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constituer une faute qui le rende non recevable à réclamer l'admission en avarie commune des objets jetés;

Que la disposition de l'art. 411 du code de commerce, invoquée par les consignataires, n'est pas tellement impérative que son inobservation constitue le capitaine en faute; que les capitaines, dans des momens pareils, ne sont pas, le plus souvent, maîtres de jeter tel objet plutôt que tel autre; que l'équipage à qui un jet est ordonné, s'attache au premier objet qui lui tombe sous la main et qu'il peut jeter le plus facilement; que, dans l'espèce, le jet des os nécessitait bien plus de temps que celui des ancres et câbles, et laissait par conséquent le navire exposé plus long-temps au danger dans lequel il se trouvait; que, même, les objets qui ont été jetés étant superposés sur les os d'animaux, l'opération était double, puisqu'il fallait enlever ces objets, les placer ailleurs et jeter enfin les os; que, dans ces circonstances, le capitaine doit être présumé avoir agi pour le mieux,

LE TRIBUNAL, ayant tel égard que de raison aux fins respectivement prises par les parties et sans s'arrêter à la fin de non-recevoir proposée par les consignataires, déclare qu'il y a lieu au règlement des avaries communes souffertes par la -balancelle le Saint-Janvier; ordonne en conséquence que, par l'expert répartiteur déjà nommé, il sera procédé entre le capitaine Marso et les consignataires de sa cargaison, et aux formes de droit, au règlement et à la répartition desdites avaries, dans lequel règlement entreront tous les objets jetés à la mer par le capitaine Marso et énoncés dans le consulat par lui fait devant M. le président du tribunal de commerce de Fréjus, à l'exccption, toutefois, de la chaloupe et de l'aussière qui la tenait amarrée au navire, et ce, d'après l'estimation qui en a été faite par l'expert répartiteur, le tout à frais privilégiés et qui entreront en avaries;

Du 13 mai 1836.- Prés. M. BENSA. - Plaid. MM. ODDO pour le capitaine, SERMET pour les consign.

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Lorsqu'il s'agit de prouver des fortunes de mer, le livre de bord peut-il suppléer aux énonciations qui ne se trouvent pas dans le consulat du capitaine? (Rés. nég.)

Le délaissement du navire pour cause d'innaviga bilité est-il admissible lorsqu'il ne résulte pas expressément du consulat du capitaine que des fortunes de mer ont été éprouvées par le navire, et qu'il résulte, au contraire, des circonstances, que le mauvais état dans lequel il était à son arrivée au lieu de relâche, où il a été déclaré innavigable, est provenu de son vice propre? (Rés. nég.)

Spécialement: En doit-il étre ainsi lors même que

les experts chargés d'examiner le navire ont attribué son état de détérioration à son âge et aux fatigues qu'une grosse mer lui a fait éprouver, si d'ailleurs les juges reconnaissent en fait, nonobstant cette déclaration et les certificats de visite au lieu du départ primitif, que le navire en est reparti sans avoir été ni visité de nouveau, ni réparé, et hors d'état de naviguer de manière à résister, sans danger, aux accidens ordinaires de la navigation? (Rés. aff.)

T. XVI. ire p.

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(Agretti contre assureurs.)

La compagnie d'assurances dé Bruxelles, représentée à Marseille, et autres assureurs, avaient assuré le corps du navire Risoluto, portant pavillon toscan, sous le commandement du capitaine Stellato, pour un voyage de Marseille à Rio-Janeiro.

Le navire assuré était parvenu à Rio-Janeiro après avoir souffert des mauvais temps, et il en était reparti en lest sans avoir été visité et après avoir seulement subi de légères réparations.

Dans ce trajet de retour, le navire faisant eau, on avait relâché à Fernambouc, où le navire, examiné par des experts, avait été déclaré innavigable par le vice-consul d'Autriche.

Le 3 octobre 1835, le sieur Agretti, copropriétaire du navire Risoluto, signifie délaissement à la compagnie pour cause d'innavigabilité déclarée.

L'assuré attribue cette innavigabilité à des fortunes de mer, et, quoique le consulat du capitaine à Fernambouc n'en mentionne aucune, il soutient que la preuve de fortunes de mer résulte du livre de bord et des rapports dressés par les experts à Fernambouc.

Les assureurs contestent le délaissement et soutiennent que l'innavigabilité du navire Risoluto n'est provenue que de son vice propre.

