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complets à l'usage des personnes des deux sexes de l'Oupoto; ils augmentent ma collection de curiosités africaines.

« La situation du district d'Oupoto est admirable; le canal qui sépare en cet endroit la rive droite de la première rangée d'îlots est très large, et des hauteurs du rivage on embrasse un horizon superbe.

« Ces hauteurs sont une chaîne de collines ondulées, à croupes arrondies, généralement boisées ou cultivées. Elles présentent des emplacements délicieux et salubres, excellents pour l'établissement d'une station.

« J'ai obtenu, avec l'assentiment de mon frère Mpesa, une concession au sommet d'une de ces collines, dans une situation fort avantageuse tant au point de vue de l'hygiène que comme panorama. Le drapeau bleu flotte sur cette éminence, où s'élèvera bientôt la station d Oupoto. >>

Dans cette intéressante lettre le capitaine Hanssens décrit le cérémonial de sa fraternisation avec le roi Mpesa. L'échange du sang se fit entre lui et le chef de l'Oupoto de la même façon qu'entre Stanley et le même personnage. « Seulement, ajoute Hanssens, après le frottement des blessures l'une contre l'autre, on appliqua sur les plaies un mélange de sel végétal et de pulpe d'un fruit spécial; cette poudre eut la vertu d'arrêter presque instantanément l'hémorragie. »

Partie d'Oupoto le 7 juin, la flottille navigua difficilement dans la passe étroite du Congo, entre le village de Moubangi (rive droite) et celui de Roubounga (rive gauche). En cet endroit le lit du fleuve est obstrué par des blocs de rochers sur lesquels le courant se heurte avec une violence inouïe, la navigation n'est possible qu'avec des embarcations d'un faible tirant d'eau. On dut haler les steamers, à l'aide d'un câble trainė par les hommes d'équipage.

Le 10, l'expédition s'arrêtait à l'embouchure du Ngingiri, ou Itimbiri d'après Stanley. Cet affluent de droite est appelé par les indigènes tantôt Boulumbu, tantôt Mboula; il est assez difficile de savoir à quelle dénomination s'en tenir, à cause de la mauvaise foi et de l'habitude de mentir qui caractérisent la race nègre.

Le capitaine Hanssens remonta ce cours d'eau sur une distance approximative de soixante-quinze kilomètres. La direction de l'Itimbiri est nordest, sa largeur varie de cinq cents à huit cents mètres.

Dans la partie explorée par l'officier belge, la rive gauche offre une densité de population considérable. Hanssens y a constaté l'existence de trois districts importants: Bousambi, Libouki et Boumbouni.

Sur la rive droite, à quelques milles du confluent Hanssens, découvrit le village d'Itembo, chef-lieu du district des Yankooués; il débarqua dans

cette localité, y passa tout un après-midi et fit l'échange du sang avec le chef indigène nommé Moulanga.

Les natifs font un trafic considérable, surtout en ivoire et en esclaves. L'Itimbiri débouche dans le Congo par une sorte de delta formé de plusieurs branches; la branche occidentale, la plus large, est couverte d'un tissu flottant et impénétrable de plantes aquatiques et de hautes herbes, la branche orientale, large de cinquante mètres seulement, est complètement libre et navigable, malgré la force du courant.

Pendant ce voyage d'exploration sur l'Itimbiri, Courtois ressentit les premières atteintes de la fièvre bilieuse; son indisposition paraissait néan

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moins peu inquiétante; il la combattit suivant la médication ordinaire: purgatifs et vomitifs énergiques.

Le 18 juin, jour où Hanssens fit avec le chef de l'Itembo l'échange du sang, cérémonie précédant la conclusion d'un traité d'alliance, le jeune docteur de l'expédition servit de parrain au capitaine, et à voir l'entrain, l'enjouement, la vivacité de Courtois, ses compagnons étaient loin de soupçonner la gravité de la maladie qu'il couvait à son insu.

Cependant le 19 Courtois manifesta à Hanssens son désir d'arriver bientôt à l'embouchure de l'Arouhouimi, où l'expédition devait séjourner pendant plusieurs jours, afin de pouvoir consacrer au repos les longues heures de la halte.

