Page images
PDF
EPUB

Afin d'éviter des détails inutiles, on devra comprendre dans la cession la remise de toutes les valeurs mobilières, tant militaires qu'administratives, ou veut-on faire autrement?.....

Le chargé d'affaires italien est-il autorisé à présenter un traité commercial et de navigation sur la plus grande échelle possible? Et, suivant l'occurrence, une révision réciproque des tarifs afin de faciliter les échanges entre les deux pays?

Si, pour faire aboutir les négociations partielles ou générales, des sommes d'argent pouvaient être utiles ou nécessaires, faudrait-il employer ce moyen?

[blocks in formation]

La remise du royaume lombardo-vénitien doit-elle se faire suivant les frontières politico-administratives actuelles, ou bien le gouvernement italien peut-il avoir un intérêt à quelque rectification ou raccord des nouvelles frontières?.....

Le Tyrol italien se trouvant compris dans la Confédération germanique, et la cession de ce territoire ne pouvant être un objet de la convention actuellement proposée, et comme d'un autre côté son annexion ne peut être assurée au royaume italien dans un avenir plus ou moins prochain, cette cession ne devrait-elle pas être l'objet d'un protocole secret qui en prévoie et en règle l'éventualité, en fixant dès maintenant les compensations au moyen desquelles on peut prévoir la coopération pour une intention donnée de la politique impériale?

Quelles sont les règles établies par le gouvernement italien concernant la restitution de la couronne d'Italie et des ordres de chevalerie? Le négociateur italien doit-il éviter toute discussion sur la question romaine, ou, pour faire taire le parti catholique si puissant à Vienne, peut-il laisser espérer un adoucissement dans la politique italienne à l'égard de Rome, ne fût-il que de pure forme et comme une intervention officieuse de la cour impériale?

Il conviendra d'autoriser le négociateur italien à seconder les désirs de l'Empereur s'il veut faire régner dans l'opinion publique européenne cette idée que c'est à l'initiative spontanée de l'empereur FrançoisJoseph qui, en inaugurant maintenant à l'intérieur de l'Empire la politique des nationalités, a voulu lui donner une conservation généreuse par un sacrifice magnanime envers la nationalité italienne.

QUESTION INTERNATIONALE

La sollicitude de l'empereur Napoléon pour un rapprochement entre l'Autriche et l'Italie pourra-t-elle jamais se changer en une difficulté à redouter pour le cabinet de Florence?

Selon toutes les probabilités, le rapprochement entre l'Autriche et l'Italie poussera la Prusse à un parti désespéré dans sa politique agressive à l'égard de la Confédération germanique et spécialement à l'égard de l'Autriche; de même parmi les éventualités à prévoir se trouve celle-ci (quoique invraisemblable) que la France, pour obtenir les provinces rhénanes, ne prenne le parti d'offrir à la Prusse l'appu de ses armes.

L'Autriche, délivrée des craintes que l'attitude de l'Italie lui inspire, pouvant par là recueillir toutes ses forces matérielles, en y réunissant les forces morales qu'elle obtiendra de son rapprochement avec l'Italie, pourrait être portée à se venger sur la Prusse: ce qui lui fournirait le moyen d'établir sa suprématie militaire sur l'Allemagne, et par là sur la tête de son Empereur la couronne impériale allemande. Il est hors de doute que l'on penche de toutes parts, à Vienne, du côté de cette politique, parce que la politique traditionnelle, dynastique et populaire... Il est possible qu'à Vienne on penche vers une politique plus timide et que l'on songe à étendre les domaines de la couronne de Saint-Etienne, en les portant jusqu'à l'extrême limite sur la rive gauche du Danube. Si quelqu'une de ces suppositions vient à se réaliser, l'Italie pourra-t-elle prendre une part coopérative en échange de la cession qu'elle obtiendrait, et plus encore en vue de la prépondérance sur l'Europe centrale qu'elle pourrait partager avec l'Autriche ? Ei si cette coopération était posée comme condition première de la conciliation ?...

