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Ceci mérite encouragement. Sans rien préjuger de ce que les heureux parents de mes trois petits amis déposeront dans leurs œufs de Pâques, celui que je prépare pour eux ne contiendra pas seulement le stéréoscope que je leur destinais à Noël... Il ne faut pas qu'ils perdent pour avoir attendu!

VIII

Hélas! je n'ai pas le même témoignage à rendre à Paul et à Marie! Je ne les retrouve plus ce qu'ils étaient il y a quelques mois, et à vous dire vrai, mes enfants, je ne m'en étonne pas.

C'est, en effet, le propre du défaut auquel ils ont succombé, d'aveugler l'intelligence et d'engourdir la volonté. C'est là justement ce qui fait de la gourmandise non-seulement le plus laid, le plus ignoble de tous les vices, mais la plus dangereuse de toutes les passions.....

Mais je ne veux pas assombrir aujourd'hui votre pensée en l'arrêtant sur ce repoussant tableau.

Tout, en cette belle fête de Pâques, doit être consolant et joyeux comme les cloches qui sonnent à toutes volées dans nos vieux clochers, comme l'Alléluia qui de nos églises s'élève vers le ciel mêlé à des flots d'encens; comme le cantique d'allégresse que chante toute la nature

Ouvrez donc vos cœurs à la joie, mes enfants, et envisagez en ce jour la vie sous son beau côté, c'està-dire au point de vue des vertus qui nous rapprochent de Dieu et non des défauts qui nous en éloignent.

Comment d'ailleurs ne seriez-vous pas bons et charmants, vous qui êtes l'objet de tant de sollicitude; vous que la famille entoure de tant de soins et d'amour; vous que l'éducation prend au berceau et guide pas à pas jusqu'à ce que, éclairés et fortifiés par elle, vous puissiez marcher hardiment et sûrement dans la vie.

A aucun temps, l'enfance n'a été l'objet de plus de sollicitude qu'à notre époque. Les institutions qui lui sont destinées n'ont jamais été aussi nombreuses et aussi bien appropriées à ses divers besoins.

Je vous ai parlé déjà de la crèche qui reçoit les enfants au berceau et les garde jusqu'à ce qu'ils marchent sans aide, jusqu'à ce qu'ils bégayent le nom béni de leur mêre. Vient ensuite l'asile, où l'enfant qui commence à parler reçoit les premières notions de l'enseignement élémentaire; puis l'école où se développent ces premières notions; puis enfin les cours professionnels, les patronages, qui n'abandonnent l'enfant qu'aux portes de l'âge mûr.

Dans d'autres conditions où la famille peut se charger de la première enfance, la mère doit suppléer à la crèche, à l'asile, et se charger de l'enseignement de la première enfance. Puis vient le petit collége, puis le lycée, puis l'enseignement supérieur.....

Voilà, mes enfants, ce que la patrie fait pour vous; attendrez-vous les années pour lui en témoigner de la reconnaissance; pour lui payer tant de soins divers par votre amour et votre reconnaissance?

Non, dès à présent vous vous appliquerez à vous montrer dignes d'elle, en préparant en vous, par votre docilité, par votre application, de bons et braves citoyens pour l'avenir.

Nos pères avaient une devise qu'ils inculquaient au cœur de leurs enfants dès le berceau. Que cette

devise: Dieu, la patrie, la famille! soit gravée profondément dans vos jeunes cœurs, que rien ne l'en puisse effacer.

IX

Ma plume, quand elle s'adresse à vous, mes enfants bien-aimés, court si vite que je ne la puis plus arrèter. Le papier disparaît ligne à ligne, page à page, avant que je vous aie dit la dixième partie de ce que mon cœur tenait en réserve pour vous.

C'est ainsi que me voilà presque au bout de mon sujet avant d'avoir abordé la partie la plus importante de mon sujet, c'est-à-dire avant de vous avoir offert, moi aussi, mes œufs de Pâques.

