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la cause sans assistance du Jury, quelles que soient les modifications qui auraient pu survenir dans les débats. Cass. 3 Nov. 1831.

2- En principe général, les tribunaux criminels doivent toujours être assistés du Jury. Ce n'est que par une dérogation ou exception au droit commun que l'art. 313 du C. d'Inst. crim. décide que certaines accusations de crimes qu'il spécifie et précise seront soumises aux tribunaux sans assistance du Jury. Le crime de viol n'étant nullement compris dans les cas exceptionnels prévus au dit article 313, reste soumis à l'examen et à la décision du Jury. Lorsque deux crimes dont l'un est de la compétence des tribunaux criminels avec assistance du Jury, et l'autre de la compétence des mêmes tribunaux sans cette assistance, et se trouvent, à cause de leur connexité, compris dans le même acte d'accusation, et sont en même temps soumis aux tribunaux criminels, ces tribunaux agiraient contre les règles de la compétence, et commettraient un excès de pouvoir en y procédant seuls. Spécialement, le tribunal criminel saisi en même temps de la double accusation de viol et de vol à main armée, contenue au même acte d'accusation, à cause de sa connexité, devait se décliner d'office, s'agissant d'une incompétence absolue, à cause de l'accusation de viol. La première chose qu'il avait à examiner était sa compétence, et en y faisant attention il aurait reconnu que l'accusation qui doit subir l'instruction la plus solennelle doit attirer à elle celle qui exige moins de solennité. Ce tribunal criminel sans être assisté du Jury n'était pas plus compétent pour juger les deux accusations ensemble que pour juger le viol seul; car il est certain qu'il pourrait arriver qu'après l'examen et les débats, le seul crime de viol qui doit être soumis au Jury resterait constant. Ainsi, le tribunal criminel a excédé ses pouvoirs et violé les règles de sa compétence. - Cass. 10 Juillet 1843.

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Après avoir défini les différents faits soumis aux tribunaux criminels sans l'assistsnce du Jury, le législateur n'a rien laissé dans le vague, ni dans l'incertitude. Il ajoute : « Et tous les faits qui sont ou se<ront prévus par des lois spéciales. Cette disposition est éminemment applicable à la cause où il s'agit d'une loi spéciale sur la responsabilité des fonctionnaires, laquelle renvoie à l'art. 130 du C. Pén. pour la punition à infliger, et cet article se sert du mot de soustraction, comme l'art. 324; et on ne peut distinguer quand la loi elle-même n'a pas distingué. Cass. 5 Mai 1875.

4 Conformément aux prescriptions établies par le législateur sur la séparation du fait et du droit dans le jugement des affaires au grand criminel, le tribunal criminel est tenu de suivre la marche que la loi du 15 février 1875 lui trace, c'est à dire recourir au C. d'Inst. crim. de 1835, à partir des chapitres 1, 2, 3 et 5. Il est bien évident qu'en supprimant le Jury pour des crimes déterminés, et en donnant aux tribunaux criminels attribution pour les juger, le législateur n'a pas entendu déroger aux

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formes tracées par la loi qui consacrent des garanties qu'il tient à maintenir pour la bonne administration de la justice. Ainsi, la procédure n'a pas changé ; le tribunal doit d'abord poser les questions sur lesquelles il doit appeler le Ministère public et les accusés à faire des objections, ce qui était le complément de leur défense, et ensuite rentrer dans la Chambre de délibéré, statuer uniquement sur le fait imputé aux accusés; et ce ne serait qu'après une déclaration de la culpabilité régulièrement rendue que le Ministère public serait autorisé à faire son réquisitoire au tribunal criminel pour l'application de la loi. Mais si ni le jugement, ni le procèsverbal d'audience n'établissent l'accomplissement de ces formalités toutes substantielles, le jugement est frappé d'une nullité radicale. Cass. 16 Juin 1875.

5 La loi modificative de février, art. 1er, 5°, en renvoyant aux art. 269, 277 et 289 du C. d'Inst. crim., fait injonction au tribunal jugeant sans assistance du Jury, de ne suivre d'autre marche que celle tracée par les articles prémentionnés. Le tribunal criminel ainsi constitué, doit, à part ce qui l'oblige de substituer en lieu et place des jurés, procéder dans le même mode qu'il observe quand il fonctionne avec leur assistance. Donc le doyen du tribunal criminel est tenu de déterminer et porter solennelle-ment en présence de l'auditoire, les questions à résoudre, celles résultant et de l'accusation et des évolutions des débats (art. 269, 270), appeler les parties intéressées à faire leurs observations et objections, entrer dans son délibéré pour en avoir la solution (art. 277), et revenir à l'audience avec le verdict de délivrance ou de condamnation; et alors le Ministère public aurait requis pour l'application de la loi (art. 289, 294). Mais aucune de ces formalités n'ayant été remplie puisque le procès verbal d'audience n'en fait nulle mention, il en ressort qu'il y a violation des articles sus mentionnés. Cass. 30 Août 1875.

