ces articles veut que la notification d'un tel arrêt aux parties emporte de plein droit sursis au jugement du procès. De là il résulte que c'est la connaissance réelle qu'ont les juges de la demande en suspicion légitime qui les oblige à surseoir. Si en cette matière, aucune disposition législative ne prescrit au greffier du tribunal qu'on veut dessaisir l'obligation de recevoir une déclaration qui est de nature à atteindre le même but que l'arrêt sus énoncé, il est néanmoins incontestable que dès qu'un tribunal est convaincu soit par un arrêt de soit communiqué, soit par un acte libellé, qu'une récusation en masse est élevée contre lui, la probité qui distingue essentiellement les magistrats, exige qu'ils s'abstiennent de juger jusqu'à décision du tribunal régulateur. Procéder contrairement à ces règles, ce serait s'exposer à la prise à partie, D'ailleurs, une jurisprudence constante relative aux principes ci-dessus exprimés, est suivie par plusieurs tribunaux, notamment par ceux du Cap Haïtien, des Gonaïves, des Cayes, de Jérémie et du Port-au-Prince. Cass. 18 Juin 1860. 2 Lorsqu'assigné au tribunal correctionnel pour avoir outragé le Secrétaire d'Etat de la justice, l'avocat inculpé a déclaré élever une suspicion légitime contre les membres du tribunal, à l'exception du doyen, si ce tribunal n'a pas cru devoir s'abstenir, en présence de cette déclaration seulement, de connaître de la cause, et a pourtant, par jugement par défaut, condamné l'avocat à un an d'emprisonnement; si ensuite, sans avoir attendu l'arrêt de soit communiqué, le même tribunal a annulé le jugement par défaut, ordonné que les choses seront remises comme elles étaient avant sa décision, déchargé l'inculpé des condamnations prononcées contre lui, et déclaré surseoir jusqu'à ce qu'il intervienne décision du tribunal de cassation, ces faits offrent de suffisants motifs pour accueillir la demande en suspicion légitime. · Cass. 10 Nov. 1879. 3 Ce n'est qu'en présence de l'arrêt de soit communiqué prévu par l'art. 418 du C. d'Inst. crim., qu'un tribunal contre lequel une suspicion légitime a été élevée, doit surseoir au jugement du procés dont il est saisi. C'est donc à tort qu'un tribunal correctionnel a cru devoir s'arrêter devant la simple déclaration de la partie qui s'est réservée de fournir ses griefs au tribunal de cassation et qui n'en a rien fait. Cass. 17 Nov. 1879. - Art. 419. Lorsque, sur la simple requête, il sera intervenu arrêt qui aura statué sur la demande en règlement de juges, cet arrêt sera, à la diligence du Commissaire du Gouvernement près le tribunal de cassation, et par l'intermédiaire du Grand-Juge, notifié à l'officier chargé du Ministère public près le tribunal ou le magistrat dessaisi. Il sera de même notifié au prévenu ou à l'accusé, et à la partie civile, s'il y en a une. Inst. crim. 117, 425, 435. Art. 420. Le prévenu ou l'accusé et la partie civile pourront former opposition à l'arrêt dans le délai de trois jours, et dans les formes prescrites par le chapitre II de la loi No 5, pour le recours en cassation. Inst. crim. 1, 53, 417, 418, 424, 428, 436. 1 L'art. 420 du C. d'Inst. crim. n'est nullement applicable à une opposition formée contre une demande en renvoi. L'art. 438 ne reconnaît comme communs à une telle demande que les art. 414, 417, 2o alinéa, 418, 421, 422, 423, 424, 425 et 428, qui se trouvent placés sous la rubrique des règlements de juges. Cass. 31 Juillet 1860. Art. 421. L'opposition dont il est parlé au précédent article, entraînera de plein droit sursis au jugement du procès comme il est dit en l'article 418. Art. 422. Le prévenu qui ne sera pas en arrestation, l'accusé qui ne sera pas retenu dans la maison de justice, et la partie civile ne seront point admis au bénéfice de l'opposition, s'ils n'ont antérieurement, ou dans le délai fixé par l'article 418, élu domicile dans le lieu où siège l'une des autorités judiciaires en conflit. — C. civ. 98. A défaut de cette élection, ils ne pourront non plus exciper de ce qu'il ne leur aurait été fourni aucune communication, dont le poursuivant sera dispensé à leur égard. Inst. crim. 55, 78, 98, 163. Art. 423. Le tribunal de cassation, en jugeant le conflit, statuera sur tous les actes qui pourraient avoir été faits par le tribunal ou le magistrat qu'il dessaisira. Inst. crim. 315, 418, 428. 