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posé le principe, ainsi que je l'ai déjà remarqué. L'ordonnance de prise de corps ne peut être qu'une disposition accessoire ; et ce n'est que parce que l'accusation est préexistante, que cette prise de corps a été lancée. J'ose, Messeigneurs, vous supplier de m'entendre avec indulgence sur un sujet de la plus profonde méditation ; je ne parle ni pour le ministère public, ni pour les ministres du Roi, dignes en tout de sa confiance; et j'ose espérer qu'eux ni le ministère public ne prendront en mauvaise part la citation de l'article qui avertit le ministère public à quoi il s'expose, quand il prend sur lui de ne pas suivre rigoureusement l'exécution de la loi..

» Maintenant que vous connaissez toute la sévérité des dispositions écrites dans le code d'instruction criminelle à l'égard de ce jugement, par défaut de la mise en accusation, et qu'il est prouvé qu'il ne se rencontre rien dans votre premier arrêt qui établisse la mise en accusation du maréchal Ney; que vous vous êtes assurés de tout ce qu'a voulu le législateur, de tout ce qu'il a fait en faveur de l'accusé; daignez réfléchir confondez tous les pouvoirs, et qu'ainsi aucun pouvoir réviseur n'existe au-dessus de vous.

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que vous

Combien, Messeigneurs, ce moyen devient imposant! Il est impossible d'être décrété de prise

de

corps sans une accusation préalable. Il est im

possible d'être jugé sans une mise en accusation antécédente.

>> Dans la marche ordinaire des affaires criminelles, et même devant les cours spéciales, l'art. 568 du code d'instruction accorde à l'accusé, contre l'arrêt et dans le délai de trois jours, le recours en cassation avant les débats.

» Telle est, dans les cours spéciales, la marche de la procédure.

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» Ah! sans doute nous n'avons pas de motifs de regrets, Messeigneurs; nous avons toute confiance dans la justice et l'impartialité d'une cour aussi auguste; mais il doit en exister pour vous, que le Roi n'ait pas complété cette législation.

» Troisième moyen de nullité. L'acte d'accusation a été dressé prématurément à l'arrêt du 17. L'antériorité sur l'acte de prise de corps est tellement évidente, qu'on en a ordonné l'annexe. C'est une subversion des règles de la procédure criminelle, démontrée par les articles 241 et 242 du code.

» Ce n'est qu'après la mise en accusation que le ministère public doit s'occuper de la rédaction de l'acte d'accusation, et non antérieurement.

>> J'entre dans l'opinion d'un magistrat qui a long-temps exercé ces fonctions dans les cours criminelles. >>

(Me. Berryer a lu le passage relatif.)

« Aussi, depuis la promulgation du code criminel en 1810, a-t-on invariablement suivi cette marche, comme le régulateur, pour poser les bases de l'accusation.

» Les motifs écrits servent à diriger le rédacteur de cet acte.

Ainsi, la nullité est évidente.

Quatrième moyen de nullité. L'acte d'accusation n'est pas même valablement signifié à l'accusé. » Je demande pardon à la cour, qui, dans ce moment même, devrait être occupée d'intérêts plus généraux.

» Je lui demande toute son indulgence pour énoncer mes deux derniers moyens, et que vous les écoutiez avec autant d'attention que les trois premiers.

>> Ceux qui n'envisagent tout qu'avec malignité, pourraient n'y rencontrer qu'un esprit minutieux et puéril. Mais, lorsque le législateur a prononcé, pourrait-on se permettre un jugement si inconve→ nant?

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» Eh bien! Messeigneurs, l'acte d'accusation, même en ce moment, ne nous a pas été valablement signifié; il n'a pas été légalement constaté qu'il l'avait été dans les délais fixés par l'art. 567 du code d'instruction criminelle, pour les cours spéciales.

1

>> Cet article porte:

« L'arrêt de la cour impériale qui renvoie à la cour spéciale, et l'acte d'accusation, seront, dans les trois jours, signifiés à l'accusé. »

<< Cette fixation, Messeigneurs, ne saurait être indifférente. Dans quel cas particulier sommesnous ? Eh bien ! j'en fais l'aveu, et on ne saurait s'en prévaloir contre nous défenseurs ; j'en ai reçu la copie, et ici vous voyez combien l'accusé, dans la noble carrière qu'il a parcourue, et dans laquelle il entend arriver à sa justification, y met de franchise et de loyauté. Mais enfin notre devoir, à nous autres défenseurs, ne nous permet pas de passer sous silence une pareille objection. Je dis que l'acte d'accusation ne porte de date ni de jour, ni de mois; elles sont restées en blanc: et ici l'on voit d'abord l'inconvénient qui peut en résulter. Tous délais sont de rigueur. L'accusé peut ignorer ce qu'exige la loi. Il aura envoyé sa copie à son défenseur sans que la date soit énoncée; et, trompé par le silence de l'acte, le défenseur laissera écouler des délais qui sont irréparables. Voilà donc la nullité; c'est que tout exploit doit porter la date et du jour et du mois. Il y a nullité, car la loi pro nonce cette peine.

>> Vous connaissez les motifs qui me la font proposer. Nous nous plaignons de l'urgence, non

pour le maréchal empressé de se justifier, mais pour nous, défenseurs, chargés d'une énorme responsabilité. Le maréchal n'est donc pas légalement en demeure de répondre; il n'est pas en retard, ni dans l'obligation de s'en expliquer, puisque l'acte ne lui est pas légalement connu.

» Cinquième moyen. Je passe au cinquième moyen de nullité. La première résulte de ce qu'on a omis de prévenir l'accusé qu'il avait la faculté de proposer des moyens de nullité; la seconde, de ce qu'on ne lui a pas laissé, avant de le traduire devant la cour dans l'intervalle du 19 au 21, le délai lui accorde la loi, art. 296 du code d'instruction criminelle.

que

:

» On voit le motif de cette disposition si conforme à l'humanité. Pour être accusé on n'est pas condamné; la loi vient au secours du malheureux plus que du coupable. Le législateur n'ordonne rien en vain voilà des précautions, de scrupuleuses précautions; elles sont restées sans effet; on n'en a pris aucune; on ne l'a point averti de la concession de cinq jours, ni de la réduction à trois jours seulement. Nous sommes donc bien autorisés à dire que les règles ordonnées par S. M., qui devaient être exécutées, ont été transgressées, et que, sans sortir du cercle tracé par la cour par son arrêt du 21, nous sommes en droit, en rentrant dans le droit commun, de faire valoir toutes ces nullités;

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