de n'être tenue des dettes de la communauté, soit à l'égard du mari, soit à l'égard des créanciers, que jusqu'à concurrence de l'émolument qu'elle retire du partage de l'actif de la communauté, pourvu qu'il y ait eu bon et fidèle inventaire, et en rendant compte tant du contenu de cet inventaire que de ce qui lui est échu par le partage (art. 1483 C. N.).

Ainsi, supposant qu'après que tous les prélèvements des deux époux ont été opérés, le surplus de l'actif ait été partagé (surplus que, pour exemple, nous porterons à 20,000 fr.); supposant que, la veuve ayant reçu 10,000 fr. pour sa moitié, il survienne alors 40,000 fr. de dettes de la communauté, inconnues jusquelà dans ce cas, la veuve serait libérée en rendant compte tant du contenu de l'inventaire que des 10,000 fr. qui lui seraient

(1) Par moitié, sauf le cas dont nous avons parlé sous le no 81, c'est-à-dire celui où, par le contrat de mariage, on a assigné à chacun des époux des parts inégales dans la communauté.

(2) Ou ceux qui les représentent; par exemple: les héritiers du mari ou leurs cessionnaires, et ceux auxquels la veuve aurait cédé ses droits de communauté.

échus par le partage; et les héritiers du mari seraient seuls tenus de l'excédant, sans recours contre la veuve (art. 1483 et 1491 C. N. combinés).

Le mari, en effet, a bien pu, de son vivant, compromettre les droits futurs de la femme dans la communauté dont il était le chef et maître, mais il est évident, en raison et en justice, qu'il n'a pu engager les biens personnels de la femme. Celle-ci, d'ailleurs, a pu ignorer la dette qui s'est révélée après le partage, et ainsi, n'avoir point exercé le droit de renoncer à la com

munauté.

C'est ce qui explique la différence des expressions employées dans les articles 1482 et 1483 C. N. Dans le premier de ces articles, les dettes de la communauté sont simplement à la charge de chacun des époux, c'est-à-dire qu'ils doivent y contribuer chacun par moitié; dans le second, la femme est tenue, mais seulement jusqu'à concurrence de son émolument.

214. Les expressions de l'article 1483 C. N. : pourvu qu'il y ait eu bon et fidèle inventaire, nous ramènent à une plus ample explication sur ce que nous avons dit précédemment et sous le n° 109, en parlant du détournement ou du recel par la veuve d'effets dépendant de la communauté. Il est évident que, dans le cas où elle a détourné ou recélé quelques-uns de ces effets, où, ainsi, elle ne les a pas fait comprendre dans l'acte destiné à établir la composition exacte des biens communs, la veuve n'a pas fait bon et fidèle inventaire. La conséquence qui en résulte contre elle, est d'être privée, non-seulement de sa portion dans les effets détournés ou recėlės, mais encore du bénéfice de n'être tenue des dettes de la communauté que jusqu'à concurrence de son émolument (art. 1456, 1477 et 1483 C. N. combinés).

215. Maintenant, rendons plus sensible encore tout ce qui vient d'être dit plus haut, par une démonstration pratique.

Quand le notaire chargé de dresser la liquidation, a établi le compte des remplois et récompenses dus par la communauté aux époux, et des récompenses et indemnités par eux dues à la communauté, il établit la masse générale active.

Il y porte, par exemple :

1o L'argent comptant existant lors du décès du mari;

2o Le mobilier, suivant la prisée de l'inventaire, déduction opérée : 1o du préciput (1) (lorsqu'il en a été stipulé un et que la veuve l'a pris en nature); 2° de la valeur des provisions inventoriées et consommées par la veuve et ses domestiques pendant les trois mois et quarante jours accordés pour faire inventaire et délibérer (voir au no 151);

3° L'excédant de recette du compte de l'administration provisoire qui aurait été confiée soit à la veuve, soit à l'un des héritiers ;

4° Le prix de la vente du mobilier, quand elle a eu lieu (2), et celui des immeubles dépendant de la communauté, lorsqu'ils ont été licités ou adjugés;

5o Les loyers, fermages, arrérages de rentes, intérêts de sommes placées, échus au décès, ainsi que ceux courus depuis le décès;

6" Les récompenses et indemnités dues par les époux à la communauté, en y joignant les intérêts à compter du jour du décès.

Puis, il opère les prélèvements, notamment celui des indemnités dues par la communauté aux époux.

Il compose la masse passive, en portant, sous une première section, les reprises et créances de la femme.

Il tire hors ligne, les reprises en nature de celle-ci.

