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çois qu'on l'entrave à l'instant. Je remercie mes » généreux défenseurs de ce qu'ils ont fait et de » ce qu'ils sont prêts à faire; mais je les prie de » cesser plutôt de me défendre tout-à-fait, , que de

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» me défendre imparfaitement. J'aime mieux

» n'être pas du tout défendu, que de n'avoir qu'un

» simulacre de défense.

Je suis accusé contre la foi des traités, et on » ne veut pas que je les invoque!

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Je fais comme Moreau; j'en appelle à l'Eu» rope et à la postérité! »

M. Bellart. « Il est temps de mettre un terme à ce système de longanimité qu'on a constamment adopté. On a fait valoir des maximes bien peu françaises. On à poussé jusqu'à la licence la liberté de la défense. Doit-il être permis à un accusé d'intercaler dans sa défense des matières qui y sont absolument étrangères ? Les défenseurs ont eu plus de temps même qu'ils n'en avaient demandé. A quoi bon les dérogations du fait capital auxquelles ils se livrent ? Ce n'est porter aucune atteinte à la défense, que de vouloir la faire circonscrire dans les faits de l'acte d'accusation. Les commissaires du Roi, quelles que soient les résolutions de M. le maréchal, persistent dans leur réquisitoire.»>

Le président. Défenseurs, continuez la défense n vous renfermant dans les faits.

M. le maréchal. Je défends à mes défenseurs de parler, à moins qu'on ne leur permette de me défendre librement.

M. Bellart. Puisque M. le maréchal veut clore les débats, nous ne ferons plus, de notre côté, de nouvelles observations. Nous ne répondrons même pas à ce qu'on s'est permis de dire contre quelques témoins, et nous terminerons par notre réquisitoire.

Ici, M. le procureur-général a donné lecture de son réquisitoire, dans lequel il a requis, au nom des commissaires du Roi, que la chambre appliquât au maréchal Ney les articles du Code pénal, relatifs aux individus convaincus du crime de haute trahison et d'attentat à la sûreté de l'état. Le président. Accusé, avez-vous quelques observations à faire sur l'application de la peine? Le maréchal. Rien du tout, Monseigneur. Le président. Faites retirer l'accusé, les témoins et l'audience.

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Sur cet ordre, tout le monde s'est retiré, et la Gour our est demeurée dans la salle pour délibérer.

Avant de donner quelques détails sur la délibération de la chambre, nous croyons devoir mettre sous les yeux du lecteur la pièce suivante: elle faisait partie de la défense du maréchal, et devait servir de base à la réplique de Me. Dupin.

CONSIDÉRATIONS SOMMAIRES

SUR L'AFFAIRE

DE M. LE MARECHAL NEY;

PAR M. DUPIN, AVOCAT,

Accusateurs, vous voulez placer sa tête sous la foudre; et nous, nous voulons montrer comment l'orage s'est formé

« UN homme qui, depuis vingt-cinq ans, n'a cessé de combattre à la tête de nos armées; dont le nom se rattache à tous les faits d'armes qui ont illustré notre pays; dont l'Europe entière admire la valeur et le génie militaires; qui, de simple soldat, sans intrigue et sans blesser l'envie, est arrivé de lui-même aux plus hautes dignités nationales; l'élève, le camarade, l'émule des Klébert et des Moreau, est accusé du crime de haute trahison!

» Il est accusé d'avoir attaqué la France et le Gouvernement à main armée (1): la France

(1) Ordonnance du 24 juillet.

qu'il aima si passionnément, qu'il défendit avec tant de courage! le gouvernement d'un Roi dont il chérissait la personne, pour se jeter dans les bras d'un usurpateur qu'il avait, peu de mois auparavant, forcé à l'abdication !

!

>> Le maréchal Ney, dit-on, pouvait arrêter la marche de Bonaparte ; il pouvait sauver son pays et, par une conduite opposée, il a attiré sur la France tous les malheurs dont elle est maintenant accablée.

» Ainsi, dans le système de l'accusation, le maréchal est encore agrandi. Il semble que dans ses seules mains était le salut de l'état ; que lui seul pouvait, s'il l'avait voulu, sauver la monarchie de la plus funeste des révolutions!

» Ah! si telle eût été la position du maréchal Ney, qu'il eût réuni près de sa personne les moyens nécessaires pour obtenir un si beau résultat, qui peut douter que son âme ardente, surtout lorsqu'il s'agissait de la gloire, n'eût saisi avec transport l'heureuse occasion de nous soustraire au nouvel empire de notre ancien tyran ?

>> Mais il ne faut que se reporter à la fatale journée du 14 mars, pour être convaincu qu'à cette époque, le mal de l'insurrection avait déjà fait des progrès si rapides, qu'il n'était plus possible de l'arrêter. C'était comme une marée dont la

force, toujours croissante, devait s'élever irrésistiblement jusqu'à la hauteur marquée par le doigt

de Dieu huc usquè venies.

:

» L'accusation a d'abord pris tous les traits de la calomnie.

«Dans les premiers temps de l'arrestation du maréchal, on a imprimé et publié, dit et répété,

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Qu'il était entré dans un complot, dont le but était de remettre Bonaparte sur le trône ;

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Que, pour , pour le mieux seconder après son débarquement, il avait offert ses services, et promis de le ramener dans une cage de fer

>>

Qu'en baisant la main du Roi, il avait déjà formé dans son coeur le dessein de le trahir;

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Que, joignant l'avidité à la perfidie, il s'était fait compter, avant son départ, une somme de 600,000 francs;

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Qu'enfin, il avait effectivement trahi son prince et son pays dans la journée du 14 mars; » Et qu'ainsi, il était coupable du crime de haute trahison et d'attentat à la sûreté de l'Etat.

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» Aujourd'hui il est bien démontré ;

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Que le maréchal n'a ni demandé ni reçu la prétendue somme de 600,000 francs;

» Qu'il n'a pas offert ses services; mais qu'il était à sa terre des Coudreaux, lorsqu'il y reçut, du ministre de la guerre, une lettre qui lui ordonnait

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