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porte que les généraux en chef commandant les pays occupés par les armées françaises, hors du territoire continental, peuvent être autorisés à former des corps militaires composés d'indigènes et d'étrangers (1)

Il résulte de la prohibition prononcée par l'art. 2 de la loi que les enfants des étrangers domiciliés en France, même avec l'autorisation de l'Empereur, qui y jouissent en conséquence de tous les droits civils, qui en un mot profitent de tous les avantages de la société, ne sont point assujettis à la plus lourde des charges qu'elle impose (2). Cette conséquence avait frappé plusieurs députés qui signalèrent les inconvénients qu'elle produirait, dans les villes frontières surtout, où habitent beaucoup de familles étrangères qui ne se sont pas fait naturaliser. Plusieurs amendements ont été proposés; mais, aucun n'ayant paru concordant avec le principe posé par la loi et avec les dipositions du Code Napoléon sur la naturalisation, tous ont été rejetés. Il a seulement été décidé que les étrangers nés en France, qui, usant du bénéfice de l'art. 9 du Code. Napoléon, réclameraient la qualité de Français dans l'année de leur majorité, seraient immédiatement soumis aux obligations de la loi du recrutement. (L. 21 mars 1832, 2, $ 2.)

La loi du 22 mars 1849, modifiant dans un sens plus large l'art. 9 du Code Napoléon, permet à l'enfant né

(1) C'est en vertu de cette loi que l'ordonnance du 21 mars 1831 a créé en Afrique un corps de zouaves et de chasseurs algériens.

(2) L'étranger dont la qualité est contestée doit assigner le préfet devant les tribunaux ordinaires pour faire prononcer sur son état; il doit le faire, autant que possible, avant la clôture de la liste de révision. Mais nous ne pensons pas comme la Cour de Bastia (8 mai 1833) qu'il puisse être obligé de servir malgré un arrêt prononçant son extranéité qui n'aurait été rendu qu'après la décision du conseil de révision. La décision de ce conseil ne peut avoir d'influence sur la question d'Etat.

en France d'un étranger de réclamer la qualité de Français en tout temps, s'il sert ou a servi dans les armées françaises de terre ou de mer, ou s'il a satisfait à la loi du recrutement sans exciper de son extranéité. Il y a là, selon nous, une dérogation à la loi de 1832, car en accordant une faveur à l'étranger né en France qui sert soit volontairement, soit par suite de la loi du recrutement, dans les armées françaises, la loi du 22 mars 1849 lui ouvre implicitement les rangs de cette armée. L'étranger dont il est question pourra contracter un engagement, il devra même être porté d'office sur les tableaux de recensement, c'est ce qui nous paraît résulter de ces termes de la loi : « s'il a satisfait à la loi du recrutement sans exciper de son extranéité.» Le principe est donc le service militaire; l'incapacité fondée sur l'extranéité, c'est l'exception qui doit être invoquée pour être admise. Mais si l'on accepte l'engagement de cet étranger, si on l'admet dans les rangs de l'armée par suite de la loi de recrutement, il doit être bien entendu qu'une fois au service il ne pourra le quitter qu'après avoir rempli les obligations résultant de son engagement ou de la loi qu'il aura consenti à subir. Cependant le ministre de la guerre décide que l'on doit s'abstenir de porter l'étranger dont il est question aux tableaux de recensement. (Cir. du 15 nov. 1854.)

D'après une loi récente plus large encore que la précédente, si l'étranger né en France est fils d'un étranger né lui-même en France, il est Français, à moins que, dans l'année qui suit l'époque de sa majorité telle qu'elle est fixée par la loi française, il ne réclame la qualité d'étranger par une déclaration faite soit devant l'autorité municipale, soit devant les agents diplomatiques ou consulaires accrédités en France par les gouvernements étrangers. (L. du 7 février 1851.) Com

ment appliquera-t-on à cet étranger la loi du recrutement? Si l'on ne s'arrêtait qu'à la disposition de la loi qui le déclare Français, il faudrait, lorsqu'il aurait atteint sa vingtième année, le porter sur le tableau du recensement et le soumettre au tirage. Mais, d'un autre côté, la qualité de Français que la loi lui confère peut tomber devant un refus qu'il a le droit d'exprimer pendant toute l'année qui suit sa majorité: on ne peut le forcer à prendre un parti avant cette époque. Si donc il faisait partie de l'armée, il pourrait, pendant un an après sa majorité, abandonner le service militaire en réclamant la qualité d'étranger. Comme la qualité de Français chez cet étranger est subordonnée à l'acceptation formelle ou tacite qu'il pourra faire pendant sa vingtdeuxième année, nous pensons qu'il faut attendre, pour le porter sur le tableau de recensement, l'époque à laquelle il ne pourra plus la répudier. C'est ainsi que le ministre de la guerre résout la question dans sa circulaire du 15 novembre 1854.

