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No 42

LE COMTE DE BARRAL AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Télégramme.

Berlin, le 30 mars 1866.

M. de Bismarck m'a dit que, le Trentin faisant partie de la Confédération-Germanique, il était impossible de stipuler à l'avance sa cession à l'Italie; mais ce qui ne pourrait pas se faire avant la guerre pourrait s'effectuer pendant ou après, surtout en adressant un appel aux popu

lations.

Signé: BARRAL.

N° 43

Extrait.

LE CHEVALIER NIGRA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Paris. 1er mars 1866.

D'après l'autorisation que vous m'avez donnée par le télégraphe de tenter d'amener sur le tapis la question de l'échange des PrincipautésDanubiennes contre la Vénétie, mais surtout ensuite de la connaissance des nouvelles ouvertures d'alliance que nous a faites la Prusse, j'ai cru devoir m'adresser directement à l'Empereur, pour lui proposer une seconde fois cette combinaison. L'Empereur m'a reçu hier, à six heures, en audience particulière !

J'ai appelé l'attention de l'Empereur sur deux faits: les ouvertures belliqueuses de la Prusse et la révolution des Principautés. Je dis à Sa Majesté que ces deux faits donnaient à cette combinaison un caractère spécial d'opportunité.

. . . Pour ma part, je n'ai qu'une crainte : c'est que ces irrésolus de Prussiens ne sachent pas se décider; prenez donc courage, mon cher Général, et inspirez-en aux Prussiens; et alors, si Dieu le veut et que la fortune nous aide, dans trois mois nous serons à Saint Marc.

Comme l'Empereur se charge de proposer la chose au cabinet anglais, je crois qu'il est inutile que nous fassions maintenant d'autres démarches à Londres.

Du reste, voici quelle doit être notre position : l'Italie ne fait aucune proposition d'échange; elle revendique la Vénétie avec l'alliance prussienne.

Si les puissances croient devoir proposer une combinaison qui aurait pour résultat la cession de la Vénétie sans la guerre, qu'elles le fassent, et l'Italie l'acceptera pour son compte. Mais il ne faut pas que nous ayons l'air de sacrifier les Principautés à l'Autriche.

Signé NIGRA.

No 44

LE CHEVALIER NIGRA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Paris, le 17 mars 1866.

L'Empereur, fidèle à la promesse qu'il m'avait faite, a agi auprès du cabinet anglais pour tenter de faire prévaloir la combinaison de l'échange des Principautés contre la Vénétie. Malheureusement lord Clarendon s'est prononcé dans un sens défavorable. D'autre part, il parait que l'Autriche elle-même n'a aucun gré de cette combinaison... Notre seul espoir se réduit donc à une guerre d'accord avec la Prusse.

Les idées de la Prusse seraient de ne pas borner les résultats de la guerre à l'annexion des duchés, mais de constituer une Allemagne septentrionale sous la direction de la Prusse. La Prusse voudrait aussi avoir la Bavière pour alliée, et des ouvertures ont été faites en ce sens à Munich. La Bavière, si elle entrait dans ces vues, 's'enrichirait, en cas d'une guerre heureuse, d'une partie des dépouilles autrichiennes, comme, par exemple, du Tyrol allemand. De cette manière on constituerait dans l'Allemagne méridionale un Etat assez fort pour pouvoir avoir la prédominance au détriment de l'Autriche.

Comme le voit Votre Excellence, les idées du cabinet de Berlin ne tendraient à rien moins qu'à changer radicalement la constitution politique de l'Allemagne. Le comte de Goltz est venu ici avec ce projet et avec mission de l'exposer à l'Empereur, en demandant que la France observe une neutralité bienveillante. Mais comme le gouvernement français avait déclaré à diverses reprises que, dans le cas où une des puissances allemandes viendrait à s'agrandir de façon à changer l'équilibre européen, la France se réserverait de pourvoir à ses propres in

térêts; le comte de Goltz avait mission de demander à l'Empereur ce que la France désirerait en pareil cas.

