Page images
PDF
EPUB

La nuit prochaine, je vous donnerai d'autres détails, car à chaque instant on nous annonce des prisonniers. Notre perte ne paraît pas énorme, puisque sans la connaître, je ne l'évalue pas à plus de 3000 hommes.

Signé

Pour copie,

Le maréchal major-général, duc de DALMATIE.

Le maréchal ministre de la guerre,

prince d'EckмUHL.

NO. XXIII.

Account of the same Battle in the Moniteur of the 20th of June.

Les armées Françaises viennent encore de s'immortaliser dans la plaine de Fleurus.

Nous sommes entrés en Belgique le 15. L'ennemi a été culbuté dans un première affaire sur tous les points où il a voulu nous opposer de la résistance.

Devant Charleroi, plusieurs de ses carrés ont été enfoncés, et pris par quelques escadrons seulement: 1700 prisonniers ont pu être sauvés sur 5 à 6000 hommes qui composaient ces carrés.

Hier 16, nous avons rencontré toute l'armée ennemie en position près de Fleurus, sa droite, composée des Anglais sous les ordres de Wellington, était en avant de Mellet, son centre à Saint-Amand, et sa gauche à Sombref: position formidable et couverte par la petite rivière de la Ligne.

L'ennemi occupait aussi le petit village de Ligny, en avant de cette rivière. Notre armée déboucha dans la plaine; sa gauche, sous les orders du maréchal Ney, par Gosselies; le centre, où était l'Empereur, par Fleurus; et sa droite, dirigée par le général Gérard, sur Sombref.

L'affaire s'engagea à deux heures sur la gauche et le centre. On s'est battu avec un acharnement inconcevable de part et d'autre. Les villages de Saint-Amand et de Ligny furent pris et repris plus de quatre fois. Nos soldats se sont tous couverts de gloire. A huit heures, l'Empereur, avec toute sa garde, a fait attaquer et enlever Ligny. Nos braves se sont portées au pas de charge sur la principale position de l'ennemi. Son armée à été forcée au centre, et obligée de se retirer dans la plus grand désordre. Blücher, avec les Prussiens, sur Namur, et Wellington sur Bruxelles.

Plusieurs pièces de canon ont été enlevées par la garde, qui a tout culbuté devant elle. La feu n'a cessé qu'à dix heures du soir. Tout marche aux cris mille fois répétés de vive l'Empereur! Ce sont aussi les dernières paroles que prononçaient les braves qui succombaient. Jamais on n'a vu un semblable enthousiasme.

Une division Anglaise, de 4 à 5000 Ecossais a été taillée en pièces; on n'en a pas vu de prisonniers. Le noble lord doit être confondu.

Il y a, sur le champ de bataille, huit ennemis pour un Français. On dit que leur perte est de 50,000 hommes. La canonnade ressemblait à celle de la Moskowa.

Ce matin 17, la cavalerie du général Pajol s'est mise à la poursuite des Prussiens sur la route de Namur. Il est déjà à deux lieues et demie. On les ramasse par bandes. Ils ne savent où sont leurs chefs.

La déroute est complette de ce côté, et j'espère qu'on n'entendra pas parler de sitôt des Prussiens, si toutefois ils peuvent se railler. Quant aux Anglais, on verra aujourd'hui ce qu'ils deviendront. L'Empereur est là.

NO. XXIV.

Bulletin of the Loss of the Great Battle, given in the Second Edition of the Moniteur of the 21st of June.

Bataille de Ligny-sous-Fleurus.

Le 16 au matin l'armée occupait les positions suivantes:

L'aile gauche, commandée par le maréchal duc d'Elchingen, et composée du 1er et du 2e corps d'infanterie et du 2o de cavalerie, occupait les positions de Frasne.

L'aile droite, commandée par le maréchal Grouchy, et composée des 3 et 4o corps d'infanterie et du 3e corps de cavalerie, occupait les hauteurs derrière Fleurus.

Le quartier-général de l'Empereur était à Charleroi, où se trouvaient la garde impériale et le 6o corps.

L'aile gauche eut l'ordre de marcher sur les Quatre-Bras, et la droite sur Sombre. L'Empereur se porta à Fleurus avec sa ré

serve.

Les colonnes du maréchal Grouchy étant en marche, apperçurent après avoir dépassé Fleurus, l'armée ennemie, commandée par le feld-maréchal Blücher, occupant les plateaux du moulin de Bussy, par la gauche, le village de Sombre, et prolongeant sa cavalerie fort avant sur la route de Namur: sa droite était à Saint-Amand, et occupait ce gros village avec de grandes forces, ayant devant elle un ravin qui formait sa position.

L'Empereur fut reconnaître la force et les positions de l'ennemi, et résolut d'attaquer sur-le-champ. Il fallut faire un changement de front, la droite en avant et en pivotant sur Fleurus.

