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Un délit de cette nature ne peut être jugé par les tribunaux correctionnels que par les art. 181 et 185 du C. Pénal (de 1826) seuls où les législateurs ont prévu les outrages qui pourraient être faits aux fonctionnaires publics dans l'exercice de leurs fonctions ou à l'occasion de cet exercice. Cass. 4 Mars 1833.

2 La distinction entre l'injure et la diffamation ressort d'une manière positive du rapprochement des art. 313 et 320 du Code Pénal. Pour que les tribunaux correctionnels puissent ne trouver que de simples injures dans un écrit, il faut qu'il ne s'y rencontre l'imputation d'aucun fait précis, la précision des faits imputés étant le caractère distinctif du délit de diffamation. En fait, lorsque dans les écrits qui ont donné lieu à l'action en diffamation sur laquelle est intervenu le jugement attaqué, il a été imputé au plaignant, notamment « d'avoir dépouillé illégalement son adversaire d'un reste de fortune de pauvre qu'elle avait mis en réserve » etc.; « d'avoir passé tout son bien sous le nom de son épouse » etc. ; < d'être prévenu d'un vol considérable, ayant été renvoyé par une Chambre du Conseil, avec ordonnance de prise de corps » etc. ; ces expressions portant sur des faits ainsi précisés et présentant si évidemment le caractère de la diffamation, il ne pouvait appartenir au pouvoir d'appréciation de la Cour impériale de ne pas les distinguer des injures et expressions outrageantes dont sont remplis les susdits écrits publiés dans une feuille publique. En admettant d'ailleurs que ces écrits ne contiendraient que des expressions plus ou moins injurieuses, la Cour Impériale, l'ayant ainsi reconnu, il y avait nécessairement lieu à l'art. 320 du Code Pénal. Et dans le cas même où il y aurait eu provocation de la part du plaignant, elle aurait pu tout au plus être admise comme circonstances atténuantes, mais non comme excluant toute criminalité des faits d'injure et de diffamation. En déclarant donc dans le dispositif du jugement qu'il n'y avait dans cette affaire ni délit, ni contravention de police, la Cour Impériale a commis un excès de pouvoir et manifestement violé les art. 313 et 320 du Code Pénal. - Cass. 21 Oct. 1850.

3 Si, d'après le vœu de l'art. 313 du Code Pénal, l'imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur et à la considération d'un individu constitue le délit de diffamation, il est néanmoins nécessaire, pour qu'il y ait lieu à l'application de la peine que prévoit l'art. 316, que les éléments qui déterminent la diffamation impriment au fait imputé un caractère punissable. Ainsi, en admettant qu'un saisi eût publiquement allégué que le gardien judiciaire eût mis à son usage les objets confiés à ses soins, cette allégation considérée comme l'imputation d'un vice déterminé, serait susceptible de donner lieu non à une peine d'emprisonnement, mais à celle d'une amende. Cass. 26 Fév. 1861.

Art. 321. Toutes autres injures ou expressions outrageantes qui n'auront pas eu ce double caractère de gravité et de publicité, ne C. PÉN.

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donneront lieu qu'à des peines de simple police. Inst. crim. 124 et suiv. C. Pén. 1, 283 et suiv. (*).

1 Lorsque de l'examen des pièces de la procédure et notamment du dire du Commissaire du Gouvernement près le tribunal civil, ainsi que son réquisitoire, il est constant que le prévenu, en proférant contre un lieutenant de la police rurale, des injures étant sur une habitation privée où n'étaient pas présents les cultivateurs mêmes qui avaient été appelés comme témoins, n'a commis qu'une contravention de police, cas prévu par l'art. 330 du C. Pénal (de 1826), et qu'en rendant son ordonnance de renvoi au correctionnel, la Chambre du Conseil a faussement appliqué cet article. · Cass. 25 Mars 1833.

2- Injurier quelqu'un c'est porter atteinte à sa délicatesse, sa probité et son crédit, etc. En cette matière, l'appréciation du juge de police échappe à la censure du tribunal de cassation. Ainsi, lorsque dans des avis publiés dans les journaux, un créancier appelle son débiteur à venir lui solder son compte, cette manière de faire, réprouvée par la société, constitue une injure de la part du créancier envers son débiteur, surtout s'il le signale au public comme un débiteur récalcitrant et de mauvaise foi. Cass. 31 Août 1863.

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3 Le ministère sacré du prêtre est tout de tolérance et de mansuétude. Placé dans une condition exceptionnelle intermédiaire entre Dieu et le commun des hommes, il doit faire preuve de modération et ne point provoquer des scènes qui puissent lui attirer des paroles susceptibles de blesser son caractère. Dire à quelqu'un qu'il est un grand voleur, c'est l'autoriser à repousser ces mots par d'autres de même nature. Si le prêtre pouvait prouver que le juge de paix, en le traitant de voleur, n'avait pas été provoqué, c'était à lui à déférer la cause au tribunal de simple police, parce que là il n'y a qu'un fait qui, manquant de précision, ne constitue qu'une simple injure. Il n'y a donc pas lieu à renvoyer ce juge de paix devant un tribunal de répression. Cass. 6 Juillet 1874.

