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station et fit chauffer l'En avant, à trois heures du matin pour voler chez les coupables Bayanzi.

Sur ces entrefaites, on annonça l'approche de pirogues descendant le fleuve. C'était justement la flottille des porteurs d'ivoire, grossie du canot en litige.

Stanley fit distribuer les armes et des munitions à tous les hommes dont il disposait; l'En avant, menaçant de sombrer sous le poids du nombre considérable de ses passagers armés, se mit en travers de la route des Bayanzi.

Ces derniers n'en persistèrent pas moins à avancer. Arrivés près du steamer, à portée de la voix, ils déclarérent leur intention de restituer le canot, sans même exiger le

moindre mitako.

Cette promesse aussitôt réalisée fit disparaître la sombre fureur à laquelle Stanley était en proie.

Le lendemain, 12 mai, le canot de la station de Msuata, solidement amarré, se balançait de nouveau dans la crique protégée par la bannière bleue du Comité d'études.

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Ce même jour, Stanley recrutait parmi les sujets de Gobila des guides volontaires, qui l'accompagnaientle 19 dans son exploration vers le Nord. Assez mal reçu par les indigènes des rives du Congo, Stanley s'engagea sur l'En avant dans les eaux du Kwa ou Koango. Il remonta cet affluent jusqu'à l'endroit où il se divise en deux larges rivières courant l'une vers le sud, sous le nom de Mbiheh, l'autre vers le nord-est, sous le nom de Mfini.

Là, Stanley, poursuivant ses découvertes, explora la rivière Mfini et atteignit l'expansion lacustre formée par ce cours d'eau, véritable lac connu. depuis (26 mai 1882) sous le nom de lac Léopold II.

Le 7 juin, Stanley, gravement malade, rentrait à Msuata, où il infor

mait Janssen de son projet de retourner en Europe pour y recouvrer la santé.

Le 8 juillet 1882, l'agent supérieur arrivait à Vivi.

Voici en quels termes le capitaine Hanssens raconte, dans une lettre datec de Vivi 11 juillet, l'arrivée de Stanley dans cette station :

« Vendredi dernier, nous avons vu apparaître, au sommet d'une des montagnes qui bornent à l'est l'horizon de Vivi, une caravane précédée du drapeau de l'Association.

« De tous les blancs qui se trouvaient à la station, j'étais le seul qui fût prêt à se porter à la rencontre du chef de l'expédition: tous les autres étaient en ce moment dans des costumes impossibles.

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Je me dirigeai donc vers la caravane, que je rejoignis à quelques centaines de mètres nos constructions. Je m'approchai du hamac dans lequel était couché Stanley, et j'eus de la peine à retenir des exclamations de surprise en apercevant les ravages produits par l'horrible fièvre d'Afrique dans cette organisation de fer.

« La figure avait une teinte cadavėrique; les yeux profondément enfoncés dans les orbites n'avaient pour ainsi dire plus de regards.

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Stanley éprouva toutes les peines du monde à sortir de dessous sa couverture de voyage la main qu'il voulait me tendre lorsque je me présentais à lui; sa voix n'était qu'un souffle lorsqu'il répondit à mon speech d'introduction:

Bonjour, mon cher capitaine, je suis heureux de vous voir en bonne santé. »

« Je marchai à côté de son hamac, jusqu'au moment de notre arrivée sur le plateau de la station.

«En ce point, le malade sembla se ranimer; en revoyant cette ville naissante qui était son œuvre, sa création, et qui avait marqué ses premiers pas dans la mission d'agent en chef du Comité d'études, ses yeux prirent une expression de contentement et sa figure rayonna de joie.

«Il se sentait chez lui; il savait qu'il y trouverait tous les soins dévoués qu'exigeait son état.

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Entre-temps, les autres blancs étaient venus lui présenter leurs compliments de bienvenue.