Il porte à la colonne des capitaux : la dot, le préciput, le douaire de la femme, le prix de ses immeubles aliénés et dont il n'a pas été fait de remploi, et toutes autres indemnités qui peuvent être dues à la femme par la communauté.

(1) Voir, au no 77, la définition que nous avons donnée du préciput. (2) Le mobilier a pu n'être pas vendu si les héritiers du mari étant mineurs, la mère, tutrice et ayant la jouissance propre et légale des biens de ces mineurs, a été dispensée d'opérer cette vente, préférant de les garder pour les remettre en nature. Dans ce cas, elle a dù en faire faire, à ses frais, une estimation à juste valeur, par un expert nommé par le subrogé tuteur, et qui aura prêté serment devant le juge de paix (art. 453 C. N.).

Sous une seconde section, le notaire porte les 'reprises en nature du mari, et les récompenses qui peuvent être dues à sa

succession.

Sous une troisième section, il établit l'importance des dettes de la communauté, y compris les frais de scellé, d'inventaire, de vente de mobilier, de liquidation, de licitation et partage.

Puis, le notaire établit la balance entre la masse active et celle passive, et l'excédant de la première sur la seconde forme le bénéfice de communauté à partager.

Il passe ensuite, à l'établissement des droits respectifs des époux.

Au paragraphe 1er, concernant les droits de la veuve, il porte: Les reprises de celle-ci, et y ajoute sa moitié des bénéfices de la communauté, en capitaux et revenus.

Dans le paragraphe 2, il procède de même à l'égard du mari, et termine son opération par des abandonnements faits d'abord, à la veuve, puis, aux héritiers du mari, pour les couvrir respectivement de leurs droits.

216. Il est bien entendu que le notaire a mis à la charge de ces héritiers les frais du deuil de la femme, réglés selon la fortune du mari au moment du décès, frais dus à la femme qui a accepté la communauté comme à celle qui y renonce, ainsi que nous l'avons déjà vu sous le no 181 (art. 1481 C. N.).

217. Au surplus, le partage de la communauté pour tout ce qui concerne ses formes, la licitation des immeubles quand il y a lieu, les effets du partage, la garantie qui en résulte, et les soultes, est soumis à toutes les règles qui sont établies pour les partages entre cohéritiers (art. 1476 C. N.). (Voir au titre 13°, chapitre 6", sections 1, 2, 3, 4 et 5.)

218. Il en résulte quatre conséquences que nous allons examiner tour à tour.

IT conséquence. Si les biens immeubles dépendant de la communauté ont été déclarés partageables par les experts nommés, ainsi qu'on l'a vu sous le n° 195, il est procédé à la composition des lots qui sont faits par la veuve ou les héritiers

du mari, s'ils peuvent convenir entre eux sur le choix, et si celui d'entre eux qu'ils avaient choisi accepte la commission. Dans le cas contraire, les lots sont faits par un expert que désigne le juge-commissaire, nommé par le jugement qui a renvoyé les parties devant le notaire pour les opérations de la liquidation. Ils sont ensuite tirés au sort, et la veuve, avant qu'il soit procédé au tirage des lots, est admise à proposer ses réclamations contre leur formation.

Dans la formation et composition des lots, on doit éviter autant que possible de morceler (ou diviser par morceaux) les héritages, et de diviser les exploitations; et il convient de faire entrer dans chaque lot, s'il se peut, la même quantité de meubles, d'immeubles, de droits ou de créances de même nature et valeur. L'inégalité des lots en nature se compense par un retour, soit en rente, soit en argent (art. 831, 832, 833, 834, 835 et 1476 G. N. combinés).

219. 2° conséquence. La seconde conséquence du principe posé ci-dessus, est que les héritiers demeureraient garants envers la veuve, et réciproquement, des troubles et évictions qui procéderaient d'une cause antérieure au partage, et qui seraient éprouvés dans la jouissance ou la propriété des biens dévolus par le partage (art. 884 C. N.).

Il y a trouble lorsqu'on inquiète un possesseur dans la jouissance ou la propriété de ce qu'il possède.

Il y a éviction lorsqu'on est juridiquement (c'est-à-dire par autorité de justice) dépossédé d'une chose dont on était en pos

session.

La garantie n'aurait pas lieu si l'espèce d'éviction soufferte avait été exceptée par une clause particulière et expresse de l'acte de partage; elle cesserait si, par sa faute, la veuve souffrait l'éviction, par exemple: dans le cas où une rente étant tombée dans son lot, elle aurait négligé de faire les diligences qui auraient pu lui en procurer le payement.

Dans les autres cas, chacun des héritiers du mari serait personnellement obligé, en proportion de sa part héréditaire,

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