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A l'aube du lendemain Brunfaut goûtait à peine les délices du premier sommeil, lorsque Orban réveilla son compatriote pour le présenter à Ibaka qui venait de grand matin rendre un hommage officiel au nouveau chef de la station.

L'incognito des voyageurs si aimables de la veille avait été divulgué par des courriers de nuit, et tout le district de Bolobo connaissait déjà la nouvelle du départ imminent du mundelé Orban et de son remplacement immédiat.

Johnston, éveillé de son côté par le vacarme et les grouillements de l'escorte du roi de Bolobo, se leva également pour assister à tous les détails de la présentation solennelle.

Après les m'botės d'usage, les serments d'amitié, de fraternité, etc., etc., Orban invita les assistants à boire le malafou à la santé de son

successeur.

La proposition fut acceptée avec enthousiasme par les indigènes sur l'assentiment de leur souverain.

Ibaka devait selon la coutume octroyer son adhésion aux libations générales et donner avant de boire, le spectacle d'une curieuse pratique.

Au moment où les serviteurs d'Orban s'apprêtaient à faire circuler parmi l'assistance les énormes jarres remplies de vin de palme, Ibaka se leva, saisit de sa main droite une calebasse, fit claquer les doigts de sa main gauche, et cria fortement « Mà! mà! må!» pour réclamer le silence et l'attention.

Aussitôt une de ses femmes vint docilement s'agenouiller à l'un de ses pieds, et un petit garçon saisit sa main gauche pendante. La femme clama à son tour « Mà! må! mà' », en frappant à coups de poing redoublés le ventre de son souverain maître et mari; l'enfant, se voilant la face de sa main libre, secoua de l'autre, et de toutes ses forces, le bras du monarque Entre-temps, Ibaka porta la calebasse à ses lèvres et en ingurgita le con

tenu.

Lorsque le souverain eut étanché sa soif, il s'essuya délicatement la bouche avec la paume de sa main, et étendit ensuite l'index droit dans la direction du ciel, en répétant la formule consacrée « Mà! mà! mà! » monosyllabes exclamatifs qui précédaient et clôturaient toute libation publique du potentat bayanzi.

Orban expliqua complaisamment aux nouveaux venus l'origine de cette coutume, pendant que l'assistance noire se livrait sans autre cérémonie à l'absorption favorite du malafou.

« Il y a longtemps, bien longtemps, suivant une légende de ce pays,

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