sympathie, donnée à leurs enfants par des petits frères inconnus, mettra de courage et d'espoir aux cœurs des mères! Vous ne savez pas ce que, dans l'avenir, la vue du plus minime de ces souvenirs pourra réveiller de patriotisme et de bons sentiments dans des âmes ébranlées. Parmi ces enfants dont le sort est si triste, il en est dont les parents se disposent à mettre entre eux et la patrie des milliers de lieues. Ils vont de par delà des mers, chercher des ressources qu'ils ne veulent plus demander au sol natal. Là, ils entendront parler une autre langue, ils vivront sous d'autres lois; les enfants grandiront avec des enfants qui ne sont pas Français... Ah! mes amis, qu'un jouet détaché pour eux de votre arbre de Noël, lequel aura charmé et consolé les longues heures de fatigues et les souffrances du voyage, soit là, sous leurs yeux; qu'il leur redise à toute heure qu'en France battent des cœurs de leur âge, des cœurs de frères, et toute cette jeune génération restera sincèrement française, et, le jour venu où la patrie aura besoin d'elle, elle la retrouvera vaillante, dévouée, fidèle!... Vous le voyez, ce que nous vous demandons n'est autre chose qu'un apostolat de dévouement et de patriotisme; c'est bien vraiment une croisade!... III C'est aux enfants, et, en particulier, aux plus jeunes d'entre eux dans chaque famille, dans chaque école, qu'en vertu du vieil adage: « à tout seigneur tout honneur, nous nous adressons. La belle solennité de Noël, en effet, n'est pas seulement la fête par excellence de l'enfance, elle est surtout la glorification de cet âge heureux, dont la faiblesse même assure le pouvoir et dont l'innocence fait la force. En tout temps, mes petits amis, pourvu que vous soyez sages et obéissants, vous êtes la joie et la bénédiction de vos familles, mais au jour anniversaire du Dieu-Enfant, vous êtes plus encore: chacun de vous est véritablement roi au logis, que ce logis soit un palais ou une chaumière! Vous êtes rois et rois pleins de puissance, car, votre souveraineté ne se borne pas aux étroites limites du foyer domestique; elle s'étend même au-delà de ce vaste monde dont vous ne connaissez et n'occupez qu'un point imperceptible; elle franchit l'espace et va s'exercer jusque dans les cieux! Voilà, n'est-ce pas? une dignité et un pouvoir que fort peu d'entre vous se connaissaient. Sachez en user, mes enfants, au profit de tous: à votre propre profit, en jetant dès à présent les bases de l'honneur de votre vie; à celui de vos chers parents, en travaillant à leur bonheur; à celui de la France, notre patrie, c'est-à-dire la grande famille, où tous les âges, toutes les conditions doivent se confondre dans une seule pensée, une seule volonté : assurer sa prospérité et sa gloire ! IV J'ai souvent pensé qu'en cet heureux jour de Noël, le Seigneur Jésus aime à se dépouiller dans les cieux de la Majesté Divine, pour redevenir petit enfant comme en son berceau de Bethléem, lorsque, couché dans la crèche d'une pauvre étable, il divinisait en quelque sorte l'enfance, en s'assujettissant à sa faiblesse et à ses besoins. N'est-ce pas, dans tous les cas, à cette occasion surtout, qu'il redit avec plus d'amour qu'en tout autre temps cette gracieuse invitation, qu'il a si souvent fait entendre pendant qu'il vivait au milieu des hommes : « Laissez venir à moi les petits enfants !... » O vous pour qui descend des cieux ce touchant appel, allez au Divin Enfant qui vous ouvre ainsi son cœur et vous tend les bras; allez à Lui, dans toute la candeur et la simplicité de votre âme; parlez-lui à cœur ouvert; il a promis lui-même de ne rien vous refuser! allez à Lui, comme à un ami, bien plus que comme à un Dieu et à un maître, et en ce jour qu'il a choisi pour partager les attributs de votre âge, soyez sûrs qu'il partagera