L'ambassadeur prussien a exécuté ces instructions et demandé à l'Empereur qu'il formulât des propositions. Mais l'Empereur n'a fait aucune demande précise. Il a dit seulement qu'on pouvait examiner sur la carte la différence qui existe entre la frontière actuelle de la France et celle qu'elle avait en 1814.....

Il est évident pour moi que, si l'Empereur prononce une parole d'encouragement pour la Prusse. la guerre sera déclarée. En attendant, notre conduite me paraît suffisamment indiquée par la situation. Nous ne devons pas hésiter à pousser à la guerre et à nous préparer à la faire. Si l'Autriche, mieux avisée, se décide à céder la Vénétie avant que nous soyons engagés avec la Prusse, tant mieux... De toute manière, notre devoir est de faire le possible pour ne pas laisser échapper

cette occasion en vain.

Je suis donc aise que Votre Excellence ait envoyé Govone. Le général de Moltke doit être en voyage pour Florence, si même il n'est déjà arrivé.

Signé: NIGRA.

N° 45

LE CHEVALIER NIGRA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Télégramme.

Paris, le 23 mars 1866.

Mon opinion est qu'il faut se borner pour le moment au traité générique pur et simple, car la Prusse évidemment n'est pas prête à tirer l'épée.

Signé: NIGRA.

N° 46

LE CHEVALIER NIGRÁ AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Paris, le 23 mars 1866.

Je dis (à l'Empereur) que nous devions encore prévoir la possibilité que l'Autriche, quand elle verrait la guerre proche et inévitable, se déciderait à nous faire la proposition de céder la Vénétie; et que, par conséquent il serait utile pour nous de nous tenir libres de tout engagement jusqu'à la veille de la guerre. Mais l'Empereur répliqua sans hésitation : << Ne vous faites pas d'illusions. L'Autriche ne cédera pas la Vénétie sans y être forcée par la guerre. Je suis convaincu qu'il ne vous sera fait aucune proposition dans ce sens. J'ai fait autrefois comprendre à l'Autriche qu'il était de son intérêt de céder amicament la Vénétie. Le gouvernement autrichien a pris la chose en fort mauvaise part, et m'a répondu qu'on proposait à l'Autriche de faire en pleine paix et avant la guerre ce qu'on pourrait à peine lui demander après une guerre désastreuse pour elle. »

Je vois et je prévois de grandes difficultés. Je vois dans la Prusse non-seulement la pensée d'intimider l'Autriche par notre moyen, mais encore les hésitations, les préjugés, les faiblesses et les influences de cour. Je ne sais ce qui en résultera. Ce qu'il y a de certain, c'est que la situation est extrêmement tendue.

Signé: NIGRA.

No 47

LE CHEVALIER NIGRA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Télegramme.

Paris. le 24 mars 1866.

L'Empereur a dit au prince Napoléon que si l'Italie prenait l'ini

tiative de la guerre, la France ne pourrait pas l'aider.

Signé: NIGRA.

No 48

LE CHEVALIER NIGRA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Télégramme.

Paris, le 27 mars 1866.

Le comte de Goltz me demande si l'on avait envoyé à Berlin instructions et pleins pouvoirs pour signer le traité générique. Je lui a dit que vous m'avez écrit que l'Italie n'avait pas de difficulté à signer ce traité.

Signé: NIGRA.

No 49

M. ARESE AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Paris, le 30 mars 1866.

J'ai été très-bien reçu par l'Empereur.

Il m'a dit que le prince Napoléon (qui partait pour l'Italie) n'a ni instruction ni commission de sa part. Il trouve utile signature du traité avec Prusse, mais il déclare donner ce conseil comme ami et sans aucune responsabilité.

Il ne croit pas, pour le moment, à la probabilité d'un arrangement entre l'Italie et l'Autriche.

Il m'a autorisé à vous télégraphier tout cela.

Le roi de Prusse se prononce chaque jour plus pour la guerre, d'après des nouvelles reçues de Berlin par l'Empereur.

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