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indigènes se retrouve-t-il presque partout en Afrique. Au Transvaal, chaque natif paie une taxe de capitation de 27.; dans l'Orange River Colony, le natif est soumis à une poll tax;" dans la Southern Rhodesia, le Bechuanaland, le Basutoland, dans l'Uganda, au Natal, il est perçu une,hut tax," au Cap, on trouve cette ,,hut tax" et une „labour tax;" dans l'Afrique Orientale Allemande, il est également perçu un impôt sur les huttes, payable en argent, en produits, ou en travail. Cette sorte d'impôt a été appliquée encore dans le Protectorat de Sierra-Leone, où elle a pu êtee payée „in kind by rice or palm-nuts", et la suggestion a été faite,,that work on roads and useful works should be accepted in lieu of payment in monay or produce." || On voit donc que le mode de paiement de l'impôt, en argent ou en nature, n'en altère pas la légitimité, lorsque son taux n'est pas excessif. Tel est le cas au Congo, où les prestations fournies par l'indigène ne représentent pas plus de quarante heures de travail par mois. Encore est-il que ce travail est rétribué et que l'impôt payé en nature fait, en quelque sorte, l'objet d'une ristourne à l'indigène. || Partout le paiement de l'impôt est obligatoire; son nonpaiement entraîne des voies de contrainte. Les textes qui établissent les taxes sur les huttes frappent l'indigène récalcitrant de peines, telles que l'emprisonnement et le travail forcé. Au Congo non plus, l'impôt n'est pas facultatif. On a vu, ailleurs, les actes d'autorité qu'a parfois rendus nécessaires le refus des indigènes de se soumettre à la loi: telles les difficultés à Sierra-Leone, à propos desquelles un publiciste Anglais, parlant des agents de la force publique, affirme: „Between July 1894 and February 1896, no fewer than sixty-two convictions - admittedly representing a small proportion of offences actuelly committed were recorded against them for flogging, plundering.and generally maltreating the natives." || D'autres exemples pourraient être rappelés de l'opposition que recontre chez les populations indigénes l'établissement des règles gouvernementales. Il est fatal que la civilisation se heurte à leurs instincts de sauvagerie, à leurs coutumes et pratiques barbares; et il se conçoit qu'elles ne se plient pas sans impatience à un état social qui leur apparaît comme restrictif de leurs licences et de leurs excès et qu'elles cherchent même à s'y soustraire. C'est une chose commune en Afrique que l'exode d'indigènes, passant d'un territoire à l'autre, dans l'espoir de trouver de l'autre côté des frontières une autorité moins établie ou moins forte, et de s'exonérer de toute dépendance et de toute obligation. Il se pourrait, à coup sur, que des indigènes de l'État se soient, sous l'empire de telles considérations, déplacés vers les territoires voisins, encore qu'une sorte d'émigration sur une large échelle, comme la présente

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la note Anglaise, n'ait jamais été signalée par les Commandants des provinces frontières. Il est, au contraire, constaté, dans la région du Haut-Nil, que des natifs qui s'étaient installés en territoire Britannique sont revenus sur la rive gauche à la suite de l'établissement d'impositions nouvellement édictées par l'autorité Anglaise. Si c'est, d'ailleurs, ces régions qui sont visées, les informations de la note semblent être en contradiction avec d'autres renseignements donnés, par exemple, par Sir Harry Johnston: This much I can speak of with certainty and emphasis: that from the British frontier near Fort George to the limit of my journeys into the Mbuba country of the Congo Free State, up and down the Semliki, the natives appear to be prosperous and happy. . . . . The extent to which they were building their villages and cultivating their plantations within the precincts of Fort Mbeni showed that they had no fear of the Belgians." || Le Major H. H. Gibbons, qui s'est trouvé plusieurs mois sur le Laut-Nil, écrit: |,,Ayant eu l'occasion de connaître plusieurs officiers et de visiter leurs stations de l'État du Congo, je suis convaincu que la conduite de ces messieurs a été bien mal interprétée par la presse. J'ai cité comme preuve mon expérience personnelle, qui est en opposition avec une version récemment publiée par la presse Anglaise, qui les accuse de grandes cruautés.“

