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(Esnault-Pelleterie contre Ministre des finances.)

ORDONNANCE.

LOUIS-PHILIPPE, etc.

Vu la loi du 1er brumaire, an 7; vu l'art. 66 de la loi du 25 mars 1817, et l'art. 61 de la loi du 15 mai 1818;

Considérant qu'aux termes des lois susvisées, les patentables compris dans les cinq premières classes du tarif annexé à la loi du 1er brumaire, an 7, qui ont plusieurs établissemens dans diverses communes, doivent payer le droit fixe de patente dans le lieu où le droit est le plus élevé, et le droit proportionnel dans chacune des autres communes ;

Considérant, que le sieur Esnault-Pelleterie a deux établissemens, situés l'un à Rouen, l'autre à Paris, à raison desquels il a été assujetti, en 1831, à deux droits fixes de patentes, l'un de 240 fr., comme marchand en gros, pour son établissement à Rouen, rangé dans la première classe du tarif, et l'autre de 100 fr., comme marchand en détail pour sa maison de Paris, rangée dans la seconde classe;

Considérant qu'il résulte des vérifications faites sur les registres du réclamant à Rouen, conformément aux dispositions de l'art. 31 de la loi du 1er brumaire an 7, que le sieur EsnaultPelleterie fait en ladite ville la commission et la vente des toiles par ballots de pièces et de demi-pièces pour des valeurs de huit et de dix mille francs à la fois, d'où il suit que c'est avec raison le conseil de préfecture de la Seine-Inférieure à maintenu ledit établissement dans la première classe, et renvoyé le réclamant à se pourvoir devant le conseil de préfecture de la Seine pour se faire décharger de son droit fixe à Paris, où il devait le droit proportionnel.

que

« Art. 1or. La requête du sieur Esnault-Pelleterie est rejetée. »

Du 31 juillet 1833. — Rapp. M. BRIAN, maître des requêtes.-Ministère public M. MARCHAND. —

Plaid. M. Lacoste.

Effet de commerce.

Endosseur.

Besoin.

Protêt.

%༢ས

Le porteur d'un effet de commerce est-il tenu, à défaut de paiement à l'échéance, de faire protester aux besoins indiqués par les endosseurs? (Rés. nég.)

Nous avons rapporté dans ce recueil deux arrêts de la cour de cassation, rendus en 1829 et en 1834, qui ont résolu négativement cette question (1).

Cette jurisprudence, à laquelle se trouvent contraires deux auteurs recommandables, M. Emile VINCENS et M. PARDESSUS, n'a pas encore prévalu auprès de quelques tribunaux de commerce, notamment de celui de Paris.

Par jugement du 17 novembre 1836, rendu entre le sieur Donet et les sieurs Bourdon et Chrétien, ce tribunal a décidé que le protét d'un effet de commerce doit être fait au domicile des payeurs au besoin indiqués par les endosseurs, aussi bien qu'a ceux indiqués par le tireur et le souscripteur (4).

La question, représentée de nouveau devant le même tribunal, a été résolue par lui dans le même

(1) Tom. X, 11 part., pag. 146: et tom. xiv, 11 part., p. 70. (2) Législation Commerciale, tom. 11, pag. 187 et 300. (3) Cours de Droit Commercial, 3e édition, no 404 et 421. (4) Voy. Sirey, 1837, 11e part., pag. 93.

T. XVI. IIe P.

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sens; mais sa décision a été infirmée par royale de Paris, dans l'espèce suivante. >

( Carette et Minguet contre Lefrançois. )

la cour

LES sieurs Carette et Minguet, banquiers à Paris, étaient s d'un effet de 2,000 fr. revêtu d'un besoin indiqué par l'un des endosseurs, au domicile de M. Socard Magnier.

A l'échéance, les porteurs font protester l'effet faute de paiement au domicile du souscripteur seulement.

*

Ils exercent ensuite leur recours contre les endosseurs.

Le sieur Lefrançois, l'un d'eux, auteur du besoin indiqué, se refuse au remboursement, sur le motif que les porteurs ont perdu tout recours contre lui faute d'avoir fait protester au besoin, ainsi que le prescrit l'art. 173 du code de commerce.

