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(Philippe contre Chapplain.)

LE sieur Philippe, marchand de chevaux à SaintChamas, vend un cheval au sieur Chapplain, propriétaire, sous garantie, pendant trois mois, de tous vices rédhibitoires et maladies quelconques.

Vingt-huit jours après la livraison, le cheval

meurt.

Le sieur Chapplain assigne le sieur Philippe devant le tribunal de commerce d'Aix, à fins de restitution du prix.

Le sieur Philippe décline la juridiction commerciale.

Le 19 janvier 1837, jugement, par lequel le tribunal se déclare compétent, et, avant dire droit, autorise Chapplain à prouver par témoins, que le vendeur lui a garanti le cheval pendant trois mois, et que l'animal est mort vingt-huit jours après la livraison, faits déniés par Philippe.

Appel, de la part du sieur Philippe, devant la cour royale d'Aix.

Il soutient qu'il ne s'agit pas, dans l'espèce, d'un acte de commerce, que la vente n'a ce caractère qu'autant qu'elle a lieu entre marchands; or, ici, le demandeur est simplement propriétaire; que ce qui prouve que la vente seule n'est pas un acte de commerce, c'est que l'art. 632 du code de commerce qui définit ces sortes d'actes, ne parle que d'achats pour revendre et n'y comprend pas le cas de vente; que l'achat pour revendre constitue matériellement une opération commerciale; car, il y a là spécula

tion en vue de bénéfice; mais qu'il n'en est pas de même de la vente, car chacun peut vendre sans être commerçant et sans vouloir spéculer.

A l'appui de sa défense, le sieur Philippe invoque un arrêt de la cour de Nîmes, du 19 août 1808, et un arrêt de la cour de Metz du 19 avril 1823(1).

ARRÊT.

Attendu que l'art. 632 du code de commerce, répute acte de commerce tout achat de denrées et marchandises pour les revendre ;

Attendu que cette disposition doit comprendre tout à la fois l'achat et la revente ;

Que la raison doit ainsi le décider, et que si le texte de cet article ne présente la revente que comme destination de l'achat, l'esprit de la loi, qui seul la vivifie, embrasse nécessairement la revente, qui devient, dès lors, acte de commerce, puisque cette revente n'est que la suite et la conséquence de l'achat, qui n'a été, d'après la loi, déclaré acte de commerce, qu'à cause de la revente qui pouvait le suivre ;

Attendu que cette manière d'interpréter l'art. 632 précité est justifiée par l'art. 638 du même code de commerce, qui excepte des actes de commerce les ventes faites par des individus qui n'avaient point acheté pour revendre;

Qu'une telle exception aurait été inutile dans la loi, si cette loi avait voulu, par l'art. 632, déterminer d'une manière absolue et générale que les achats seuls constituaient des actes de commerce et non les reventes;

Que, de plus, les exceptions sont toujours la preuve que règle et le principe étaient déjà établis;

(1) Voy. Journal du Palais, tom. 11 de 1824, pag. 341. SIREY, tom. x, 11e part., pag. 348, et tom. 23, 11o part., pag.

Attendu que, dans l'éspèce de la causé, Jean-Baptiste Phi•Hppe a la qualité incontestée de commerçant en chevaux; qu'il avait vendu un cheval à Charles Chapplain, et a fait àmsi un acte de commerce dont le tribunal de commerce d'Aix devait et pouvait connaître,

LA COUR confirmé (1).

Du 28 avril 1837.-3 ch.- Prés. M. DARLATAN
Plaid. MM. TARDIF et MOUTTE.

LAURIS.

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Monnaie. Change. Chapeau. Règle

ment.

Usage.

Lorsque le fret est stipulé dans le connaissement en monnaie étrangère, la conversion de cette monnaie doit-elle étre opérée d'après le cours en vigueur au lieu du paiement ? (Rés. aff.) Lorque le connaissement attribue au capitaine le droit d'avarie et chapeau d'usage, sans déterminer la quotité de ce droit, l'usage qui doit faire règle est-il celui du lieu où le paiement du fret doit être effectué? (Rés. aff.)

