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faut faire de ces deux cas, c'est que pour l'opposition, le législateur n'accorde à l'opposant qu'un délai de 24 heures, et pour le pourvoyant un délai de trois jours francs. Il donne à la première procédure une marche toute différente de la seconde, en permettant au tribunal de cassation de réviser entièrement le procès, d'entrer dans le fond, tandis que le tribunal est circonscrit par l'art. 205 précité, lui donne la faculté de n'examiner le mérite de l'ordonnance que dans les trois cas qu'il spécifie. D'où il suit que le demandeur, en faisant un pourvoi en cassation, s'est écarté des prescriptions impératives de l'art. 115 qui n'exige, dans l'espèce, qu'un acte d'opposition, en l'absence duquel le tribunal ne se trouve pas légalement saisi de la demande formée contre l'ordonnance de non-lieu. Cass. 3 juin 1874. 56 Aux termes de l'art. 115 du C. d'Inst. crim. modifié, la partie civile n'a que 24 heures pour s'opposer à l'exécution d'une ordonnance de non-lieu. Or, si l'ordonnance attaquée a été signifiée le 14 mars, et que ce n'est que le 16 que la partie civile a, par acte d'huissier, déclaré au Commissaire du Gouvernement qu'elle s'oppose à ladite ordonnance, elle s'est rendue inhabile à faire apprécier ses moyens d'opposition, et l'opposition doit être rejetée. Vainement la partie civile dit-elle, dans une pièce trouvée au dossier, que le 15 étant un dimanche, jour férié, la déclaration d'opposition a pu être valablement faite le 16, car la loi ne distingue pas entre les jours fériés et les jours non fériés. Cass. 15 juillet 1874. 57 Lorsque de cinq témoins entendus, quatre ont dénié les faits avancés contre les prévenus, et qu'un seul a confirmé ces faits, c'est avec raison que l'ordonnance attaquée a déclaré n'avoir lieu à suivre contre les prévenus, un seul témoin, en droit, n'étant pas considéré comme témoin : unus testis, nullus testis. Cass. 25 oct. 1874.

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58 C'est sans raison que la Chambre du Conseil du tribunal civil a déclaré, pour rendre son ordonnance de non-lieu, que le prévenu était dans le cas de la légitime défense, lorsque nulle part dans l'instruction on ne voit que l'accusé ait eu ses jours menacés, bien qu'il résulte du certificat du médecin que la victime ait succombé aux coups que lui a donnés l'accusé. Cass. 23 nov. 1874.

59 Lorsque l'ordonnance relève que l'une des parties est depuis longtemps fermière et qu'elle paye régulièrement à la bailleresse le prix de sa ferme, si plus tard il s'élève contestation entre cette bailleresse et une tierce personne à l'occasion du droit de propriété de la terre occupée par la fermière, cette contestation ne peut donner lieu qu'à une action civile et non à une action criminelle. D'où il suit que la Chambre du Conseil du tribunal civil a bien fait de déclarer qu'il n'y avait pas lieu à suivre contre la bailleresse et sa fermière. Cass. 30 nov. 1874.

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60 De ce que l'avocat de la demanderesse en cassation ne se soit pas servi du mot technique de la matière en déclarant se pourvoir en cassation, au lieu de déclarer s'opposer à l'exécution de l'ordonnance de non

lieu, il ne s'ensuit pas que sa déclaration doive être repoussée n'étant entachée d'aucune nullité substantielle, mais contenant une irrégularité qui a été réparée, puisque loin de suivre les cinq jours fixés par le code pour attaquer les ordonnances de renvoi au tribunal criminel, il a fait, au contraire, sa déclaration dans les 24 heures, tel que le prescrit l'art. 115 du C. d'Inst. crim. qui détermine les formalités qu'on doit observer dans l'opposition faite contre l'exécution des ordonnances de non-lieu. D'où il suit qu'un pareil pourvoi est recevable en la forme. Cass. 24 mai 1875.