La déclaration de Juin dernier, ci-jointe, a fait justice des critiques contre la force publique de l'État en signalant que son recrutement est réglé par la loi et qu'il n'atteint qu'un homme sur 10,000. Dire que „the method of obtaining men for military service is often but little different from that formerly employed to obtain slaves", c'est méconnaître les prescriptions minutieuses édictées pour, au contraire, éviter les abus. Les levées s'opèrent dans chaque district; les Commissaires de District règlent, de commun accord avec les Chefs indigènes, le mode de conscription. Les engagements volontaires et les multiples réengagements complètent aisément les effectifs qui atteignent à peine le chiffre modique du 15,000 hommes. || Ceux qui allèguent, comme le dit la note, que „the composing the armed force oft the State were in many cases cecruited from the most warlike and savage tribes", ignorent que la force publique est recrutée dans toutes les provinces et parmi toute la population du territoire. Les intérêts de l'État prostestent contre cette notion d'une armée que l'autorité elle-même formerait d'éléments indisciplinés et sauvages et des exemples tels que les excès qui ont été mis à charge des auxiliaires irréguliers utilisés dans l'Uganda, ainsi que les révoltes qui se sont produites jadis au Congo, imposent, au contraire, une circonspection spéciale pour la composition de la force armée. Les cadres

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Européens, qui se composent d'officiers Belges, Italiens, Suédois, Norwégiens, et Danois, y maintiennent une sévère discipline, et l'on chercherait en vain à quelles circonstances fait allusion l'assertion que les soldats,,not infrequently terrorized over their own offfcers." Elle n'est pas plus fondée que cette autre assertion,,,that compulsion is often exercised by irresponsible native soldiers uncontrolled by an European officer.“ Depuis longtemps, l'autorité était consciente des dangers que présentait l'existence de postes de soldats noirs, dont le Rapport de Sir D. Chalmers, sur l'insurrection à Sierra-Leone, a constaté les inévitables abus de pouvoirs. Au Congo, ils ont été graduellement supprimés. || Il apparaîtra, à ceux qui ne nient pas l'évidence, que des reproches articulés contre l'État, le plus injuste est d'avancer ,,that no attempt at any administation of the natives is made, and that the officers of the Government do not apparently concern themselves with such work." || On peut s'étonner de trouver semblable affirmation dans une dépêche d'un Gouvernement dont l'un des membres, Lord Cranborne, Sous-Secrétaire d'État pour les Affaires Étrangères, disait le 20 Mai dernier: There was no doubt that the administration of the Congo Government had been marked by a very high degree of a certain kind of administrative development. There were railways, there were steamers upon the river, hospitals had been established, and all the machinery of elaborate judicial and police systems had been set up." | Un autre Membre de la Chambre des Communes reconnaissait,,That the Congo State had done good work in excluding alcoholic liquors from the greater part of their domain, that they had established a certain number of hospitals, had diminished small-pox by means of vaccination, and had suppressed the Arab Slave Trade." || Si atténuées que soient ces appréciations, encore démentent-elles cette affirmation d'aujourd'hui que „the natives are left entirely to themselves, so far as any assistance in their government or in their affairs is concerned.“ | Telles ne semblent pas être les conclusions auxquelles, déjà en 1898, arrivait le Consul Anglais Pickersgill. |,,Has the welfare of the African", se demande-t-il, „been duly cared for in the Congo State?" Il répond: ,,The State has restricted the liquor trade . . . . . . it is scarcely possible to over-estimate the service which is being rendered by the Congo Government to its subjects in this matter. Intertribal wars have been suppressed over a wide area, and, the imposition of European authority being steadily pursued, the boundaries of peace are constantly extending. The State must be congratulated upon the security

it has created for all who live within the shelter of its flag and abide by its laws and regulations. . . . . . . Credit is also due to the Congo

Government in respect of the diminution of cannibalism..

