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1807. France.

par elle sur le bronze et sur le marbre à la postérité la plus reculée, et, le récit de vos exploits enflammant le courage de nos derniers descendants, longtemps encore après vous-mêmes vous protégerez par vos exemples ce vaste empire si glorieusement défendu par votre valeur.

<< Braves guerriers, ici même un arc triomphal dédié à la grande armée s'élève sur votre passage; il vous attend : venez recevoir sous ces voûtes la part qui vous est due des lauriers votés par la capitale à cette invincible armée ; qu'ainsi commence la fête de votre retour: venez, et que ces lauriers tressés en couronne par la reconnaissance publique demeurent appendus désormais aux aigles impériales qui planent sur vos têtes victorieuses.

« Salut, aigles belliqueuses, symbole de la puissance de notre magnanime empereur: portez dans toute la terre, avec son grand nom, la gloire du nom français; et que les couronnes dont il a été permis à la ville de Paris de vous orner soient en tous lieux un témoignage auguste à la fois et redoutable de l'union du monarque, du peuple et de l'armée.

<< Mais c'est trop, généreux guerriers, c'est trop retenir vos pas, quand tous les cœurs vous appellent. Entrez dans nos remparts, enorgueillis de vous recevoir, entrez-y au milieu des chants d'allégresse et de triomphe, et que la mémoire de ce beau jour vive à jamais avec vos exploits dans les annales de la cité et dans les fastes de l'empire. »

Le maréchal Bessières répondit au nom de la garde :

<< Monsieur le préfet et Messieurs les membres du corps municipal de la ville de Paris,

<< Ces couronnes dont vous décorez nos aigles, ces arcs de triomphe, toute cette pompe brillante pour célébrer le retour de la garde impériale, sont une nouvelle preuve de votre affection pour l'empereur, et un hommage éclatant rendu à la grande armée.

« Les aînés de cette grande famille militaire vont se retrouver avec plaisir dans le sein d'une ville dont les habitants ont constamment rivalisé avec eux d'amour, de dévouement et de fidélité pour notre illustre monarque. Animés des mêmes sentiments, la plus parfaite harmonie existera toujours entre les

habitants de la grande ville et les soldats de la garde impériale. Si nos aigles marchaient encore, en nous rappelant le serment que nous avons fait de les défendre jusqu'à la mort, nous nous rappellerons aussi que les couronnes qui les décorent leur en imposent doublement l'obligation..>>

Après ces deux discours, les couronnes d'or votées par la ville de Paris furent apposées aux aigles de la garde impériale, au milieu du cercle formé par son état-major.

Le corps municipal vint se placer ensuite dans une des deux tribunes qui avaient été ménagées dans l'intérieur de l'arc de triomphe : la seconde était occupée par un nombreux orchestre qui exécuta aussitôt le chant du retour, paroles de M. Arnault, membre de l'Institut, musique de Mehul. C'est sur la mesure de ce chant que la garde impériale défila dans l'ordre suivant : les fusiliers de la garde; les chasseurs à pied; les grenadiers à pied; les chasseurs à cheval; les mamelucks; les dragons; les grenadiers à cheval; la gendarmerie d'élite.

Chaque régiment était précédé des officiers généraux et supérieurs chargés de son commandement.

A la suite de la garde impériale marchait, accompagné de l'état-major de Paris, le général Hullin, commandant d'armes, suivi du corps municipal et de son cortége.

C'est dans cet ordre, et en traversant les haies formées par une innombrable population, que la garde parvint au palais des Tuileries, en passant sous le grand arc de la porte triomphale qui sert d'entrée principale au palais, où elle déposa ses aigles de là, traversant le jardin des Tuileries, où elle posa ses armes, elle se rendit aux Champs-Élysées, où tous les corps qui la composaient et un détachement de la garde de Paris prirent place à un immense banquet qui leur était préparé, et dont le corps municipal fit les honneurs.

Le lendemain de l'entrée de la garde impériale, tous les théâtres de la capitale donnèrent une représentation gratuite. Le parterre, l'orchestre, les premiers rangs de loges furent réservés pour ces guerriers.

L'Académie de musique (l'Opéra ) leur offrit le spectacle de leur propre gloire, de leur triomphe : c'était la belle tragédie lyrique le Triomphe de Trajan. Cette élite des braves de la

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grande armée, qui, dans ses conquêtes si rapides, dans ses courses si lointaines, avait visité tant de climats et côtoyé tant de rivages, qui avait vu dans un si petit nombre de mois les sources et les bouches de tant de fleuves, connaissait aussi les rives du Tibre. Ainsi, dans la décoration qui fixait ses regards, elle reconnaissait Rome; dans la marche triomphale, dans cette foule empressée, dans cette population immense se précipitant à travers les rangs des soldats romains et sous les pieds de leurs chevaux, elle reconnaissait le tableau touchant de la réception qui lui avait été faite la veille, au sein de la capitale de l'empire français: son émotion était impossible à décrire. Pour l'homme dont l'âme n'est point étrangère aux sentiments qu'inspire la valeur honorée et récompensée dans ses plus nobles affections, la garde impériale, assistant au triomphe de Trajan, était sans doute elle-même un spectacle admirable.

Une autre fête fut donnée le 28 novembre par le sénat, dans son propre palais, à la garde impériale. Les dociles exécuteurs des volontés du monarque guerrier crurent devoir cet hommage spécial à ses vaillants prétoriens, dans la personne des officiers qui les commandaient.