avec vous ceux de sa puissance. Et ainsi, ô mes enfants, vous deviendrez nos interprètes auprès de Dieu et les messagers de Dieu auprès de nous!... Est-il, dites-moi, - sur la terre une royauté plus désirable, une puissance plus réelle?... Mais pour être ainsi aimés de Jésus, pour en être écoutés et exaucés, il faut que vous le méritiez par la pureté et la bonne volonté de votre cœur; par votre amour pour Dieu, votre tendresse pour vos parents, votre compassion pour les malheureux, votre charité pour les pauvres... que sais-je encore : par votre douceur, votre application et surtout par votre obéissance, cette vertu qu'on appelle justement la gardienne et la maîtresse de toutes les autres... En un mot, il faut que vous réunissiez cet ensemble de qualités charmantes que votre devoir, d'accord avec votre intérêt, est de faire grandir avec vous, afin qu'on puisse vous appliquer ce que l'Évangile dit de Jésus enfant : « et il croissait en âge et en sagesse. » V La plupart d'entre vous, mes enfants, ne peuvent encore comprendre ce que la religion, la famille, la patrie ont fait et font chaque jour pour vous; mais ce que tous vous pouvez et devez sentir, c'est qu'elles ont droit à tout votre amour. Cet ordre de pensées semble bien sérieux pour votre âge; -quelques personnes diront peut-être même qu'elles sont au-dessus de votre portée. En temps ordinaire, ce pourrait être vrai. Mais l'angoisse et le deuil, en mûrissant la raison, en élargissant le cœur, développent singulièrement l'intelligence. Or, lequel d'entre vous, mes enfants, n'a déjà vu couler des larmes amères, lequel n'a recueilli des soupirs de regret ou d'inquiétude... Lequel, enfin, ne sait que la France a souffert, qu'elle souffre et que le remède à tous les maux qui l'ont accablée se trouve dans l'amour de ses enfants, petits ou grands. Au jour de votre royauté, faites donc quelque chose pour cette chère affligée, et, en attendant que vos bras soient assez forts pour prendre à leur tour cette épée si longtemps victorieuse, que, malgré leur courage et leur dévouement, vos pères et vos frères aînés ont vu se briser en leurs mains; en attendant, dis-je, que votre tour arrive de servir efficacement la patrie, demandez à Dieu de la secourir, de la fortifier, de la bénir... C'est encore à cette croisade de bons souhaits que nous vous convions. Ainsi, c'est entendu, mes enfants, vous serez pieux et bons, et alors, non-seulement la France sera bénie et sauvée, mais encore la religion et la famille, qui sont menacées aussi, trouveront en vous leur sauvegarde et leur appui. VI Mais ce n'est pas seulement à ce point de vue, un peu élevé pour vos jeunes intelligences, que Noël vous fait rois. Cette aimable fête vous apporte une souveraineté plus sensible et plus appréciable pour votre âge; j'entends le charme ravissant de la crèche du Sauveur et les délicieuses surprises de l'arbre de Noël! Comme à cette occasion vos mères et vos grandes sœurs sont affairées et aussi comme elles se montrent discrètes... que d'emplettes, que de préparatifs mystérieux ont par avance fait battre vos cœurs, presque aussi fort que lorsque, la grande soirée venue, se déploieront, à vos regards charmés et éblouis, toutes les richesses qui, selon les pays et les usages, font plier les branches de l'arbre de Noël, ou sortent du sabot traditionnel que l'enfant anxieux, quoique plein d'espérance, a placé vide dans le foyer et qu'il en retire tout rempli de jolies et bonnes choses. Que de cris de surprise! que de trépignements de joie! et au milieu de tout cela que de baisers donnés ou reçus ! C'est, mes petits amis, que, pour si grandes que soient les espérances d'un enfant, pour si merveilleux que soient ses rêves, le cœur d'une bonne mère trouve toujours le moyen d'aller au-delà. Il s'en |