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609. Bien qu'en principe général les jeunes gens qui doivent entrer dans le contingent soient désignés par le sort, il en est cependant que la loi y place nécessairement à titre de punition; ce sont ceux qui ont été condamnés pour l'omission frauduleuse de leur nom sur le tableau de recensement. L'art. 11 ajoute à la peine de l'emprisonnement, prononcée dans ce cas par l'art. 38, l'attribution de plein droit des premiers numéros, qui sont pour cela extraits de l'urne avant le tirage. L'opération a lieu ensuite de la manière suivante les jeunes gens appelés dans l'ordre du tableau, ou en leur absence leurs parents, ou le maire de leur commune, tirent un numéro qui est proclamé et inscrit à la suite de leurs noms; ce tirage ne peut être recommencé sous aucun prétexte, et chacun garde le numéro qu'il a tiré; une liste dressée dans l'ordre de ces numéros, avec la mention des cas et des motifs d'exemption et de déduction que les jeunes gens se proposent de faire valoir, est ensuite publiée et affichée dans chaque commune du canton. (Id., 12.)

610. Toutes ces opérations ne sont en quelque sorte que le préliminaire du recrutement. Il reste à désigner, d'après la loi, les hommes qui feront partie du contingent. Cette désignation est faite en séance publique par le conseil de révision, composé du préfet président, <«<L'administration a jugé avec équité la difficulté quand elle s'est pré>> sentée; voici ce qui se pratiquait les jeunes gens qui n'avaient pu >> tirer au sort, par absence de numéros oubliés, furent considérés ce» pendant comme ayant satisfait complétement à la loi, et ne devant » pas être soumis à un nouvel appel. Ceux qui avaient été victimes de >> cette erreur, en courant des chances moins favorables, reçurent des » congés d'un an pour rester dans leurs foyers. » (Moniteur du 2 novembre et erratum du 4.) C'est d'après ces explications officielles qu'ont été retirées plusieurs propositions, au nombre desquelles il y en avait une qui avait pour but de renvoyer les jeunes gens au tirage de l'année sui

ou, à son défaut, d'un conseiller de préfecture délégué; d'un conseiller de préfecture, d'un membre du conseil général, d'un membre du conseil d'arrondissement (ces trois derniers à la désignation du préfet); d'un officier général ou supérieur, désigné par l'Empereur. Un membre de l'intendance militaire assiste aux opérations du conseil ; il est entendu toutes les fois qu'il le demande, et il peut faire consigner ses observations dans le registre des délibérations. Le sous-préfet, ou le fonctionnaire qui l'a remplacé pour le tirage, assiste aux séances avec voix consultative. Ce conseil revoit les opérations du recrutement, juge les réclamations auxquelles elles ont pu donner lieu, prononce sur les causes d'incapacité, d'exemption et de dispense, sur les substitutions de numéro et sur les demandes de remplacement dans les cas fort rares où il peut encore avoir lieu; ses séances sont publiques, et il va les tenir successivement dans chaque canton, pour éviter un trop grand déplacement de la part des parties intéressées. Ce conseil est permanent et peut être réuni en tout temps. (Instr. du 18 mai 1840, no 104.)

Les jeunes gens qui peuvent être appelés à faire partie du contingent sont convoqués, et s'ils ne se présentent pas, ou ne se font pas représenter, ou n'obtiennent pas un délai qui ne peut être de plus de vingt jours et qu'on ne doit pas renouveler, on peut procéder comme s'ils étaient présents. (Id., 15, 16, 17, 27.) Il est convenable d'accorder le délai même à ceux qui ne se présentent pas, parce que, s'ils avaient des infirmités, ils seraient réformés au corps, et la force du contingent se trouverait alors diminuée. (Circ. 30 mars 1832. Pour vaincre leur mauvaise volonté, les circulaires ministérielles veulent que ceux qui ne justifient pas des causes légitimes qui les ont empêchés de

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se présenter soient toujours dirigés sur un corps, à moins qu'ils ne soient absolument impropres à toute espèce de service. (Instr. du 18 mai 1840, no 38.) Les jeunes gens qui ne résident pas dans le département où ils ont leur domicile peuvent demander à être examinés par le conseil de révision du département de leur résidence; mais ce conseil ne donne qu'un avis, lequel est transmis au conseil du domicile, qui seul a qualité pour prononcer (1).

