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condamnation solidaire au paiement de la somme réclamée faute de représentation du group.

Les demandeurs invoquent les dispositions des art. 221, 222, 223 du code de commerce qui rendent le capitaine responsable des marchandises dont il se charge et l'obligent à garantir les fautes de son équipage.

Le capitaine Raimond excipe, en fait, de ce que le connaissement produit par les sieurs Arquier frères n'est pas signé par lui, mais par le lieutenant Gervaise pour le capitaine en second.

En droit, il soutient qu'il n'en est pas d'un bâtiment à vapeur, où le capitaine en second est choisi par les armateurs, comme des autres navires que le code de commerce a eu en vue et dont l'équipage est formé par le capitaine (art. 223 du code de commerce).

Qu'il résulte de cette distinction que sur les bâtimens à vapeur il y a division de devoirs et de responsabilité entre le capitaine en premier et le capitaine en second, d'où il suit que le capitaine en premier ne peut être responsable des faits du capitaine en second.

Que, dès lors, dans l'espèce, le capitaine Raimond étant resté tout à fait étranger au chargement du group réclamé, ce n'est que contre le capitaine en second et contre le lieutenant, seuls signataires di connaissement, que le recours peut être exercé.

Le capitaine en second et le lieutenant demandent leur relaxe d'instance sur le motif qu'ayant agi sous l'autorité et la responsabilité du capitaine Raimond et l'action en recours étant principalement dirigée

contre celui-ci, il n'y a pas lieu à prononcer condamnation contr'eux.

JUGEMENT.

Attendu, en fait, qu'il est établi au procès, par le connaissement qui a été produit, que le 25 juin dernier, il a été chargé · à Naples par le sieur de Rothschild sur le paquebot à vapeur l'Océan un groupe contenant cent quarante-cinq quadruples et demi d'Espagne en or, en destination pour Marseille, pour remettre et consigner aux sieurs Jacques Fraissinet et Roux, banquiers de ladite ville;

Qu'il est également établi qu'à l'arrivée du paquebot à Marseille, le group dont il s'agit ne s'est pas trouvé à bord du navire, et que les sieurs Arquier frères, agens principaux de l'entreprise des paquebots à vapeur, ont été obligés d'en payer la valeur auxdits sieurs Jacques Fraissinet et Roux ;

Attendu, en droit, que l'art. 222 du code de commerce dispose que le capitaine est responsable des marchandises dont il se charge, et qu'il est tenu d'en fournir une reconnaissance que l'on nomme connaissement;

Que la circonstance qui se rencontre dans l'espèce, que le connaissement des quadruples dont il s'agit n'a pas été signé par le capitaine, mais par un des officiers du bord, ne saurait exonérer celui-là de la responsabilité que la loi fait peser sur lui, puisqu'il est de principe que ce capitaine répond des fautes de son équipage;

Attendu que la distinction que l'on a voulu établir entre les bâtimens à vapeur et les autres navires, est repoussée par la généralité des expressions de l'article 221 du même code;

Que la division des droits, et par suite, de la responsabilité entre le capitaine en premier et le capitaine en second, dont excipe le capitaine Raimond, ne saurait être admise par le tribunal, que là où il serait justifié qu'elle aurait été convenue avec les armateurs lors de leur engagement, mais qu'on ne

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saurait l'induire seulement de ce que le capitaine en second avait été choisi par les armateurs, et de ce qu'ils lui auraient imposé l'obligation de prendre une action dans l'entreprise ;

Que l'art. 223 dudit code, en soumettant le capitaine à se concerter avec les armateurs lorsqu'il est dans le lieu de leur demeure pour la formation de l'équipage, ne diminue cependant en rien, dans ce cas, la responsabilité qu'il fait peser sur lại, quant à ses actes; que le capitaine étant toujours libre de refuser les membres de l'équipage qui lui sont présentés par les armateurs, ou d'attacher à son agrément telle condition qu'il juge convenable dans ses intérêts, ne peut plus, lorsqu'il l'a donné, s'en faire un moyen pour répudier une partie de sa responsabilité;

