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un bienfait du ciel nous a tirés, en nous rendant ce monarque adoré qui régit la France avec une sagesse égale à sa clémence.

Je ne vous parlerai point, Messieurs, des bienfaits sans nombre que doit répandre la loi paternelle de l'amnistie; des orateurs célèbres les ont savamment développés, et je craindrais d'affaiblir les avantages qui doivent résulter de leurs discours.

Je vote pour la loi avec l'addition proposée par la Chambre des députés et acceptée par le Roi.

CHAMBRE DES DÉPUTÉS.

PRÉSIDENCE DE M. LAINÉ.

Comité secret du 11 janvier 1816.

Le procès-verbal du 8 janvier est lu et adopté. La Chambre accorde un congé à M. Berthier de Souvigny et à M. de Lancry.

L'ordre du jour appelle la discussion sur les amendements proposés par la Chambre des pairs à la résolution relative au deuil général du 21 janvier.

M. le Président donne lecture des amendements.

Un membre (M. le comte de Roncherolles) dit qu'on ne doit point séparer la mémoire dé Louis XVI de celle de la Reine.

Un second membre (M. le prince de la Trémoille) dit que, puisque la France doit élever des monuments en expiation des crimes de la Révolution, on ne peut oublier ce prince illustre et dernier rejeton de la famille des Condé. Il annonce qu'un membre de la Chambre des députés a fait de cette proposition l'objet d'un amendement, et il demande qu'il soit entendu.

M. le Président annonce que cette proposition vient d'être déposée sur son bureau.

Un membre demande que le nom du défenseur de Louis XVI soit compris dans l'amendement. Il n'est pas appuyé.

M. Hyde de Neuville, l'auteur de la proposition sur le duc d'Enghien, monte à la tribune et dit qu'il reste encore des regrets à consacrer et d'augustes victimes à consoler. Il rappelle les grands souvenirs attachés à la famille des Condé : il dit que ce nom est près de s'éteindre par le crime d'un seul homme. Mais il ajoute que si la Chambre n'a point à justifier la France de ce crime, elle doit rendre hommage à la mémoire du héros dont la perte laisse un vide irréparable au milieu des princes qui nous sont rendus.

Il demande qu'il soit présenté par la Chambre une humble adresse au Roi, pour qu'il veuille bien permettre de faire célébrer un service solennel pour Mgr Louis de Bourbon, duc d'Enghien, et dans l'incertitude du terme de la session, de devancer le funeste aniversaire du 22 mars en le reportant au 22 février.

M. le Président met aux voix si, dans l'article 4, on ajoutera ces mots :

Et de Monsieur le duc d'Enghien; et l'amendement est adopté.

M. le Président met aux voix le premier amendement de la Chambre des pairs; il est adopté. Il met ensuite aux voix l'article additionnel de la Chambre des pairs, amendé par la Chambre des députés, et il est adopté.

M. le Président fait observer qu'il était d'usage dans les précédentes sessions de ne pas voter au scrutin sur les résolutions précédem

[13 janvier 1816.]

la même faculté, et la Chambre, confirm l'usage en cette occasion, adopte la résolu sans vote au scrutin.

La séance devient publique.

CHAMBRE DES DÉPUTÉS.
PRÉSIDENCE DE M. LAINÉ.
Séance du 11 janvier 1816.

Le procès-verbal de la séance du 6 est adopté.

On lit le nom d'un grand nombre de péti naires.

Les pétitions, au nombre de trente-six, renvoyées à la commission compétente.

M. le garde des sceaux, présent à la séanc invité à monter à la tribune pour une comp cation.

M. le comte Barbé de Marbois dit o loi du 5 décembre 1814, qui suspendait jus 1er janvier 1816, les poursuites contre les én remis en possession de leurs biens restés disposition de l'Etat, n'ayant pu avoir son e tion, Sa Majesté, d'après le vou des deux ( bres, à reconnu qu'il était juste de renouve sursis et d'en fixer le terme au 1er janvier Ce délai est nécessaire, ajoute M. le gard sceaux, pour donner aux débiteurs le ten la faculté de prévenir les poursuites de créanciers, avant que ceux-ci puissent e leurs droits sur les gages que la loi fait r pour eux.

