Page images
PDF
EPUB

Vis d'Archimède à double effet, de M. Pattu.

Voici le rapport fait à la société de Caen, et que nous avons promis page 328 du tome précédent.

« M. Pattu, dit M. Joyau, au nom d'une commission, a fait transporter et placer, auprès du moulin de Montaigu, le modèle qu'il avait fait construire et qu'il a décrit dans le mémoire joint à notre rapport, et nous avons remarqué:

1°. Que la machine inclinée sous un angle de 35 degrés était mise en mouvement par une chute d'eau d'un demi-mètre au plus, dans l'intérieur de la grande vis;

2o. Que, sans doute par suite des accidens qu'elle a éprouvés en restant pendant longtemps sans mouvement et sans abri, elle s'était déjetée d'environ vingt-six millimètres;

3o. Qu'elle éprouvait une flexion sensible par suite de la faiblesse de son axe ou noyau;

4°. Que, malgré ces défectuosités qui peuvent être évitées, elle faisait environ vingt tours sur elle-même par minute;

5°. Que l'eau était élevée par la petite vis

à la hauteur de 170 au-dessus du courant à son entrée dans la grosse vis;

6°. Que le rapport entre l'effet utile et la force du moteur etait environ 40/100.

Ainsi, il nous a paru très-probable qu'une machine parfaitement construite sur des dimensions plus grandes (ce qui diminuera la perte causée par les frottemens) devra avoir un effet beaucoup plus considérable, et quand les résultats seraient bornés à ceux que nous avons vu produire par un simple modèle qui a des défauts et qui a éprouvé des accidens, ne seraient-ils pas déjà assez considérables pour assurer à l'inventeur de cette belle et simple machine, un juste tribut de reconnaissance?

Sans doute la vis de M. Pattu ne peut pas servir dans toutes les circonstances; mais ne croyons pas que son utilité reste bornée aux exemples qu'il s'est réduit à vous indiquer; une idée neuve et heureuse quoique simple en elle-même est trouvée; d'heureuses et nouvelles applications s'en feront bientôt, et, n'en doutons pas, elles porteront les avantages dé la découverte bien au-delà de ce que s'en promet son auteur. Comment, en effet, cette machine ne deviendrait-elle pas bientôt d'un

usage, sinon général, au moins très-multiplié pour notre agriculture, pour nos manufactures et pour des constructions du génie;

Elle n'offre aucune complication de rouages, de forces ou de mouvemens;

Elle peut se transporter avec facilité, et se placer promptement;

Elle n'est pas très-chère et ne coûte aucuns frais d'entretien ;

Elle n'exige d'autre moteur que le fluide même sur lequel elle est destinée à agir; elle transporte avec lui les vases et le gravier qu'il charrie et qui obstruent bientôt tant d'autres machines, et elle cède à l'impulsion de l'eau, au moyen d'une faible chute.

Dans l'état où M. Pattu a trouvé la vis d'Archimède, elle offre déjà tant d'avantages qu'on s'en sert fréquemment, malgré la dépense énorme que coûte l'emploi de toute machine qui n'est mise en mouvement que par les bras de l'homme.

Maintenant dans beaucoup de circonstances la vis de M. Pattu paiera par elle-même, si je puis parler ainsi, toute cette main-d'œuvre, et donnera un résultat triple, puisqu'on ne perdra ni les heures de la nuit, ni celles que les ouvriers emploient pour faire leur repas,

ou pour se reposer, soit par nécessité, soit par paresse.

Nous sommes donc convaincus que la découverte de notre collègue est une belle et heureuse idée, dont chaque jour démontrera de plus en plus l'utilité. Nous énonçons cette opi nion avec d'autant plus de confiance, qu'elle a été partagée par M. Bouesnel, inspecteur divisionnaire des ponts et chaussées qui, dans le même instant que nous, a vu mouvoir et a examiné la machine de M. Pattu et par plusieurs d'entre vous qui l'ont examinée depuis, »

Nous terminerons cette notice par les observations suivantes, qu'a bien voulu nous communiquer M. Lenormand, ancien professeur de physique et de chimie.

<< L'invention de M. Pattu me paraît digne des plus grands éloges : j'admire l'heureuse idée qu'il a eue de faire servir la même machine de moteur et d'agent pour porter les eaux à une certaine élévation, et d'appliquer ainsi la vis d'Archimède aux irrigations et aux dessèchemens. Une seule partie de son mémoire m'a frappé par l'impossibilité de la réussite, et je crois rendre service aux arts en rendant publiques quelques réflexions

que

[ocr errors]

j'ai faites sur l'emploi de cette machine, pour le dessèchement des marais.

*Si les commissaires nommés par la société d'agriculture de Caen n'attestaient pas que, malgré la défectuosité de la machine, elle faisait environ vingt tours par minute, on aurait de la peine à croire un effet aussi surprenant; mais ce fait est hors de doute, d'après leur rapport. D'ailleurs les calculs que M. Pattu fournit à l'appui de son invention, donnent 'une entière conviction à celui qui est assez versé dans les mathématiques pour apprécier la justesse de son langage algébrique, et l'on voit que cet appareil doit produire son effet, qui consiste à monter l'eau pour les irriga tions, ou à extraire celle des fouilles.

Mais en relisant ce mémoire, j'ai senti l'impossibilité d'employer cette machine au dessèchement des marais, en opérant comme l'indique son auteur. Je cherchai à lever cette difficulté, et je trouyai le moyen d'y parvenir pour le cas indiqué dans la fig. 2, dont la proposition est énoncée en ces termes, tome 2, pag. 326:

Si l'on a une source ou un ruisseau élevé, dont les eaux sont amenées par un aqueduc qui peut n'être qu'une suite d'auges en bois

« PreviousContinue »