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quence inviter le général Oudinot, dont la division se trouvait alors à Marienburg, à porter une de ses brigades dans l'ile de Allemagne. Nogat, afin de lui prêter secours s'il était attaqué par des forces supérieures. En même temps il prit toutes les mesures qui pouvaient rendre meilleures ses positions ordinaires, et renforça les postes qui lui parurent trop faibles. Le général Schramm, qui commandait toujours dans l'ile de Nehrung, reçut l'ordre de se tenir sur le qui-vive le plus sévère, et d'observer surtout avec une attention particulière le Frisch-Haff.

Le maréchal s'était déterminé à tenter un assaut au fort du Hagelsberg, et il fit faire, à ce sujet, toutes les reconnaissances nécessaires. Le 9 mai, le bombardement fut poussé avec une plus grande activité pour distraire l'ennemi. Deux batteries basses, à gauche du Hagelsberg, furent démontées par l'artillerie française, qui fit également taire les pièces du bastion de gauche. Il ne restait plus sur le front d'attaque que le feu de trois pièces du bastion de droite. Enfin, pour enfiler la droite du chemin couvert du Hagelsberg, on établit dans l'ile une batterie de deux pièces de 12; une seconde fut placée à la pointe de cette ile pour enfiler et prendre à revers les ouvrages du corps de la place qui répondaient au Hagelsberg, et trois pièces de 24 furent mises en batterie sur un mamelon pour battre un cavalier' que l'on avait armé dans la place. Dans la soirée, tous les débouchés pour entrer dans le chemin couvert se trouvèrent prêts, et, à la nuit close, deux détachements de sapeurs, soutenus par un piquet d'infanterie, poussèrent une reconnaissance sur le blockhaus de la place d'armes. Le sergent de mineurs Noyer sauta le premier dans le chemin couvert et s'assura qu'il n'existait pas de mine au saillant du bastion; mais les sapeurs et le piquet d'infanterie furent assaillis par un feu si violent, parti du blockhaus, qu'ils furent obligés de se retirer après avoir perdu plusieurs hommes.

forcé de quitter le commandement du cinquième corps, de se porter, avec la réserve, dont la division Oudinot faisait partie, sur le Nogat ou branche droite de la Vistule, afin d'être en mesure de renforcer le corps d'armée du maréchal Lefebvre.

1 Nous avons déjà dit qu'on donne ce nom à un ouvrage plus élevé que le rempart dans le corps de la place.

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Cette reconnaissance donna la certitude que les réduits des Allemagne. places d'armes étaient encore trop fortement occupés pour qu'on songeât à tenter la descente du fossé avec quelque apparence de succès. Cette opération fut donc remise à un temps plus opportun, et l'on reprit, le 10 mai, les travaux ordinaires. On chemina sur les trois saillants à la fois, afin d'embrasser tous les contours du chemin couvert et de détruire les blockhaus par une fougasse lorsque le couronnement serait arrivé à leur hauteur et qu'il n'y aurait plus que trois ou quatre toises à percer pour placer les barils de poudre; mais ce travail fut très-lent, parce que l'ennemi culbutait à coups de canon les gabions de la sape, et labourait même avec ses bombes et ses obus le travail déjà fait. Un capitaine du génie, Collet, fut blessé grièvement par un éclat de bombe.

Les journées du 11 et du 12 furent presque nulles pour les travaux de la sape du centre, que l'on cherchait à prolonger. Les assiégés jetèrent une telle quantité d'obus et de bombes sur ce point, que six toises de la tête furent comblées : on réussit seulement à avancer le couronnement du bastion d'attaque.

Ces obstacles apportés par l'ennemi aux derniers travaux de tranchées contrariaient d'autant plus le maréchal, que le nombre des bâtiments ennemis de convoi augmentait journellement dans le Frisch-Haff. Le 10 et le 11, plus de cinquante de ces bâtiments, tous chargés de troupes, s'étaient avancés par la pleine mer, sous la protection du fort de Weichselmünde, et avaient débarqué des hommes et des munitions au camp de Neufahrwasser, qui, fort heureusement, n'avait plus de communication avec la ville.

Le projet de ce secours pour les assiégés et son mode d'exécution avaient été discutés dans un conseil de guerre tenu à Bartenstein par les généraux de l'armée alliée. On avait reconnu, dans ce conseil, que Dantzig ne pouvait être secouru que de deux manières : la première, en attaquant l'armée française dans ses cantonnements, opération que tous les événements antérieurs rendaient plus que douteuse; et la seconde, en faisant un vigoureux effort pour attaquer l'armée de siége du côté de la mer. Le dernier parti fut celui auquel on s'arrêta; et le gé– néral Kaminski s'embarqua au port de Pillau avec deux divi

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sions, composées de douze régiments russes et de six régiments prussiens, formant un effectif de 12 à 15,000 hommes. Soixante- Allemagne. six bâtiments de transport, escortés par trois frégates ou corvettes, débarquèrent, ainsi que nous venons de le dire, ce secours nombreux, au camp de Neufahrwasser.

Le 12 mai au matin, les renforts promis par l'empereur au maréchal Lefebvre n'étaient point encore arrivés; le danger était imminent, et la faible armée de siége pouvait être assaillie d'un moment à l'autre par les forces réunies de la garnison et du corps de secours. Le maréchal ne dissimula point à ses troupes le péril auquel elles étaient exposées. Il passa une revue générale, et, après avoir instruit les différents corps de l'arrivée du général Kaminski avec de nouvelles troupes, il leur dit : « Camarades, tant que nous vivrons, nous n'abandonnerons rien à l'ennemi; chacun doit défendre son poste jusqu'à la mort. » Cette incitation concise du maréchal fut vivement ressentie par les troupes. Elles répondirent à sa généreuse proposition par le serment de vaincre ou de mourir !

