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donc que, s'il y a une nullité à soulever de ce chef (ce que les tribunaux apprécieront dans chaque cas), cette nullité sera couverte par la prescription d'une année.

TITRE X.

Des assurances en général.

(Loi du 11 juin 1874.)

468, NOTIONS PRÉLIMINAIRES. Le contrat d'assurance, qui s'applique aujourd'hui à tant d'objets, a été pendant longtemps réservé exclusivement aux risques maritimes. Mème dans ces limites, il ne semble pas avoir été connu avant le moyen âge. Tout porte à croire que ce fut en Italie que les assurances ont été usitées pour la première fois; mais le plus ancien monument législatif connu qui les ait réglées est l'ordonnance de Barcelone de 1435. Cette législation fut menée presque à sa perfection dans les PaysBas, par l'ordonnance promulguée par le duc D'Albe en 1570. Avant le Code de commerce de 1808, cette matière était régie en France par la célèbre ordonnance maritime de 1681.

Le Code de commerce de 1808, dont le livre II, relatif au commerce maritime, reproduit généralement les prescriptions de cette ordonnance, consacre aux assurances le titre X de ce livre (art. 332 à 396). Mais il n'y est pas encore question des assurances terrestres, nom donné à toutes les assurances ayant pour objet des risques autres que ceux attachés à la navigation maritime ou intérieure. Et cependant, les assurances terrestres étaient pratiquées déjà depuis longtemps. Mais elles prirent bientôt un développement qui réclama une législation spéciale. Car l'application des principes généraux du droit et des règles relatives aux assurances maritimes ou les stipulations des contrats ne suffisaient pas à trancher les nombreuses controverses qui

s'étaient élevées. La loi belge du 11 juin 1874 vint donc enfin chez nous répondre à ce besoin.

Cette loi comprend deux parties : une partie générale, qui forme le titre X du livre premier du Code de commerce revisé, et dont les dispositions sont applicables même aux assurances maritimes, lorsqu'il n'y est pas dérogé par des articles spéciaux; et une partie spéciale, formant le titre XI, et traitant en particulier de quelques assurances terrestres (1).

469. DE LA NATURE DU CONTRAT D'ASSURANCE. L'art. 1er définit l'assurance « un contrat par lequel l'assu«reur s'oblige, moyennant une prime, à indemniser l'as« suré des pertes ou dommages qu'éprouverait celui-ci par suite de certains événements fortuits ou de force majeure. » Ainsi, l'assurance a pour objet d'indemniser d'une perte éventuelle, et non d'enrichir l'assuré. C'est pourquoi on ne peut, en principe, assurer des bénéfices simplement espérés. Mais, dans certaines conditions, le profit non encore réalisé pourrait être assez défini pour qu'il soit permis de l'assimiler à une valeur à conserver. C'est pourquoi le même article ajoute :

« Le profit espéré peut être assuré dans les cas prévus « par la loi. » Ce sera donc au législateur à consacrer par une disposition expresse des exceptions de ce genre. On en trouve une en matière d'assurance maritime (v. l'art. 168 de la loi du 21 août 1879, liv. II).

La définition de l'art. 1er ne s'applique qu'à l'assurance à prime, bien que l'article suivant parle des assurances mutuelles. Nous avons déjà signalé la différence entre ces deux sortes d'opérations (no 322, X). Les assurances à prime

(1) Sources: NAMUR: Le Code de commerce belge, ouv. déjà cité. - Rapport fait par M. le baron d'ANETHAN au nom des Commissions du Sénat. Documents parlementaires, Sénat, 1872-1873. Rapport fait au nom de la Commission de la Chambre des représentants par M. VAN HUMBEEK, Documents parlem. Chambre des rep., 1869-1870. DALLOZ, Répertoire, ve. Assurances terrestres.

constituent des actes de commerce de la part des assureurs mais non de la part des assurés, qui ne peuvent avoir en vue un bénéfice; les assurances mutuelles sont des actes civils vis-à-vis de tous les contractants, qui sont à la fois assureurs et assurés.

Le contrat d'assurance est un acte synallagmatique et à titre onéreux; c'est un contrat aléatoire (v. les nos 269 et suiv.). Il ne doit jamais dégénérer en jeu ou pari: dès que l'assuré cesse d'avoir intérêt à la conservation de la chose assurée, les effets du contrat cessent également. Enfin, l'assurance suppose certains risques: la convention serait donc nulle si la chose avait péri avant le contrat, ou si le dommage dont on veut se garantir était déjà consommé, ou encore si le risque ne pouvait se produire.