61 Lorsqu'il résulte de la déposition des témoins entendus dans la cause, qu'il y a eu de nombreuses et grandes variations, de tels faits ne sauraient établir une conviction unanime dans les juges de la Chambre du Conseil. Ces variations mêmes faisaient soulever des indices graves et suffisants d'inculpation que l'audience publique en ses débats solennels est seule habile à examiner, concorder et éclaircir: le tribunal de cassation dit la prévention de culpabilité suffisamment établie et les art. 115 et 119 du code d'Inst. crim. violés. En conséquence, casse et annule l'ordonnance de non-lieu dénoncée, dit qu'il y a lieu d'accuser, et renvoie le prévenu en état d'accusation, etc. Cass. 2 août 1875.

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Mais si ces

62 La prévention préjuge l'existence du délit, mais elle ne l'établit pas. Elle prend naissance dans la dénonciation, dans les indices, dans la présomption, toutes choses que l'instruction seule est habile à éclaircir, concorder et asseoir en faits irrécusables, sinon rejeter. préliminaires ne suffisent pas pour asseoir la conviction, ils ne doivent pas être négligés. Agir autrement, c'est ne pas tenir compte de la vindicte publique, c'est faire violence à l'action publique. Ainsi, une importation illicite d'armes, de munitions de guerre, à l'aide de faux connaissements, au mépris des lois de la matière, étaient de graves préventions. Dès lors, les auteurs ou complices, devaient être présumés se trouver dans le capitaine du navire introducteur, et dans l'importateur, surtout quand il ne s'était pas présenté d'autres réclamants consignataires que ce dernier. C'est un excès de pouvoir que de les renvoyer absous, sans instruction préalable. · Cass. 18 août 1875.

63 La présomption ne peut être invoquée, en droit criminel, si elle n'est appuyée de faits qui concourent à la rendre probante et à la faire servir comme commencement de preuve. Une prévention uniquement basée sur la présomption est infirme et insuffisante pour amener une mise en accusation. Cass. 6 oct. 1875.

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L'opposant qui ne s'est, d'aucune manière, constitué partie civile dans la cause, ne peut, ni ne doit se targuer de la notification qui lui a été faite illégalement par le Ministère public de l'ordonnance de nonlieu de la Chambre du Conseil. Cette notification, loin de lui profiter, est nulle et non avenue. - Cass. 29 nov. 1875.

65 Lorsqu'aucun acte au dossier ne prouve que le demandeur en

cassation ait pris, conformément à l'art 53 du C. d'Inst. crim., la qualité de partie civile, il est sans droit et sans qualité pour s'opposer à l'exécution d'une ordonnance de non-lieu. Et si cette ordonnance de non-lieu lui a été signifiée, cette signification n'a pu avoir été faite que par erreur, car elle ne pouvait se faire qu'au plaignant partie civile. En supposant, au surplus, que le plaignant se fut constitué partie civile, il n'aurait pu par son opposition faire amender l'ordonnance de non-lieu, puisque le fait d'enlèvement de mineur suppose fraude, ruse de la part de celui qui l'exerce, lorsqu'au contraire la ruse a été pratiquée par le mineur luimême qui est venu implorer du secours, en se faisant passer pour orphelin et sans asile. Cass. 6 sept. 1876.

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66 Aux termes de l'art. 115 du C. d'Inst. crim., la partie civile peut s'opposer, dans les 24 heures, à la mise en liberté du prévenu quand il a été rendu en sa faveur une ordonnance de non-lieu. S'il est vrai que la partie civile ne se présente au procès que pour soutenir ses intérêts pécuniaires, il résulte qu'elle a le droit de s'opposer à l'exécution d'une ordonnance de mise en liberté provisoire sous caution, si elle s'aperçoit que le fait reproché au prévenu peut entraîner une peine afflictive et infamante et non une peine correctionnelle, puisque le prévenu ainsi mis en liberté pourrait s'évader et rendre par là illusoire les dommages-intérêts que l'on pourrait réclamer contre lui, et que se présentant même pour être jugé au correctionnel au lieu d'être jugé au criminel, il est évident que les dommages-intérêts que l'on pourrait adjuger à la partie civile seraient beaucoup moins considérables, ce qui préjudicierait à ses intérêts civils. Partant, la partie civile peut s'opposer à l'exécution d'une ordonnance de mise en liberté provisoire. Cass. 13 déc. 1876.