JUGEMENT.

Attendu qu'il est établi en fait au procès, par les documens produits, que le navire Risoluto est arrivé à Rio-Janeiro après 132 jours de traversée, pendant laquelle il a éprouvé de gros

temps et une grosse mer qui le faisaient extrêmement souffrir, pompant journellement du vin, de l'huile et du sel;

Qu'après plus de trois mois de séjour à Río-Janeiro, sans pouvoir y trouver un chargement de retour, il est parti sur son lest pour effectuer son retour en Europe, après avoir reçù seulement à sa voilure et à ses agrès, quelques réparations insignifiantes et sans que le capitaine eût fait visiter le navire pour savoir s'il était, ou non, en état de reprendre son voyagé de

retour;

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Attendu qu'il est également établi par le consulat fait pár le capitaine Stellato devant le vice-consul d'Autriche à Fernambouc, qu'après une navigation de trente-six jours depuis son départ de Rio-Janeiro, et sans que le consulat énonce aucune fortune de mer qu'aurait éprouvée le navire, l'eau qu'il faisait ordinairement augmenta jusqu'à sept pouces à l'heure, ce qui obligea le capitaine, d'après l'avis de son équipage, à relâcher à Fernambouc, port le plus voisin;

Attendu qu'il résulte du premier procès-verbal de visite faite à bord du navire Risoluto, par deux experts nommés par M. le vice-consul d'Autriche, que les experts reconnurent que le navire faisait, terme moyen, cinq pouces d'eau à l'heure ; qu'ils trouvèrent que les coutures du pont étaient dans le plus mauvais état et tellement ouvertes qu'on pouvait y passer la main; que toutes les jointures au dehors, jusqu'à la flottaison, se trouvaient aussi dans la plus grande détérioration, ce que les experts attribuent à l'âge du navire et à la fatigue qu'une grosse mer avait dû lui faire éprouver, et enfin, qu'ils estimèle lest devait être déchargé afin que le navire pût être visité dans son fond et son intérieur;

rent que

Attendu qu'il résulte du procès-verbal de la seconde visite ordonnée également par mon dit sieur le vice-consul, qu'en l'état des dommages soufferts, le navire Risoluto était hors d'état de continuer son voyage, soit à Marseille, soit pour tout autre port;

Et enfin, qu'il est établi, par la troisième visite faite par

l'intendance maritime de Fernambouc, que le navire Risoluto, en l'état de son arrivée au dit port, était d'une valeur de deux millions cinq cent septante-deux mille reis, ou soit huit mille trois cent cinquante-trois francs; que le total des diverses réparations jugées nécessaires par les experts, s'élèverait à quatre millions trois cent vingt-huit mille huit cent reis, ou soit, seize mille six cent cinquante francs; et enfin, que le navire, après les réparations effectuées, ne vaudrait que trois millions de reïs, ou soit onze mille cinq cent trente-cinq francs;

Attendu qu'il est établi par le décret rendu par le vice-consul d'Autriche à Fernambouc, le 1er mai 1835, que le navire le Risoluto a été déclaré innavigable, et par suite, vendu aux enchères publiques, moyennant le prix de sept mille cent quatre-vingt-seize francs, lequel s'est réduit à la somme de huit cent vingt-cinq francs soixante-neuf centimes, déduction faite des frais de vente, de ceux de la relâche et des salaires et conduite de l'équipage;

Attendu qu'il est également établi que le navire Risoluto, aujourd'hui sous pavillon toscan, était jadis le navire russe Nicolino, vendu aux enchères publiques à Marseille pour une somme de neuf mille vingt-cinq francs, auquel il a été fait pour environ huit mille francs de réparations, frais d'armement et mise hors, et qui a été évalué dans la police d'assurance à la somme de quarante-trois mille francs;

Que c'est en l'état de ces faits que le tribunal a à décider si le délaissement pour cause d'innavigabilité fait par le sieur Agretti et ses assureurs, doit ou non, être déclaré valable et mise à charge de ceux-ci;

Et sur ce, attendu qu'en droit et aux termes de l'art. 369 du code de commerce, il faut que l'innavigabilité, pour donner ouverture au délaissement, soit le résultat de fortunes de

mer;

Que, dans l'espèce, aucune fortune de mer n'est énoncée dans le cousulat fait par le capitaine Stellato devant le viceconsul d'Autriche à Fernambouc;

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