Je pourrais penser, il est vrai, que les paroles que je viens de vous adresser peuvent prendre place parmi les souhaits et les conseils qui accompagneront les présents qui vous sont offerts par vos parents et vos amis; je pourrais même me flatter que mon petit livre prendra parmi ces présents une des places d'honneur; mais tout cela ne satisfait pas mon affection pour vous, et je tiens à vous adresser à tous et à chacun un présent collectif.

Ce présent, le voici :

Aux heureux enfants qui reçoivent des œufs de Pàques, je répète l'appel de notre croisade : Un peu de vos richesses, s'il vous plaît, en faveur de vos frères qui, par suite des malheurs de la France, notre mère à tous, sont déshérités des joies du foyer.

Et, je ne saurais trop le redire, en provoquant leur enfantine générosité, je leur ouvre une mine pré

cieuse de bénédictions et de joies; je leur assure lo plus réel du bonheur.

C'est là mon présent de Pâques.

D'autre part, et par suite de cette vérité qui exprime si bien notre vieux proverbe : La bienfaisance est deux fois miséricordieuse, car elle profite à qui l'exerce et en est l'objet, j'irai les mains pleines vers nos bien-aimés petits exilés et je leur dirai:

<< Voici ce que vous envoient vos jeunes frères, vos bonnes et charmantes petites sœurs... voici vos œufs de Pâques. >>>

J'aurai ainsi droit de la part de chacun à un peu d'affection, à un cordial et sincère remerciement. Je n'aspire pas à une autre récompense et je n'ambitionne pas de souvenir de Pâques plus précieux.

X

Nous voilà donc, mes enfants, vous et moi et nos intéressants petits protégés, si admirablement bien portants, que jamais année ne saurait laisser dans nos cœurs de meilleures traces de l'anniversaire de la résurrection du Sauveur.

Est-ce à dire que les souhaits et les présents que j'ai à vous offrir soient épuisés?

Certes non. Un cœur comme le mien a d'abondants trésors et d'inépuisables ambitions. Or, je vous aime si tendrement, mes bons petits amis, que je vous confonds tous dans une même sollicitude maternelle.

Je voudrais donc que toutes les bénédictions du ciel descendissent sur vous, et c'est du plus profond de mon cœur que je demande au Dieu de bonté de la répandre sur vos jeunes têtes.

Puissiez-vous grandir tous en science et surtout en sagesse. Or, ceci dépend en grande partie, pour ne pas dire entièrement, de vous, de votre bonne volonté. Je viens donc vous supplier ardemment, mes chers petits amis, d'être appliqués, respectueux, dociles, empressés, sages, prévenants, aimables les uns pour les autres; chérissez vos bons parents, et par dessus tout aimez la France, et dans toutes vos actions ayez son bonheur et sa gloire en vue.

Songez que vous êtes l'espoir de l'avenir, c'est-à-dire les soldats, les citoyens, les hommes d'ordre, de devoir, de dévouement auquel appartiendra, dans un temps prochain, de réaliser la grande et sainte mission de réparer nos fautes, d'effacer nos malheurs !...

Ces mots que je viens d'écrire : des hommes de devoir, méritent d'arrêter un instant ma pensée et la

vôtre.

Le devoir, mes enfants, est de tous les âges; il change de forme à mesure que nous avançons dans la vie, mais il est tout aussi important, tout aussi obligatoire à votre âge, qu'il ne saurait le devenir plus tard.

Volontiers même je dirai qu'il est plus obligatoire que jamais dans l'enfance et dans la jeunesse.

C'est alors, en effet, que la conscience se développe, que le caractère prend des plis ineffaçables.

Tel qui n'a pas appris, dès ses premiers pas dans la vie, à lire son devoir dans le livre sacré que Dieu lui-même a caché au fond de notre âme, et que je viens d'appeler la conscience, celui-là ne saura jamais pénétrer et pratiquer ces mille délicatesses d'une âme honnête et généreuse qu'aucune loi humaine ne sauraient formuler, qu'aucunes leçons, aucuns

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