M. le Garde des sceaux donne e lecture du projet de loi que la Chambre de a adopté (Voy. la séance du 5 janvier 18 qui est présenté par le Roi à la délibération Chambre.

M. le Président fait observer que ce ne contenant que des dispositions déjà ad par la Chambre (Voy. la séance de la Ch des députés du 2 décembre 1815), la délib n'exige pas les mêmes formes qu'une prop de loi nouvelle; cependant, comme chac droit de parler, même sur les proposition: qui reproduisent les résolutions des Cha il demande si quelque membre veut pre parole.

Personne ne la réclame, personne ne s à ce qu'on vote à l'instant même sur le p loi présenté par M. le garde des sceaux. M. le Président, en conséquence, le r voix et il est adopté. La séance est levée.

CHAMBRE DES PAIRS.

PRÉSIDENCE DE M. LE CHANCELJER.

Séance du 13 janvier 1816.

A midi, les pairs se réunissent sous 1 dence ordinaire de M. le chancelier.

L'Assemblée entend la lecture et app rédaction du procès-verbal de la séance ce mois.

M. le Président rend compte de l'ex par lui donnée à l'arrêté du même jour chargeait de porter au Roi les remercio la Chambre des pairs, pour la bonté Sa Majesté d'associer les Chambres à 1 clémence purement royale, contenu da

Sa Majesté a répondu à M. le président : « Je « sais que je pouvais faire le bien seul; mais j'ai voulu y associer les Chambres, afin qu'un acte « de réconciliation générale ne fût pas seulement «< un acte royal, mais un acte national. >>

"

L'Assemblée arrête que le compte rendu par M. le président sera inséré au procès-verbal de ce jour.

Il est fait lecture du message de la Chambre des députés, en date du 11 de ce mois, et contenant envoi d'une résolution du même jour par laquelle cette Chambre, en adoptant le nouvel article ajouté, par la Chambre des pairs, à la résolution concernant le deuil général du 21 janvier, ajoute elle-même à cet article une disposition qui a pour objet de faire élever un monument national à la mémoire de M. le duc d'Enghien.

M. le Président, après cette lecture, ordonne, aux termes du règlement, l'impression et la distribution, tant du message que de la résolution transmise par la Chambre des députés

Un pair en demande le renvoi aux bureaux ; il saisit cette occasion de réclamer, au nom des principes, contre la facilité avec laquelle, dans la dernière séance, la Chambre s'est écartée des formes prescrites par son règlement, et qui exige que tout projet de loi, toute proposition soient examinés dans les bureaux avant d'être discutés en assemblée générale. L'exemple de précipitation donné par la Chambre serait sans excuse, s'il pouvait se répéter, et nuirait à la considération dont elle doit jouir, en détruisant ce caractère de sagesse et de maturité empreint dans toutes ses délibérations. L'opinant ajoute que, dans la circonstance présente, le renvoi aux bureaux est d'autant plus nécessaire que, malgré tout l'intérêt dû au sort d'un jeune prince victime de la plus noire perfidie, malgré l'horreur attachée au crime affreux qui en prive la France, il est difficile d'apercevoir entre ce crime et l'attentat du 21 janvier, entre l'époque où périt le duc d'Enghien et celle où succombèrent les victimes royales, une liaison qui justifie leur rapprochement dans une disposition législative.

Un autre pair observe à l'appui de cette opinion, que le monument voté à la mémoire des victimes royales est un monument expiatoire, parce que l'Assemblée qui les immola n'eut pas .honte d'imputer à la nation son exécrable forfait; mais que ce motif ne peut s'appliquer à M. le duć d'Enghien, dont la mort fut le crime d'un tyran qui ne prétendit jamais agir au nom de la nation qu'il opprimait.

