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gistrat réussit à les lui faire payer, il y a là une convention de bonne foi où l'on ne voit rien d'illicite blessant l'ordre public. Certes, ce juge de paix pouvait, par dignité, ne pas s'occuper d'un recouvrement de ce genre; mais il pouvait aussi se laisser guider par l'intérêt lorsque cet intérêt n'est pas en opposition avec son devoir. Dès lors on ne peut lui faire aucun reproche. Cass. 18 Mars 1872.

2 Les greffiers et les officiers ministériels sont des fonctionnaires publics responsables des actes de leur ministère devant la société et devant la loi. Lors donc que d'après les renseignements recueillis par l'instruction, et de l'aveu même du greffier de la justice de paix, celui-ci a exigé mille gourdes pour l'expédition des actes de conciliation, comme cette somme est au-dessus de celle fixée par le Tarif, sa perception est un acte de concussion prévu par la loi. Vainement ce greffier dit-il, pour s'excuser, que cette expédition a été délivrée en dehors de ses heures de bureau. Il est temps que la loi reprenne ses droits et protège les citoyens contre les spoliations iniques commises dans le sanctuaire même de la justice. Donc ce greffier doit être renvoyé devant le Ministère public pour être poursuivi et puni conformément à la loi. Cass. 28 Juillet 1873.

Art. 138. La précédente disposition est applicable à tout fonctionnaire, agent ou préposé, de la qualité ci-dessus exprimée, qui, par offres ou promesses agréées, dons ou présents reçus, se sera abstenu de faire un acte qui entrait dans l'ordre de ses devoirs (1).

Art. 139. Dans le cas où la corruption aurait pour objet un fait criminel, elle sera punie de la même peine que ce fait. C. Pén. 137.

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Art. 140. Quiconque aura contraint ou tenté de contraindre par voies de fait ou menaces, corrompu ou tenté de corrompre par promesses, offres, dons ou présents, un fonctionnaire, agent ou préposé, de la qualité exprimée en l'article 137, pour obtenir, soit une opinion favorable, soit des procès-verbaux, états, certificats ou estimations contraires à la vérité, soit des places, emplois, adjudications, entreprises ou autres bénéfices quelconques, soit enfin tout autre acte du ministère du fonctionnaire, agent ou préposé, sera puni d'un emprisonnement d'un an à trois ans. C. Pén. 9, 1o, 26 et suiv. 28, 43, 137.

Art. 141. Il ne sera jamais fait au corrupteur, restitution des choses par lui livrées, ni de leur valeur elles seront confisquées au profit de la caisse publique. C. Pén. 36, 38 et suiv. 139.

(1) Voy. No 6584. Loi du 10 Août 1877, qui règle en monnaie forte, etc., art. 1, 4o.

C. PÉN.

Art. 142. Si c'est un juge prononçant en matière criminelle, ou un juré qui s'est laissé corrompre, soit en faveur, soit au préjudice de l'accusé, il sera puni de la réclusion, outre l'amende ordonnée par l'article 137. Inst. crim. 176 et suiv. C. Pén. 7, 4°, 10, 20, 21, 33, 36, 143 et suiv.

Art. 143. Si, par l'effet de la corruption, il y a eu condamnation à une peine supérieure à celle de la réclusion, cette peine, quelle qu'elle soit, sera appliquée au juge ou juré coupable de corruption. -C. Pén. 142.

Art. 144. Tout juge ou autorité administrative, qui se sera décidé par faveur pour une partie, ou par inimitié contre elle, sera coupable de forfaiture et puni de la dégradation civique. - Inst. crim. 180 et suiv. C. Pén. 8, 2°, 23, 90, 95, 127 et suiv.

1 S'il est prouvé par les pièces de l'instruction qu'un juge de paix a ordonné la mise en liberté d'un individu légalement incarcéré, sans l'accomplissement d'aucune des conditions énumérées en l'art. 700 du C. de Proc. civ., et s'il est demeuré également constant qu'il ait agi avec l'intention criminelle punissable par l'art. 144 du C. Pén., cet excès de pouvoir qui ne pourrait donner lieu qu'à des poursuites civiles, si la loi prononçait la responsabilité à peine de dommages-intérêts, ne constitue ni crime ni délit. Cass. 26 Août 1839.

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2 C'est à la Chambre des Représentants, non à la Cour de cassation, à connaître de la plainte portée contre un de ses membres et dont les faits constitueraient la forfaiture prévue par l'art. 144 du C. Pén. et punie de la dégradation civique, peine qualifiée infamante par l'art. 8 du même Code. Cass. 1er Oct. 1850.