« Porté près du pavillon qui sert de logement aux autorités de l'expédition, et qui renferme sa chambre et sa bibliothèque, Stanley sortit de son hamac Lindner (chef actuel de Vivi) et moi, nous le primes chacun sous un bras, et l'aidâmes à monter l'escalier qui conduit à ses apparte

ments.

« Une légère collation et quelques réconfortants le ranimèrent bientôt complètement.

Mon étonnement n'eut pas de bornes en entendant cet hommme, réduit à l'état de cadavre ambulant quelques instants auparavant, demander sa pipe à Dualla et l'allumer avec toutes les apparences d'une vive satisfaction.

......

Il semble tout à fait s'illusionner sur son état, et ne parle de rien moins que de revenir en Afrique après deux ou trois mois de séjour en Europe. Je souhaite que son espoir se réalise !

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Le départ du chef de l'expédition modifiait l'organisation de celle-ci et amenait un changement dans les attributions du capitaine Hanssens. La possibilité de ce départ avait été prévue par S. M. Léopold II. Avant que Hanssens quittàt la Belgique, le roi avait mandé en son palais de Laeken le capitaine belge, en même temps que le colonel Strauch et un agent allemand, le docteur Peschuel.

Au cours de cette audience, l'auguste promoteur de l'œuvre africaine avait déclaré que si, par suite d'une circonstance quelconque, M. Stanley quittait l'expédition, le commandement en serait remis à M. Peschuel. Sa Majesté avait ajouté que le docteur allemand recevrait des pouvoirs écrits sous une enveloppe cachetée qui ne serait ouverte que le jour où M. Stanley serait mort ou aurait décidé son retour en Europe.

Précisément, au moment où l'une de ces éventualités se produisait, le docteur Peschuel se trouvait à Vivi. Il informa Stanley de la décision du roi des Belges et ouvrit devant lui, en présence aussi de Hanssens, le pli cacheté.

Stanley parut satisfait de voir la direction de l'expédition assurée par les soins du Comité; il remit avant son départ ses pouvoir au docteur Peschuel.

Nous avons précédemment raconté un épisode concernant une expédition du chef intérimaire, et relaté brièvement quelques-unes des étapes accomplies dans le bas et le moyen Congo par le capitaine Hanssens, dont les pouvoirs s'étendirent d'abord sur toute la zone entre Issanghila et le Stanley-Pool inclusivement.

Peu après, tout le personnel attaché aux postes établis dans cette zone et au delà, fut placé sous les ordres du capitaine belge; par suite du départ du docteur Peschuel, la charge d'agent supérieur fut confié à Hanssens.

La tâche désormais imposée au capitaine était lourde, pleine de responsabilités sérieuses, hérissée d'obstacles et de difficultés; mais il la préférait

de beaucoup au service relativement sédentaire qu'il aurait eu à remplir en acceptant le commandement d'une station.

La vie agitée de bivouacs, de marches, d'aventures, de luttes imprévues et de découvertes, était plus conforme aux aspirations du vaillant pionnier. Il désirait le bruit, les émotions, le mouvement, un généreux retentissement de son nom en Europe: son vœu le plus cher s'accomplissait.

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Hanssens agent supérieur de l'Association.

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Bolobo.

Wabouma. plades Bayanzi.

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Les

Voyage d'exploration de l'Éclaireur.
Ibaka et son chapeau. Relation ethnographique sur les peu-
Funérailles de Mpoki.

u jour où Hanssens fut investi du commandement effectif de l'expédition du Congo, il se créa une besogne à sa taille: il tenta résolument vers l'intérieur une entreprise dans laquelle Stanley lui-même avait précédemment échoué.

Après avoir assuré l'établissement d'une route suivant la rive méridionale du Congo entre Manyanga et le Stanley-Pool, pacifié les territoires riverains situés entre ces deux points, conclu deçà, delà, grâce à l'éloquence de sa parole persuasive ou au triomphe de ses armes,

LES BELGES. III.

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