Un troisième opinant, sans contester l'utilité des règles établies ni la sagesse du conseil qui en recommandent à l'Assemblée la stricte observation, pense néanmoins que, dans la délibération actuelle, les formes qu'elle suivra doivent être assez promptes pour lui permettre d'atteindre le but de la résolution. C'est à juste titre que cette résolution associe des victimes qui ne doivent pas être séparées! On a demandé ce qu'elles avaient de commun. N'est-ce donc pas toujours le sang des Bourbons qu'on a versé en les immolant? Faut-il, pour être réunies, qu'elles aient été frappées du même coup? Mais la hache impie qui, le 21 janvier, a frappé Louis XVI, n'est pas tombée au même instant sur la Reine et Madame Elisabeth. La nation peut-elle refuser un monument au petit-fils d'un héros qui fit de la gloire le patrimoine des Bourbons, et dont le nom suffirait à l'ornement d'un siècle et à l'illustration d'un peuple? L'opinant demande qu'on délibère de suite sur l'addition proposée.

M. le Président consulte la Chambre, qui renvoie la proposition à l'examen des bureaux. La séance est suspendue pendant cet examen. A deux heures, elle est reprise. Lecture faite de la résolution par un de MM. les secrétaires, la discussion est ouverte sur ses dispositions.

Un membre observe qu'en accueillant l'addition proposée par la Chambre des députés, le vœu général des bureaux a été pour que cette addition, détachée de l'article 4, formât dans la résoluiion un article séparé. Il ajoute qu'il a été proposé par quelques membres de voter aussi un monument à la mémoire d'une autre victime de la barbarie révolutionnaire, madame la princesse de Lamballe. L'opinant présente la rédaction de deux articles propres à remplir ce double vou.

Un autre membre pense que, dans la rédaction même de l'article 4, il eût été convenable de séparer Louis XVI de la reine Marie-Antoinette et de Madame Elisabeth. On pourrait du moins substituer dans cet article au mot singulier, un monument, le mot pluriel, des monuments, ce qui laisserait au Roi une entière liberté.

Plusieurs membres, en appuyant la séparation proposée de l'amendement relatif à M. le duc d'Enghien, ne pensent pas que la Chambre puisse en ce moment délibérer sur les autres propositions.

D'autres appuient au contraire le nouvel article proposé en faveur de madame la princesse de Lamballe.

M. le Président observe que cette proposition ne saurait être adoptée par forme d'amendement à une résolution sur laquelle la Chambre a déjà épuisé son droit par les amendements originaires qu'elle y a apportés. Elle n'a dans ce moment à délibérer que sur l'addition faite par la Chambre des députés à l'article 4. Autrement, et si, à propos de cette addition, il était permis d'en proposer d'autres, la Chambre des députés pouvant, à son tour, user du même droit, la délibération deviendrait interminable. On ne peut absolument s'occuper de la nouvelle proposition, qu'en la soumettant aux formes prescrites par le règlement, et en faisant de son objet celui d'une résolution particulière.

Cette doctrine est développée avec force par divers membres, qui établissent que le droit d'amendement, épuisé par la Chambre, sur l'ensemble de la résolution, ne renaît pour elle et ne peut être exercé en ce moment que sur l'addition faite par la Chambre des députés.

Un pair déclare tenir d'un de ses collègues, ancien ministre du Roi, que Sa Majesté était dans l'intention d'élever à Vincennes un monument en l'honneur de M. le duc d'Enghien.

Ce fait est confirmé à la Chambre par le pair dont on invoque le témoignage.

M. le Président annonce qu'il est à sa connaissance qu'une statue devait être érigée à M. le duc d'Enghien parmi les hommes qui ont illustré la France; mais que Sa Majesté, lorsqu'il a eu l'honneur de l'entretenir à ce sujet, ne lui a parlé d'aucun autre monument.

Un pair observe que, quelles que soient à cet égard les intentions de Sa Majesté, rien n'empêche la Chambre d'exprimer son vou, ainsi que l'a fait la Chambre des députés. Il a mérité sans doute d'être honoré par son Roi, mais n'a-t-il pas aussi des droits à un hommage national, ce dernier rejeton d'une branche héroïque dont il s'était déjà montré si digne? Que cet hommage adoucisse, s'il se peut, sa douleur paternelle, et que les vieux jours du plus ancien et du plus illustre soldat de

l'Europe en reçoivent encore quelque consolation. La formation d'un article séparé, contenant l'addition relative à M. le duc d'Enghien, est mis aux voix et adopté.

