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de leur propre travail à la part qu'ils avaient aur revenus des sujets. En prenant les arts de ces hommes, ils en prenaient les mœurs, et peu а peu se mêlaient à eux. Dans les premiers temps, lorsqu'ils étaient appelés, ils se tenaient en conférence commune dans un même lieu avec leurs officiers, avec les lords spirituels et temporels; après que des bourgeois et des membres des comnrunes eurent été mandés au parlement, les soldats se séparèrent de leurs chefs; et réunis aux bourgeois, ils délibérèrent avec eux dans un lieu part (1).

Telle est l'origine de la chambre des communes dans le parlement d'Angleterre. Ce n'était pas volontiers que les villes envoyaient des députés, car il fallait qu'elles prissent sur elles les frais de leur subsistance dans ce long séjour, loin de leur travail et de leurs affaires. Ce n'était pas volon

(1) Cette réunion n'eut point lieu tout d'un coup, et pendant quelque temps les bourgeois convoqués résidèrent à part des soldats, comme à part des lieutenans, des aumôniers et du capitaine. Souvent, après avoir répondu aux demandes et accédé aux taxes, ils retourpaient chez eux, quoique le parlement ne fût point dis et que l'armée restât en conférence.

sous,

(Hume's history, chap. x.).

Hers que les députés venaient se présenter, obligés qu'ils étaient de suspendre les occupations qui nourrissaient leurs familles, pour aller déclarer exactement, devant des maîtres dont ils. voyaient toujours le bras levé, combien, sans les faire périr, on pourrait désormais leur ôter du produit de leur peine et de leur industrie (1).

(1300-1400.) La convocation des délégués des communes fut trouvée commode et passa en usage: on ne manquait pas de les appeler toutes les fois, qu'il s'agissait de faire des levées d'argent. Vers le 14o. siècle, l'armée commença à faire des excur sions hors du pays pour acquérir de la terre et du butin. Il fallait pour ces entreprises des armes, des bagages, des provisions. Les bourgeois étaient souvent consultés (2).

A force de voir ses vainqueurs face à face, la bourgeoisie les redouta moins. Elle ne vit plus

(1) No intelligence could be more desagreeable to any borough, than to find that they must elect, or to any individual than that he was elected.

(Hume's history, chap. x.) Richard II fit un statut pour ordonner expressément aux villes de nommer des représentans. (Clarke, ch. rer.)

(2) Les invasions en France, commencèrent vers 1340, sous le commandement d'Édouard II.

Cens. Europ. TOM. IV.

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le conquérant armé exigeant, sous peine de la vie, il lui parut comme un voleur mal assuré, prêt à capituler, et elle songea à faire des conditions. Engagée dans des entreprises industrielles plus étendues, le besoin plus pressant d'avoir en toute occasion des sommes disponibles, la tenait éveillée sur les demandes : elle était plus sensible dans sa propriété. Les députés apportèrent les plaintes de leurs commettans, et se mirent à plaider pour eux. C'est ainsi qu'une institution destinée à favoriser les exactions, allait se retournant contre ceux qui l'avaient appelée à leur aide, et tendait à garantir les hommes subjugués contre la rapacité de leurs vainqueurs (1). Long-temps général de l'armée, le roi, n'avait

(1) During the reign of Henry IV (1400) the house of commons began to assume powers, which had not been exercised by their predecessors. They maintained the pratice of not granting any supply before they received an answer to their petitions; which was a tacit manner of bargaining with the prince.

(Hume's history, chap. xvIII.)

Le premier exemple d'opposition d'un membre de la chambre des communes à une demande d'argent, fut donné par Thomas Morus en 1509. Voyez Barrington, Remarques sur les anciens statuts.

eu qu'à se montrer, qu'à parler, et le peuple sujet se figurant encore à ce seul aspect toutes les horreurs de l'invasion, le ravage, l'incendie le massacre, baissait le front, et se laissait frapper, de crainte que la destruction ne punît aussitôt la moindre résistance (1). C'était la subordination naturelle, celle du faible fléchissant sous la force. Mais quand on fut déjà loin de ́ces temps, quand le souvenir ne les retraça plus que faiblement, quand la terreur cessa d'être la première impression, et qu'on pût raisonner avant de craindre, cette subordination s'effaça. Le vainqueur le sentit ; et pour qu'on ne s'avisât point de se mesurer à lui, et d'attendre l'effet après la mènace, il prêta à ses volontés au lieu de son pouvoir déterminé, une nécessité indéfinie qu'il alla chercher hors de la nature. Du moment que la pensée put venir aux sujets

(1) La province de Northumberland, punie par le conquérant, devait encore, après plusieurs siècles, prẻsenter aux yeux un exemple terrible. Cette contrée de soixante milles d'étendue, avait été si bien châtiée, que, l'exécution finie, on n'y trouvait plus ni une maison, ni un arbre, ni un être vivant. Les troupeaux avaient été 'saisis, les instrumens de travail brisés, et les hommes nus chassés dans les forêts, où ils tombaient par milliers, morts de faim et de froid. (Hume's history, chap. IV.)

de calculer l'action de leurs maîtres, la pensée vint aux maîtres de soustraire leur action à tout calcul.

(1500-1600.) Ils déclarèrent solennellement leur droit, leur droit sacré, leur droit divin. C'était Dieu qui avait tiré l'épée, qui avait vaincu par eux, qui prétendait se maintenir par eux dans sa con'quête. C'est avec cet appui que leur volonté se présentait à l'imagination des subjugués. Et tous se taisaient alors devant un doigt levé vers le ciel, comme autrefois devant une main mise à la poignée du sabre.

Dans la barbarie des premiers temps, cette sanction divine de la propriété conquise avait quelque chose d'utile, en ce qu'elle arrêtait par une force mystérieuse le brigand qui voulait acquérir devant le brigand possesseur, et terminait ainsi les guerres, qui, sans cela, n'eussent jamais eu de fin. Les coutumes juives consacraient ces maximes, et c'est sur leur tradition que fut fondé le dogme moderne de la divinité des puissances. Mais la nouvelle doctrine était loin de ressembler à l'ancienne. Ce n'était plus le propriétaire se tournant vers ceux qui voulaient le déposséder, et leur criant : « Ne regardez pas ma » force et la vôtre; il y a derrière moi quelqu'un plus fort que moi et que vous, qui possède

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