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captifs en sortirent. La Convention s'attribua les pouvoirs de la Commune de Paris, qui avait si longtemps neutralisé ou dominé l'Assemblée; et le club des Jacobins, dernier asile du parti vaincu, fut fermé, aux applaudissements de toute la France. Carrier et d'autres massacreurs furent envoyés au supplice. Lebon, Fouquier-Tinville, l'accusateur public, ne périrent que l'année suivante. Collot d'Herbois, Barrère, Billaud-Varennes, Vadier, furent déportés à Cayenne, après un dernier effort du parti jacobin, à la journée du 1er prairial (20 mai 1795). Dans cette journée le peuple ayant envahi la salle de la Convention, le député Féraud fut tué. Boissy d'Anglas présidait. On lui présente au bout d'une pique la tête de Féraud. Il se découvre, s'incline, et, par son sang-froid et sa dignité, impose à ces furieux'. On désarma alors le faubourg Saint-Antoine.

La gloire des armes

Glorieuse campagne de 1793. avait heureusement consolé la France dans son deuil. Du Comité de salut public, Carnot, organisant la victoire, avait envoyé aux armées des plans que nos soldats accomplirent. Les stratégistes de la coalition n'avaient su imaginer autre chose que d'envelopper la France d'armées nombreuses, mais disséminées en une foule de petits corps, et s'ils avançaient d'un pas sur nous, c'était après s'être bien assurés qu'ils ne laissaient aucune place sur leurs derrières. A ces opérations lentes et méthodiques, à cette guerre de siéges et de positions, Carnot substitua la guerre par grandes masses. Au lieu de savantes manœuvres que nos généraux improvisés ne connaissaient pas encore, et que nos conscrits ne comprenaient point, il demanda qu'on frappât des coups rapides, marchant droit devant soi, à la baïonnette, sans compter l'ennemi; qu'on menât enfin la guerre et la victoire au pas de charge. Cette tactique, qui convenait fort à l'inexpérience et à l'enthousiasme de nos jeunes armées, était aussi la meilleure pour couper l'immense et mince cordon que la coalition serrait autour de nous; elle réussit. A la fin d'août 1793, la France était envahie par toutes ses frontières et on pouvait désespérer d'elle; à la fin de décembre, elle était presque partout victorieuse.

Perte de Condé, de Valenciennes et de Mayence (mai-août). — Après la défection de Dumouriez, les coali

1. Six semaines plus tôt, le 12 germinal (1er avril), les Jacobins avaient fait une autre tentative contre la Convention, en soulevant les faubourgs.

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sés, au lieu de marcher tous ensemble sur Paris pour y étouffer la Révolution, seul but, disaient-ils, qu'ils poursuivaient, n'avaient songé qu'à leurs intérêts particuliers: les Anglais, à mettre enfin la main sur Dunkerque, objet pour eux d'une longue convoitise; les Autrichiens, à réunir nos places fortes de l'Escaut à leurs provinces belges. Dampierre, qui s'était réfugié sous Valenciennes, dans le camp de Famars, fut tué le 9 mai, en essayant de débloquer Condé; le 23, les Autrichiens forcèrent le camp de Famars, et l'armée se retira sous Bouchain, au camp de César. Condé et Valenciennes se trou

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vèrent investis. Dès le moi d'avril, Custine, reculant jusque sous le canon de Wissembourg, comme il avait avancé jusqu'à Francfort, étourdiment, avait laissé les Prussiens envelopper Mayence. 20000 de nos meilleurs soldats y étaient, et avec eux Kléber et deux représentants d'un courage indomptable, Rewbell et Merlin de Thionville. Beauharnais, successeur de Custine, ne fit pas plus que lui pour sauver Mayence. Les coalisés dépensèrent trois mois, mai, juin et juillet, à ces trois siéges. Ils en vinrent à bout '. Mais pen

1. L'investissement de Mayence eut lieu dans les premiers jours d'avril; la première parallèle fut tracée le 16 juin, les Mayençais sortirent de la place le 25 juillet. Depuis longtemps la disette était extrême dans la ville. Un chat se vendait 6 fr., une livre de chair de cheval mort, 2 fr. 25 c.; le général Dubayet, donnant à dîner à son état-major, fit servir un chat flanqué de douze souris. Condé fut pris de même par famine. Valenciennes se rendit le 28 juillet, après avoir reçu, pendant 41 jours de bombardement, 84 000 boulets, 48 000 bombes et 20 000 obus.

dant ces trois mois, la France entière s'était levée, et l'énergie des moyens de défense s'était proportionnée au péril.

Les coalisés perdirent un mois encore à préparer de nouvelles opérations. Sur le Rhin, ils remontèrent de Mayence vers les lignes de la Lauter et de la Sarre, qui couvraient

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l'Alsace et la Lorraine. Au nord, ils se séparèrent; les Anglais marchèrent sur Dunkerque et les Autrichiens entreprirent un nouveau siége, celui du Quesnoy. Houchard, chargé d'opérer contre les premiers, reçut de Carnot un bon plan. Il devait, tandis que Souham et Hoche défendaient énergiquement

Dunkerque, se porter en masse entre l'armée qui faisait le siége et celle qui le couvrait, pour les écraser l'une après l'autre. Il battit en effet les Anglais à Hondschoote (8 sept.). Mais ce ne fut qu'un demi-succès, parce qu'il n'obéit qu'à demi aux ordres du Comité. Il avait conduit sa marche et son attaque de telle sorte qu'il avait rejeté le corps d'observation sur le corps de siége, au lieu de les séparer. Cinq jours après, il battit encore les Hollandais et les chassa de Menin. Mais une panique ramena son armée en désordre sous Lille. Il fut destitué et monta comme Custine sur l'échafaud.

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Les coalisés avaient échoué à leur extrême droite, vers Dunkerque; ils avaient réussi à leur gauche, où ils avaient pris le Quesnoy. Maîtres de l'Escaut par Condé et Valenciennes, de l'intervalle entre l'Escaut et la Sambre par le Quesnoy et Mons, ils voulurent prendre Maubeuge pour s'assurer aussi de la haute Sambre. C'était presque la position du prince Eugène en 1721. Le péril pour la France semblait aussi grand; il fut aussi heureusement conjuré. Au lieu d'agir à gauche comme Villars, le long de la Scarpe, Carnot fit agir par la droite, le long de la Sambre. Jourdan, simple chef de bataillon au commencement de la campagne, avait été promu au commandement de l'armée du Nord. Il vainquit le prince de Cobourg à Watignies, en avant de Maubeuge,

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