Cet article est lui-même adopté dans les termes suivants :

« Sa Majesté sera aussi suppliée d'ordonner « qu'un monument soit élevé, au nom et aux frais « de la nation, à la mémoire de M. le duc d'En« ghien.

Au moyen de cet article, qui formera le cinquième de la résolution, l'article 4 sera rétabli ainsi qu'il était avant l'addition faite par la Chambre des députés.

L'ordre du jour appelait ensuite le renouvellement des bureaux, conformément à l'article 6 du règlement.

Il y est procédé par la voie d'un tirage au sort, dont M. le président proclame le résultat.

Les bureaux, ainsi renouvelés, se retirent dans les salles respectives pour y procéder, tant à la nomination de leur président et secrétaires, qu'à la formation du comité des pétitions.

Ces opérations terminées, la séance est reprise. M. le Président met sous les yeux de l'Assemblée l'état des nominations faites par chaque bureau.

La Chambre ordonne l'impression de cet état, ainsi que du tableau des nouveaux membres des bureaux.

La séance est levée.

ANNEXE

A la séance de la Chambre des pairs du 13 février 1816.

NOTA. Le Journal des Débats publia un complément de la séance de la Chambre des pairs. Nous croyons devoir l'insérer ici, en annexe, parce que M. le comte de Saint-Roman proposa, dans la séance du 10 janvier, de demander à M. le comte de Lally-Tolendal des éclaircissements sur la manière dont son discours avait reçu une publicité contraire aux intentions de l'Assem blée.

EXTRAIT DU JOURNAL DES DÉBATS DU 17 JANVIER 1816.

Une explication du plus grand intérêt a eu lieu dans la dernière séance de la Chambre des pairs entre M. le comte de Lally-Tolendal et M. le marquis de Bonnay, sur plusieurs principes relatifs à la loi d'amnistie, qui avait été votée par l'un et par l'autre.

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«La Chambre se rappelle, sans doute (a dit M. de Lally-Tolendal), avec quel entraine«ment, sur la proposition de M. le marquis de Bonnay, elle s'est portée à remercier le Roi de « l'avoir associée à Tacte de sa clémence, ren« fermé dans la loi mémorable que nous avons « adoptée mardi dernier (9 janvier 1816). La Chambre, ce jour-là, songeait beaucoup plus à « donner des preuves de son dévouement qu'à « en mesurer les expressions. Dans la rédaction * définitive du noble pair, auteur de la motion, « deux mots se sont rencontrés, qui, pris dans « leur véritable sens, ne peuvent être susceptibles « d'aucune objection, mais qui, mal interprétés, << ont fait naître au dehors plusieurs doutes, qu'il « y aurait peut-être quelque inconvénient à ne « pas dissiper sans retour.

«La bonté du Roi, dans la communication « dont il nous a honorés, a été appelée par le

« C'est sur cette dernière épithète que beauc « de personnes se sont méprises, en lui don « une extension forcée, une application dén tie par la phrase même où elle se trouve « cée.

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« Oui (a poursuivi M. de Lally avec toute la « meté de son organe et de sa conviction <«< communication préalable, la délibération << discussion commune de l'acte d'amnistie, « été, de la part de Sa Majesté, une bonté t gratuite, parce qu'au Roi seul, sans dépend « et sans partage, appartient le droit d'amni « parce que ce droit est essentiellement inhé à la couronne et qu'elle peut l'exercer co «< il lui plaît, soit à elle seule, soit en y app « gratuitement le concours des deux Cham «L'étendue et les exceptions de l'amnistic << partiennent encore au Roi, sans dépendan « sans partage; car, d'un côté, aucune inter «tion ne peut dérober un accusé à la justic prince; et de l'autre, je ne connais pas « sortirait cette nouvelle puissance, qui pre << drait adresser à la clémence des rois les m « paroles qu'adressa la puissance divine à la «reur des mers: Tu avanceras jusque-là « n'iras pas plus loin! »

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Passant ensuite à la distinction qu'il vo établir, M. de Lally s'est exprimé en ces ter S'agit-il donc, Messieurs, ou d'accorde « d'étendre, ou de resserrer l'amnistie? Tou partient à la couronne, et à elle seule. «< communication, toute association à l'exe « de sa plus haute et de sa plus douce pré «tive, est de sa part une bonté entièrement « tuite.