4 — Les injures ou paroles outrageantes ne constituent un délit que lorsque, entr'autres conditions, elles renferment l'imputation d'un vice déterminé. Mais si dans aucune des pièces du procès on ne voit spécifier les termes par lesquels le juge de paix dénoncé n'aurait profére contre la partie plaignante que des expressions vagues : « des paroles outrageantes et déshonnétes », contenues dans le procès-verbal du commandant de section, ne sont pas de nature à faire ordonner des poursuites. Cass. 21 Juillet 1881.

Art. 322. A l'égard des imputations et des injures qui seraient

(*) L'art. 321 du présent Code Pénal est la reproduction textuelle de l'art. 330 du Code Pénal de 1826.

contenues dans les écrits relatifs à la défense des parties, ou dans les plaidoyers, les juges saisis de la contestation pourront, en jugeant la cause, ou prononcer la suppression des injures ou des écrits injurieux, ou faire des injonctions aux auteurs du délit, ou les suspendre de leurs fonctions, et statuer sur les dommages-intérêts.

La durée de cette suspension ne pourra excéder six mois : en cas de récidive, elle sera d'un an au moins et de trois ans au plus.

Si les injures ou écrits injurieux portent le caractère de diffamation grave, et que les juges saisis de la contestation ne puissent connaître du délit, ils ne pourront prononcer, contre les prévenus, qu'une suspension provisoire de leurs fonctions, et les renverront, pour le jugement du délit, devant les juges compétents.

1 Lorsque dans le premier moyen de son pourvoi le condamné impute au tribunal de cassation d'avoir par un excès de pouvoir fait une extension illégale de l'art. 337 du Code d'Instruction criminelle, et imposé au tribunal de renvoi le texte de la loi et que celui-ci devait appliquer ; qu'il impute aussi à ce dernier tribunal d'avoir rendu un jugement entaché d'illégalité et d'abus de pouvoir, ce jugement, dit-il, ayant été imposé plutôt que loyalement et légalement rendu; ces imputations injurieuses pour le caractère du tribunal de cassation et du tribunal criminel de renvoi, constituent le délit d'outrage prévu et puni par les art. 183 et 187 du Code Pénal. Cass. 20 Avril 1863.

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Art. 323. Les médecins, chirurgiens, et autres officiers de santé, ainsi que les pharmaciens, les sages-femmes, et toutes autres personnes dépositaires, par état ou profession, des secrets qu'on leur confie, qui, hors le cas où la loi les oblige de se porter dénonciateurs, auront révélé ces secrets, seront punis d'un emprisonnement d'un mois à un an. C. Pén. 9, 1°, 26 et suiv., 52, 59, 148.

CHAPITRE II.

Crimes et Délits contre les Propriétés.

SECTION PREMIÈRE.

Vols.

Art. 324. Quiconque a soustrait frauduleusement une chose qui

Proc. civ. 794.

ne lui appartient pas, est coupable de vol. -
1720, 1721, 2044, 2045.
Pén. 24, 274, 326 et suiv.

C. civ. 1087, 1715,

C. co. 605 C.

1 D'après l'art. 324 du Code Pénal, le vol est la soustraction frauduleuse de la chose d'autrui. Or, en déclarant un accusé coupable de vol, sans dire au préjudice de qui il a été commis, le Jury l'a évidemment déclaré coupable de soustraction frauduleuse d'une chose appartenant à autrui, et la Cour criminelle a dû le condamner conformément à la loi. Cass. 13 Fév. 1854.

2 En droit, le vol se constitue de la soustraction et de la fraude. En effet, aux termes de l'art. 324 du Code Pénal, le vol est l'action de celui qui soustrait frauduleusement une chose qui ne lui appartient pas. Il s'ensuit nécessairement qu'il ne peut exister de vol sans la réunion de ces deux conditions. Mais lorsqu'il est établi au procès qu'une vieille chaudière à sucre enfouie dans un terrain que le fermier croyait de sa ferme, a été transportée par ce fermier dans sa guildive, il n'est pas moins évident que si, poursuivi comme auteur de l'enlèvement et de la vente de cette chaudière, le fermier a déclaré qu'il avait pensé qu'elle avait été trouvée sur l'habitation dont il était fermier, et que dans le cas qu'on lui prouvât le contraire il était disposé à en faire la remise au propriétaire; de ces faits il résulte que le jugement correctionnel attaqué ne se trouve point dans la condition prescrite par l'art. 324; car dans aucune de ses dispositions il ne contaste et ne signale la fraude, qui est un des éléments essentiels et constitutifs du vol. La fraude ne consiste que dans le dessein de s'approprier d'une manière clandestine la chose d'autrui tel n'est point le caractère du fait ci-dessus, car il est impossible d'y apercevoir un des délits prévus et qualifiés par la loi. On ne saurait plutôt y voir qu'un fait susceptible de donner lieu à une action civile. Ainsi, il y a dans le jugement attaqué une violation manifeste de l'art. 324 et une fausse application de l'art. 338. Cass. 5 Mai 1856.

