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et puis par une autre clause, je donne ma mais son à Jean; Pierre et Jean s'appelaient cunjuncti re

2o. Par les mèmes expressions et dans la même période. Si le testateur disait, je donne ma maison à Pierre et à Jean, ils étaient alors conjoints. Re et verbis.

3°. Par les mêmes expressions et à la même chose, mais avec des parties distinctes, si le testateur disait, je donne à Pierre et à Jean ma maison par portions égales, ou bien, à chacun la moitié ils étaient alors conjoints. Verbis tantùm.

Entre les héritiers testamentaires, il y avait toujours droit d'accroissement, suivant la règle, nemo partim testatus, partim intestatus decedere potest. Mais entre les légataires, on distinguait ceux qui étaient conjoints re et verbis, d'avec ceux qui ne l'étaient que re, aut verbis.

On convenait que le droit d'accroissement avait toujours lieu inter cunjunctos re et verbis; mais on disputait beaucoup pour savoir s'il avait lieu dans les autres espèces, et on voyait de grands noms des deux côtés, Cujas, Henris, Bretonnier et Domat d'une part; de l'autre, Vinnius, Ferrières sur Guipape, Maynard, Serres; etc.

Nos deux articles terminent enfin ces fameuses questions: l'accroissement aura lieu, inter cunjunctos re et verbis, il n'aura pas lieu inter cunjunctos verbis tantùm, ni même inter cunjunctos re tantùm, excepté que la chose léguée ne soit impartageable.

L'effet du droit d'accroissement est de faire pas

ser au co-héritier ou co-légataire, la portion de celui qui répudie la sienne, on ne peut la recueillir, parce qu'il est mort incapable ou indigne. V. sur ce droit d'accroissement, la Loi unique, Cod. dle Caducis tollendis.

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ART. 1046. Les mêmes causes qui, suivant l'ar»ticle 954 et les deux premières dispositions de » l'art. 955, autoriseront la demande en révoca» tion de la donation entre-vifs, seront admises pour la demande en révocation des dispositions testamentaires. >>

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Ces causes sont l'inexécution, de la part du légataire, des conditions sous lesquelles le legs lui a été fait, son attentat à la vie du donateur, ses sévices, délits ou injures graves contre la personne du même donateur.

Cet article suppose le décès du donateur, et que ce sont ses héritiers qui exercent l'action en révocation. V. ce que nous avons dit à ce sujet au Ch. 6 de ce titre, in principio.

ART. 1047. Si cette demande est fondée sur une injnre grave faite à la mémoire du testateur, elle doit » être intentée dans l'année, à compter du jour du » délit. »

La section de Législation avait commencé cet article par une disposition ainsi conçue.

Si la demande est fondée sur le fait que le légataire était auteur ou complice de la mort du testateur, l'héritier doit la former dans l'année, à compter du décès du testateur, si la condamnation du légataire est antérieure, et à comp

ter du jour de la condamnation, si elle est pos térieure au décès.

On observa qu'il serait contre l'ordre public de laisser un assassin jouir des dépouilles de sa victime, par cela seul qu'il n'aurait pas été recherché pendant un an, et on demanda que l'action en déchéance eût la même durée que l'action en poursuite du crime.

Sur ces observations, la première partie de l'arti cle projeté fut retranchée : mais notre article se tait sur la demande qui avait été faite de la fixation d'un délai pour l'exercice de l'action en révocation pour cause d'attentat à la vie ou de sévices. On a craint sans doute de contrarier le principe posé dans l'article 957. Mais comme ce n'est pas le même cas, je crois qu'il résulte seulement de ce silence, que la chose est restée dans les termes ordinaires du droit, sur lesquels la demande était certainement basée; aussi eût-elle l'assentiment du Conseil. V. l'observation sur l'art. 957.

Il n'est parlé ni dans nos deux articles, ni dans le 957, du cas de la réconciliation du donateur et du donataire, survenue après les délits et injures qui auraient pu mériter la révocation de la donation; mais je ne fais point de doute à ce que cette réconciliation, bien prouvée par le donataire, ne fît cesser l'action en révocation, puisqu'elle rendait même l'exhérédation inutile. Lapeyrère, lett. E, n. 30; Serres, p. 289; Despeisses, Grassus, Mornac, etc.

Je dois aussi rappeler en finissant, une question qui ne se trouve nulle part résolue dans le Code, c'est celle de la nullité des testamens par suggestion et

captation. Personne n'ignore combien ce moyen était commun autrefois, et l'ordonnance de 1735 l'avait expressément conservé: on a jugé qu'il serait moins utile aujourd'hui, et il ne faut pas même dissimuler qu'il donnait lieu à de grands abus. En principe, il est permis de se procurer des libéra- · lités, par des caresses, des services, des prières, des présens; il n'y a que les moyens frauduleux, des calomnies contre les héritiers naturels, qui soient réprouvés par la justice et la morale; dans tout autre cas, la question se réduit au point de savoir si le testateur était ou n'était point imbécile. Cependant du silence de la Loi, on ne doit pas conclure que le moyen de captation soit abrogé; au contraire, M. Treillard, dans son discours au Corps législatif, a expressément dit qu'on n'avait pas voulu le détruire, malgré tous ses inconvéniens, de crainte que des gens avides ne s'en fissent un titre pour dépouiller impunément les familles, après avoir subjugué les mourans.

Il a mis sur la même ligne le moyen pris de ce que les testamens étaient supposés faits ab irato; on ne le connaissait guère en pays de Droit écrit; mais il était en grande vogue au parlement de Paris. Il est, ce me semble, bien plus contraire aux véritables principes et à l'exercice du droit de propriété, que ceux pris de la captation et de la suggestion. Que deviendra la liberté que la loi me donne, de disposer d'une telle quotité de mes biens, si la disposition que j'en ferai peut être attaquée après ma mort, sous le prétexte que je l'ai faite en

colère, ou par une injuste préférence? La loi ne me demande pas compte de mes motifs, et un pareil moyen ne peut pas soutenir les regards du véritable jurisconsulte; cependant on ne peut pas dire encore qu'il soit abrogé par nos nouvelles lois.

CHAPITRE VI.

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Des Dispositions permises en faveur des Petitsenfans du Donateur ou Testateur, ou des Enfans de ses Frères et Sœurs.

C'EST après bien des essais et des discussions délicates, qu'on est parvenu enfin à se réunir pour établir les règles contenues dans ce Chapitre.

La Loi romaine permettait aux pères et mères de déshériter leurs enfans, lorsque ceux-ci se rendaient indignes de leurs bienfaits par leur ingratitude ou par leurs crimes: la Novelle 115 avait fixé les causes d'exhérédation au nombre de quatorze; et comme plusieurs de ces causes né convenaient plus à nos mœurs, la Cour de Cassation, dans ses observations sur notre projet, les avait réduites à quatre : la première, si l'enfant s'était porté contre ses parens à quelqu'acte de violence ou d'outrages; la seconde, s'il avait intenté contr'eux une accusation criminelle ou correctionnelle; la troisième, s'il s'était marié depuis vingt-un ans jusqu'à vingtcinq, sans leur consentement; la quatrième, s'il avait commis un crime pour lequel il eût été condamné à une peine afflictive ou infamante.

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