1 D'après le texte et le sens de l'art. 423 du C. d'Inst. crim., dont la disposition est conçue dans les termes les plus absolus, le législateur a investi le tribunal de cassation d'une attribution spéciale. A la vérité, il l'autorise, en jugeant la suspicion légitime, à statuer sur tous les actes; la loi n'établit aucune distinction; dès lors, on ne peut créer des exceptions au-delà de ses prescriptions. Cass. 18 Juin 1860. - 2. D'après le texte de l'art. 423 du C. d'inst. crim., le tribunal de cassation est investi d'une attribution toute spéciale qui lui donne le droit, en jugeant le conflit, de statuer sur tous les actes, qui pourraient avoir été faits par le tribunal qu'il dessaisit. Cass. 8 sept. 1869. Art. 424. Les arrêts rendus sur des conflits ne pourront pas être attaqués par la voie de l'opposition, lorsqu'ils anront été précédés d'un arrêt de soit communiqué, dùment exécuté. Inst. crim. 418, 425. Art, 425. L'arrêt rendu, ou après un soit communiqué, ou sur une opposition, sera notifié aux mêmes parties et dans la même forme que l'arrêt qui l'aura précédé.- Proc. civ. 78. — Inst. crim. 419. Art. 426. Lorsque le prévenu ou l'accusé, l'officier chargé du Ministère public, ou la partie civile, aura excipé de l'incompétence d'un tribunal ou d'un juge d'instruction, ou proposé un déclinatoire, soit que l'exception ait été admise ou rejetée, nul ne pourra recourir au tribunal de cassation pour être réglé de juges, sauf à se pourvoir en cassation, s'il y a lieu, contre le jugement rendu. Proc. civ. 171. Inst. crim. 315. Art. 427. Lorsque deux tribunaux de police simple seront saisis de la même contravention ou de contraventions connexes, les parties seront réglées de juges par le tribunal civil auquel ils ressortissent l'un et l'autre, sauf le recours en cassation; et s'ils ressortissent à différents tribunaux, elles seront réglées par le tribunal de cassation, ainsi qu'il est dit en l'art. 415. 1. Lorsque par arrêt un tribunal correctionnel est légalement saisi du procès contre un accusé de vol, il peut même, d'après l'art. 168 du C. d'Inst. crim., appliquer la peine de simple police, si la partie civile ou la partie publique ne demande le renvoi de la cause. De ce que le Ministère public en ait formellement demandé le renvoi et que le tribunal ait jugé que le fait rentrait dans le cas de l'art. 408 du C. Pén., il ne s'ensuit pas qu'il puisse changer l'ordre attributif de juridiction, en renvoyant l'accusé devant tout autre tribunal de police que celui de son ressort; car le tribunal de police du ressort du tribunal correctionnel de renvoi est seul habile à connaitre de l'affaire. En outre, il y aurait évidemment contrariété dans les décisions, d'où résulterait un conflit négatif, si le tribunal de police d'un ressort autre que celui du tribunal correctionnel, au lieu d'optempé rer à la réquisition du Ministère public tendant à surseoir jusqu'à l'avis du Grand-Juge, s'était au contraire déclaré incompétent par un jugement. Lorsqu'il n'en est pas ainsi, on ne peut dire que le cours de la justice soit interrompu par cela seul que ce dernier tribunal n'a pas cru devoir prendre connaissance de l'affaire. Son jugement seu! pourrait constituer un conflit dans le sens de la loi, Cass. 30 nov. 1840. Art. 428. La partie civile, le prévenu ou l'accusé qui succombera dans la demande en règlement de juges qu'il aura introduite, pourra être condamné à une amende qui toutefois n'excédera pas la somme de deux cent quarante gourdes, dont moitié sera pour la partie. Proc. civ. 366. Inst. crim. 1, 53. 417, 418, 420 (1). (1) Voy. 6584. Loi du 10 août 1877, qui règle en monnaie forte, etc. Art. 1, 3. 1. L'art. 375 du C. d'Instr. crim. énumère les cas susceptibles de donner lieu à récusation. Mais en droit, la récusation en masse contre un tribunal équivaut à une demande en suspicion légitime. Donc, celui qui a récusé quatre juges et suppléants du tribunal civil, et qui, malgré la sommation à lui faite n'a point déféré sa demande en cassation, et si en outre il résulte des faits par lui allégués que cette récusation est non pertinente, la dite récusation qui est assimilée à une demande en renvoi, n'a eu d'autre but que de suspendre le cours de la justice; elle est déclarée inadmissible et le demandeur condamné à l'amende. Cass. 18 mars 1861. 