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DARIUS rappeller. Mais Pifandre s'avançant parmi la foule, leur demanda s'ils favoient quelque autre moien de fauver la République dans le trifte état où elle étoit réduite. Et, comme ils avouoient que non, il ajouta qu'il s'agiffoit giffoit de fauver l'Etat & non pas l'autorité des loix, aux quelles on pourroit pourvoir dans la fuite; mais que pour le préfent, c'etoit là l'unique voie de parvenir à l'amitié du Roi, & à celle de Tiffapherne. Quoique ce changement déplût fort au peuple, il y confentit à la fin, dans l'efpérance de rétablir un jour la Démocratie, comme Pifandre le promettoit, & ordonna qu'il iroit, fuivi de dix Députés, traiter avec Alcibiade & Tiffapherne: & cependant Phrynique fut révoqué, & l'on en nomma un autre à fa place pour commander la flote.

Les Députés ne trouverent pas Tiffapherne auffi bien difpofé qu'on le leur avoit fait efpérer. Il craignoit les Péloponnéfiens, mais il ne vouloit pas rendre ceux d'Athénes trop puiffans. Sa politique étoit, felon le confeil d'Alcibiade, de laiffer les deux partis toujours en guerre pour les affoiblir, & les confumer l'un par l'autre. Il fe

rendit donc fort difficile. Il demanda NOTHUS. d'abord que les Athéniens lui abandonnaffent toute l'Ionie; enfuite qu'ils y ajoutaffent les îles voifines: & quand on lui eut accordé ces demandes, il exigea encore, dans une troifiéme entrevue, qu'on lui permît d'équiper une armée navale, & de courir les mers de la Gréce, ce qui étoit formellement défendu par le célébre traité conclu fous Artaxerxe. Alors on rompit avec colére, & les Députés reconnurent qu'Albiciade les avoit joués.

Tiffapherne, fans perdre de tems, conclut un nouveau traité avec les Pé loponnéfiens. On y réforma ce qui avoit déplu dans les deux précédens. L'article, par lequel on cédoit à la Perfe généralement tous les pays que Darius actuellement régnant ou fes prédéceffeurs avoient poffédés, fut reftraint aux provinces de l'Afie. Le Roi s'engagea à entretenir fur le pié ordinaire la flote des Lacédémoniens dans l'état où elle étoit actuellement, & cela jufqu'à l'arrivée de celle de Perfe: après quoi ils feroient tenus de l'entretenir eux-mêmes, s'ils n'aimoient mieux que le Roi la paiât, à

BARIUS Condition qu'ils le rembourseroient après la fin de la guerre. Le traité por toit qu'ils joindroient ensemble leurs forces pour faire la guerre ou la paix d'un commun accord. Tiffapherne, pour tenir fa promeffe, manda la flote de Phénicie. Ce traité fut fait la treiziéme année du régne de Darius, & la vingtiéme de la guerre du Péloi ponnéfe.

Thucyd. lib.

594.

eib. pag. 105.

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Quatre cens hommes aiant été revétus dé toute l'autorité à Athénes, en abufent tyranniquement. Ils font caffes. Alci biade eft rappelle. Après divers accidens, & plufieurs conquêtes confidérables, il retourne triomphant à Athènes & eft nommé Généralissime. Il fait celébrer les grands myfteres,& part avec la flote.

PISANDRE, de retour à Athénes, 8. pag. 590- trouva les chofes bien avancées pour Plut. in A-le changement qu'il avoit proposé en partant, & il y mit bientôt la derniére main. Pour donner une forme à ce nouveau gouvernement, il fit nommer dix Commiffaires avec un pouvoir abfolu, qui devoient pourtant,,

dans un tems marqué, rendre compte Noдиus. au peuple de ce qu'ils auroient fait. Quand ce tems fut expiré, ils convoquerent l'affemblée. On commença par ftatuer qu'il feroit permis à chacun de proposer ce qu'il lui plairoit fans qu'on pût l'accufer d'avoir violé les loix, ni lui faire rien fouffrir en confequence. Enfuite il fut arrété qu'on formeroit un nouveau Confeil, qui feroit maître des affaires, & qui éliroit de nouveaux Magiftrats. Pour cet effet, on établit cinq Préfidens, qui nommérent cent hommes dont ils faifoient partie; & chacun d'eux en choisit & en affocia trois à fa volonté, ce qui faifoit en tout quatre cens, quels on donna un pouvoir abfolu. Mais pour amufer le peuple, & le confoler par une ombre de gouvernement populaire pendant qu'ils établiffoient une véritable Oligarchie, il fut dit que ces quatre cens appelleroient au Confeil cinq mille citoiens, quand ils le jugeroient à propos. Le Confeil,& les affemblées du peuple, fe tenoient à l'ordinaire; mais rien ne fe faifoit. pourtant que par l'ordre des Quatrecens. C'eft ainfi que le peuple d'AthéLes fut dépouillé de fa liberté, dont il

aux

DARIUS jouiffoit depuis près de cent ans qu'il avoit aboli la tyrannie des Pifistratides.

Après que ce décret fut paffé fans contradiction, & que l'affemblée fut féparée, les Quatre-cens, armés de poignards, & accompagnés de fixvingts jeunes hommes, dont ils se servoient lorfqu'il faloit faire quelque exécution, entrerent dans le Sénat, & contraignirent les Sénateurs de fe retirer, après leur avoir paié ce qui leur étoit dû de leurs appointemens. Ils nommerent de nouveaux Magiftrats, tirés de leur corps, obfervant dans ce choix les cérémonies ordinaires. Ils ne jugerent pas à propos de rappeller les bannis, pour n'être point obligés de faire revenir Alcibiade, dont ils redoutoient l'efprit de domination, & qui fe feroit bientôt rendu maître du peuple. Ufant tyranniquement de leur pouvoir, ils tuoient les uns, banniffoient les autres, & confifquoient impunément leurs biens. Tous ceux qui ofoient s'oppofer à ce changement, ou même s'en plaindre, étoient égorgés fous quelque faux prétexte, & on auroit été mal reçu à demander juftice des meurtriers. Les Quatre

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