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«Mais est-il question de prononcer sur la << tinée des individus exceptés de l'amnist « non remis aux tribunaux? s'agit-il de fra « par une loi spéciale, au lieu de condamne « un jugement ordinaire ? s'agit-il d'interdire « et le feu de la terre natale à trente-huit s << les uns évidemment coupables, d'autres «ment suspects, mais aucun légalement « vaincu? Alors la couronne (et le prince « porte, pour notre bonheur, repousserait av dain toute doctrine contraire), alors, dis« couronne se fait gloire de reconnaître qu'e « peut, qu'elle ne veut rien pouvoir à elle s « qu'autant elle est jalouse du domaine ent «la puissance qui pardonne, autant elle dés partage de la puissance qui punit; que «ciation des deux Chambres à l'exercice de dernière, au lieu d'être gratuite, est ind « sable; au lieu d'être une offense à la sou « neté du prince, est un appui pour sa ju «< comme un soulagement pour sa conscie

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Ici M. le comte de Lally a cité le fameux sage de Cicéron: Le peuple romain tout ent peut pas priver un citoyen de sa patrie malg Il a observé que ce principe, si beau en th n'en avait pas moins été, de fait, cruelleme freint dans la personne de Cicéron, par la f et la violence de Claudius. Il a demandé s'il pas été préférable que la justice et la for blique réunies eussent pu alors, par un extrême, mais régularisé, conserver à Rom qu'elle avait proclamé le père de la patrie et hors de son sein celui qui en était la terreu fléau. « Dans nos gouvernements modernes « dit, qui sont plus éclairés, où tous les " ont été approfondis, où ceux des indivi « ceux de la société ont été plus exacteme « lancés, où les maladies des corps politiqu

guérison plus industrieusement recherchés, il « a été reconnu et posé en principe que, pour « tous les Etats, il est des crises extraordinai res ola violence des maux ne peut céder qu'à celle « des remèdes. Il a été reconnu que, dans les gou<< vernements les plus libres, le ressort d'un poua voir transcendant, absolu, ne craignons pas de ré« péter Blackstone, le ressort d'un pouvoir despotia que, supérieur aux choses comme aux personnes, « doit se cacher quelque part, pour y dormir dans «une inaction profonde, tant que la société est « dans son état naturel, mais pour être prêt à la « secourir et à la sauver, s'il vient un de ces mo«ments, aussi rares que terribles, où elle ne puisse être secourue ni sauvée que par lui.

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Mais moins il est possible d'échapper à cette « extrémité quand son heure est venue, plus il « est nécessaire d'empêcher qu'on ne puisse, ou << la prétexter sans cause, ou s'abandonner à son « action sans contrôle. Aussi, à côté du premier principe que nous venons de rappeler, en est«< il un second qui n'a pa été moins positivement « reconnu, c'est que, dans cette extrémité-là « même, l'arbitraire peut encore, et par conséquent doit se revêtir d'un genre de légalité qui « commande le respect en même temps que la « soumission, et qu'ainsi, pour se mettre au-des« sus de toutes les lois, ce n'est pas trop, c'est à ⚫ peine assez du pouvoir législatif tout entier. « Nos voisins ont dit: La toute-puissance du par« lement; et l'individu ou le parti qui menaçaient l'Etat, ou que la loi commune n'aurait pas eu « le temps d'arrêter avant la consommation du « complot, ils l'ont frappé de ce terrible attainder, ⚫ dont frémissent tellement ceux-là même qui le « lancent, qu'à chaque exemple qu'ils en ont « donné dans le cours de plusieurs siècles, ils ont « toujours défendu, par une clause formelle, qu'il « púť tirer à conséquence pour l'avenir. Nous ve«nons de dire, nous : La toute-puissance du Roi « unie aux deux Chambres; et un caractère parti

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culier signalera du moins le premier et, j'espère, « le dernier usage fait en France de ce pouvoir a transcendant et absolu c'est qu'une empreinte, << non-seulement de justice, mais de clémence, << s'est fait encore sentir au milieu même d'une « des dispositions rigoureuses de la nouvelle loi.