3 Pour avoir annulé pour des raisons qu'il croyait valables et justes, la saisie arrêt de 150 sacs de café opérée sur leur débiteur par ses créanciers, et pour avoir condamné ces derniers à la somme énorme de 130 mille piastres de dommages-intérêts, les juges du tribunal civil ont fait reposer leur décision sur des appréciations donnant lieu à un mal jugé et résultant de la fausse interprétation et de la fausse application de la loi ; ce que démontre évidemment : 1o l'assimilation qu'ils ont faite du tiers saisi à un sequestre; 2o le fait de reconnaître qu'une saisie d'objets montant à une valeur de P. 3,000 environ, ruinerait le crédit du saisi à l'étranger, crédit supposé de P. 130,000; 3° l'exécution provisoire du jugement, sans caution, s'agissant, dit le jugement, de réparations urgentes, cas non identique à celui qu'ils avaient en vue d'apprécier. Néanmoins, le tout bien considéré, il y a lieu de regretter qu'un tribunal civil jugeant sans nécessité avec une précipitation marquée, n'ait pas cherché à s'entourer d'abord de toutes les lumières qui pourraient éclairer la question, et à s'aider de commentaires qui pouvaient lui faire rectifier des appré

ciations qui ne ressortissaient pas au texte de la loi. - Le jugement comportait en outre des vices et excès de pouvoir qui ne pouvaient donner lieu qu'à ouverture en cassation et non à une action pour fait de forfaiture contre les juges qui l'ont rendu, puisqu'aucune charge suffisante n'est ressortie de l'instruction ordonnée. Rien ne peut donc valablement motiver la mise en accusation de ces juges et de leurs prétendus complices. Cass. 3 Oct. 1877.

S V.

Des Abus d'Autorité.

PREMIÈRE CLASSE.

Des Abus d'Autorité contre les Particuliers.

Art. 145. Tout juge, tout officier du Ministère public, tout administrateur ou tout autre officier de justice ou de police, qui se sera introduit dans le domicile d'un citoyen, hors les cas prévus par la loi et sans les formalités qu'elle a prescrites, sera puni d'une amende de seize gourdes au moins et de quarante-huit gourdes au plus. C. Pén. 10, 36 (1).

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Lorsque, de l'aveu même du juge de paix, celui-ci s'est introduit dans la demeure d'un citoyen et y a pris pour compte d'un créancier des objets que ce citoyen avait achetés et n'avait pas payés, cette saisie est irrégulière pour avoir été pratiquée en dehors des prescriptions de la loi. Par cette conduite, ce juge de paix doit être renvoyé devant un tribunal de répression pour y être jugé conformément à l'art. 145 du C. Pén. Cass. 23 Juillet 1878.

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Lorsqu'il est constant que le Général, commandant d'une commune a, sans les formalités de la loi, pénétré de vive force sur la propriété d'un citoyen pour y arrêter un soldat déserteur et au service de ce citoyen, cet acte ainsi consommé est une violation de l'art. 18 de la Constitution, et met ce général sous le coup de l'art. 145 du C. Pén. — 11 importe peu que la veille de cette violation de domicile, le propriétaire ayant rencontré une patrouille qui conduisait le soldat déserteur, ait dit aux soldats qu'il avait un permis du Chef de ce soldat; il importe peu qu'il ait négligé d'exhiber ce permis quand le commandant de la commune se présenta chez lui. Le refus de livrer le délinquant qui serait de nature à porter atteinte à la discipline militaire, n'autorisait pas ce commandant à pénétrer illégalement et avec des hommes armés sur la propriété de ce citoyen. L'ordre même du commandant de département dont l'officier pré

(1) Voy. No 6584. Loi du 10 Août 1877, qui règle en monnaie forte, etc. art. 1, 4o.

tend se couvrir, tout en prescrivant l'arrestation, chez le propriétaire du soldat déserteur, n'autorisait pas la suppression des formalités légales, la violation, par conséquent, du domicile du citoyen, en cas de refus d'y donner accès au porteur de l'ordre d'arrestation. L'intervention du magistrat compétent devenait dès lors nécessaire. C'est donc sans raison que la Chambre du Conseil a déclaré que ce commandant de commune, en agissant comme il l'a fait, a obéi à l'ordre d'une autorité supérieure. L'ordre d'une autorité supérieure ne peut être exécuté que quand il ne froisse pas les principes de la Constitution, surtout quand il s'agit de fonctionnaires qui, comme les commandants d'arrondissement et de place, sont appelés, par la nature de leurs fonctions, à veiller, sous leur responsabilité personnelle, à l'exécution de la loi. Donc, l'ordonnance de non lieu de la Chambre du Conseil demeure annulée. Cass. 29 Juillet 1878.