No 15

LE CHEVALIER NIGRA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Paris. le 3 novembre 1865,

Le comte de Bismarck m'a parlé du traité de commerce entre l'Italie et le Zollverein, en m'engageant vivement à vous écrire pour vous conseiller, en mettant à part toute autre considération, d'accorder au

Zollverein le traitement de la nation la plus favorisée. Ce fait, m'a-t-il dit, aurait pour résultat de rendre les populations allemandes plus favorables à l'Italie, et d'accélérer la reconnaissance du royaume italien de la part de la Saxe et des autres Etats allemands, et encore de fortifier la Prusse en Allemagne. Croyez-moi, a-t-il ajouté, en accordant à l'Allemagne du Zollverein le traitement de la nation la plus favorisée, avec réciprocité, vous ferez une œuvre hautement politique, etqui, à l'avenir vous sera éminemment avantageuse.

N 16

LE GÉNÉRAL DE LA MARMORA AU CHEVALIER NIGRA, A PARIS

Florence, le 11 janvier 1966.

Plus d'une fois j'ai éprouvé le désir de vous écrire pendant la dernière crise, mais je n'en ai pas eu le temps. Je ne me sens pas guère disposé à vous en parler maintenant que la crise est passée, parce que pour vous faire connaître tout ce qui est arrivé, il ne suffirait pas d'un volume de l'épaisseur du Livre vert. Pour peu que vous lisiez nos journaux, vous pourrez vous faire une idée plus complète que d'après ce que je pourrais vous écrire, quand même je serais en état de rapporter les différentes phases qui variaient chaque jour, et même plusieurs fois par jour. Seulement, je puis vous dire que j'ai trouvé moins de courage et de dévouement que j'étais en droit d'en attendre, et que les nombreux refus reçus des hommes politiques sur lesquels je comptais le plus m'ont fait souvent me demander s'il n'aurait pas mieux valu renoncer à l'entreprise. Mais pouvais-je désigner à la couronne quelqu'un qui eût voulu ou pu se charger de la tâche ingrate de former un ministère avec la déplorable confusion des partis qui règne dans la Chambre !

Vers la fin de 1859, malgré la vive opposition de quelques-uns de mes collègues, et entre autres de... j'ai insisté auprès de Sa Majesté, pour qu'elle acceptât nos démissions. Si alors j'aimais peu le pouvoir, aujourd'hui je l'ai en horreur. Mais alors tous voulaient un homme, et cet homme était Cavour, qui cherchait à arriver au pouvoir, parce qu'il se sentait capable de faire ce qu'il a fait depuis. Mais à présent, je ne connais qu'un seul homme ambitionnant mon poste, et quoique ne manquant pas de capacité gouvernementale et d'une certaine fermeté... vous ne pouvez vous faire une idée de ce qu'il fait, promettant des

choses possibles et impossibles et les plus disparates aux partis les plus opposés afin d'arriver...

Mais laissons ces vilaines choses, qui me répugnent au point de me faire tomber la plume de la main. Le fait est que j'ai cru devoir rester à mon poste, autant pour ce qui concerne la politique intérieure que pour ce qui est de la politique étrangère...

Je passe maintenant à l'affaire importante qui m'a amené à vous expédier ce courrier, car j'espère que vous ne vous êtes point imaginé que je vous aurais expédié un courrier pour ce que je vous ai rapporté plus haut, j'aurais aussi bien pu vous le mander par la poste, ou même ne pas vous le communiquer du tout.