La mème loi autorise l'enfant de l'étranger naturalisé, quoique né en pays étranger, à obtenir la qualité de Français sous la condition de la réclamer dans l'année de la naturalisation de son père s'il était majeur, ou dans l'année de sa majorité s'il était mineur à cette époque. Ces étrangers, ainsi que les individus nés en pays étranger de Français qui ont perdu cette qualité et qui peuvent redevenir Français en réclamant à quelque époque que ce soit (C. Nap., 10), doivent, au moment où ils deviennent Français, être soumis au recrutement; mais ils ne peuvent être indéfiniment assujettis à cette obligation quel que soit leur âge. L'art. 9 de la loi du 21 mars 1832 fixe à trente ans l'âge auquel on ne peut plus inscrire sur les tableaux du recensement les jeunes gens omis jusque-là. Nous

pensons, par argument de cet article, que les étrangers dont nous venons de parler ne seront assujettis au recrutement qu'autant qu'ils deviendront Français avant leur trentième année.

Nous terminerons en faisant remarquer que les étrangers nés en France qui échappent aux obligations du recrutement ne doivent pas compter dans la supputation du contingent des cantons dont ils font partie (1).

604. La régle que tous les Français peuvent être appelés sous les drapeaux n'est point une règle sans exception les uns sont exclus de l'armée comme indignes d'en faire partie; les autres sont exemptés ; d'autres enfin sont dispenses du service militaire.

:

L'indignité résulte d'une condamnation à une peine afflictive ou infamante, perpétuelle ou non, et d'une condamnation à une peine correctionnelle de deux années au moins, quand elle est accompagnée de la mise en surveillance de la haute police, et de l'interdiction complète des droits civiques, civils et de famille. (Id., 2; C. P., 6, 7, 8.) Lorsqu'un jeune homme subit, au moment où il est appelé au tirage, un emprisonnement correctionnel n'emportant pas l'exclusion, ses parents ou le maire doivent tirer au sort pour lui, comme le permet l'article 12 de la loi; et, à l'expiration de sa peine, quand même il serait encore sous la surveillance de la haute police, il est dirigé sur un des corps de l'armée. Nous pensons que, dans ce cas, le temps qu'il aura passé en prison ne sera pas compté

(1) On lit dans une instruction du ministre de la guerre du 26 nov. 1845, que les jeunes gens dont les pères se font naturaliser à l'étranger ne sont pas inscrits. Cette preposition n'est vraie que pour les jeunes gens nés après la naturalisation de leurs parents; quant à ceux nés avant, ils sont restés Français et ne peuvent cesser de l'être avant leur majorité. {V. n° 193.)

en déduction du temps de service exigé de lui par la loi; il ne peut en effet profiter de son délit pour s'en faire une cause d'exemption temporaire. (Arg. de l'article 42.)

605. Les exemptions sont fondées sur des incapacités physiques, sur des raisons d'humanité, ou sur la justice distributive.

Les incapacités physiques sont le défaut de taille et des infirmités graves. Les jeunes gens qui n'ont point la taille de 1 mètre 56 centimètres sont exemptés, sur une vérification toujours très-facile à faire. Les infirmités doivent être reconnues par le conseil de révision, après l'examen des gens de l'art. (Id., 13 et 16.)

L'exemption est accordée par motif d'humanité :

1° Al'aîné d'orphelins de père et de mère (art. 13, no 3); c'est en effet le soutien de ses frères et sœurs. On entend par orphelins même les enfants qui auraient encore leurs grands-pères et leurs grand'mères. Dans les classes indigentes, en faveur desquelles cette exemption est surtout établie, l'existence des aïeuls est, pour les petits-enfants qui ont perdu leurs père et mère, une charge de plus. Quand l'orphelin n'a ni frère ni sœur, ou quand il a des sœurs toutes plus âgées que lui, il ne doit point être exempté; la loi, en se servant du mot aîné, suppose qu'il n'est pas seul, et qu'il y a d'autres enfants plus jeunes que lui. Il en est de même quand ses frères et sœurs sont utérins ou consanguins, et qu'ils ont encore leur père ou leur mère. Ils ne sont pas alors orphelins de père et de mère.

2° Au fils unique ou à l'aîné des fils d'une femme actuellement veuve, ou d'un père aveugle, ou qui est entré dans sa soixante-dixième année. S'il n'y a pas de fils, l'exemption peut profiter au petit-f ́s unique ou à

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