En face du palais s'élevait un temple à la Victoire, au centre duquel était la statue de l'empereur. Dans toutes les parties de ce palais, des trophées militaires disposés avec art, et liés par des couronnes de laurier, offraient des inscriptions commémoratives des batailles, siéges et actions qui ont rendu si mémorables les campagnes que la fête avait pour objet de célébrer. A deux heures après midi, les officiers furent reçus par les sénateurs réunis : les premières autorités civiles et mil:taires avaient été invitées également à cette solennité; le sénateur Lacépède, en recevant le maréchal Bessières et le corps des officiers de la garde, prononça ce discours :

<< Monsieur le maréchal, invincible garde impériale,

« Le sénat vient au-devant de vous: il aime à voir les dignes représentants de la grande armée remplir ses portiques; il se plaît à se voir entouré de ces braves qui ont combattu à Austerlitz, à Iéna, à Eylau, à Friedland, de ces favoris de la victoire, de ces enfants chéris du génie qui préside aux batailles. « Cette enceinte doit vous plaire, invincible garde impériale!

« Ces voûtes ont tant de fois retenti des acclamations qui ont célébré vos immortels faits d'armes et tous les triomphes de la grande armée : vos trophées décorent nos murailles; les paroles sacrées que le plus grand des monarques daigna nous adresser du haut de son char de victoire, et au nom des braves, sont gravées dans ce palais par la reconnaissance, et vous retrouvez parmi nous plusieurs de ceux qui ont porté la foudre de notre empereur, et dirigé les hardis mouvements de ses phalanges redoutables.

a Représentants de la première armée du monde, recevez, par notre organe, pour vous et pour tous vos frères d'armes, les vœux du grand et bon peuple, dont l'amour et l'admiration vous présagent ceux de la postérité. »

Un repas, des jeux scéniques, une brillante illumination et un feu d'artifice complétèrent cette fête.

Suite des événements militaires dans le royaume de Naples; siéges d'Amantea, de Fiume-Freddo; combat de Mileto; prise de Cotrone, etc. La tranquillité était rétablie dans la plupart des provinces du royaume de Naples; celle de Calabre conservait seule un foyer d'insurrection que les Français n'étaient pas parvenus à éteindre, et dont les étincelles menaçaient même encore les pays environnants.

Nous avons dit que le général Verdier avait tenté infructueusement de soumettre la ville d'Amantea, située sur la côte de la Calabre citérieure, à cinq lieues de Cosenza : voici les détails de cette expédition. Le 3 décembre 1806, une forte colonne, composée de deux bataillons du 1er régiment de ligne français, d'un bataillon de conscrits formé des dépôts des 1er et 14o régiments d'infanterie légère, d'un bataillon de la légion corse, d'un escadron du 29° de dragons, d'un détachement d'artillerie légère, et d'un autre de sapeurs, se mit en marche de Cosenza, dans la direction d'Amantea. Cette troupe avait avec elle deux obusiers et deux pièces de 3 portés sur des mulets, des munitions, des vivres, des échelles, et les outils nécessaires à des travaux de tranchée.

L'avant-garde du général Verdier chassa devant elle de -nombreux détachements d'insurgés, qui voulurent, mais en vain, s'opposer à sa marche dans un chemin étroit, difficile, et

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qui présente dans l'espace de plusieurs lieues tous les avantages possibles à ceux qui entreprennent de défendre le passage. Les Français surmontèrent ces obstacles, et parvinrent assez heureusement jusqu'à Lago, petit village situé à l'entrée d'une gorge très-resserrée qui conduit à Amantea, et dans le milieu de laquelle coule un ruisseau, que les grandes pluies transfor

'ment en torrent.

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Le 4 décembre, le général Verdier partit de ce village pour continuer sa marche. Il fit marcher le bataillon corse sur la crête des montagnes de droite de la gorge, le deuxième bataillon du 1er régiment sur la gauche, et le reste des troupes, ainsi que les bagages, par le défilé. Ces trois colonnes s'avançaient à la même hauteur, précédées de compagnies de voltigeurs, qui ne cessèrent point de faire la fusillade avec les rebelles embusqués de toutes parts derrière les arbres, les habitations et les rochers.

La réunion des trois colonnes, après cette marche pénible, se fit à San-Pietro, petit village à un mille environ d'Amantea. En s'avançant sur cette ville, le général Verdier aperçut un détachement assez considérable, posté sur une montagne à gauche il y envoya le bataillon d'infanterie légère des 1er et 14o régiments, et ces conscrits suffirent pour disperser le rassemblement, fort de 1,200 hommes, dont une trentaine resta sur le terrain. Les troupes françaises prirent position devant Aman. tea, sur une montagne d'où l'on découvre parfaitement cette ville. Sur le bord de la mer, s'élève, au débouché d'une gorge, une hauteur en forme de cône tronqué; sa base est arrosée au nord par une petite rivière. Sur le versant méridional, est bâtie, du côté de la mer, la ville d'Amantea. Cette place n'a pour défense, vers la mer, dont elle est éloignée de cent cinquante toises environ, qu'un rocher de soixante pieds de hauteur; mais les autres parties sont fermées par une muraille élevée, flanquée de deux bastions à ses extrémités, qui viennent s'appuyer au rocher. Sur le plateau qui forme la base supérieure du cône tronqué, se trouve un fort de forme irrégulière, placé toutefois de manière à battre à la fois la gorge, le côté de la mer, et à défendre la porte principale de la ville, qu'il domine. Ce château, d'une ancienne construction, et alors armé de trois pièces

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