611. La vérification des infirmités a lieu par des hommes de l'art. Tous les jeunes gens appelés à faire partie du contingent sont soumis à leur inspection, lors même qu'ils ne l'ont pas réclamée, parce qu'il arrive quelquefois qu'ils ne connaissent pas les infirmités dont ils sont affectés, ou qu'ils ont intérêt à les dissimuler; par exemple, en cas de substitution de numéro. Les autres cas d'exemption sont jugés sur la production de documents authentiques, tels que des actes de décès, d'engagement, etc. Quand il est impossible de se procurer ces actes, on peut y suppléer par des certificats signés de trois pères de famille domiciliés dans le canton, dont les fils sont soumis à l'appel ou ont été appelés, signés et approuvés par le maire. (L. 24 mars 1832, 16.)

Si l'admission du moyen invoqué dépend de l'appréciation d'une question relative à l'état ou aux droits civils des jeunes gens, comme la solution des questions de cette nature est de la compétence des tribunaux, le conseil doit surseoir à prononcer jusqu'après leur décision (C. d'Etat, 5 juin 1838, Wille); mais les tribunaux doivent se contenter d'examiner et de juger la question civile, sans décider si le jeune homme est ou

(1) V. pour les formalités à remplir dans ce cas, la circ. du 21 mars

non dans le cas d'exemption : ils résoudraient alors une question administrative, et leur jugement serait annulé en cette partie par la Cour de cassation. (C. C. réq., 11 août 1829, Court.) Les questions portées devant les tribunaux sont jugées contradictoirement avec le préfet dans un bref délai, le ministère public entendu; elles peuvent l'être aussi sur la poursuite de l'un des jeunes gens qui serait appelé à partir par suite de l'exemption d'un autre jeune homme désigné par le sort, et qui contesterait soit la réalité, soit la régularité des actes fournis par ce dernier. L'affaire, d'ailleurs, suit la marche ordinaire, et le jugement est susceptible d'appel et de pourvoi en cassation.

612. Existe-t-il un recours contre les décisions du conseil de révision? En thèse générale, ces décisions sont définitives (L. 21 mars 1832, 26); et cela se conçoit, car il est important que le sort des jeunes gens soit fixé dans un bref délai; mais il est de principe que les décisions même définitives des tribunaux administratifs peuvent être attaquées devant le Conseil d'Etat pour incompétence, excès de pouvoir et violation de la loi. Aucune exception n'est établie formellement à l'égard des conseils de révision. Le ministre de la guerre émettait l'avis, le 19 juillet 1819, que les décisions du conseil de révision pouvaient être attaquées pour excès de pouvoirs et pour violation de la loi. Cependant le Conseil d'État (Id., 25) disait, le 27 juillet 1820, que les recours contre les décisions rendues par les conseils de révision ne pouvaient être admis que par une loi qui modifierait en ce point les articles 13 et 17 de la loi du recrutement. Le projet de la loi de 1832 contenait cette disposition provoquée par le Conseil d'Etat ; mais elle n'a point été admise. Quoi qu'il en soit, la jurisprudence du Conseil

d'État, après quelques hésitations, a fini par reconpour incomnaître que le pourvoi pourrait être formé pétence et excès de pouvoirs, en vertu du principe général qui fait de l'Empereur le régulateur des compétences, le modérateur des pouvoirs; mais non pour violation de la loi. (C. d'Etat, 15 sept. 1831, Ade; 5 juin 1838, Wille; 2 avril 1849, Dalloz.)

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613. La rigueur de ce principe est adoucie dans la pratique par une mesure toute d'équité. Une circulaire du ministre de la guerre du 24 février 4834 contient un paragraphe ainsi conçu: « A l'avenir, les hommes compris dans le contingent soit par erreur, soit par une » fausse interprétation de la loi, et qui se trouveraient >>> incorporés, pourront être l'objet d'une proposition spéciale au ministre, qui avisera aux moyens de ren» voyer dans leurs foyers ceux dont les réclamations seront >> fondées. >> D'après une autre circulaire du 25 juin 1834, le général commandant la division, ou le préfet, doit soumettre la réclamation au ministre, lequel peut accorder un congé qui autorise le jeune homme à rester dans ses foyers pendant le temps du service militaire. Les parties peuvent aussi se pourvoir directement. Mais il ne faut pas perdre de vue que cette disposition bienveillante ne serait pas applicable aux jeunes gens qui, soit par ignorance, soit par négligence, n'auraient pas justifié de leurs droits à l'exemption. (Circ. 11 juillet 1836.)

614. Il est important de déterminer d'une manière définitive, dans le plus court délai possible, quels sont les jeunes gens qui seront libérés ; cependant il peut se présenter plusieurs cas où cette décision doit être différée; c'est 1° lorsque l'admission ou le rejet des réclamations dépend de la décision d'une question judiciaire ; 2o lorsque des jeunes gens sont déférés aux tribunaux

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