Le général russe Kaminski avait la facilité d'attaquer tout à la fois le général Schramm dans l'île de Nehrung, le général Gardanne sur le canal de Laacke et dans l'ile de Holm, et même une partie des autres postes de l'armée de siége. Le maréchal, prévoyant que l'ennemi se porterait d'abord sur l'île de Nehrung, renforça principalement cette position. Le général Gardanne, qui se trouvait le plus rapproché du camp de Neufahrwasser, et par conséquent exposé aux premières attaques, reçut aussi une augmentation de forces pour être à même de se maintenir. Le général Schramm eut ordre de redoubler de surveillance et de précautions, et le maréchal se tint lui-même préparé à se porter partout où le danger serait le plus pressant.

Cependant l'empereur Napoléon, averti du mouvement des Russes sur Dantzig, avait déjà pris des mesures pour rendre inutiles les efforts de ceux-ci en faveur de cette place. Le maréchal Lannes, à qui l'empereur avait donné le commandement de la réserve, composée, comme l'on sait, des grenadiers aux ordres du général Oudinot, reçut l'ordre de se porter de Marienburg, où il s'était avancé, au secours du 10 corps. Ses têtes de colonnes parurent aux environs de la place dans la soirée

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même du 12 mai. La présence inopinée de ce secours, qui arAllemagne. rivait à marches forcées, remplit d'allégresse et de confiance l'armée assiégeante le maréchal Lefebvre fut au-devant de son compagnon d'armes et du général Oudinot, qui l'accompagnait. Le spectacle de cette touchante entrevue accrut encore l'enthousiasme des soldats. Dès ce moment, le succès du siége ne fut plus douteux.

La nuit qui suivit cette heureuse réunion fut employée à continuer les travaux; les descentes dans le chemin couvert furent amorcées, et l'on rejoignit les deux têtes de sape du couronnement. L'artillerie commença deux nouvelles batteries d'obusiers, pour enfiler les chemins couverts et les fossés du bastion du front d'attaque: la première était dans la troisième parallèle, et l'autre au commencement du chemin couvert du bastion.

Le 13 au matin, les deux maréchaux ordonnèrent les différentes dispositions que le nouvel état des choses rendait convenables. Ils s'attendaient à une attaque instante du général Kaminski; mais celui-ci, déconcerté par la perte de l'île de Holm, se tenait retranché dans le camp de Neufahrwasser, et montrait beaucoup d'irrésolution dans ses manœuvres. Les assiégeants remarquèrent surtout un passage fréquent de barques entre le camp et le fort de Weichselmünde. Il semblait aussi que le général russe attendit pour agir qu'il eût communiqué avec le gouverneur de Dantzig; mais cette communication, dans la situation présente, était devenue bien difficile, et ne pouvait avoir lieu que par des signaux.

Pendant toute la journée, les assiégés firent un feu très-vif, qui coûta la vie au capitaine du génie Papont, aide de camp du général du génie Bertrand. Dans la nuit on déboucha des deux pointes de la sape, pour entrer dans le chemin couvert du bastion et dans celui des places d'armes vis-à-vis des blockhaus. On perça aussi le couronnement du chemin couvert sur différents points, pour arriver jusqu'aux palissades et les enlever. Leur énorme grosseur fit que, dans le premier essai, trois hommes employèrent plus de deux heures pour en couper trois à grands coups de hache. Cet essai malheureux démontra qu'une attaque de vive force était impossible avant que ces palissades ne fussent ruinées par un moyen plus prompt. On se

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rappela aussi que, lors du siége de la place de Dantzig, en 1734, les Russes qui le faisaient, parvenus à la troisième parallèle, Allemagne. ayant voulu tenter l'assaut, y avaient perdu plus de 4,000 hommes, et s'étaient vus forcés de rentrer dans leurs tranchées. A minuit, l'assiégé, devenu plus audacieux par la présence de l'armée de secours, fit une petite sortie et pénétra jusque dans la tête de la sape qu'on avait crue menacée par des mines; mais cette tentative fut promptement repoussée par un détachement du 12e d'infanterie légère qui gardait cette partie des travaux.

Le 14, les sapeurs débouchèrent sur le saillant de la place d'armes rentrante, par une sape debout. Ils la poussèrent jusqu'à trois pieds de la palissade, et firent une traverse à une batterie d'obusiers établie au couronnement des glacis du demibastion de droite; ils poussèrent aussi un boyau suivant le contour de la hauteur, afin d'y placer du monde pour soutenir l'unique pièce qu'on eût pu établir vis-à-vis du flanc qui défendait le passage du fossé.

Les travaux de la basse Vistule, devenus plus intéressants depuis l'arrivée des troupes du général Kaminski, furent continués avec activité : 50 hommes de la grande redoute, no 5, se réunirent aux sapeurs pour terminer la communication en arrière, et l'on planta la palissade sur les trois quarts de la gorge. 80 hommes du régiment de la garde de Paris, réunis également aux mineurs, détruisirent les abris qu'offraient les chemins couverts de l'ennemi, et renforcèrent le parapet opposé à la place.

Sur ces entrefaites, divers mouvements opérés par les Russes dans le camp retranché de Neufahrwasser ayant fait penser que le dessein du général Kaminski était d'attaquer le 15, l'ordre fut donné à toutes les troupes de se tenir prêtes à combattre, et cette précaution ne fut point inutile. En effet, ce même jour (15), à quatre heures du matin, l'ennemi commença à déboucher de son camp de Neufahrwasser, et engagea aussitôt une vive canonnade.

Le général Schramm défendait la tête de l'ile de Nehrung; ses troupes et celles du général Gardanne étaient en bataille derrière les deux redoutes construites vis-à-vis du fort de

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