Le général Vandamme marcha sur Saint-Amand, le général Gerard sur Ligny et le maréchal Grouchy sur Sombre. La 4e division du 2e corps, commandée par le général Girard, marcha en réserve

derrière le corps du général Vandamme. La garde se rangea à la hauteur de Fleurus, ainsi que les cuirassiers du général Milhaud.

A trois heures après-midi ces dispositions furent achevées. La division du général Lefol, faisant partie du corps du général Vandamme, s'engagea la première, et s'empara de Saint-Amand, d'où elle chassa l'ennemi à la baïonnette. Elle se maintint pendant tout le combat au cimetière et au clocher de Saint-Amand; mais ce village, qui est très-étendu, fut le théâtre de différens combats pendant la soirée; tout le corps du général Vandamme y fut engagé, et l'ennemi y engagea des forces considérables.

Le général Girard placé en réserve du corps du général Vandamme tourna le village par sa droite et s'y battit avec sa valeur accoutumée. Les forces respectives étaient soutenues de part et d'autres par une soixantaine de bouches à feu.

A la droite le général Gérard s'engagea avec le 4o corps au village de Ligny, qui fut pris et repris plusieurs fois.

Le maréchal Grouchy à l'extrême droite et le général Pajol combattirent au village de Sombre. L'ennemi montra de 80 à 90 mille hommes et un grand nombre de pièces de canon.

A sept heures nous étions maîtres de tous les villages situés sur le bord du ravin qui couvrait la position de l'ennemi; mais il occupait encore avec toutes ses masses le plateau du moulin de Bussy.

L'Empereur se porta avec sa garde au village de Ligny, le général Gérard fit déboucher le général Pecheux avec ce qui lui restait de réserve, presque toutes les troupes ayant été engagées dans ce village. Huit bataillons de la garde débouchèrent à la bayonnette et derrière eux les quatre escadrons de service, les cuirassiers du général Delort, ceux du général Milhaud, et les grenadiers à cheval de la garde. La vieille garde aborda à la bayonnette les colonnes ennemies qui étaient sur les hauteurs de Bussy, et en un instant couvrit le champ de bataille de morts. L'escadron de service attaqua et rompit un carré, et les cuirassiers poussèrent l'ennemi dans toutes les directions. A sept heures et demi nous avions 40 pièces de canon, beaucoup de voitures, des drapeaux et des prisonniers, et l'ennemi cherchait son salut dans une retraite précipitée. A dix heures la bataille était finie et nous nous trouvions maîtres de tout le champ de bataille.

Les prisonniers L'elite de l'arSa perte ne peut

Le général Lutzow partisan a été fait prisonnier. assurent que le feld-maréchal Blücher a été blessé. mée prussienne a été détruite dans cette bataille. être moindre de 15,000 hommes. La notre est de 3,000 hommes tués ou blessés.

A la gauche, le maréchal Ney avait marché sur les Quatre-Bras, avec une division qui avait culbuté une division anglaise qui' s'y trouvait placée. Mais attaqué par le prince d'Orange avec vingtcinq mille hommes, partie anglais, partie hanovriens, à la solde de l'Ang eterre, il se replia sur sa position de Frasnes. Là, s'engagèrent des combats multipliées; l'ennemi s'attachait à le forcer, mais il le fit vainement. Le duc d'Elchingen attendait le premier corps qui

n'arriva qu'à la nuit, il se borna à garder sa position. Dans un carré attaqué par le 8e régiment de cuirassiers, le drapeau du 69e régiment d'infanterie anglais, est tombé entre nos mains. Le prince de Brunswick a été tuné. Le prince d'Orange a été blessé. On assure que

l'ennemi a eu beaucoup de personnages et de généraux de marque tués ou blessés; on porte la perte des Anglais, à 4 ou 5000 hommes, la nôtre de ce côté, a été très-considérable, elle s'élève a 4200 hommes tués ou blessés. Ce combat a fini à la nuit. Lord Wellington a ensuite évacué les Quatre-Bras, et s'est porté sur Genappes.

Dans la inatinée du 17, l'Empereur s'est rendu aux Quatre-Bras, d'où il a marché pour attaquer l'armée anglaise; il l'a poussée jusqu'à l'entrée de la forêt de Soignes avec l'aile gauche et la réserve. L'aile droite s'est portée par Sombres à la suite du feld-maréchal Blücher, qui se dirigeait sur Savres, où il paraissait vouloir se placer.

A dix heures du soir, l'armée anglaise occupa Mont-Saint-Jean par son centre, se trouva en position en avant de la forêt de Soignes; il aurait fallu pouvoir disposer de trois heures pour l'attaquer, on fut donc obligé de remettre au lendemain.

Le quartier-général de l'Empereur fut établi à la ferme de Caillon, près Planchenoit. La pluie tombait par torrens. Ainsi, dans la journée du 16, la gauche, la droite et la réserve, ont été également engagées à une distance d'à-peu-près deux lieues.

