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Si la donation consistait en meubles, le donateur ne pourrait les reprendre que tels qu'ils se trouveraient.

Si elle consistait en une somme d'argent constituée en dot, l'ascendant aurait droit de se la faire restituer, comme le donataire: aurait pu le faire lui-même, en cas de séparation. Il succède à l'action en reprise; le procès-verbal et l'article le disent formellement. `

Si elle consistait en une somme purement donnée, et qu'un tiers n'eût pas reçue et affectée; pour lors, si elle se trouvait en argent dans l'hérédité du descendant, l'ascendant aurait droit de la reprendre. Il en serait de même si le donataire l'avait placée lui-même, soit en acquisition de fonds caistans encore dans ses mains, soit en prêt à des tiers qui ne se fussent pas libérés, soit en acquit de ses propres dettes..

De sorte qu'il me semble que le droit de retour doit toujours avoir lieu, soit que la donation consistât en meubles ou en immeubles, excepté que l'objet n'en ait péri dans les mains du donataire, qu n'ait été dissipé par lui, sans emploi utile. Dans tous les autres cas, la chose ou le prix doivent revenir au donateur, par le principe même qui a fait établir le droit de retour ou de succession en faveur des ascendans, et par cette grande raison d'équité, neminem ex alterius jacturâ locupletari debere.

Il faut convenir que le procès-verbal est très-obscur a ce sujet.

Mais voici une autre question. L'article dit que les ascendans succèdent aux choses par eux données à leurs descendans décédés sans postérité. Si le descendant laisse des enfans, mais que ces enfans viennent à mourir avant l'ascendant donateur, le droit de retour ou de succession est-il conservé en faveur de celui-ci, ou bien est-il éteint par cela seul que le donataire a laissé des enfans?

A suivre rigoureusement les termes de notre article, on ne pourrait s'empêcher de décider que le droit est éteint; car c'est par succession que l'ascendant reprend la chose donnée : il faut donc considérer uniquement l'état des choses tel qu'il est au moment du décès du donataire : or, il est bien constant qu'à cette époque la reversion ne peut pas avoir lieu, puisque le donataire n'est pas décédé sans postérité.

Cependant on penchera pour l'opinion contraire, si on fait attention que notre article ne fait que renouveler, dans les mêmes termes, la disposition des Coutumes de Paris et d'Orléans, et que dans le ressort de ces Coutumes, comme dans tout le reste de la France en général, il était de maxime que l'ascendant ne perdait son expectative que lorsqu'à sa mort, il existait des descendans de son donataire. Voy. à ce sujet Cambolas, liv. 1, ch. 5; Catellan, liv. 5, ch. 8, Ricard, tom. I, part. 5, ch. 7, sect. 4; Lebrun, liv. 1, ch. 5, sect. 2, n. 30; Pothier, Bourjon, etc.

Notre article n'exclut pas même positivement cette manière de l'entendre; il appelle les ascendans

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à succéder aux choses par eux données à leurs descendans décédés sans postérité; mais il ne borne pas le cas de ce décès sans postérité; et lorsqu'il arrive du vivant du donateur appelé, on peut dire qu'il est très-vrai et dans le fait et dans le langage ordinaire, que le descendant est décédé sans pos→ térité. Il ne fut rien dit, lors de la discussion de cet article, qui conduisît à penser qu'il dût être entendu dans un sens différent de celui qu'on luj avait toujours donné : cependant, il faut convenir que l'expression succèdent, rigoureusement prise, prête beaucoup à l'opinion contraire.

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ART. 748. Lorsque les père et mère d'une per» sonne morte sans postérité lui ont survécu, si » elle a laissé des frères, sœurs, ou des descendans » d'eux, la succession se divise en deux portions

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égales, dont moitié seulement est déférée au père > et à la mère, qui la partagent entre eux égale→

» ment.

» L'autre moitié appartient aux frères, sœurs ou » descendans d'eux, ainsi qu'il sera expliqué dans » la section V du présent chapitre.

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ART. 749. Dans le cas où la personne morte ? sans postérité laisse des frères, sœurs ou des des»cendans d'eux, si le père ou la mère est prédé» cédé, la portion qui lui aurait été dévolue con» formément au précédent article, se réunit à la » moitié déférée aux frères, sœurs ou à leurs représentans, ainsi qu'il sera expliqué à la section » V du présent chapitre. »

Le droit romain partageait tout simplement la

succession par tête entre les père et mère, et les frères et sœurs ou leurs représentans;, s'il n'y avait que le père et un frère, chacun prenait la moitié ; s'il y avait le père et la mère, et deux frères ou sœurs, chacun avait un quart; s'il n'y avait que le père ou la mère, et deux frères ou sœurs, chacun en avait un tiers, etc. Cette règle était plus claire, plus aisée à retenir, plus adaptée à l'affection naturelle, d'après laquelle doit être réglé l'ordre des suc'cessions.

SECTION V.

Des Successions collatérales.

ART. 50. « En cas de prédécès des père et mère d'une personne morte sans postérité, ses frères, sœurs ou leurs descendans sont appelés à la » succession, à l'exclusion des ascendans ou des au• tres collatéraux.

>> Ils succédent, ou de leur chef, ou par repré»sentation, ainsi qu'il a été réglé dans la section ⚫ II du présent chapitre.

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Est-ce des frères et sœurs germains seulement, ou des frères et sœurs en général, soit germains, soit consanguins et utérins, que notre article a entendu parler? Grande question qui partage les jurisconsultes et les tribunaux.

Pour soutenir que les frères et sœurs consanguins ou utérins et leurs descendans, n'excluent pas, hors de leur ligne, les ascendans autres que les père et mère, et tous les collatéraux, on dit que l'article 733 veut que toute succession dévolue

à des ascendans, ou à des collatéraux, soit divisée en deux parts égales, l'nne pour la ligne paternelle, l'autre pour la ligne maternelle, et que les parens consanguins ou utérins ne prennent part que dans leur ligne, sauf ce qui sera dit à l'article 752. Mais cet article 752 ne parle que du cas auquel les frères consanguins ou utérins concourent avec les père et mère, et c'est dans ce concours seulement que les frères d'un seul côté succèdent à la totalité de la moitié ou des trois quarts qui leur sont déférés, et exclucnt tous autres parens de l'autre ligne: ils ne peuvent donc pas les exclure dans les autres cas.

Pour l'opinion contraire, on dit qu'il serait absurde de supposer que le frère consanguin ou utérin réduisît le père ou la mère au quart de la succession, et qu'il eût pour lui les trois autres quarts, tandis qu'il n'aurait que la moitié, lorsqu'il concourrait seulement avec un parent au douzième degré.

Cette supposition est en effet inconcevable, et cette injustice ne peut pas se supposer dans la loi. L'article 750 parle des frères et sœurs en général; elle comprend donc aussi bien les consanguins et utérins que les germains, dès qu'elle ne les désigne pas autrement. Il est même démontré qu'elle a entendu les comprendre tous, puisque dans l'article 752 elle règle le cas auquel ces frères se trouveraient de divers lits. Il est donc incontestable que, tant les frères et sœurs consanguins et utérins, que les germains, excluent tous autres collatéraux, et tous les ascendans autres que les père et mère, et qu'ils prennent toute la succession.

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