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67 Le tribunal de cassation n'ayant été saisi que d'une opposition à une ordonnance de mise en liberté provisoire et non d'une question de compétence, et la partie civile ne s'étant pourvue contre l'ordonnance de renvoi au correctionnel, rendue le lendemain de l'ordonnance de mise en liberté provisoire sous caution, ordonnance dont elle n'a eu connaissance qu'après le pourvoi, il n'est pas vrai de dire qu'elle soit sans intérêt pour s'opposer à l'ordonnance de mise en liberté provisoire. Cass. 13 déc. 1876. 68 Les Juges de la Chambre du Conseil, saisis de la connaissance de la procédure criminelle introduite contre un prévenu de faux en écriture authentique, ayant examiné les actes de l'instruction ainsi que les faits et les circonstances de la prévention et reconnu qu'il ne résulte point de l'instruction des charges suffisantes pour motiver le renvoi du prévenu devant un tribunal de répression, ont rendu leur ordonnance par laquelle il a été déclaré qu'il n'y a ni crime, ni délit, ni contravention, qu'en conséquence il n'y a pas lieu à suivre contre ledit prévenu, le renvoie de la prévention. La Chambre du Conseil rendant ainsi sa décision, n'a commis aucun empiètement sur les attributions du jury. Au contraire, il ressort

de l'ordonnance attaquée que la Chambre du Conseil a bien apprécié le fait, est resté dans le cercle de ses attributions et s'est conformé aux prescriptions de l'art. 115 du C. d'Inst. crim. Cass, 28 mai 1877.

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69 Il est du devoir du Ministère public près un tribunal de dénoncer une ordonnance qui aurait par erreur qualifié délit un fait reconnu par la loi. Un individu, par exemple, qui aurait commis le crime de meurtre et qui serait renvoyé au tribunal correctionnel, obtenant sa mise en liberté provisoire sous caution, pourrait bien ne pas se présenter pour être jugé ; il rendrait par là vaine la juste application des lois. Il importe donc que les prévenus soient renvoyés devant la juridiction compétente pour apprécier les faits dont ils ont été reconnus prévenus. Ainsi, après délibération, le tribunal de cassation dit que le Ministère public est en droit de se pourvoir contre une ordonnance qui a improprement qualifié le fait qui s'y trouve. Cass. 17 sept. 1877.

70 La partie n'ayant été que partie plaignante et ne s'étant pas constituée partie civile, pas n'était besoin de lui signifier l'ordonnance de nonlieu rendue en faveur de son adversaire. Cass. 29 oct. 1877.

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71 L'art. 115 du C. d'Inst. crim. ne prête pas à l'interprétation tendant à dire que la Chambre du Conseil n'a aucun pouvoir de juger du mérite des charges qui peuvent se trouver contre un inculpé dans aucune affaire. Son texte clair et précis ne laisse aucun doute sur le pouvoir donné à la Chambre du Conseil d'apprécier d'une manière souveraine les charges portées contre un inculpé. Ce pouvoir est absolu; le législateur n'y porte aucune restriction. Cass. 1er avril 1878.

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72 L'art. 115 du C. d'Inst. crim. modifié donne un large pouvoir aux Juges de la Chambre du Conseil. Il suffit qu'ils reconnaissent que le fait ne présente ni crime, ni délit, ni contravention, ou qu'il n'existe aucune charge contre l'inculpé pour qu'ils en ordonnent la mise en liberté. On n'a pas le droit de critiquer le résumé qu'ils font de la déposition des témoins pour établir leur conviction. Cass. 12 juin 1878.