Attendu que le précédent que le capitaine invoque contre les armateurs pour établir qu'ils ont reconnu la responsabilité du sieur Laperger ne saurait être suffisant pour repousser l'action qu'ils dirigent aujourd'hui contre le capitaine; qu'il n'y ent, en. effet, à cette époque, aucune réclamation de la part du sieur Laperger, et qu'il importait peu à l'entreprise que la perte du ballot fût supportée par l'un plutôt que par l'autre de ces deux capitaines, l'essentiel pour elle étant qu'elle en fût déchargée;

Attendu que, par le paiement fait par les armateurs aux sieurs Jacques Fraissinet et Roux de la valeur du group dont il s'agit, ils ne peuvent être présumés avoir reconnu l'irresponsabilité du capitaine Raimond; qu'il est de principe posé par l'art. 1251 du code civil que celui qui paie une dette à laquelle il était tenu avec d'autres ou pour d'autres, rapporte ipso facto la subrogation légale des droits du créancier; que, dans l'espèce, les sieurs Cartairade et compagnie étaient incontestablement tenus pour le capitaine Raimond, à l'égard des sieurs Jacques Fraissinet et Roux, à raison de la perte du group dont il s'agit, puisque, aux termes de l'art. 216 du code de commerce, ils étaient responsables à leur égard des fautes de ce capitaine ; qu'il suit de là que, tout comme le capitaine Raimond n'aurait pas pu se soustraire à l'action des sieurs Jacques FraisT. XVI. — 1re P.

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ment de blé qu'il s'engage à transporter à Bone, à la consignation de la maison Régny née Bernadac. Arrivé à Bone, l'entrée lui est refusée jusqu'à ce qu'il ait purgé sa quarantaine dans un autre port. Il se rend alors à Marseille.

Le 28 juin 1837, le capitaine Defondza assigné la maison Régny née Bernadac devant le tribunal de

commerce.

Il demande que cette maison procède immédiatement au débarquement et prenne livraison du chargement de blé dont il s'agit et qu'elle soit condamnée à lui payer:

1o Le nolis stipulé d'Odessa à Bone;

20 Le nolis de Bone à Marseille, à fixer par le tribunal ou à diré d'experts;

3. Les frais de quarantaine tant à Bone qu'au port du Frioul et au port de Marseille ;

4o Les dommages-intérêts à régler et débattre par état;

Et que, faute par la maison Régny née Bernadac de prendre livraison du chargement de blé dans les vingt-quatre heures de la prononciation du jugement à intervenir, il soit nommé un tiers consignataire chargé de procéder au débarquement et à la mise en magasin du chargement dont il s'agit, aux risques et périls des propriétaires et de payer les nolis, frais et dommages-intérêts réclamés par le capitaine;

Et, subsidiairement, dans le cas où le tribunal déciderait qu'il y a lieu de transporter le chargement à Bone, le capitaine Defondza demande de n'être tenu de reprendre son voyage qu'en tant qu'il

lui sera payé un nolis de Bone à Marseille et de Marseille à Bone, et les dommages-intérêts résultant de sa quarantaine à Marseille.

La maison Régny née Bernadac conteste toutes les demandes du capitaine Defondza; elle soutient qu'il ne dépend pas de lui de terminer son voyage à Marseille, et qu'il doit accomplir l'obligation qu'il a contractée à Odessa de transporter le chargement de blé à Bone.

JUGEMENT.

Attendu qu'il est établi que le capitaine Defondza s'est obligé pour un voyage d'Odessa à Bone; que c'est donc dans ce port, seulement, lorsqu'il y aura consigné son chargement, que son voyage sera terminé ;

Attendu que le refus fait à Bone de ne le recevoir qu'après qu'il aurait purgé sa quarantaine dans un autre port n'est pas au nombre des cas dans lesquels la loi autorise la rupture du voyage;

Que si le capitaine à raison de ses accords avec les chargeurs a droit à des dommages-intérêts pour les frais que 'sa quarantaine à Marseille aura pu lui occasionner, c'est au lieu du reste qu'il pourra les réclamer,

LE TRIBUNAL, sans s'arrêter à la demande du capitaine Defondza, met la maison Régny née Bernadac hors d'instance et de procès avec dépens.

t.

Du 30 juin 1837. Prés. M. CROZET DE BARGMANN. Plaid. MM. DUMAS pour Régny, REY De FORESTA pour le capitaine.

Appel de la

part du capitaine Defondza.

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