2. L'art. 428 du C. d'Inst. crim. contient une disposition toute spéciale à la partie civile, le prévenu ou l'accusé qui succombera dans sa demande en réglement de juges qui est commun aux demandes en renvoi d'un tribunal à un autre. On ne trouve dans la loi du 16 octobre 1863 aucune dérogation à l'art. 428, ni d'une manière tacite, ni d'une manière formelle. L'intitulé même de cette loi repousse toute idée que le législateur ait entendu abroger l'art. 428. Ainsi, il y a lieu à prononcer l'amende d'après ce dernier article, et non d'après la loi du 16 octobre 1863. Cass. 6 juillet 1874. CHAPITRE II Des Renvois d'un Tribunal à un autre. Art. 429. En matière criminelle, correctionnelle ou de police, le tribunal de cassation peut, sur la réquisition du Commissaire du gouvernement près ce tribunal, renvoyer la connaissance d'une affaire, d'un tribunal criminel, d'un tribunal correctionnel ou de police, à un autre tribunal de même qualité, d'un juge d'instruction à un autre juge d'instruction, pour cause de sûreté publique ou de suspicion légitime. Ce renvoi peut aussi être ordonné sur la demande des parties intéressées, mais seulement pour cause de suspicion légitime.-Proc. civ. 367 et suiv. Inst. crim. 430 et suiv. (*). (*) L'art. 429 du présent C. d'inst. crim. reproduit textuellement l'art. 439 du C. d'Inst. crim. de 1826. EXTRAIT de la loi du 15 septembre 1874, additionnelle à celle « Art. 11. Outre les attributions conférées par la loi au tribunal de > cassation, ce tribunal connaît encore de la suspicion légitime résultant > de la récusation en masse des juges d'un tribunal, et il y sera procédé 1. Lorsque par son arrêt sur suspicion légitime, le tribunal de cassation renvoie un accusé devant le tribunal criminel et non devant le juge d'instruction, si le Commissaire du gouvernement près le tribunal de renvoi en saisit le juge d'instruction et que l'affaire soumise à la Chambre du Conseil, la majorité de cette Chambre se décline, motivant son déclinatoire sur la lettre de l'arrêt; comme il s'agit de savoir le véritable sens de l'arrêt de renvoi sans s'attacher judaïquement à ses expressions, la Chambre du Conseil doit statuer sur le fait impute à l'accusé. Cass. 8 octobre 1835. 2. S'il y a négligence ou tout autre cause qui n'entre point dans les motifs indiqués par la loi pour les demandes en renvoi pour cause de suspicion légitime, il n'appartient point au tribunal de cassation d'en connaître, et par suite d'en ordonner le renvoi pour ces causes. Cass. 17 oct. 1842. 3. Le recours en cassation est soumis aux formalités prescrites par l'art. 151 de la loi sur l'enregistrement. Or, la requête par laquelle le juge d'un tribunal civil demande aux juges du tribunal de cassation de désigner un autre tribunal pour ouvrir une action contre son épouse condamnée pour adultère, et contre son complice, n'étant pas revêtue de la formalité exigée par le susdit article, ce qui arrête le Ministère public dans l'examen de sa demande, constitue une irrégularité qui doit faire rejeter la demande. Cass. 2 déc. 1814. 4. Il ressort des principes posés au ch. 11 de la loi n° 7 dudit C. d'Inst. crim. qui régissent la matière, qu'on ne peut demander le renvoi d'un tribunal à un autre que pour des affaires certaines et déterminées ; soit qu'il s'agisse d'instances déjà liées devant le tribunal qu'on veut dessaisir, soit dans le cas d'actions qu'on se dispose à intenter. Or, la requête qui parle d'une manière vague et indéterminée de procès naissants ou à naitre que le demandeur aurait à soutenir devant le tribunal civil, ne peut être admise. Cass. 13 nov. 1848. 5 La cause de suspicion légitime ne peut être appréciée que lorsque les récusations s'étendent sur les membres d'un tribunal, en tel nombre qu'il ne peut se composer légalement. Mais si rien ne prouve que le juge de paix ait été récusé par la partie demanderesse, en suivant les formes tracées par la loi sur la matière, et qu'en admettant même cette récusation, il resterait encore deux suppléants qui pourraient connaitre de l'affaire, la demande en suspicion légitime doit être rejetée. Cass. 1er Oct. 1849. 6 Bien qu'il y ait eu une récusation proposée contre les magistrats >> conformément au Code de Procédure civile concernant la récusation » des juges. >> Cette loi a été abrogée par l'art. 1er de la loi du 6 octobre 1876, qui annule toutes les lois, etc. |