< Loi du 6 Sept. 1870, sur le mode de procéder devant les tribunaux a correctionnels, en matière de délits politiques et de presse.

Le Sénat, usant de l'initiative à lui conférée par l'art. 82 de la Constitution, a proposé,

« Et le Corps Législatif,

« Vu les dispositions de l'art. 30 de la Constitution,

Attendu que, si aux termes de cet article, le Jury est établi non seule«ment en toute matière criminelle, mais encore pour délits politiques et « de la presse, il importe de tracer les formes à suivre devant les tribu<< bunaux correctionnels relativement à ces délits ;

« A rendu la loi suivante :

Art. 1er. Les tribunaux civils connaîtront, sous le titre de tribunaux « correctionnels, avec assistance du Jury, des délits politiques et de la " presse non susceptibles d'entraîner une peine afflictive ou infamante. Art. 2. Le Commissaire du Gouvernement aura, après en avoir in

« formé le doyen, la faculté de faire citer directement le prévenu devant « le tribunal correctionnel.

«La citation contiendra l'indication précise de l'écrit incriminé, ainsi « que l'articulation et la qualification des délits qui ont donné lieu à la < poursuite.

«Art. 3. Il y aura au moins un délai de trois jours, outre un jour par << cinq lieues, entre la citation et le jugement, à peine de nullité de la << condamnation qui serait prononcée par défaut contre la personne citée. << Néanmoins cette nullité ne pourra être proposée qu'à la première au« dience, et avant toute exception ou défense.

«Art. 4. Les prévenus de délits politiques, s'ils ont été arrêtés, pour<< ront demander et obtenir leur mise en liberté provisoire, moyennant « caution, en suivant, à cet égard, les prescriptions du Code d'Instruction << criminelle.

« Art. 5. Dès que le doyen se sera entendu avec le Ministère public, <conformément à l'art. 2, il est tenu de convoquer les jurés et de les << tirer au sort en présence du Commissaire du Gouvernement et du pré<venu, qui exerceront, s'ils le veulent, le droit de récusation consacré « par la loi.

« Art. 6. Si, au moment où le Ministère public exerce son action, la « session du tribunal criminel est ouverte, les jurés seront les mêmes << que ceux de cette session, et le tirage en sera fait conformément au Code « d'Instruction criminelle.

Mais, si la session du tribunal criminel est terminée, les jurés seront, <«< dans la quinzaine, convoqués à l'extraordinaire, par ordonnance motivée

« du doyen du tribunal correctionnel, qui, à l'égard du tirage au sort,

« suivra les prescriptions du Code ci-dessus cité.

« Art. 7. La liste des jurés sera notifiée aux prévenus par le Commis<< saire du Gouvernement, 24 heures au moins avant le jour fixé pour le «jugement, à peine de nullité.

<< Cette signification sera faite à personne ou à domicile.

«Si le prévenu n'est pas domicilié dans le siège du tribunal correc«tionnel, la signification lui sera valablement faite au greffe du tribunal « de paix du lieu du jugement.

« Le juge de paix qui recevra la copie, visera, sans frais, l'original de << la signification.

« Art. 8. Dans le cas où il y aura partie civile, elle fera élection de < domicile dans le lieu où siège le tribunal qui sera saisi de sa demande << en dommages-intérêts par suite de la citation donnée au prévenu par le « Ministère public.

« Mais si la partie civile croit devoir citer de plano le prévenu devant «<le tribunal correctionnel, elle est tenue de communiquer les écrits in<< criminés ou les pièces constitutives de la prévention au doyen et au

Ministère public, qui après les avoir scrupuleusement examinés, dé<< cideront s'il y a lieu de convoquer le Jury à l'extraordinaire, dans le cas où la session criminelle est close.

« Art. 9. Le prévenu a le droit de présenter lui-même ses moyens de <défense ou de constituer un ou plusieurs avocats.

Art. 10. S'il ne comparaît pas au jour fixé par la citation, il sera jugé par défaut par le tribunal correctionnel, sans assistance ni inter«vention de jurés.

« L'opposition au jugement par défaut devra être formée dans les trois jours de la signification à personne ou à domicile, outre un jour par cinq lieues de distance, à peine de nullité.

L'opposition sera signifiée au Ministère public et à la partie civile <et tiendra lieu de citation à la première audience.

