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TITRE VII.

Des assurances maritimes.

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546. NOTIONS GÉNÉRALES. Le contrat d'assurance maritime est celui par lequel une partie prend à sa charge, moyennant un prix convenu, les risques auxquels est exposée la chose d'autrui par suite d'événements de mer.

Comme nous l'avons dit ailleurs, cette assurance fut longtemps la seule connue, et c'est la seule dont le législateur se soit occupé avant la loi du 11 juin 1874 (v. le no 468).

Nous avons fait connaître, en expliquant cette loi, les principes généraux qui régissent le contrat d'assurance (nos 469 à 492). Nous avons vu notamment que les dispositions de cette loi auxquelles il n'est pas dérogé pour des articles spéciaux sont applicables aux assurances maritimes (art. 3 de la loi du 11 juin 1874).

Les règles spéciales aux assurances maritimes sont tracées aux articles 168 à 227 de la loi que nous reproduisons ci-dessous; ces dispositions remplacent, avec certaines modifications, les art. 332 à 396 de l'ancien Code de com

merce.

Section I.

Du contrat d'assurance, de sa forme et de son objet.

547. DES CHOSES QUI PEUVENT FAIRE L'OBJET DE L'ASSURANCE MARITIME. L'art. 168 est ainsi conçu : ART. 168. L'assurance peut avoir pour objet :

Le corps et la quille du navire;

Les agrès et apparaux ;

Les armements et victuailles ;

Le fret ;

Le prix de passage;

Les sommes prêtées à la grosse et le produit maritime;

Les marchandises du chargement;

Le profit espéré des marchandises;

Les loyers des gens de mer;

Le bénéfice d'affrètement;

Le courtage et les commissions d'achats, de ventes et de consignations ;

Les sommes employées aux besoins du navire et à l'expédition des marchandises, avant et pendant le voyage;

En général, toutes choses ou valeurs, estimables à prix d'argent, sujettes aux risques de la navigation, sans préjudice des dispositions du livre Ier, relatives aux assurances sur la vie (no 497 et suiv.).

En ce qui concerne l'assurance des profits espérés permise par cet article, nous renvoyons à ce que nous avons dit au no 469, à propos de l'alinéa 2o de l'art. 1er de la loi du 11 juin 1873.

Ajoutons ici la disposition de l'art. 176, ainsi conçue : Le contrat d'assurance est nul, s'il a pour objet les sommes emprun tées à la grosse.

On comprend la raison de cette dernière disposition: l'emprunteur n'ayant rien à restituer en cas de sinistre, il ne court aucune chance de perte et l'assurance est sans objet. Mais le prêteur à la grosse peut assurer les sommes prêtées, conformément à l'art. 168.

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ART. 169.

548. DE L'ÉVALUATION DES OBJETS ASSURÉS. En cas de fraude dans l'estimation des effets assurés, en cas de supposition ou de falsification, l'assureur peut faire procéder à la vérification et estimation des objets, sans préjudice de toutes autres poursuites, soit civiles, soit criminelles.

ART. 170. Tout effet dont le prix est stipulé dans le contrat en monnaie étrangère est évalué au prix que la monnaie stipulée vaut en monnaie de Belgique, suivant le cours à l'époque de la signature de la police.

ART. 171. Si la valeur des choses assurées n'est pas fixée dans le contrat, elle sera justifiée conformément aux dispositions de la section II du présent titre.

Les articles suivants de la section II s'occupent de l'estimation des choses assurées :

ART. 187. Lorsque l'assurance a pour objet des marchandises, l'estimation est faite sur la valeur qu'elles avaient au temps et au lieu du

chargement, y compris tous les droits payés et les frais faits jusqu'à bord, la prime d'assurance et les frais accessoires.

L'estimation des corps, quilles, agrès et apparaux d'un navire est établie sur leur valeur au jour où les risques ont commencé.

L'estimation des victuailles, des armements et de toutes autres choses estimables à prix d'argent est faite d'après leurs valeurs aux lieux et au temps où les risques ont commencé.

ART. 188. Un contrat d'assurance ou de réassurance consenti pour une somme excédant la valeur des choses assurées est nul à l'égard de l'assuré seulement, s'il est prouvé qu'il y a dol ou fraude de sa part.

ART. 189. Dans le même cas, s'il n'y a ni dol, ni fraude, le contrat est valable jusqu'à concurrence de la valeur des choses assurées, d'après l'estimation qui en est faite ou convenue.

ART. 190. Si les parties sont convenues de l'évaluation du profit espéré, cette évaluation fera loi, sans qu'il soit besoin d'autre justification.

549. DU TEMPS DES RISQUES. · ART. 172. Si le temps des risques n'est pas déterminé par le contrat, il court à l'égard du navire, des agrès et apparaux, de l'armement, des victuailles et du fret, du moment où le navire commence à charger et, s'il part sur lest, du moment qu'il commence à charger le lest; il finit au moment du déchargement ou vingt et un jours après l'arrivée au lieu de destination, à défaut de déchargement dans ce délai.

A l'égard des marchandises, le temps des risques court du jour où elles ont été chargées dans le navire ou dans les gabares destinées à les transborder, jusqu'au jour où elles sont délivrées à terre.

A l'égard de toutes autres choses, la responsabilité de l'assureur commence et finit au moment où commencent et finissent pour l'assuré les risques maritimes.

