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Si même, en l'absence de toute stipulation par ticulière, on pouvait soutenir la compétence de l'administration, à combien plus forte raison doiton exécuter la convention par laquelle les parties se soumettent expressément à la juridiction admi

nistrative.

Enfin, si la décision de l'intendant militaire ne satisfait pas le capitaine, il aura son recours au conseil d'état.

JUGEMENT.

En ce qui touche le classement des avaries :

Considérant que, soit du rapport de mer, soit du livre de bord tenu par le capitaine Brignetti, il résulte clairement que la relâche à Malte n'a été déterminée que par des avaries survenues au Saint-Fortuné antérieurement à la première délibération de l'équipage, laquelle a eu seulement pour objet le jet à la mer des effets ou marchandises placés sur le pont du navire;

Que ces avaries ne peuvent avoir le caractère d'avaries communes; qu'elles sont des avaries particulières, comme produites par un événement non prévu et nées d'une fortune de mer; qu'en ce cas, il est vrai de dire que les frais de réparation qu'elles ont occasionnés et ceux de la relâche elle-même doivent demeurer à la charge du capitaine Brignetti;

En ce qui touche le règlement des surestaries:

Considérant que l'art. 2 de la charte-partie dispose qu'il est accordé par le capitaine dix jours de starie pour le débarquement, et que, passé ce délai, il lui sera accordé une surestarie réglée par M. l'intendant de l'armée; que c'est là une convention faisant loi entre les parties, et qu'il n'est pas justifié que ce préalable ait été rempli; qu'au moins, quant à ce chef, l'action du capitaine Brignetti a été prématurée;

LE TRIBUNAL SUPERIEUR, émendant, quant aux chefs relatifs aux surestaries, renvoie les parties devant M. l'inten

dant militaire, conformément à la charte-partie du 29 avril 1835, pour en opérer le règlement; confirme, pour le surplus, le jugement dont est appel, et condamne le capitaine Brignetti à tous les dépens tant de première instance que d'appel (1).

Du 11 janvier 1836.—Tribunal supérieur d'Alger. -Prés. M. FILHON.- Plaid. MM. URTIS pour l'administration, NEGRONI pour le capitaine.

Avarie commune.-Caractère. Relâche.-Délibétion.-Forcement de voiles.-Avarie particulière.

Les dommages éprouvés par le navire ne sont-ils avaries communes qu'autant qu'ils sont le résultat immédiat de sacrifices volontairement faits pour le salut commun, en vertu de délibérations de l'équipage? (Rés. aff. )

Par suite, si les relâches opérées en suite de délibé

rations de l'équipage, motivées sur le salut commun, n'ont eu pour objet que de réparer les dommages préexistans éprouvés par le navire, ces dommages conservent-ils le caractère d'avaries particulières au navire? (Rés. aff.)

Le forcement de voiles, méme après délibération de l'équipage, dans l'objet de relâcher pour réparer les avaries antérieurement souffertes par le navire, ne doit-il être considéré que comme une manœuvre ordinaire, une mesure comman

(1) Voy. ce Recueil, sur la relâche, t. xv, ire part., pag. 135 et 263; sur le forcement de voiles, tom. IX, 11e part., pag. 59.

dée par un événement de navigation et qui entre dans la charge du capitaine ? ( Rés, aff. )

Dans de telles circonstances, les dommages résultant du forcement de voiles sont-ils avaries particulières? (Rés. aff.)

(Julien et Granger et consorts contre Régis, Boiscourt,)

LE navire le Lévrier, commandé par le capitaine J.-F. Régis, expédié de Marseille à l'île Bourbon, avait éprouvé dans ce trajet diverses tempêtes et, par suite, des avaries, qui avaient obligé le capitaine à forcer de voiles et à relâcher à l'île Majorque et à Rio-Janeiro.

Ces relâches avaient eu lieu en suite de délibérations motivées pour le bien et le salut communs du navire et de la cargaison.