« Si, à l'audience où il doit être statué sur l'opposition, le prévenu n'est pas présent, le nouveau jugement rendu par le tribunal sera définitif et « ne pourra être attaqué que par la voie de la cassation.

Art. 11. Toute demande en renvoi, pour quelque cause que ce soit, tout incident sur la procédure suivie, devront être présentés avant «l'appel et le tirage au sort des jurés, à peine de forclusion.

« Art. 12. Après l'appel et le tirage au sort des jurés, le prévenu interrogé ne pourra plus faire défaut. En conséquence, tout jugement qui interviendra, soit sur la forme, soit sur le fond, sera définitif, quand << bien même le prévenu se serait retiré et aurait refusé de se défendre. . Dans ce cas, il sera procédé avec le concours du Jury, et comme si < le prévenu était présent.

Art. 13. Si le Ministère public exerce ses poursuites en exécution << d'une ordonnance de la Chambre du Conseil, cette ordonnance sera dans les conditions indiquées par l'art. 2.

Art. 14. Aucun pourvoi en cassation contre les jugements qui auront a statué, soit sur les demandes en renvoi, soit sur les incidents de procé«dure, ne pourra être formé qu'après le jugement définitif et en même « temps que le pourvoi contre ce jugement, à peine de nullité.

« Art. 15. L'instruction sera publique, à peine de nullité, et se fera < dans l'ordre suivant :

« Si le tribunal est saisi de la cause par ordonnance de renvoi, lecture << en sera faite par le greffier. Il en sera de même de la citation.

« Le Ministère public exposera les faits constitutifs de la prévention. « Le doyen, après avoir interpellé le prévenu sur ses nom, prénom, « âge, profession et lieu de domicile, l'avertira d'être attentif à tout ce << qu'il va entendre, et s'adressera ensuite aux jurés en se conformant à < ce qui est prescrit par l'art. 246 du C. d'Instruction criminelle.

«Si le prévenu a constitué un avocat, celui-ci sera avisé qu'il ne peut « rien dire contre sa conscience, ni contre le respect dû aux lois, et qu'il doit s'exprimer avec décence et modération.

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« Le prévenu sera placé en face du Jury.

<< Les témoins pour et contre, assignés légalement, soit par le Commissaire du Gouvernement, soit par la partie civile, seront entendus <dans les formes et en conformité des dispositions exigées par les arti« cles 250, 251, 252, 253, 254 et 255 du Code ci-dessus cité.

Après l'audition des témoins, il sera donné lecture des écrits incri«minés ou des procès-verbaux concernant la prévention.

« Art. 16. Ces formalités remplies, et sur l'avertissement du doyen, la partie civile ou son avocat constitué, et le Commissaire du Gouvernement, prendront la parole, et développeront les moyens qui appuient la « prévention.

<< Le prévenu et son défenseur pourront leur répondre.

«La réplique sera permise au Ministère public et à la partie civile ou « son défenseur, mais le prévenu et son défenseur auront toujours la « parole les derniers.

<< Après l'accomplissement de ce qui vient d'être énoncé, le doyen dé«clatera les débats terminés, et posera aux jurés les questions résultant << des faits articulés et qualifiés dans la citation ou dans l'ordonnance de renvoi, en suivant à cet égard, le principe établi dans le Code d'Instruc«tion criminelle.

« Art. 17. Les articles 274, 275, 276, 277, 278, 280, 281, 282, 283, « 285, 286, 288, 294, 300, 302 et 304 du dit Code sont communs aux « tribunaux correctionnels jugeant en matière de délits politiques et de << presse.

« Art. 18. Lorsque le prévenu a été déclaré non coupable, le doyen << prononcera, par une ordonnance, son renvoi de la prévention élevée « contre lui, et le tribunal, par un jugement, annulera la citation et tout « ce qui aura suivi, et statuera, s'il y a lieu, sur les dommages-intérêts réclamés par les parties.

◄ Art. 19. Tout jugement de condamnation rendu contre le prévenu ou contre la partie civile, les condamnera aux frais, même envers la partie publique.

« Les frais seront liquidés par le même jugement.

«Art. 20. Le texte de la loi dont on fera l'application contre le pré« venu, sera lu à l'audience par le doyen il sera fait mention de cette << lecture dans le jugement; le texte de la loi et le verdict du Jury y « seront insérés, sous peine de cinq cents gourdes d'amende contre le << greffier.

Art. 21. Le jugement sera exécuté à la requête du Commissaire du « Gouvernement et de la partie civile, chacun en ce qui le concerne. < Art. 22. La partie publique, le prévenu, et la partie civile pourront « se pourvoir en cassation contre le jugement.

Art. 23. Le pourvoi en cassation devra être formé, dans les trois

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