Dans la définition donnée par l'art. 1er, définition qui n'est pas sans défaut, le mot assuré désigne le bénéficiaire de l'assurance, celui qui doit toucher l'indemnité en cas de sinistre. Ce bénéficiaire n'est pas toujours l'un des contractants, car on peut faire une assurance pour autrui; le mot assuré est aussi employé dans notre loi pour désigner simplement le preneur d'assurances, par opposition à l'assureur. Enfin, dans les assurances sur la vie, ce même terme désigne la personne sur la tête de laquelle une assurance est faite. Or, comme nous le verrons, cette personne peut n'être ni le preneur d'assurance ni le bénéficiaire.

«Les associations

470. DES ASSURANCES MUTUELLES. -(( « d'assurances mutuelles, dit l'art. 2, sont régies par leurs « règlements, par les principes généraux du droit et par les dispositions du présent titre, en tant qu'elles ne sont point « incompatibles avec ces sortes d'assurances. »

་་

Elles sont représentées en justice par leurs directeurs. » Donc, les assurances mutuelles sont soumises à la plupart des dispositions générales concernant les autres assurances, bien qu'elles ne soient pas des sociétés commerciales. Elles ne sont pas même des sociétés civiles, puisque l'un des élé

ments exigés par l'art. 1832 du Code civil, le but de réaliser un bénéfice, leur fait défaut (v. le no 258).

Ces associations sont représentées en justice par leur directeur, soit en demandant, soit en défendant; la loi leur reconnaît donc par là une individualité juridique.

471. GÉNÉRALISATION DES DISPOSITIONS PRÉSENTÉES ICI. « Les dispositions du présent titre, dit l'art. 3, « auxquelles il n'est point dérogé par des articles spéciaux, « sont applicables aux assurances maritimes, ainsi qu'aux <«< assurances sur le transport par terre, rivières et ca

«naux. »

Il faut appliquer la même règle à toute espèce d'assurance. Ce point a été reconnu formellement dans les travaux préparatoires de la loi.

CHAPITRE II.

Des personnes qui peuvent faire assurer.

472. PRINCIPES GÉNÉRAUX. << Un objet peut être <«< assuré par toute personne ayant intérêt à sa conserva«<tion, à raison d'un droit de propriété ou autre droit réel, « ou à raison de la responsabilité à laquelle elle se trouve << engagée relativement à la chose assurée (art. 4). »

Cet article donne le droit de faire assurer une chose : 1o au propriétaire; 2°o à ceux qui sont intéressés à la conservation. de la chose à raison d'un droit réel, par exemple à l'usufruitier; 3o à tous ceux qui ont intérêt à cette conservation à raison de la responsabilité à laquelle ils sont engagés par rapport à la chose assurée.

Ainsi, le dépositaire peut faire une assurance valable. Celui qui n'est propriétaire que d'une quote-part ne peut faire assurer en son nom que ce qui lui appartient. L'assurance prise pour toute la chose ne peut profiter à ses copro

priétaires que s'il a agi comme gérant d'affaires, conformément à l'article suivant; de même si un usufruitier a pris une assurance pour toute la valeur de la chose, cette assurance ne sera valable à son égard que jusqu'à concurrence de la valeur de l'usufruit, et le nù-propriétaire n'en profitera que si l'usufruitier peut être considéré comme son gérant d'affaires.

472. DE L'ASSURANCE CONTRACTÉE POUR COMPTE D'AUTRUI. — « L'assurance peut être contractée pour « compte d'autrui en vertu d'un mandat général ou spécial, «< ou même sans mandat. »

<< Les effets en sont réglés en ce dernier cas par les dis«positions relatives à la gestion d'affaires. »

«S'il ne résulte pas de l'assurance qu'elle est faite pour «< compte d'un tiers, l'assuré est censé avoir contracté pour « lui-même (art. 5). »

Nous avons exposé les principes de la gestion d'affaires (nos 183 et 184).

Celui qui a fait assurer la chose d'autrui est présumé avoir agi en son nom personnel lorsque le contraire ne résulte pas du contrat, ou lorsqu'on ne combat pas cette présomption en invoquant d'autres circonstances de nature à la renverser. L'assurance ne sera donc valable en ce cas, que si l'assuré se trouve intéressé à la conservation de la chose de l'une des manières indiquées à l'article précédent. 474. QUE PEUVENT FAIRE ASSURER LES CRÉAN« Un créancier peut faire assurer la solvabilité « de son débiteur; l'assureur pourra se prévaloir du béné«fice de discussion, sauf convention contraire.

CIERS.

<< Les créanciers saisissants ou nantis d'un gage et les «< créanciers privilégiés et hypothécaires peuvent faire assu«rer en leur nom personnel les biens affectés au payement « de leurs créances.

«< Dans ce cas, l'indemnité due à raison du sinistre est « subrogée de plein droit, à leur égard, aux biens assurés «< qui formaient leur gage (art. 6). »

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