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plus à compter sur ceux qui la gouvernent sous le sceptre de Rothschild, c'est-à-dire de l'Allemagne. Sûr de l'appui du ministère, le juif triomphe avec cette impudence qui se serait changée en platitude, si la disparition de l'ancien président de la République n'avait pas tout remis en question.

Dupuy, qui se cramponne à son banc, et les imbéciles de sa majorité, laquelle a voté, il y a quelques semaines, la loi de dessaisissement qu'elle repousserait aujourd'hui, ne songent naturellement qu'à l'heure présente. Ils ne se demandent même pas, les ahuris, de quelles conséquences sont grosses et l'apparition du gredin sur le sol français et sa comparution devant un nouveau tribunal.

Le vrai plan était celui de Bard, de Low et de Manau : la revision sans renvoi ; ce qui eût permis à l'espion des Allemands d'atterrir en Allemagne, où ses amis de Paris seraient allés lui rendre visite sans danger pour lui ni pour eux.

Mais je ne le vois pas bien circulant, fût-ce en voiture hermétiquement fermée, sur notre territoire, dont il a pendant trois longues années préparé le démembrement. Dupuy, Delcassé et Monestier essayeront peutêtre de le protéger contre les fureurs de la foule; mais ils risqueront fort d'être, à eux seuls, hors d'état d'y réussir, et je doute que l'armée, à laquelle ils réservent ce dernier soufflet, soit très disposée à leur prêter main forte.

LIVRE SIXIÈME

LES FRASQUES DU CAPITAINE CUIGNET

CHAPITRE PREMIER

Publication par le Petit Journal de la correspondance échangée entre deux ministres. Interpellation de Viviani.

Séance

de la Chambre du 12 mai. - Violents débats autour du conflit Paléologue-Cuignet. Rochefort met en scè ne la trahison de Ballot-Beaupré.

La pantalonnade a pour décor trois estrades. A droite, vingt et un mannequins habillés de robes rouges ils portent les écriteaux « honnête », « irréductible», «patriote. » A gauche, dix-huit autres mannequins avec « Retour de l'île du Diable ». Au centre, huit mannequins étiquetés « A vendre ». Entrée du porteur d'eau. Il fredonne l'air de Guillaume Tell. Il apporte huit seaux. Derrière lui, un terrassier sur sa casquette, « Syndicat ». Il remue à

la pelle un tas énorme de pièces d'or : il en remplit les seaux à les faire déborder. Le porteur d'eau dispose par dessus, rosettes de la légion d'honneur, bureaux de tabac, etc...; il les porte devant les huit mannequins de l'estrade centrale. Les mannequins s'animent, glissent l'or dans leurs poches; ils retournent leurs écriteaux; on y lit cette fois : « Retour de l'île du Diable». Bravo, clown!

Le 12 mai 1899, se produit une interpellation du député Viviani sur la divulgation de documents officiels par le Petit Journal.

1.

Interpellation de Viviani : « La correspondance entre le ministre de la guerre et le ministre des affaires étrangères, publiée ce matin par le Petit Journal est-elle authentique? - Reponse du ministre de la guerre. - «Le commandant Cuignet est l'auteur de la divulgation de cette correspondance; il a été mis en non activité par retrait d'emploi. »

M. LE PRÉSIDENT. pellation suivantes :

J'ai reçu les demandes d'inter

La première, signée de M. Viviani, est ainsi conçue: « Je demande à interpeller le Gouvernement sur les publications faites ce matin par la presse et touchant aux échanges de correspondance entre le ministre de la guerre et le ministre des affaires étrangères. »

La seconde, signée de M. Lasies, a trait aux révélations relatives à la démission du précédent ministre de la guerre.

Quel jour le gouvernement propose-t-il pour la discussion?

M. DELCASSÉ, ministre des affaires étrangères. —Le Gouvernement demande, désire la discussion immédiate. (Applaudissements à gauche.)

La discussion immédiate est ordonnée.

M. VIVIANI. Je remercie M. le ministre des affaires étrangères d'avoir compris qu'une discussion immédiate doit s'instituer à la tribune au sujet des publications de la presse de ce matin, publications qui sont de nature à jeter une certaine émotion dans le Parlement.

Nous savons tous qu'une correspondance a été échangée, touchant certaines lectures et certains commentaires donnés à ces lectures devant la Cour de cassation, entre M. le ministre des affaires étrangères Delcassé et M. le ministre de la guerre de Freycinet.

Je demande si cette correspondance est authentique, et, si elle l'est, quelles explications M. le ministre dest affaires étrangères peut fournir à la Chambre à cet égard. Je demande, en particulier, à M. le ministre de la guerre si cette correspondance n'aurait pas été livrée. par un fonctionnaire appartenant à son administration, et, au cas où il en serait ainsi, quelles mesures il compte prendre contre le coupable. (Vifs applaudissements à gauche et à l'extrême gauche.) La pu

M. CAMILLE KRANTZ, ministre de la guerre. blication prochaine de la correspondance dont il s'agit avait été annoncée hier dans un journal du matin, dont l'entrefilet n'a pas passé inaperçu pour moi.

La menace a été promptement suivie d'effet, puisque le Petit Journal de ce matin publie ces lettres.

Au moment où paraissait le Petit Journal, M. le commandant Cuignet, dont le nom est connu de la Chambre. (Mouvement à gauche.), que je savais être le seal officier ou fonctionnaire de l'entourage de M. de Freycinet qui eût eu connaissance de ces lettres et qui fût le gardien des minutes, est venu dans mon cabinet et m'a fait spontanément l'aveu que, les incidents auxquels ces lettres avaient trait le touchant personnellement, il avait cru devoir prendre copie du dossier. (Exclamations et bruit à gauche. Applaudissements

sur divers bancs.)

Cette copie du dossier, M. le commandant Cuignet l'a remise, dimanche dernier, à un de ses amis, lequel ami, usant, dans des conditions qu'il ne m'appartient pas d'apprécier, de la remise qui lui avait été faite, a communiqué lui-même hier le dossier à M. Judet, directeur du Petit Journal. (Exclamations à l'extrême gauche et à gauche. Bruit à droite.)

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