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550. MESURES DE GARANTIES SPÉCIALES POUR LE CAS OU LE CAPITAINE EST LUI-MÊME CHARGEUR ET CELUI OU LE CHARGEUR EST SUR LE NAVIRE. ART. 174. En cas de perte des marchandises assurées et chargées, pour le compte du capitaine, sur le vaisseau qu'il commande, le capitaine est tenu de justifier aux assureurs l'achat des marchandises, et d'en fournir un connaissement signé par deux des principaux de l'équipage.

ART. 175. Tout homme de l'équipage et tout passager qui chargent à bord des marchandises assurées en Belgique, sont tenus d'en laisser un connaissement au lieu où le chargement s'effectue. En Belgique, ce connaissement est laissé au greffe du tribunal de commerce; à l'étran

ger, entre les mains du consul belge ou, à défaut, entre les mains du magistrat du lieu.

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551. DES RISQUES DE GUERRE. ART. 173. L'augmentation de prime qui aura été stipulée en temps de paix pour le temps de guerre qui pourrait survenir, et dont la quotité n'aura pas été déterminée par les contrats d'assurance, est réglée par les tribunaux, en ayant égard aux risques, aux circonstances et aux stipulations de chaque police d'assurance.

ART. 178, § 2. Dans le cas où les assureurs ont pris à leur charge les risques de guerre, ils répondent de tous dommages et pertes qui arrivent aux choses assurées par hostilité, représailles, déclaration de guerre, blocus, arrêt par ordre de puissance, molestation de gouvernements quelconques reconnus ou non reconnus et, généralement, de tous accidents et fortunes de guerre.

ART. 179. Dans le cas où l'assurance ne comprend pas les risques de guerre, le contrat est résilié lorsqu'un fait de guerre modifie les conditions du voyage.

Toutefois, si ce fait survient en mer, la résiliation du contrat n'a lieu que du moment où le navire sera ancré ou amarré au premier port qu'il atteindra.

ART. 180. Dans le cas de l'article précédent, les objets assurés sont présumés avoir péri par fortune de mer, jusqu'à preuve du contraire. ART. 181. Les assureurs qui souscrivent les risques de guerre seuls sont, indépendamment de leurs obligations de ce chef, substitués, pour les risques ordinaires, aux assureurs francs de guerre, à partir du moment où le contrat, en ce qui concerne ces derniers, a été résilié conformément à l'article 179.

Section II.

Des obligations de l'assureur et de l'assuré.

552. DIVERSES CAUSES D'ANNULATION

OU DE NUL

LITÉ DE L'ASSURANCE ET DROITS DES PARTIES SUIVANT LES CAS. ART. 177. L'assurance est annulée et l'assureur reçoit, à titre d'indemnité, un demi pour cent de la somme assurée : Si, avant le commencement des risques, le voyage est rompu, même par le fait de l'assuré;

Lorsque l'affréteur, ayant fait assurer le fret, il arrive que le fret n'est pas dû.

Lorsque, dans le cas prévu par l'article 10 de la loi du 11 juin 1874, l'assuré a droit à la restitution de la prime (no 478).

Si la prime n'atteint pas le taux de 1 p. c., l'indemnité sera de la moitié de la prime.

ART. 196. Toute assurance faite après la perte ou l'arrivée des choses assurées est nulle s'il est prouvé qu'avant la signature du contrat l'assuré a dû être informé de la perte, ou l'assureur de l'arrivée des choses assurées.

ART. 197. En cas de preuve contre l'assuré, celui-ci paye à l'assureur une double prime.

En cas de preuve contre l'assureur, celui-ci paye à l'assuré une somme double de la prime convenue.

Il faut ajouter ici les dispositions de l'art. 176, cité au no 547, et des art. 188 et 189, cités au no 559.

553. DES DOMMAGES DONT EST TENU OU DONT N'EST PAS TENU L'ASSUREUR, ET DE SES DROITS DANS CERTAINS CAS SPÉCIAUX. ART. 178. Sont aux risques des assureurs toutes pertes et dommages occasionnés par tempête, naufrage, échouement, abordage, changements forcés de route, de voyage ou de vaisseau, par jet, feu, explosion, pillage et généralement par toutes les autres fortunes de mer.

Il faut ajouter ici ce que nous avons dit plus haut du cas de guerre (no 551).

ART. 182. Tout changement de route, de voyage ou de vaisseau ordonné par l'assuré, et toutes pertes et dommages provenant de son fait, ne sont point à la charge de l'assureur, et même la prime lui est acquise, s'il a commencé à courir les risques.

ART. 183. Les dommages causés par le fait et faute de propriétaires, affréteurs ou chargeurs, ne sont point à la charge des assureurs.

ART. 184. L'assureur est tenu des prévarications et fautes du capitaine et de l'équipage, connues sous le nom de baraterie de patron, s'il n'y a convention contraire.

Il n'est pas tenu des prévarications du capitaine choisi par l'assuré s'il n'y a convention contraire.

ART. 185. Il sera fait désignation, dans la police, des marchandises sujettes, par leur nature, à détérioration particulière ou diminution, comme blés ou sels, ou marchandises susceptibles de coulage; sinon les assureurs ne répondront point des dommages ou pertes qui pourraient arriver à ces mêmes denrées, si ce n'est toutefois que l'assuré eût ignoré la nature du chargement lors de la signature de la police.

ART. 186. Si l'assurance a pour objet des marchandises pour l'aller et le retour et si, le vaisseau étant parvenu à sa première destination, il ne se fait point de chargement en retour, ou si le chargement en retour

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