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3 Aux termes de l'art. 324 du Code Pénal, le vol se constitue de la soustraction frauduleuse et de la fraude; mais le fait d'avoir soustrait deux robes qui se trouvaient dans un carton confié à l'accusé, ne renferme point les éléments caractéristiques de vol défini par l'art. 324. Ce fait ne peut donner lieu qu'à une action civile. Cass. 22 Juin 1858.

4- Lorsque l'instruction du procès établit que sans avoir été forcé, le prévenu a fait au juge d'instruction l'aveu d'avoir été arrêté au moment qu'il sortait avec le boeuf en question de la barrière de l'habitation où il l'avait caché toute une journée, cet aveu spontané joint aux faits de la cause, a nécessairement donné lieu au tribunal correctionnel d'asseoir sa conviction sur le délit imputé au prévenu. Si, en outre, différentes autres circonstances relevées à la charge de ce prévenu dans ladite instruction, constituent une soustraction frauduleuse et caractéristique du

vol, il n'est pas fondé à dire qu'il y a dans le jugement attaqué fausse interprétation de l'art. 324 du Code Pénal, et par suite, fausse application de l'art. 330 du même Code. Cass. 2 Juin 1862.

5 Si, en matière de vel, la pensée coupable, l'intention frauduleuse est nécessaire pour caractériser, préciser et déterminer le fait punissable, cette pensée coupable, cette fraude, constitutives du délit, une fois appréciées par les juges de la cause, leur jugement ne saurait encourir la censure du tribunal de cassation. Ainsi, le tribunal correctionnel après avoir rassemblé les preuves résultant de l'instruction orale et des pièces produites, ayant reconnu que l'accusé a soustrait frauduleusement les objets compris dans les actes de poursuites dirigées contre lui par la partie publique, son jugement qui a consacré d'une manière précise, comme il en avait le droit; que l'accusé a fait l'enlèvement des dits objets appartenant au plaignant, avec l'intention de se les approprier d'une manière frauduleuse, réunit nécessairement toutes les conditions nécessaires pour faire rentrer le fait dans la catégorie du délit de vol défini et puni par les art. 324 et 330 du C. Pénal. Cass. 29 Sept. 1869.

6 La soustraction non accompagnée de la fraude, ne saurait constituer le vol. En effet, si aux termes de l'art. 324 du Code Pénal, l'individu qui a soustrait frauduleusement une chose qui ne lui appartenait pas est coupable de vol, il s'ensuit évidemment que pour que ce délit soit punissable conformément à la loi il faut nécessairement qu'il y ait, non-seulement la soustraction, mais la fraude qui constitue la criminalité dans le fait d'enlèvement de la chose d'autrui. D'où il suit que le tribunal dont émane le jugement attaqué qui a condamné l'accusé comme coupable de l'enlèvement d'un bœuf appartenant au plaignant, et ses co-accusés comme complices, sans énoncer dans les motifs dudit jugement la circonstance de la fraude qui donne le caractère légal au vol, et qui n'a pas non plus exprimé les éléments constitutifs de la complicité, en l'absence de ces conditions essentielles, ce tribunal a manifestement contrevenu aux art. 44, 45, 324 et 330 du Code Pénal. Cass. 14 Nov. 1870.

7- Il est de principe que l'individu qui s'est emparé, avec le dessein de se l'approprier, d'une chose qu'il a trouvée et qu'il sait appartenir à autrui, se rend coupable de la soustraction que punit la loi pénale. Or, lorsqu'il est constaté par jugement du tribunal correctionnel, sur l'appel d'un jugement de simple police, que l'accusé a gardé avec l'intention de se l'approprier, une douzaine de mouchoirs qu'il prétend avoir trouvée, sans l'avoir remise au propriétaire ou à la police, l'art. 2044 du Code civil ne pouvait être d'aucune influence à la cause. Et bien que les art. 408 et 409 du Code Pénal n'aient pas été invoqués, il appartenait au Ministère public de prendre à cet égard telles mesures que de droit. Les faits ayant trait à la prévention comme ils sont ci-dessus appréciés, tombent nécessairement dans le domaine des premiers juges. Il s'ensuit qu'en confirmant le jugement de simple police, le tribunal correctionnel n'a ni

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