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d'acrimonie au sujet des compensations à apposer pour les sommes perçues en trop par le blessé.

<< Il n'était donc pas prudent de laisser au juge de paix la faculté de déterminer sans restriction et sans appel la date de la consolidation de la blessure.

«Telles sont, Messieurs, les raisons pour lesquelles nous vous proposons d'insérer dans l'article 15 la disposition suivante : « En cas de désaccord sur la date de la consolidation de la blessure, constatée par un certificat médical et fixée ainsi qu'il est dit en l'article 16, le juge de paix est dessaisi et transmet immédiatement le dossier au président du tribunal civil. »

Enfin la Chambre des députés propose d'ajouter à l'article 15 la disposition qui suit :

« Ces décisions pourront être déférées à la Cour de cassation pour violation de la loi. »

En effet, ainsi que le constate un arrêt de cassation du 29 janvier 1901 << la loi spéciale du 9 avril 1898 sur les accidents de travail n'ayant rien statue relativement aux pourvois dont seraient susceptibles les jugements en dernier ressort rendus en pareille matière par les juges de paix, les droits des parties sont demeurés à cet égard sous l'empire de la loi du 25 mai 1838, et par conséquent lesdits jugements ne peuvent être attaqués par la voie du recours en cassation que pour excès de pouvoir. »

La commission du Sénat a pensé, avec la Chambre, qu'il était d'autant plus utile de combler la lacune signalée ci-dessus que la loi de 1898 a donné et devait donner au juge de paix une compétence beaucoup plus étendue qu'en toute autre matière pour juger en dernier ressort.

Section IV. - Allocation d'une provision en cours d'instance.

Les nombreuses difficultés auxquelles peuvent donner lieu soit l'allocation d'une provision en cours d'instance, soit les règlements de compte auxquels cette provision elle-même peut donner lieu lors de la liquidation définitive de l'indemnité, sont expressément résolues par le nouvel article 16.

L'idée dominante dont procède cette disposition nouvelle est que la victime de l'accident ne doit, en aucun cas, cumuler le bénéfice d'indemnités distinctes; elle ne doit obtenir au maximum que la seule indemnité à laquelle elle a droit et si, par l'effet de circonstances spéciales, elle a pu, un temps plus ou moins long, bénéficier d'une indemnité journalière ou provisionnelle supérieure au montant de la rente qui lui est définitivement allouée, elle en doit compte au chef d'entreprise.

C'est à cet objet que répondent les §§ 4 et 5 du nouvel art. 16. Ces sages mesures enlèvent à la victime tout intérêt à prolonger abusivement la durée de l'instance, dans l'unique but de se ménager le plus longtemps possible les avantages d'une situation meilleure que celle à laquelle elle a effectivement droit (1).

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Section V. - Revision des indemnités. Rachat des rentes. Conventions contraires à la loi.

Signalons encore la rédaction nouvelle des art. 19 et 21, le premier relatif à la revision des indemnités, le second concernant le rachat des rentes inférieures à 100 francs.

Spécialement en ce qui concerne la revision, ses conditions d'exercice sont précisées et accompagnées pour le chef d'entreprise d'une faculté précieuse, celle de faire visiter trimestriellement la victime par un médecin de son choix, au cours des trois années durant lesquelles peut s'exercer l'action en revision.

Quant au rachat des rentes inférieures à 100 francs, le texte nouveau dispose que « ce rachat » ne pourra être effectué pour un chiffre inférieur de plus d'un sixième à celui qui résulterait du tarif fixé à l'article 28.

Enfin, il était urgent de protéger les indemnitaires contre les manoeuvres auxquelles ils sont exposés de la part d'intermédiaires peu scrupuleux. Les garanties instituées par la loi du 9 avril 1898 enlèvent aux services des agents d'affaires la meilleure part de leur utilité, et c'est, croyons-nous, avec juste raison que l'article 30 recevrait une addition déclarant « nulles de plein droit et de nul effet les obligations contractées, pour rémunération de leurs services, envers les intermédiaires qui se chargent, moyennant émoluments convenus à l'avance, d'assurer aux victimes d'accidents ou à leurs ayant sdroit le bénéfice des instances ou des accords prévus aux articles 15, 16, 17 et 19»> (1).