The yoke of the notorious Arab Slave Traders has been broken, and traffic in human beings amongst the natives themselves has been diminished to a considerable degree." || Ce Rapport constatait aussi que les travaux des natifs étaient rémunérés et rendait hommage aux efforts de l'État pour instruire les jeunes indigènes et ouvrir des écoles. || Depuis 1898 l'amélioration de la condition général de l'indigéne a encore progressé. Le portage à dos d'homme, dont précisement Mr. Pickersgill signalait le côté pénible pour les indigènes, a disparu là où il était le plus actif, en raison de la mise en exploitation des voies ferrées. Ailleurs, l'automobile est utilisée comme moyen de transport. La ,,sentry“ le poste de soldats nègres qu'il critiquait non sans raison - n'existe plus. Le bétail est introduit dans tous les districts. Des Commissions d'Hygiène sont instituées. Les écoles et les ateliers se sont multipliés. || „L'indigène", dit le document ci-joint, „est mieux logé, vêtu, nourri; il remplace ses huttes par des habitations plus résistantes et mieux appropriées aux exigences de l'hygiène; grâce aux facilités de transport, il s'approvisionne des produits nécessaires à ses besoins nouveaux; des ateliers lui sont ouverts, où il apprend des métiers manuels tels que, ceux de forgeron, charpentier, mécanicien, maçon; il étend ses plantations, et, à l'exemple des blancs, s'inspire des modes de culture rationnels; les soins médicaux lui sont assurés; il envoie ses enfants dans les colonies scolaires de l'État et aux écoles des missionnaires." | Il est juste de reconnaître, a-t-on dit à la Chambre des Communes, que la régénération matérielle et morale de l'Afrique Centrale ne peut être l'oeuvre d'un jour. Les résultats obtenus jusqu'à présent sont considérables; nous chercherons à les consolider et à les accentuer, malgré les entraves que l'on s'efforce de mettre à l'action de l'État, action que l'intérêt bien entendu de la civilisation serait, au contraire, de favoriser.

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La note Anglaise ne démontre pas que le système économique de l'État est oppossé à l'Acte de Berlin. Elle ne rencontre pas les éléments de droit et de fait par lesquels l'État a justifié la conformité de ses lois foncières et de ses concessions avec les dispositions de cet Acte. Elle n'explique pas pourquoi ni en quoi la liberté de commerce, termes dont la Conférence de Berlin s'est servie dans leur sens usuel, grammatical et économique, ne serait plus entière au Congo parce qu'il s'y trouve des propriétaires. La note confond l'exploitation de son bien par le propriétaire avec le commerce. L'indigène, qui récolte pour compte du propriétaire, ne devient pas propriétaire des produits récoltés et ne peut naturellement les céder à autrui, pas plus que l'ouvrier qui extrait les

produits d'une mine ne peut en frustrer le propriétaire en en disposant lui-même. Ces règles sont de droit et sont mises en lumière dans de multiples documents: consultations juridiques et décisions judiciaires dont quelques-unes sont annexées. Le Gouvernement de Sa Majesté ne conteste pas que l'État a le droit de répartir les terres domaniales entre les occupants bonâ fide et que l'indigène ne peut plus prétendre aux produits du sol, mais seulement lorsque land is reduced into individual occupation". La distinction est sans base juridique. Si l'État peut céder les terres, c'est que l'indigène n'en a pas la propriété, et à quel titre alors conserverait-il un droit aux produits d'un fonds dont la propriété est légitimement acquise par d'autres ? Pourrait-on soutenir, par exemple, que la Compagnie du Chemin de Fer du Bas-Congo ou la Société du Sud-Cameroun ou l'Italian Colonial Trading Company sont tenues de tolérer le pillage par les indigènes des terres qu'elles ont reçues, parce qu'elles ne les occuperaient pas actuellement? En fait, d'ailleurs, au Congo, l'appropriation des terres exploitées en régie ou par les Compagnies Concessionnaires est chose réalisée. L'État et les Sociétés ont consacré à leur mise en valeur, notamment des forêts, des sommes considérables se chiffrant par millions de francs. Il n'y a donc pas de doute que dans tous les territoires du Congo, l'État exploite réellement et complétement ses propriétés, tout comme les Sociétés exploitent réellement et complètement leurs Concessions. | Cet état de choses existant et consolidé dans lÉtat Indépendant permettrait, en ce qui le concerne, de ne point insister plus longuement sur la théorie formulée par la note et qui envisage tour à tour les droits de l'Etat, ceux des occupants boná fide, ceux des indigènes. Cependant, elle s'impose à l'attention des Puissances par les graves difficultés qu'elle ferait surgir si elle était implicitement acceptée. || La note contient les trois propositions suivantes:

,,The State has the right to partition the State lands among bonâ fide occupants". || „The natives will, as the land is so divided out amongst bona fide occupiers, lose their right of roaming over it and collecting the natural fruits which it produces." ||,,Until unoccupied land is reduced into individual occupation and so lang as the produce can only be collected by the native, the native should be free to dispose of that produce as he pleases." || Il n'est pas une de ces propositions qui ne semble exclure les deux autres, et à vrai dire ces contradictions aboutissent à la négation du droit de Concession. || S'il a existé des occupants bona fide, ils sont devenus propriétaires: l'occupation, lorsqu'elle trouve à s'exercer, est dans toutes les législations un des modes d'acquisition de la propriété, et, au Congo, les titres en dérivant ont été légalement

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