Le capitaine, se conformant aux désirs de son compatriote, suspendit ses négociations avec les riverains de l'Itimbiri: la flottille navigua à toute vapeur vers le confluent de l'Arouhouimi.

Roger et Stanley ont, en 1883, remonté le cours de cette rivière jusqu'à 2° 13', au village d'Yambouga, point où l'expédition fut arrêtée par des rapides.

Le 21 juin, les bateaux jetaient l'ancre devant cette rivière; on débarquait sur l'emplacement de l'ancien camp de Stanley, et Hanssens faisait en toute hâte dresser la tente du malade dans un endroit élevé, salubre, sec et et assez ombragé pour y être à l'abri des ardeurs du soleil.

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La route du Nil au Congo. Les Basoko et les chasseurs d'hommes.

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Les décemvirs de Les Vouenya des Stanley

A rivière que Stanley appelle Arouhouimi-Biyerré, porte en réalité, écrit Hanssens, le nom d'Oubingi; ses deux rives sont habitées par les Basoko, tribus qui le disputent en sauvagerie et en cannibalisme aux peuplades de l'Iboko. Le point où l'Oubingi se jette dans le Congo est de la plus haute importance géographique; selon toutes probabilités, cette rivière est la voic de communication future entre les bassins du Congo et du haut Nil.

A l'époque où Hanssens arrivait au confluent de l'Oubingi, un illustre voyageur africain, le général Gordon-Pacha, acceptait de S. M. Léopold II l'offre de succéder à Stanley en qualité d'agent général de l'Association internationale.

Cette mission, qui répondait si bien à la passion pour les expéditions lointaines du général anglais, alors gouverneur au Soudan égyptien, eût résolu le problème hydrographique de l'Oubingi. Gordon émettait la possibilité de rejoindre l'expédition de Hanssens en remontant le Nil blanc jusqu'au lac Albert Nyanza, et de là, en descendant le Népoko, branche supérieure de l'Oubingi. Malheureusement le gouvernement anglais repoussa le projet de Gordon; le ministre, M. Gladstone, fit appel au dévouement de l'héroïque général pour arrêter les progrès du madhi, chef de bandes innombrables d'Arabes, de sectateurs fanatiques qui ravageaient l'Égypte.

Gordon en référa au roi des Belges, qui le releva de sa promesse. On sait comment finit l'aventureux général anglais : esclave de son devoir, fidèle exécuteur des ordres que lui avait transmis son gouvernement, il mourut assassiné dans la citadelle de Karthoum, tombée au pouvoir du Madhi, après un siège héroïquement soutenu pendant de longs mois.

Le problème de l'Oubingi est toujours à résoudre; mais les explorations successives du docteur allemand Schweinfurth et du docteur russe Juncker ont révélé l'importance de ce cours d'eau confondu sous les noms d'Ouellė, de Népoko, d'Arouhouimi, de Ouerré et d'Oubingi.

En décembre 1883, Stanley avait vainement essayé d'acheter le district des Basoko; le capitaine Hanssens devait encore une fois être plus heureux que l'agent supérieur de l'Association et acquérir, à deux kilomètres en amont du point de jonction du fleuve et de son affluent, une concession aussi vaste que bien située.

Ce succès ne fut pas obtenu sans peine; Hanssens dut recourir à toutes sortes de combinaisons pour vaincre l'opposition des Bosoko à l'établissement d'étrangers sur leur territoire.

Naturellement insociables, les Basoko l'étaient dévenus davantage encore lors de l'arrivée de Hanssens, en raison d'événements tout récents provoqués par les Arabes chasseurs d'hommes de la côte occidentale.

On sait que les bandes d'Abed-ben-Selim et consorts avaient poussé naguère leurs razzias infâmes en aval des Stanley-Falls; leur exemple avait été imité depuis, et les traitants de la côte occidentale, après avoir dépeuplé tour à tour les districts riverains du lac Tanganika, établi le centre du commerce du bois d'ébène à Oudjidji, occupé ensuite le poste

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