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n'est pas de nature à former un chapitre, et trouvera sa place dans le droit communal. Les prestations en nature pour la confection des chemins vicinaux ne peuvent être séparées de l'explication des principes de la loi sur la vicinalité. Il ne nous reste donc à développer sous ce titre que les obligations résultant du jury, du service militaire dans l'armée active et dans la garde nationale. Ce sera l'objet de trois chapitres.

CHAPITRE PREMIER.

DU JURY.

SOMMAIRE.

591. Institution du jury.. Son ancien caracière. 592. Loi du 4 juin 1853. -Système qu'elle adopte. 593. Conditions requises pour être juré.

594. Incompatibilités.

595. Dispenses.

596. Excuses.

Incapacités.

597. Confection des listes annuelles des jurés titulaires et suppléants.

598. Jury en matière d'expropriation. (Renvoi.)

599. Jury de révision de la garde nationale. (Renvoi. )

600. Jury en matière de douane.

Du jury.

591. L'intervention dans l'administration de la justice de citoyens qui, sous le nom de jurés, sont appelés à prononcer sur le fait en matière criminelle, est une institution empruntée à l'Angleterre et transportée en France par la Constitution de 1791. A cette époque d'inexpérience et d'illusion, le législateur assimila au vote politique l'action si grave de prononcer sur la vie et l'honneur des citoyens, et il déclara que tout élec

teur serait juré (L. du 16 sept. 1791, t. XI, art. 2), érigeant ainsi en un droit politique ce qui n'est en réalité qu'une fonction, et transformant par la contrainte la fonction en une charge. Mais le législateur a eu beau considérer tous les électeurs comme capables de suivre avec intelligence les débats d'une affaire criminelle, de discerner le vrai du faux au milieu des assertions contradictoires et des surprises de la parole, la nature des choses réclamait contre la fiction, et la loi ellemême fut obligée d'admettre un correctif en donnant à l'autorité le droit de choisir sur la liste générale les jurés entre lesquels serait indiqué par la voie du sort le jury du jugement.

L'union des qualités d'électeur et de juré et l'inter vention discrétionnaire de l'administration donnèrent au jury l'empreinte du caractère politique de chaque époque, au grand préjudice d'une bonne administration de la justice. « Nous avons vu pendant trente ans » la liste de service disputée par les partis à l'autorité, >> le jury se modifier à chaque abaissement du cens, » dit le rapporteur de la loi du 4 juin 1853 (M. Langlois de la Sarthe). L'Assemblée constituante de 1848, en supprimant toute condition de cens pour l'exercice des droits de citoyen, étendit démesurément l'aptitude à devenir juré, et malgré le choix fait chaque année par une commission cantonale, les listes furent composées de telle sorte que le rapporteur de la loi de 1853 a pu dire que le niveau du jury avait visiblement baissé depuis cinq ans (1).

592. La loi du 4 juin 1853, qui régit aujourd'hui la matière, adopte des principes différents; elle distingue la qualité de juré de celle d'électeur; la fonction, du

(1) V. Duvergier, Collection des lois, t. 1853, p. 171, en note.

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droit... « La logique ne conduit donc pas à admettre » que tous les électeurs doivent être nécessairement jurés. La mission de participer aux jugements crimi»nels et le droit de voter les lois et les impôts ni ne » dérivent de la même source, ni ne supposent les » mêmes qualités... Le ministère de juré cesse d'être >> envisagé comme un droit, pour devenir, ce qu'il est » dans la réalité et la vérité, une simple fonction; on » n'est pas appelé à l'exercer parce qu'on est en posses>>sion du droit de citoyen, mais seulement si l'on est jugé capable et digne de le remplir (1). » En partant de ce principe, la loi détermine d'abord les conditions de capacité.

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593. La première condition est d'avoir trente ans et de jouir des droits politiques, civils et de famille. Il faut ensuite n'être dans aucun cas d'incapacité ou d'incompatibilité. Nous allons énumérer ces différents cas, nous ferons connaître ensuite les cas de dispense et les excuses.

