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C'est la disposition du S. 21, Inst. de rer. div. Seulement on a borné à un an les expressions tongior tempore, de ce §.

On demanda si cet article s'appliquait aux cas qu'on dit assez fréquens dans les pays de montagne, où des bâtimens et des bois entiers sont emportés dans les vallées. Il fut répondu qu'il ne s'appliquait qu'à l'enlèvement de la surface du fonds, et non au fonds même.

Cette réponse a été mal rendue, sans doute, elle ne résout pas la question ; et sans doute le cas qui en est l'objet n'est pas assez fréquent pour mériter une solution particulière. Mais s'il arrivait qu'un orage enlevât une maison ou une vigne, et les fit couler dans le vallon prochain sans les dégrader, et en conservant la position respective de leurs parties, sans doute leur propriétaire serait en droit d'en emporter ce qu'il pouraait; mais s'il ne le faisait pas dans le tems prescrit, il serait censé les abandonner au propriétaire du sol, sur lequel ils auraient été portés, et ce serait toujours ce dernier qui devrait être censé avoir conservé son terrain originaire avec tous les attributs attachés à la propriété.

ART. 560. « Les îles, îlots, attérissemens qui » se forment dans le lit des fleuves ou des ri» vières navigables ou flottables, appartiennent » à la nation, s'il n'y a titre ou prescription con» traire. »

Cet atticle est formellement contraire aux lois romaines qui adjugeaient les îles nées dans les

fleuves aux propriétaires riverains, pro modo tatitudinis cujusque agri qui propè ripam sit. S. 22, Inst. de rer. div.

Dans le tems de la féodalité, on avait abandonné cette disposition du Droit écrit, et on adjugeait au domaine les îles nées dans les rivières navigables, et aux seigneurs haut-justiciers, celles qui se formaient dans les autres. Loisel, Inst. coutum. liv. 2, tit. 2, art. 12; Bacquet, Justice, ch. 20 ; Boissieu, Traité des fiefs, ch. 6o.

Il fallait choisir entre ces règles si différentes, et ce choix partagea le conseil : les uns soutenaienț qu'il n'y avait pas d'ordonnance qui adjugeât précisément à la nation les îles nées dans les riviè res, et que l'équité devait les donner aux propriétaires riverains; les autres soutenaient que la question était déjà décidée par l'art. 538, qui dit que les rivières navigables ou flottables sont considérées comme domaine national; car, si le fleuve est national, l'île qui se forme dans son sein doit être de la même nature.

On répliquait qu'une rivière est considérée comme nationale, par deux motifs : le premier, parce qu'il importait que le Gouvernement pût en disposer pour la sûreté de la navigation et de la flottaison; le second, parce qu'une rivière ne peut être dans le domaine d'un particulier, et que, suivant l'art. 538, tout ce qui n'était pas susceptible d'une propriété privée, était censé dépendre du domaine public; mais qu'aucun de ces motifs ne peut s'appliquer aux îles. On ajoutait à l'appui de

cette opinion que, si on adoptait sans restriction le principe de l'article proposé, on allait dépouiller les possesseurs actuels de ces îles, qui en jouissaient par titres, ou depuis un tems suffisant pour prescrire.

La majorité convint que les îles étant susceptibles d'une propriété privée, la propriété pouvait en être acquise par titre et par possession, et l'article fut adopté avec la restriction qui s'y trouve, s'il n'y a titre ou possession contraire.

ART. 561. « Les îles et attérissemens qui se for»ment dans les rivières non navigables et non ⚫ flottables, appartiennent aux propriétaires rive

rains du côté où l'île s'est formée: si l'île n'est › pas formée d'un seul côté, elle appartient aux » propriétaires riverains des deux côtés, à partir » de la ligne qu'on suppose tracée au milieu de » la rivière. »

Voyez l'observation sur l'article précédent. Il faut y ajouter que lorsque l'île s'est formée d'un seul côté, et qu'elle appartient ainsi au propriétaire riverain de ce côté, les attérissemens qui s'y formeront dans la suite par alluvion, appartiennent toujours à ce propriétaire, quoiqu'ils soient plus rapprochés de l'autre bord. L. 59. ff. De acq. rer. dom.

ART. 562. « Si une rivière ou un fleuve, en se » formant un bras nouveau, coupe et embrasse » le champ d'un propriétaiae riverain, et en fait » une île, ce propriétaire conserve la propriété de » son champ, encore que l'île se soit formée dans

un fleuve ou dans une rivière navigable ou ffot>> table. >>

C'est que ce n'est plus une île formée dans la rivière, §. 22, Inst. de rer. divis.

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ART. 563. « Si un ffeuve ou une rivière naviga

ble, flottable ou non, se forme un nouveau » cours en abandonnant son ancien lit, les pro» priétaires des fonds nouvellement occupés pren» nent, à titre d'indemnité, l'ancien lit abandonné, » chacun dans la proportion du terrain qui lui a » été enlevé. »

Cet article est contraire à la loi ff. De acq. rer. dom. et au §. 23, Inst. eod. qui adjugeaient Je lit abandonné aux propriétaires riverains. Cela ne manqua pas d'être relevé dans la discussion de cet article: on ajoutą de plus qu'il produirait des effets fâcheux dans la vingt-septième division militaire, où l'usage était conforme à la disposition des lois citées. Mais l'équité de l'article l'emporta avec raison sur cet usage.

Dans le système féodal, ce n'était ni aux riverains ni aux propriétaires du nouveau lit, occupé par le fleuve, que l'ancien était adjugé, mais bien au roi, ou au seigneur, suivant que la rivière était navigable, ou simplement flottable. Henris, tom. 2, liv. 3, quest. 3o. Il faut cependant dire à la louange des Parlemens de Droit écrit, qu'ils avaient résisté à cette injustice. Vedel sur Catellan, liv. 3, ch. 40', Fromental, p. 264.

ART. 564.

Les pigeons, lapins, poissons qui » passent dans un autre colombier, garenne ou

» étang, appartiennent au propriétaire de ccs objets, pourvu qu'ils n'y aient point été attirés par » fraude et artifice, »>

Il y a des pigeons et des lapins privés, comme il y en a de sauvages; c'est de ces derniers seule¬ ment que notre article parle; et si des pigeons de volière, ou des lapins domestiques, allaient se joindre à ceux du voisin, il n'y a pas de doute que le premier propriétaire ne fût en droit de les ré¬ clamer, comme son coq et ses poules,

Quant aux poissons, l'application de l'article est plus difficile, par la difficulté même de les re

connaître.

SECTION II.

Du droit d'accession relativement aux choses

mobilières,

ART. 565. Le droit d'accession, quand il a pour objet deux choses mobilières appartenant à deux » maîtres différens, est entièrement subordonné › aux principes de l'équité naturelle.

>> Les règles suivantes serviront d'exemple au Juge pour se déterminer, dans les cas non pré» vus, suivant les circonstances particulières. »

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La matière de cette section est traitée dans les §. 25, 26, 27 et 28 des Institutes, tit. 1, liv. 2, Le Code s'y conforme presque en entier, sauf quel ques points où il s'est encore plus rapproché de l'équité naturelle; c'est elle, en effet, que notre article reconnaît devoir être prise uniquement pour

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