Le règlement des frais de justice en matière
d'assistance judiciaire (2).

Exposé des motifs. En accordant la gratuité de la procédure aux plaideurs indigents ou dépourvus d'une fortune suffisante, la loi du 22 janvier 1851 a certainement réalisé un acte de justice sociale; elle n'y est malheureusement parvenue qu'au détriment des plaideurs qui sont obligés de se défendre à leurs frais et ne peuvent jamais obtenir le remboursement des dépenses parfois considérables qui leur ont été imposées pour la sauvegarde de leurs intérêts.

Dans l'application de son principe, chaque jour plus étendu, le droit à l'assistance judiciaire peut ainsi dégénérer en véritables abus dont les inconvénients sont d'autant plus à retenir qu'ils n'atteignent que des plaideurs injustement attaqués.

Dans l'impossibilité légale d'examiner le fond des demandes qui leur sont soumises, les bureaux d'assistance judiciaire sont en effet conduits à faciliter les procès les plus téméraires; et peu importe alors à ceux qui bénéficient de leurs décisions de provoquer ou de

1.

2.

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Cabouat, loc. cit.

- Proposition présentée par MM. Louis Ollivier, Lionce de Castelnau, Groussau, Lamy, Lerolle, Arnal, députés. (Ch. des dep., 14 décembre 1903* annexe, n° 1366).

nécessiter les procédures les plus dispendieuses et les plus aléatoires. Ils savent qu'ils sont prémunis contre tout danger; quelle que soit leur situation, qu'ils soient demandeurs ou défendeurs, si le succès ne correspond pas à leurs espérances, ils ne supporteront aucune charge. Leur imprudence ne peut avoir d'autre résultat que d'impo ser à leurs adversaires des dépenses aussi injustifiées qu'exagérées Ces derniers resteront toujours obligés de payer les honoraires de leurs défenseurs, les émoluments de leurs avoués et tous les autres frais judiciaires dont ils ont dû faire l'avance, sans que le gain de leur procès leur permette d'en poursuivre le remboursement, puisqu'ils ne trouvent en face d'eux qu'un débiteur ou des débiteurs insolvables. C'est ainsi dans sa propre faiblesse que le plaideur indigent trouve à la fois ses forces et son impunité.

Il semblerait qu'en intervenant pour protéger un droit et lui permettre de se développer, l'État ait par là même, contracté l'obligation d'intervenir pour en prévenir ou en réparer les abus. Cependant au point de vue fiscal il serait peut-être excessif de l'obliger, dans tous les cas à rembourser des frais judiciaires dont le contrôle ne lui a pas été réservé. Ce qui serait de toute justice, ce serait qu'il n'en profitât pas.

Les droits d'enregistrement sont parfois considérables; ils représentent en tout cas une grande partie des frais imposés à la solvabilité des plaideurs. L'équité la plus élémentaire exigerait que l'avance n'en fût pas réclamée, et que pour en demander le payement l'État attendit au moins la solution définitive des procès engagés.

Il serait même rationnel, dans le cas où la témérité de l'action serait démontrée, que l'État supportât en partie la responsabilité de la faute qu'il a encouragée en remboursant parmi les frais taxables qui ont été nécessités, ceux que les tribunaux ont spécialement ordonnés, tels que les frais de transport des juges, les frais et honoraires des experts désignés, et les taxes des temoins dont les dépositions auront été retenues. Il lui resterait son recours normal contre les insolvables qu'il a protégés, en cas de retour à meilleure fortune.

Proposition de loi. — Article unique.

10 juillet 1901 est ainsi modifié :

L'article 14 de la loi du

§3. Les actes de la procédure faite à la requête de l'assisté et de toutes les parties en cause sont visés pour timbre et enregistrés en débet.

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$10. Les frais de transport des juges, des officiers ministériels et des experts, les honoraires de ces derniers, les taxes des témoins dont l'audition a été autorisée par le tribunal ou par le juge, et en général tous les frais dus à des tiers non officiers ministériels sont avancés par le Trésor, conformément à l'article 118 du décret du 18 juin 1811. Le§ 6 du présent article s'applique au recouvrement de

ces avances.

