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pour. la défense de cette place importante, les volontaires de la garde nationale de sa ville.

Ne voulant pas se reposer sur la ponctualité du préfet de Saône-et-Loire du soin d'être informé à toute heure des pas que fait l'ennemi, il charge M. Vaulchier de dépêcher sur Châlons deux hommes sûrs qui reviendraient l'éclairer.

» Il insinue le même ordre au chef d'escadron de la gendarmerie Beauregard, en lui recommandant d'envoyer à la découverte précisément deux de ces gendarmes; de veiller à ce qu'ils voyagent déguisés, à ce que chacun d'eux se porte sur deux lignes différentes aboutissant à Lyon, pour y observer surtout l'esprit publie.

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Et, comme des subalternes peu instruits pou

vaient mal observer, ou lui faire des rapports du moins peu exacts, le maréchal Ney demande au préfet de lui procurer un homme bien élevé, connu surtout par sa fidélité envers le Roi, qu'il puisse charger d'aller aux informations comme' d'une mission secrète. M. de Rochemont, ancien gentilhomme émigré sans fortune, lui est présenté. Le maréchal l'aecepte, l'encourage par les promesses les plus déterminantes de solliciter pour lui les bontés du Roi: le maréchal fui donne de l'argent de sa poche pour ses frais de route; lui fait ouvrir un crédit sur les villes qu'il doit traverser

et le fait partir sans délai. La déposition de M. de Rochemont précise toutes ces nuances, et quoique signalée d'abord comme défavorable, elle est précieuse encore sur d'autres faits.

» Dans cette journée du 13 mars, plusieurs gentilshommes demandent à être incorporés dans les deux divisions; ils le sont sur parole.

» Au dire de M. de Vaulchier, préfet, le maréchal, le 13, se montre accessible à tout le monde: il a déclaré l'être à toute heure de jour et de nuit.

>> Ceux qui entrent dans son appartement, le surprennent entouré, comme c'est son usage, de.. ses cartes géographiques, et les consultant.

>> Il fait arrêter publiquement un'officier qui a paru disposé à l'insurrection; et ordonne au comte de Bourmont de le faire conduire dans la citadelle de Besançon.

» Il notifie hautement qu'il fera fusiller la première vedette qui osera se mettre en communication avec celles de Bonaparte.

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>> Dans la soirée du 13 mars, est prêté le serment de rester fidèles au Roi, par tous les sous-officiers, que l'on sait être en général l'âme de la troupe..

>> Dans cette même soirée, il dicte au marquis de Saurans, qui va rejoindre Monsieur, dont on est fort inquiet, une note instructive sur ce que lui, maréchal, estime devoir être combiné et exé

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cuté à Paris, ou sur la route qui y conduit, afin d'empêcher Bonaparte d'y pénétrer, à la cour de s'en éloigner.

» Enfin, Messieurs; qu'a-t-on recueilli des discours du maréchal Ney jusqu'aux derniers instans? En voici le sommaire, d'après les dépositions de témoins, que je citerai avec rapidité.

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» M. de Scey croyait à la fidélité du maréchal d'après la violence de ses discours contre Buonaparte.

» M. de la Genetière : « Le maréchal lui » avait manifesté l'intention bien positive de mar» cher contre Bonaparte.

:

que

» M. Cayrol « Le maréchal lui avait dit » le débarquement était le cinquième et dernier » acte de la Napoléonade. Les 12 et 13 mars » il l'avait vu persister dans les mêmes sentimens » pour le Roi. Le maréchal ne trouvant pas mau» vaises les sorties que lui Cayrol faisait contre » Bonaparte. >>

>> M. le baron de Mongenet : « Le maréchal » s'était annoncé dansles meilleures dispositions. >> M. de Ségur: « Dès le 7 mars au matin

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>> le maréchal lui avait notifié de bonnes réso-" lutions. >>

» M. le maréchal de camp Gaye: « Le maré> chal montrait beaucoup de fureur et d'indi

»gnation contre Bonaparte, en présence des généraux Lecourbe, Mermet, de Bourmont et >> autres ; il parlait de la cause du Roi avec zèle, » même avec chaleur. >>

- » M. Durand : « Il a qualifié le retour de » l'île d'Elbe du cinquième et dernier acte de la

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tragédie. Lui, maréchal, faisait de Bonaparte »sa propre affaire. »

» M. le maréchal de camp Bessières : «Le » maréchal lui a recommandé, ainsi qu'aux autres » officiers de garder fidélité au Roi. »

-» M. de Borcia : « Le maréchal s'écriait contre Bonaparte, qu'il avait fait beaucoup de mal à la France, qu'il fallait courir droit dessus. »

M. de Grivel: « Il lui a paru que le maré» chal brûlait de se mesurer contre Bonaparte. >> > M. Boulonge (de Paris):« Le maréchal, » sur ce que lui, témoin, faisait part de ses inquié>tudes au sujet de Bonaparte, lui avait répondu : » Nous en viendrons à bout. Je ferai mort » devoir.» »

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«« Je n'ai pas cru, Messieurs, pouvoir vous faire grâce de ces citations; je ne puis pas même vous Jaisser perdre le souvenir de ce qu'ont rapporté, dans le même sens, des paroles si énergiques du maréchal, MM. de Saint-Amour, de Saurans et de Bruges Bourcier. Vous pardonnerez à mes scru

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pules: on aurait pu objecter, ou du moins pu penser que le récit était de complaisance; qu'il était l'effet de quelque bienveillance militaire pour un camarade aussi distingué.

» Mais quand ce sont autant d'échos divers qui répètent les mêmes paroles; quand les organes qui les redisent sont pour la plupart des administrateurs ou officiers civils, des préfets, sous-préfets, des employés; quand on considère que ceux qui ont en ce point rendu hommage à la vérité, ont traité d'ailleurs le maréchal Ney sans nul ménagement, à raison de son dévouement subit: il n'y a plus moyen de douter, le pyrrhonisme lui-même est subjugué.

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>> Je suis donc autorisé à conclure en toute sécurité, qu'encore bien avant dans la nuit du 13 au 14 de mars, la cause des Bourbons n'avait pas de zélateur plus franc, plus animé, plus résolu à s'y dévouer que le maréchal Ney.

» Actuellement que la conviction est dans toutes les âmes, on en revient, avec l'acte d'accusation, à se demander par quel enchantement malheureux, par quel vertige, ou quelle impulsion extraordinaire, tout à coup le maréchal Ney, ce guerrier jusque-là inébranlable dans sa foi comme dans son courage, est devenu un tout autre homme; comment il passé précipitamment de cet état

TOME II.

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