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» demander un changement dans l'Église ou dans >> l'État (vous reconnaissez bien là le langage anglais), » si elle est signée par plus de vingt personnes, à » moins que le contenu n'en ait été approuvé par trois juges de paix ou par la majorité du grand jury, » dans la province, et à Londres par le lord-maire, » les aldermen et le conseil de la commune ; et au>> cune pétition ne pourra être présentée par plus de >> dix personnes à la fois. » Voilà donc la première restriction, et maintenant vous pouvez comprendre aisément pourquoi en Angleterre, lorsqu'il s'agit de présenter des pétitions (on présente au Parlement des pétitions monstres), vous lisez que ces pétitions sont présentées précisément par des juges de paix, ou par des hommes dont l'assistance puisse les soustraire à l'application de la loi. Le juge de paix en Angleterre, vous le savez, est un particulier, un notable du comté, de sorte que, si c'est le parti de l'opposition qui présente la pétition, il trouvera toujours trois juges de paix pour l'appuyer.

Le statut de la première année de Guillaume et Marie porte que, en se conformant à ces règles, tout Anglais a droit de pétitionner, et il ajoute, c'est l'histoire qui nous donne le sens de cette addition, il ajoute qui tout emprisonnement, mandat d'amener ou poursuite pour des pétitions faites ainsi, en se conformant au statut de Charles II, sont déclarés actes illégaux.

Voilà le système anglais.

En France, les mêmes excès, ainsi que je l'ai dit, avaient eu lieu, et les assemblées elles-mêmes tâché

rent d'y porter quelques remèdes. Ainsi, en 1789, l'usage s'était établi de présenter des pétitions à la barre de l'Assemblée, et le décret du 29 juillet 1789, dit en propres termes que la barre de l'Assemblée est réservée pour les personnes qui auraient une pétition à présenter, et auxquelles l'Assemblée aurait accordé les honneurs de la séance. Voilà donc les pétitionnaires à la barre. Mais le règlement est de juillet, et déjà le 1er août vous trouvez un décret qui essaie d'en restreindre l'application, et on renvoie les pétitionnaires à ce qu'on appelait le comité des rapports, chargé ensuite d'en référer à l'Assemblée. En effet, indépendamment de toute autre pensée, vous voyez ce qui arrivait déjà dans ce temps où le système des assemblées était tout nouveau, lorsque chacun pouvait se donner le plaisir d'aller se poser en orateur à la barre de la première assemblée délibérante du monde, d'aller lutter avec les plus grands orateurs et de se faire écouter comme eux; on aurait inventé des pétitions à moins. Mais le temps de l'Assemblée était complétement absorbé; c'est le besoin d'éviter la perte de temps, et non la crainte inspirée par les pétitionnaires qui a dicté ces premières dispositions.

Le 16 octobre de la même année, un nouveau décret, toujours pour contenir l'exercice du droit de pétition. En mars 1790, l'Assemblée est obligée de déclarer qu'elle n'entendra aucune pétition, si ce n'est dans les séances du soir. Enfin, je ne veux pas vous fatiguer par trop de citations; mais au mois d'octobre 1791 vous trouvez un nouveau règlement,

toujours dans le même but, et vous le savez, la meilleure preuve d'un désordre est la multiplicité des règlements faits pour le réprimer.

Arriva enfin l'abus dont je vous ai parlé, les pétitionnaires envahissaient l'Assemblée ; ils venaient ent foule, en multitude, et enfin en multitudes armées, voulant défiler au milieu de l'Assemblée elle-même. Le décret rendu par l'Assemblée, en juin 1792, pour réprimer ces abus, ceux du 21 septembre et du 11 novembre de la même année, n'eurent aucune efficacité.

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Ces faits donnèrent lieu à la disposition de la Constitution de 1795 que j'ai déjà citée, disposition qui ne doit point nous étonner et qui, comme toutes les lois, était le résultat de l'expérience: « Tous les citoyens » sont libres d'adresser aux autorités publiques des pétitions, mais elles doivent être individuelles : » nulle association ne peut en présenter de collec»tives, si ce n'est les autorités constituées et seule>> ment pour des objets propres à leurs attribu» tions. » Évidemment cette disposition n'est autre chose que la traduction en formule législative du besoin qui s'était fait sentir d'empêcher le renouvellement de ces pétitions tumultueuses, comme les appellent les Anglais. C'est pour cela que la Constitution de 1795 a exigé qu'elles fussent individuelles, et qu'elle a interdit aux associations d'en présenter de collectives.

SOIXANTE-UNIÈME LEÇON

SOMMAIRE

Droit de pétition (suite). État actuel de la législation toutes pétitions aux chambres doivent être présentées par écrit; elles doivent être individuelles; elles peuvent toutefois être présentées collectivement par les autorités constituées, par les gérants d'une société ou les chefs d'une corporation légalement reconnue, pour des objets concernant leurs intérêts propres.

Droit d'association.

Placé dans le droit commun par le décret du 13 no

vembre 1790 et par la constitution de 1791. 22 juillet 1791. Constitution de 1793.

27 juillet 1793 pour protéger les clubs.

-

Réglementé par la loi du

Dispositions du décret du Constitution de l'an III: dis

positions contre les sociétés populaires. Loi du 7 thermidor an V. - Loi du 19 fructidor. Code pénal de 18.0. Dispositions des articles 291 et su.vants sur les associations, corroborées et rendues plus sévères par la loi du 10 avril 1834.

MESSIEURS,

La Charte constitutionnelle de 1830, dans son article 45, qui reproduit textuellement l'article 53 de la Charte de 1814, a consacré le principe du droit de pétition par une disposition ainsi conçue : « Toute

pétition à l'une ou à l'autre des chambres ne peut >> être faite et présentée que par écrit: la loi interdit » d'en apporter en personne et à la barre. »

Et avant tout vous remarquerez que cette dispo

sition concerne les pétitions adressées à l'une ou à l'autre chambre, et non celles qui peuvent être adressées aux autres pouvoirs constitués. Quant aux pétitions adressées à l'une ou à l'autre chambre, la restriction essentielle consiste en ce qu'elles ne peuvent être présentées que par écrit. La disposition était suffisamment claire par elle-même; cependant, pour mieux expliquer sa pensée, le législateur a cru devoir ajouter « La loi interdit d'en apporter en >> personne et à la barre. » Cette dernière phrase de l'article 45 n'est que le commentaire de la règle posée déjà dans l'article même : « Toute pétition.... ne >> peut être faite et présentée que par écrit. » Ainsi, la loi n'admet d'autres pétitions que celles qui sont envoyées au secrétariat de l'une ou de l'autre chambre, et présentées par un des membres de la chambre elle-même. Cette disposition se trouve en harmonie avec l'article 98 du règlement intérieur de la Chambre des députés, lequel article porte : « Nul étran» ger ne peut, sous aucun prétexte, s'introduire » dans l'enceinte où siégent les membres de la >> chambre. >>

Quant aux règles suivies dans l'une ou l'autre chambre pour s'occuper de ces pétitions et délibérer sur leur contenu, ce n'est pas ici le moment d'en parler, nous aurons l'occasion d'en dire quelques mots en traitant de l'organisation politique et en particulier de l'organisation des assemblées délirantes dans la législation constitutionnelle en vigueur. Les pétitions donc doivent être faites et présentées par écrit, nul ne peut en présenter en personne,

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