3 Le commandant de la place qui a pénétré sur la propriété d'un citoyen pour y arrêter un militaire, encourt la pénalité édictée par l'art. 145 du C. Pén., pour n'avoir pas rempli le vou de la loi. Il n'en serait pas de même si ce fonctionnaire avait pénétré dans le domicile propre du militaire. D'où il suit que le jugement dont est pourvoi n'ayant pas reconnu au général commandant de la place pénétrant de vive force dans le domicile d'un citoyen pour y arrêter un militaire, la qualité d'officier de police ou de justice, a violé le dit art. 145. Cass. 13 Nov. 1878.

Art. 146. Tout juge ou tribunal qui, sous quelque prétexte que ce soit, même du silence ou de l'obscurité de la loi, aura dénié de rendre la justice qu'il doit aux parties, après en avoir été requis, et qui aura persévéré dans son déni, après avertissement ou injonction. de ses supérieurs, pourra être poursuivi, et sera puni d'une amende de quarante-huit gourdes au moins, et de quatre-vingt-seize gourdes au plus, et de l'interdiction des fonctions publiques depuis un an jusqu'à cinq.-C. civ. 9. C. Pén. 8, 2°, 10, 36, 95, 145, 147 et suiv. (1).

1 Conformément à l'art. 146 du C. Pén., un juge de paix ne pourrait être poursuivi pour le déni de justice qu'il a commis, que dans le cas qu'il eût persisté nonobstant avertissement ou injonction de ses supérieurs ; mais s'il n'a reçu aucun ordre ni injonction de ses supérieurs à cet égard, il n'y a pas lieu à suivre contre lui. Cass. 31 Mai 1841.

2 Aux termes de l'art. 146 du C. Pén., pour que les magistrats puissent être poursuivis pour déni de justice, il faut qu'ils reçoivent injonction de leurs supérieurs dans la hiérarchie judiciaire, et qu'ils persé

(1) Voy. No 6584. Loi du 10 Août 1877, qui règle en monnaie forte, etc., art. 1, 40.

vèrent dans leur déni de justice. Mais lorsqu'aucune injonction ou avertissement ne lui ont été faits comme le prescrit l'article précité, la plainte doit être rejetée. Cass. 12 Juillet 1841.

Art. 147. Lorsqu'un fonctionnaire ou un officier public, ou un administrateur, un agent ou un préposé du Gouvernement ou de la police, un exécuteur des mandats de justice ou de jugements, un commandant en chef, ou en sous-ordre, de la force publique, aura, sans motif légitime, usé ou fait user de violences envers les personnes, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, il sera puni, selon la nature et la gravité de ses violences, et en élevant la peine, suivant la règle posée en l'article 159 ci-après. C. Pén. 254 et suiv.

1 Le 1er alinéa de l'art. 149, mentionne les actes qui constituent l'abus d'autorité, mais lorsqu'il n'existe rien de cette nature dans les faits reprochés au Commissaire de police, qu'au contraire d'après le jugement dénoncé et les actes de la cause, il est prévenu d'avoir, à l'occasion de l'exécution d'un mandat d'amener émané du suppléant du juge de paix, usé et fait user, par des soldats de la police, et ceux de la garde de la prison, de violences envers le plaignant, et d'avoir commis un attentat à sa liberté individuelle, ces faits tombent plutôt sous l'application des art. 85, 147 et 159 du C. Pén. D'où il suit qu'en condamnant le Commissaire de police selon le 1er alinéa de l'art. 149, le tribunal correctionnel en a fait une fausse application et violé les art. 147 et 159 du C. Pén. Cass. 17 Déc. 1879.

Art. 148. Toute suppression, toute ouverture de lettres confiées à la poste, commise ou facilitée par un fonctionnaire ou un agent du gouvernement ou de l'administration des postes, sera punie d'une amende de seize gourdes à soixante-quatre gourdes. Le coupable sera, de plus, interdit de toute fonction ou emploi publics, pendant un an au moins et trois ans au plus. - C. Pén. 10, 26, 28, 36, 323 (1).

II CLASSE.

Des Abus d'Autorité contre la Chose publique.

Art. 149. Tout fonctionnaire public, soit civil, soit militaire, tout agent ou préposé du gouvernement, de quelque état et grade qu'il

Voy. No 6584. Loi du 10 Août 1877, qui règle en monnaie forte, etc., art. 1, 40.

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