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73 Aucune disposition du C. d'inst. crim. ne prescrit l'insertion, dans une ordonnance de non-lieu, du réquisitoire du Ministère public. Il suffit que cette ordonnance constate, conformément à l'art. 110 du C. d'Inst. crim., que le Commissaire du Gouvernement, après avoir déposé sur le bureau sa réquisition écrite, s'est retiré ainsi que le greffier. Dès lors, en l'absence de tous témoins et à défaut d'autres indices que ceux résultant du procès-verbal produit, la Chambre du Conseil du tribunal civil, en rendant son ordonnance de non-lieu sans y insérer le réquisitoire du Ministère public, n'a pas violé les art. 110, 115 et 119; elle en a fait, au contraire, une saine application. Cass. 23 déc. 1878.

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74 L'opposition mentionnée à l'art. 115 du C. d'Inst crim. ne saurait, en aucun cas, être formée par la partie plaignante qui ne figure pas au procès, ni par les prévenus renvoyés hors de cour, qui, d'une part, pour ce qui les concerne personnellement, sont sans intérêt, et partant,

sans action; d'autre part, sans qualité pour agir dans l'intérêt de la vindicte publique. Cass. 3 mars 1879.

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75 — S'il est vrai que le pourvoi en cassation contre les jugements en dernier ressort rendus par les tribunaux criminels, correctionnels, ou de police, ne saurait être confondu avec l'opposition aux ordonnances de la Chambre du Conseil ; que le pourvoi est régi par l'art. 305 du C. d'Inst. crim., tandis que l'opposition ne peut être formée que dans les termes de l'art. 115; il n'est pas moins constant que la différence qui existe entre ces deux voies résulte beaucoup moins des termes qui peuvent servir à les désigner que dans la nature même des décisions qu'elles ont en vue de réformer, et par suite, des conditions et du mode dans lesquels elles sont exercées. Ainsi, bien que le Commissaire du Gouvernement près le tribunal civil se soit servi du terme de pourvoi, il est évident que c'est une opposition qu'il a entendu faire à l'ordonnance, puisqu'il a exercé son recours dans les 24 heures, et conformément à l'art. 115 du C. d'Inst. crim., et non en se basant sur les dispositions de l'art. 305 du susdit code. Cass. 28 avril 1879.

76 - Lorsqu'il est constaté que c'est bien dans les 24 heures que l'opposition a été formée par le Commissaire du Gouvernement à l'exécution de l'ordonnance de la Chambre du Conseil, et que ce ne sont que les pièces qui n'aient pas été envoyées dans ce délai, comme aux termes de l'art. 115 du C. d'Inst. crim., cette irrégularité n'entraîne pas la déchéance et ne peut donner lieu qu'à une amende contre le greffier et à prise à partie contre le Ministère public, ce moyen ne peut être proposé en cassation. Cass. 30 avril 1879.

77 - S'il est vrai que c'est au Ministère public, qu'aux termes de l'art. 115 du C. d'Inst. crim., il appartient de former opposition à une ordonnance de la Chambre du Conseil, rien ne s'oppose à ce que le Secrétaire d'Etat de la justice appelé, en vertu de la loi, à exercer un contrôle sur les actes des Commissaires du Gouvernement, ne leur transmette les instructions qu'il juge nécessaire dans l'intérêt de la bonne marche de la procédure. Par cette intervention, il ne fait qu'assumer,dans ce cas, une part de la responsabilité incombant au Ministère public.- Cass. 30 avril 1879, 78 Pour ne s'être pas conformé aux dispositions rigoureuses des art. 115 et 53 dd C. d'Inst. crim. en déclarant formellement se constituer partie civile soit dans sa plainte, soit par un acte subséquent, la partie plaigrante s'est elle-même rendue inhabile et sans qualité pour exercer le droit de s'opposer au chef de l'ordonnance de la Chambre du Conseil qui renvoie le prévenu hors de cour et de procès. Cass. 8 mars. 1880. 79- En Chambre du Conseil, le non-lieu ne peut être prononcé qu'à l'unanimité des voix. Dès qu'il y a dissidence) ou doute sur l'existence ou l'absence du délit, l'instruction par cela seul, est reconnne imparfaite, et il appartient alors au tribunal compétent, en son audience publique, de la mettre au grand jour de la vérité. Cass. 24 mai 1880.

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