En cas de mauvaise contestation de l'assisté judiciaire, le remboursement de ces mêmes frais pourra être autorisé au profit de la partie qui les aura avancés et sera effectué par l'Administration de l'enregistrement sur la présentation de la taxe du Président du tribunal.

Allocation de pensions aux membres de congrégations dissoutes ou non autorisées.

M. Flourens vient de déposer une proposition de loi tendant à l'application des dispositions des lois des 4 et 18 août 1792 (c'est-àdire à l'allocation de pensions), aux membres des congrégations dont les établissements d'enseignement antérieurement autorisés sont fermés ou dont les demandes d'autorisation ont été rejetées et qui ont été par suite frappées de dissolution (1).

<< S'il entre, écrit M. Flourens dans l'exposé des motifs, dans le droit d'un peuple d'interdire, sur le sol national, l'existence de telles ou telles congrégations, il n'entre dans le droit d'aucune société qui prétend au titre de société civilisée, de dire à un individu quelconque: << Je vous exproprie du droit d'exercer la profession qui vous faisait vivre, et je ne vous accorde aucune indemnité. Je vous refuse la liberté du domicile en commun, je vous refuse la liberté du travail. Allez et mendiez, ou mourez de faim. »

« Voilà ce que la Chambre ne voudra certes pas, et voilà pourquoi je lui soumets la proposition de loi dont le texte suit:

<< Article unique. Sont appliquées aux membres des congrégations dont la demande d'autorisation est rejetée et qui sont frappées, par suite, de dissolution, les dispositions des lois des 4 et 18 août 1792 portant allocation de pensions aux membres des congrégations supprimées et des décrets législatifs des 7-16 août de la même année, rendus en exécution desdites lois et fixant la quotité de ces pensions. La jouissance des dites pensions ne pourra, en aucun cas, être cumulée avec l'allocation à laquelle l'ex-congréganiste pourrait avoir droit en vertu du dernier paragraphe de l'article 4 de la loi du 1er juillet 1901. »

1

Ch. des dép., 18 décembre 1903, annexe no 1383.

REVUE DES TRAVAUX LÉGISLATIFS

Les officiers ministériels et la loi sur la presse.

Nous reproduisons ci-après une proposition de loi ayant pour objet d'ajouter les officiers ministériels aux personnes désignées dans l'article 31 de la loi sur la presse du 29 juillet 1881, présentée par M. Devins, député (1).

énu

Exposé des motifs. L'article 31 de la loi sur la presse mère une certaine catégorie de personnes qui, au point de vue de la répression des délits de presse, sont l'objet d'un régime spécial comportant une procédure ou des dispositions différentes de celles qui concernent les simples particuliers diffamés ou injuriés publiquement.

Au nombre des personnes énumérées en cet article 31 figurent d'une manière générale des citoyens investis d'un mandat public, permanent ou temporaire, les jurés et témoins à raison de leurs dépositions, les fonctionnaires publics, les dépositaires ou agents de l'autorité publique, etc.

L'article 35 de la loi du 29 juillet 1881 autorise la preuve des faits diffamatoires, quand ils sont relatifs aux fonctions, contre les personnes énumérées audit article 31, et dit que si la preuve du fait diffamatoire est rapportée, le prévenu « sera renvoyé des fins de la plainte ».

La jurisprudence actuelle, jurisprudence définitivement consacrée par la Cour de cassation, est absolument contraire à l'assimilation des officiers ministériels (avoués, notaires, huissiers, avocats à la Cour de cassation), aux citoyens investis d'un mandat public.

Telle n'était pas l'idée dirigeante du législateur de 1881, qui posait en principe que si les particuliers sont protégés contre les allégations ou imputations de nature à porter atteinte à leur honneur ou à leur considération, alors même que ces allégations ou imputations seraient vraies et indéniables, il n'en est pas de même des allégations produites à l'encontre des hommes publics, lesquelles ne deviennent punissables que si elles sont contraires à la vérité.

Le principe qui domine notre législation libérale de la presse est que les actes des hommes publics peuvent être librement discutés. D'autre part, ceux-ci sont protégés par des pénalités plus sévères que les particuliers lorsqu'ils sont l'objet de calomnies.

Comme il le fait pour les magistrats de l'ordre administratif ou judiciaire, les fonctionnaires, etc., le code pénal (art. 225 et 230) pro

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