(Thompson contre Oxnard.)

->

LE capitaine Thompson, commandant le navire américain Clarissa-Andrews, consigne à Marseille aux sieurs Thomas Oxnard et fils 1,597 balles graines de coton, expédiées de la Nouvelle-Orléans.

(1) Voy. E. VINCENS, Législation commerciale, tom. 1o, pag. 123. Journal du Palais, tom, 11 de 1837, pag. 144,

note 1.

Le connaissement stipule le fret en dollars pour 1,696 fr. 55 cent. et porte dans sa partie imprimée qu'il sera, en outre, payé au capitaine le droit de chapeau et avarie d'usage; mais le blanc qui devait servir à indiquer la quotité de ce droit n'est pas rempli.

Quelques difficultés s'élèvent entre le capitaine et ses consignataires relativement au règlement du fret.

Le 18 février 1837, le capitaine Thompson assigne les sieurs Oxnard et fils à fins de paiement de 1,781 dollars 37 centièmes, soit de 9,761 fr. 90 cent. pour montant du fret et chapeau des balles graines de coton consignées.

Les sieurs Oxnard répondent à cette demande : qu'ils ne font pas difficulté de payer le fret, mais qu'ils ne sont pas d'accord avec le capitaine sur le change des dollars en francs;

Que le dollar, soit la piastre américaine, est réglé dans l'usage à 5 fr. 25 cent. le dollar pour la Nouvelle-Orléans, et d'après la loi américaine, à 5 fr. 33 cent. 173;

Qu'il n'y a aucun motif, dans l'espèce, pour régler le fret d'après la piastre forte d'Espagne, qui n'est ni la monnaie américaine, ni la monnaie stipulée dans le connaissement;

Que le fret doit donc être réglé à 8,906 fr. 90 c. à raison de 5 fr. 25 cent., et au plus, à 9,048 francs 26 cent. à raison de 5 fr. 33 cent. 173;

Quant au chapeau : qu'il n'en a pas été stipulé et que le blanc qui devait servir à en constater l'existence et la quotité n'a pas été rempli dans le connais sement, mais au contraire, biffé.

En conséquence, les sieurs Oxnard, au bénéfice de l'offre qu'ils font de payer au capitaine Thompson 8,906 fr. 90 cent., et subsidiairement, 9,048 francs 26 cent., demandent d'être mis hors d'instance et de procès.

JUGEMENT.

Attendu que le connaissement relatif aux balles graines de coton dont il s'agit contient la condition, qu'outre le fret convenu, il serait payé au capitaine le chapeau et l'avarie d'usage

Attendu qu'en tirant un trait sur le blanc qui devait contenir le montant auquel devait être fixé le droit de chapeau et avarie, et ne déterminant, par conséquent, rien, quant à la quotité de ce droit, les parties ont évidemment entendu s'en rapporter, pour cette quotité, à l'usage; que cet usage ne peut être autre que celui du lieu où le paiement du fret devait être effectué;

Que, d'après l'usage de la place, le droit de chapcau que l'on accorde aux capitaines, est d'ordinaire de cinq pour cent ;

Attendu que, d'après la valeur des monnaies, fixée dans l'annuaire de 1836, le dollar vaut en France 5 fr. 42 cent.;

Que les sicurs Thomas Oxnard et fils ne payant pas en dollars, monnaie convenue dans le connaissement, doivent nécessairement donner leur représentation en francs,

LE TRIBUNAL, ayant tel égard que de raison à la demande du capitaine Thompson, condamne les sieurs Oxnard et fils au paiement, en sa faveur, du droit de chapeau, à raison de cinq pour cent sur le fret convenu, et ordonne que la conversion des dollars en francs sera faite à raison de cinq francs quarante-deux centimes pour chaque dollar, avec intérêts et dépens.

Du 28 février 1837. Prés. M. BEnsa. - Plaid. MM. LECOURT pour le capitaine, REY DE FORESTA pour Oxnard.

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