Incapacités. Elles résultent de l'absence ou de l'altération des facultés intellectuelles, de l'ignorance, d'une position de subordination, de condamnations et même de fortes présomptions de culpabilité. Ainsi sont incapables d'être jurés:

Les individus qui sont placés dans un établissement d'aliénés, en vertu de la loi du 30 juin 1838; les interdits et les individus pourvus d'un conseil judiciaire (L. du 4 juin 1853, art. 2, § 10; art. 4, § 3);

Les domestiques et serviteurs à gage (id., 4, § 1); Ceux qui ne savent pas lire et écrire en français (id., 4, § 2);

Les individus condamnés soit à des peines afflictives

(1) V. Duvergier, Collection des Lois, t. 1853, p. 173.

et infamantes, soit à des peines infamantes seulement; Ceux qui ont été condamnés à des peines correctionnelles pour fait qualifié crime par la loi ;

Les militaires condamnés au boulet ou aux travaux publics;

Les condamnés à un emprisonnement de trois mois au moins;

Les condamnés à l'emprisonnement, quelle que soit sa durée, pour vol, escroquerie, abus de confiance, soustraction commise par des dépositaires publics, attentats aux mœurs prévus par les articles 330 et 334 du Code pénal, outrage à la morale publique et religieuse, attaque contre le principe de la propriété et les droits de la famille, vagabondage ou mendicité, pour infraction aux dispositions des articles 38, 41, 43 et 45 de la loi du 21 mars 1832 sur le recrutement de l'armée, et aux dispositions des articles 318 et 423 du Code pénal et de l'article 1 de la loi du 27 mars 1851; Les condamnés pour délit d'usure;

Les notaires, greffiers et officiers ministériels destitués;

Les faillis non réhabilités;

Ceux auxquels les fonctions de juré ont été interdites en vertu de l'art. 396 du Code d'instruction criminelle et de l'art. 42 du Code pénal;

Les condamnés à un emprisonnement d'un mois au moins, mais seulement pendant cinq ans à dater de l'expiration de leur peine (L. du 4 juin 1853, art. 2);

Les individus qui sont en état d'accusation ou de contumace, ceux qui sont sous mandat de dépôt (id., S7 et 12).

594. Incompatibilités. -Les fonctions de juré sont incompatibles avec celles de ministre, président du Sénat, président du Corps législatif, membre du Con

seil d'Etat, sous-secrétaire d'Etat ou secrétaire général d'un ministère, préfet et sous-préfet, conseiller de préfecture, juge, officier du ministère public près les cours et tribunaux de première instance, commissaire de police, ministre d'un culte reconnu par l'Etat, militaire de l'armée de terre et de mer en activité de service et pourvu d'emploi, fonctionnaire ou préposé du service administratif des douanes, des contributions indirectes, des forêts de l'Etat et de la couronne et de l'administration des télégraphes, instituteur primaire communal. (Id., 3.)

595. Dispenses. - Enfin les septuagénaires et ceux qui ont besoin pour vivre de leur travail manuel et journalier sont dispensés des fonctions de juré. (Id., 5.)

596. Excuses. Les sénateurs et les membres du

Corps législatif pendant la durée des sessions seulement, les personnes qui ont rempli les fonctions de jurés pendant l'année courante et l'année précédente sont excusés, sur leur demande. (Id., 16.)

597. D'après le système du Code d'instruction criminelle combiné avec les lois électorales, il était dressé une liste générale et permanente des jurés de chaque département, revisée chaque année. (C. d'inst. crim., 384 et suiv.) Un nombre de jurés déterminé par la loi était extrait chaque année de cette liste, d'abord par le préfet (C. d'instr. crim., 387), ensuite par une commission spéciale (v. décr. du 7 août 1848, 10 et suiv.), pour former une liste sur laquelle avait lieu le tirage au sort des noms des jurés qui devaient faire le service de chaque session d'assises. La loi du 4 juin 1853 supprime la liste générale des jurés; il n'existe plus qu'une liste dressée chaque année et qui comprend deux mille jurés pour le département de la Seine, cinq cents pour les départements dont la population excède trois cent

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