Le baron Malaret est venu hier me lire une dépêche que le duc de Gramont a envoyée au ministre des affaires étrangères de France, et dont celui-ci expédie une copie à Florence pour m'être communiquée. Suivant l'usage diplomatique, que je me borne à qualifier d'étrange, le baron Malaret m'a lules dépêches et s'en est allé sans m'en laisser la copie. Comme de plus cette lecture m'a été faite dans une pièce contiguë à celle où se tient le conseil, et pendant que j'avais la tête remplie de nos discussions, je ne puis affirmer avoir compris tous les points, et tout au moins avoir deviné la vraie pensée du gouvernement français. Mais, hier soir, j'ai rencontré le baron Malaret dans une soirée, et lui ai exprimé le désir de revoir ces documents, c'est-àdire la lettre du duc de Gramont et la dépêche de M. Drouyn de Lhuys au baron Malaret. Je lui ai adressé cette demande en lui faisant comprendre que, s'il m'en avait laissé une copie, il m'aurait fait plaisir ; mais, ou il n'a pas compris, ou, ce qui est plus probable, il a fait semblant de ne pas comprendre. Cependant il me promit d'une façon trèsaimable de venir recommencer la lecture des dépêches. S'il vient, et si j'ai des observations importantes ou nouvelles à vous faire, je vous les transmettrai à la fin de cette lettre. Pour le moment, j'ai hâte de vous communiquer l'impression que m'a produite cette communication.

La dépêche du duc de Gramont rapporte une conversation qu'il a eue avec le ministre autrichien Mensdorf; il résulterait de cette dépêche que le gouvernement autrichien reviendrait à la charge sur l'opportunité de reprendre les rapports commerciaux avec l'Italie. Les intentions et le langage du gouvernement autrichien m'ont paru très-conciliateurs; c'est pourquoi je n'ai pas le moindre doute qu'il ne soit disposé à reconnaître le royaume d'Italie, pourvu que nous lui accordions les avantages de la nation la plus favorisée, tels que nous les avons récemment accordés au Zollverein.

Pris à l'improviste pendant que je cherchais du temps à réfléchir à cette question, je répondis que nous étions disposés à maintenir ce que

nous avions publié dans deux circulaires insérées au Livre vert, en ajoutant qu'il était bien entendu que le gouvernement autrichien traiterait avec nous comme gouvernement Royal d'Italie. En parlant ainsi, il me vint le soupçon qu'il s'agissait d'établir aussi des rapports diplomatiques, et j'ajoutai aussitôt que, conformément à ma circulaire du 25 novembre dernier, il n'était pas possible d'établir des rapports diplomatiques (avec l'Autriche) sans traiter la question de Venise, et que, par conséquent, on pouvait étudier les moyens de rétablir les rapports commerciaux entre l'Italie et l'Autriche, sans rétablir les rapports diplomatiques; je citai l'exemple de la Sardaigne qui avait vécu, sinon parfaitement d'accord, au moins avec une entente suffisante, surtout en ce qui concernait les intérêts commerciaux de 1853 à 1859.

Mais ce qui, plus que toute autre chose, m'a donné à réfléchir dans cette communication, c'est la manière, je dirais presque la désinvolture, avec laquelle le baron Malaret m'a parlé lui-même de l'impossibilité dans laquelle nous nous trouvions de rétablir des rapports diplomatiques avec l'Autriche.

Pourquoi le ministre de France s'avance-t-il le premier dans ce qui touche nos difficultés?

Je puis me tromper, et je voudrais que cela fût, mais il m'a semblé découvrir que, pendant que l'Autriche était maintenant disposée à la conciliation, peut-être même à traiter la question de Venise, la France, pour le moment, ne le désirerait pas.

Tel est le fait très-important que je vous soumets afin que vous l'éclaircissiez s'il est vrai, que vous en recherchiez les motifs et que vous en pesiez les conséquences.....

Je ne m'étonnerais pas que la France, peut-être pas l'Empereur, ne désirât pas que la question de Venise soit résolue avant celle de Rome, ou au moins avant que les Français aient quitté Rome.....

Signé: LA MARMORA.

No 17

LE CHEVALIER NIGRA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Paris, le 19 janvier 1866.

De la dépêche de M. de Gramont, et de ces divers entretiens, il me semble qu'on peut conclure que l'Autriche se contenterait d'obtenir l'application pure et simple du traité de commerce de 1851, c'est-à

« PreviousContinue »