Bataille de Mont-de-Saint-Jean.

A neuf heurs du matin, la pluie ayant un peu diminué, le 1er corps se mit en mouvement, et se plaça, la gauche à la route de Bruxelles, et vis-à-vis la village de Mont-Saint-Jean, qui paraissait le centre de la position de l'ennemi. Le second corps appuya sa droite à la route de Bruxelles, et sa gauchè à un petit bois à portée de canon de l'armée anglaise. Les cuirassiers se portèrent en réserve derrière, et la garde en réserve sur les hauteurs. Le 6e corps avec la cavalerie du général d'Aumont, sous les ordres du comte Lobau, fut destinée à se porter en arrière de notre droite, pour s'opposer à un corps prussien qui paraissait avoir échappé au maréchal Grouchy, et être dans l'intention de tomber sur notre flanc droit, intention qui nous avait été connue par nos rapports, et par une lettre d'un général prussien, que portait une ordonnance prise par nos cou

reurs.

Les troupes étaient pleines d'ardeur. On estimait les forces de l'armée anglaise à 80 mille hommes; on supposait que le corps prussien, qui pouvait être en mesure vers le soir, pouvait être de 15 mille hommes. Les forces ennemies étaient donc de plus de 90 mille homLes nôtres étaient moins nombreuses.

mes.

A midi, tous les préparatifs étant terminés, le prince Jérôme, commandant une division du 2e corps, et destiné à en former l'extrême gauche, se porta sur le bois dont l'ennemi occupait une

partie. La canonnade s'engagea; l'ennemi soutint par 30 pièces de canon les troupes qu'il avait envoyées pour garder le bois. Nous fîmes aussi de notre côté des dispositions d'artillerie. A une heure, le prince Jérôme fut maître de tout le bois, et toute l'armée anglaise se replia derrière un rideau. Le comte d'Erlon attaqua alors le village de Mont-Saint-Jean, et fit appuyer son attaque par 80 pièces de canon. Il s'engagea là une épouvantable canonnade, qui dut beaucoup faire souffrir l'armée anglaise. Tous les coups portaient sur le plateau. Une brigade de la ler division du comte d'Erlon s'empara du village de Mont-Saint-Jean; une seconde brigade fut chargée par un corps de cavalerie anglaise, qui lui fit éprouver beaucoup de pertes. Au même moment, une division de cavalerie anglaise chargea la batterie du comte d'Erlon par sa droite, et désorganisa plusieurs pièces; mais les cuirassiers du général Milhaud chargèrent cette division, dont trois régimens furent rompus et écharpés.

Il était trois heures après midi. L'Empereur fit avancer la garde pour la placer dans la plaine sur le terrein qu'avait occupé le premier corps au commencement de l'action: ce corps se trouvant déjà en avant. La division prussienne, dont on avait prévu le mouvement, commença alors à s'engager avec les tirailleurs du comte Lobau, en prolongeant son feu sur tout notre flanc droit. Il était convenable, avant de rien entreprendre ailleurs, d'attendre l'issue qu'aurait cette attaque. A cet effet, tous les moyens de la réserve étaient près à se porter au secours du comte Lobau et à écraser le corps prussien, lorsqu'il serait avancé.

Cela fait, l'Empereur avait le projet de mener une attaque par le village de Mont-Saint-Jean, dont on espérait un succès décisif; mais par un mouvement d'impatience si frequent dans nos annales militaires, et qui nous a été souvent si funeste, la cavalerie de réserve s'étant apperçue d'un mouvement retrograde que faisaient les Anglais pour se mettre à l'abri de nos batteries, dont ils avaient déjà tant souffert, couronna les hauteurs du mont-Saint-Jean et chargea l'infanterie. Ce mouvement qui, fait à tems et soutenu par les réserves, devait décider de la journée, fait isolément et avant que les affaires de la droite ne fussent terminées, devint funeste.

N'y ayant aucun moyen de le contremander, l'ennemi montrant beaucoup de masses d'infanterie et de cavalerie, et les deux divisions de cuirassiers étant engagées, toute notre cavalerie courut au même moment pour soutenir ses camarades. La, pendant trois heures, se firent de nombreuses charges qui nous valurent l'efoncement de plusieurs carrés et six drapeaux de l'infanterie anglaise, avantage hors de proportion avec les pertes qu'éprouvait notre cavalerie par la mitraille et les fusillades. Il était impossible de disposer de nos réserves d'infanterie jusqu'à ce qu'on eût repoussé l'attaque de flanc du corps prussien. Cette attaque se prolongeait toujours et perpendiculairement sur notre flanc droit, l'Empereur y envoya le général Duhesmes avec la jeune garde et plusieurs batteries de réserve. L'ennemi fut contenu, fut repoussé et recula; il avait épuisé

M

« PreviousContinue »