Les sieurs Carette et Minguet répondent que la loi ne les obligeait point à faire protester au domicile indiqué au besoin par un endosseur; que la disposition de l'art. 173 du code de commerce ne s'applique qu'au besoin indiqué par le souscripteur

dé l'effet.

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Jugement qui réprouve ce système de défense et déclare les porteurs déchus de leur recours contre 1 le sieur Lefrançois.

Les motifs de ce jugement sont ainsi conçus()

Attendu qué l'indication au besoin peut être mise sur une lettre de change par tous ceux qui y ont intérêt, et que ceux-là y ont tous intérêt qui, soit comme tireurs, soit comme endos

seurs, sont solidairement obligés à son paiement; que cet intérêt est pour eux premièrement, d'éviter les frais d'un compte de retour; deuxièmement, d'être aussi avertis plus tôt du nonpaiement par le principal obligé, ce qui a souvent une grande importance;

Attendu que cet usage, établi depuis la création de la lettre de change, a été reconnu et consacré par la loi, d'abord par l'art. 159, qui a statué qu'en cas de concurrence ponr l'intervention, celui qui opére le plus de libérations est préféré ;

Or, il faut remarquer que l'intervention suppose l'indication d'un besoin, moyen le plus simple de faire connaître le nonpaiement à celui qui doit intervenir;

Enfin, par l'art. 173 qui dit que le protêt doit être fait au domicile des personnes indiquées par la lettre de change pour la payer au besoin, sans restreindre ni limiter le nombre de ces personnes;

Attendu que l'art. 187 a déclaré applicables aux billets à ordre les dispositions relatives aux lettres de change, relatives, notamment, au paiement par intervention et au protêt;

Attendu en fait, qu'il est reconnu à l'audience et constant au procès, que le billet de 2,000 fr. de Duval fils, ordre Dodon,t payable fin mars, portait, avant son échéance, cette indication au besoin chez Socard Magnier, forme ordinairement adoptée et consacrée par l'usage; que le protêt n'a point été fait au domicile du sieur Socard Magnier, mais à celui de Carette et Minguet, porteurs, qui ont substitué à cette première indication un besoin à leur propre domicile, à eux porteurs, et qui auraient déclaré intervenir pour le compte de Donnet, troisième endosseur;

Attendu qu'ils ne pouvaient être ainsi dispensés de protester i au domicile de Socard Magnier, précédemment indiqué pour payer au besoin, enginy

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Attendu que l'omission de cette formalité substantielle du protet l'a vicié dans son essence; que, par conséquent, il est avicié nul, qu'il n'y a lieu, par suite, à examiner si l'on a fait en temps utile les dénonciations et significations d'un acte nul.

Appel de la part des sieurs Carette et Minguet. M. l'avocat-général DELAPALME conclut à la confirmation du jugement par les motifs suivans :

L'usage des indications de besoins par les endosseurs existait avant le code de commerce. Si l'article 173 de ce code ne l'autorise pas d'une manière explicite, du moins ses termes ne répugnent pas à ce que l'usage soit conservé.

« Le commerce l'a entendu ainsi, et son interprétation n'est, en réalité, que l'application de cette règle vulgaire : ce qui n'est pas défendu est permis.

<< Le porteur peut-il se plaindre de ce qu'un ou plusieurs endosseurs auront, par addition au titre, indiqué un tiers qui, au besoin, paiera la traite ? Ce, serait se plaindre de ce que les sûretés se multiplient pour lui, car les besoins sont la meilleure recommandation de la lettre de change.

<<< Il ne sera pas plus recevable à se plaindre de la trop grande multiplicité des besoins, en ce qu'elle rendrait impossible ou très difficile l'accomplissement de la formalité du protêt dans le délai de la loi, car on est toujours libre d'accepter ou de refuser une lettre de change.

<<< Celui qui l'accepte se soumet à la condition de l'endossement qui lui est transmis, c'est-à-dire à l'obligation de faire protester aux besoins indiqués pour le paiement.

<< Sans doute, l'indication du besoin n'oblige pas l'intervenant indiqué; mais elle ajoute, l'expérience le démontre, une garantie de plus au titre, elle augmente les chances du paiement et les sûretés du porteur. Elle a de plus l'avantage de soustraire les

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