Dans ces relâches, le capitaine Régis, pour fairé face aux réparations et autres besoins de son navire, avait vendu une partie des marchandises de son chargement et emprunté à la grosse sur le restant de la cargaison.

A l'arrivée du Lévrier à Bourbon, le capitaine assigne ses divers consignataires devant le tribunal de première instance de Saint-Denis, île Bourbon, jugeant commercialement, à fins de règlement en avaries communes et répartition entre le navire et la cargaison des dépenses faites à Palma (île Majorque) et à Rio-Janeiro.

Le sieur Boiscourt - Ricquebourg, chargeur ou consignataire des marchandises vendues en cours de voyage, déclare s'en rapporter à justice

sur la

nature des avaries, et demande condamnation en sa faveur, contre le capitaine Régis et les autres consignataires, au paiement de la somme de 4,000 P., par préférence et privilége sur le corps et le chargement du navire le Lévrier, sous toutes réserves contre les armateurs.

Les sieurs Julien et Granger et autres consignataires demandent que les avaries faites par le Lévrier, pendant son voyage de Marseille à Bourbon, soient déclarées avaries particulières et, en conséquence, supportées par les propriétaires du navire; que les consignataires ne soient tenus de payer par contribution que le montant du contrat à la grosse, pour lequel le capitaine a affecté la cargaison, sauf leur recours, ou celui de leurs assureurs, contre qui dé droit; enfin, que les consignataires soient autorisés à faire retirer leurs marchandises de l'entrepôt de la douane, moyennant le paiement de leur dividende, sous toutes réserves.

Le capitaine demande, de son côté, que les avaries souffertes par le Lévrier, dans le voyage de Marseille à Bourbon, soient déclarées avaries communes; qu'en conséquence, elles soient supportées proportionnellement par les marchandises et la demie du navire et du fret, et que les consignataires soient condamnés à y contribuer pour leur part, sauf leur recours contre leurs assureurs, le capitaine déclarant être prêt à livrer les marchandises chargées à bord de son navire, à la charge, par chaque consignataire, de payer sa part de contribution; et, en cas de refus, il demande d'être autorisé à faire

vendre les marchandises pour compte de qui il appartiendra, etc.

-

JUGEMENT.

QUESTION. En droit, aux termes de l'art. 400 du code de commerce, les avaries faites d'après délibérations motivées et pour le salut commun du navire et de la cargaison sont-elles avaries communes?

Attendu que l'avarie grosse est celle que, dans une circonstance périlleuse, l'équipage délibère comme un sacrifice nécessaire, et qu'il fait et exécute lui-même; et l'avarie simple, celle qui n'est qu'un accident purement fatal, venu de fortune de mer;

Que les réparations commandées par chacune de ces deux espèces d'avaries doivent garder le caractère de l'événement primitif; que c'est ainsi qu'il faut comprendre le dernier paragraphe de l'art. 400, et que, d'ailleurs, le no 3 de l'art. 403 s'en explique si nettement qu'il ne peut y avoir à cet égard aucune controverse;

Attendu que du rapprochement du n° 6 de l'art. 400 et du no 4 de l'art. 403, il résulte que les gages et la nourriture de l'équipage pendant les réparations, celles-ci vinssent-elles à la suite d'avaries grosses, ne peuvent eux-mêmes entrer comme telles qu'autant que le navire est affrété au mois ;

Attendu le Lévrier était affrété au voyage;

que

Attendu que c'est par un événement fortuit de mer, sans aucune part de l'équipage, que s'est déclarée dans la Méditerranée la voie d'eau qui a motivé la relâche du navire à Palma et le radoub qu'il y a reçu, qu'il en a été de même lorsqué, dans l'Océan, a éclaté le mât et ont été éprouvés les dommages qui ont amené l'entrée du bâtiment à Rio-Janeiro et nécessité› les réparations qui y ont été faites; que ce qu'énonce le rapport du capitaine, que le navire fuyait à la lame sous la misaine seulement et ensuite le grand hunier bordé aux bas ris, n'établit pas qu'il y ait eu ce qu'on peut entendre par forcement

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