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au bout de trois jours elles n'avaient pas été amenées à un point de solution, le négociateur français ne voulut plus les continuer qu'avec le président luimême. Une seule entrevue mit dès lors fin à toutes les difficultés; et ce fut le lendemain de cette conférence que le président écrivit la lettre que nous venons de rapporter.

Quatre jours avaient donc suffi au commissaire français pour mener à fin l'affaire dont l'avait chargé le gouvernement du roi, et tout était arrêté, lorsque l'escadre des amiraux Jurien et Grivel parut devant le Port-au-Prince. Elle reçut l'invitation d'entrer dans le port. Le 11 juillet, on procéda à l'acceptation et à l'enregistrement au sénat de l'ordonnance royale. Ce fut une véritable cérémonie. L'acte de l'indépendance, enfermé dans un fourreau de velours, fut solennellement porté au sénat par un cortége militaire composé de l'état-major des frégates françaises, et l'entérinement eut lieu au milieu des vivat poussés en l'honneur du roi et du négociateur.

Voici le procès-verbal de ce fait décisif dans l'affaire de Saint-Domingue, que nous transcrivons d'après la copie délivrée au négociateur français :

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RÉPUBLIQUE D'HAITI.

A LA MAISON NATIONALE DU PORT-AU-PRINCE.

SÉNAT.

Aujourd'hui, onzième jour de juillet de l'année 1825, 22 de l'indépendance d'Haïti, vers huit heures du matin,

« Le sénat complétement réuni à la Maison nationale, un des secrétaires a donné lecture du message du président d'Haïti, sous la date du jour d'hier; lequel message annonce une ordonnance de S. M. T. C. Charles X, déclarant l'indépendance formelle, pleine et entière, du gouvernement d'Haïti.

« Et au même instant s'est présenté le général Thomas, commandant de cette place, lequel a annoncé M. le baron de Mackau, porteur de l'ordonnance précitée. Le président du sénat a invité M. le baron de Mackau, ainsi que MM. les contre-amiraux Jurien de la Gravière et de Grivel, qui l'accompagnaient, à prendre les places qui leur ont été désignées. Lecture faite de cet acte solennel, et après délibération, le sénat a arrêté l'acceptation et l'enregistrement de l'ordonnance sus-mentionnée; a arrêté de plus, qu'une députation du sénat, se com

posant des sénateurs Pitre, Daumec et Rouannez, sera chargée de présenter au président l'original de ladite ordonnance royale, et que mention sera faite au présent procès-verbal du discours que vient d'adresser au sénat M. le baron de Mackau, et de la réponse à lui faite par le président du sénat. Lesquels discours, dont suit la teneur, ont été accompagnés des cris répétés de: Vive Charles X! vive (3 fois) l'indépendance d'Haïti! vive le président! vive le baron de Mackau!.....

<< Fait et clos, Maison nationale, les jour, mois et an que des autres parts.

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Signé au registre: L. A. Daumec, Pitre, Caneaux, J. Thézan, Birot, D. Chanlatte, Lerebours, Dupuche, C. Dupiton, Degand, Gayot, président, Viallet et Rouannez, secrétaires.

« Pour copie conforme, etc., etc. »

Le même jour, le président remit au négociateur français une déclaration que nous reproduisons également d'après l'original.

« RÉPUBLIQUE D'HAITI.

«JEAN-PIERRE BOYER, PRÉSIDENT D'HAÏTI,

« Déclarons avoir reçu des mains de M. le baron

1 Nous ne reproduisons pas ces discours qui sont de pur cérémonial, et ne font aucune allusion aux difficultés soulevées dans la négociation.

de Mackau, capitaine de vaisseau au service de S. M. T. C., gentilhomme de la chambre du roi, l'ordonnance royale qui a été entérinée ce jour par le sénat, et dont la teneur suit.....

<< En foi de quoi, le présent, signé de notre main et revêtu de notre sceau, a été remis à M. le baron de Mackau, pour lui servir ce que de raison.

<< Donné au palais national du Port-au-Prince, le 11 juillet 1825, an 22° de l'indépendance.

Signé Boyer. -Par le président d'Haïti, le secrétaire général : B. Inginac. -Par le président, le secrétaire d'État : J. C. Imbert. >>

Enfin, le 16 juillet, M. le baron de Mackau recevait la communication suivante en réponse à une note qu'il avait remise après l'acte de l'indépendance accompli, et que nous reproduisons encore textuellement :

<< RÉPUBLIQUE D'HAÏTI.

<«< B. Inginac, général de brigade, secrétaire général près Son Excellence le président d'Haïti,

<< A M. le baron de Mackau, capitaine de vaisseau de la marine royale de France, commissaire de S. M. T. C. au Port-au-Prince.

« M. le Baron,

« Je suis chargé par Son Excellence le président d'Haïti de vous accuser réception de la nouvelle note que vous lui avez adressée sous la date d'hier, et de vous transmettre la pensée de S. E., ainsi que vous en témoignez le désir, relativement aux quatre articles que vous y développez.

<< Pour plus de précision, je choisirai l'ordre que vous avez suivi.

« 1° Les ministres du roi, et S. M. elle-même <«< (elle a daigné me l'exprimer), attachent beaucoup « de prix à ce que l'emprunt que le gouverne«ment d'Haïti pourra contracter pour satisfaire « à ses engagements, ait lieu en France. S. M. << verrait avec bien du déplaisir que des étran«<gers intervinssent dans le détail d'un arrangement qui a mené les deux pays à une réconciliation «franche et finale. >>

« Son Excellence a le désir bien sincère d'être agréable au gouvernement français. Mais, comme elle vous l'a dit elle-même dans plusieurs conférences', elle s'était vue par délicatesse dans l'obli

'C'est nous qui soulignons ces mots dont nous aurons besoin tout à l'heure en traitant de l'emprunt.

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