La liste du 24 juillet est restée abandonnée à la « volonté du Roi. Le Roi peut abréger l'exil tem« poraire de ceux qui lui paraîtront ne devoir

ètre soumis qu'à une épreuve. Le Roi peut ef« facer de la liste les noms qu'il ne croira pas devoir y maintenir, et que l'opinion publique « peut-être a été surprise d'y rencontrer. Le « cœur du Roi avait besoin de conserver cette liberté, et la conscience de ses Chambres avait « besoin de la lui reconnaître.

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« Concluons, Messieurs.

« Deux parties bien distinctes figurent dans la loi extraordinaire que nous avons votée le 9 de • ce mois :

« Acte d'amnistie, qui appartenait au Roi, sans « dépendance et sans partage.

Acte de rigueur, qui ne pouvait émaner que de la réunion du Roi et des deux Chambres. En remerciant explicitement le Roi de la a bonté gratuite qu'il nous a témoignée, lorsqu'il «a daigné nous associer à l'acte de sa clémence, nous l'avons implicitement remercié du scru« pule vertueux avec lequel il a reconnu et jugé « qu'aux trois portions intégrantes du pouvoir législatif réunies appartenait exclusivement le • droit de frapper le coup d'Etat,dont cette réu«nion a régularisé le principe.

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« C'est dans ce sens, je n'en doute pas, que «M. le marquis de Bonnay a entendu sa rédac«tion; c'est dans ce sens qu'elle a été adoptée « par les pairs. Je ne présumerai point de provo«quer une délibération de la Chambre; mais « l'explication dans laquelle je viens d'entrer, « mais quelques mots d'éclaircissements que je << puis peut-être espérer de l'auteur de la motion, « pénétreront, comme elle, au delà de ces murs, « et ne laisseront plus lieu à aucune des méprises « qu'il est, je crois, convenable de faire cesser.▸ M. le Chancelier a dit en substance que la réponse faite par le Roi aux remerciements de la Chambre, aurait sûrement prévenu les inquiétudes qui venaient d'être exprimées par l'orateur, s'il l'eût connue; et M. le chancelier a donné à la Chambre lecture de cette réponse.

M. le marquis de Bonnay a observé que ces inquiétudes auraient été prévenues dès le premier jour, si, dans la séance du 9, le temps lui eût permis de développer les motifs de sa motion, et il en a donné un aperçu aussi clair que concis.

Organisation des bureaux de la Chambre des pairs.

Par le résultat des élections faites dans chaque bureau, les six bureaux se trouvent organisés de la manière suivante :

Premier bureau. Président, M. le comte de Barthélemi; vice-président, M. le comte de ClermontGallerande; secrétaire, M. le marquis de Rouge; vice-secrétaire, M. le vicomte de Châteaubriand.

Deuxième bureau. Président, M. le comte de Maleville; vice-président, M. le duc d'Uzès; secrétaire, M. le comte de Nicolaï; vice-secrétaire, M. le comte de Latour-Dupin-Gouvernet.

Troisième bureau. Président, M. l'évêque de Châlons; vice-président, le duc de La Vauguyon; secrétaire, M. Lepelletier-Rosambo; vice-secrétaire, M. le comte de Melun.

Quatrième bureau. Président, M. le duc de Saint-Aignan; vice-président, M. le duc de Doudeauville; secrétaire, M. Emmanuel Dambray ; vice-secrétaire, M. le duc de Brissac.

Cinquième bureau. Président, Mgr le duc d'Angoulême; vice-président, M. le duc de DamasCrux; secrétaire, M. le marquis de Frondeville; vice-secrétaire, M. le marquis de La Guiche.

Sixième bureau. Président, MONSIEUR; vice-président, M. le marquis d'Avaray; secrétaire, M. le marquis de Gontaut-Biron; vice-secrétaire, M. le comte de Choiseul.

Nomination du comité des pétitions.

Les membres nommés pour former ce comité,

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M. le Président informe la Chambre qu'il vient de recevoir un message annonçant que la Chambre des pairs a adopté, avec une rédaction différente, l'amendement voté par la Chambre des députés, dans la séance du 11, pour ajouter le nom de Mgr le duc d'Enghien à ceux des illustres victimes auxquelles il sera érigé des monuments expiatoires.

M. le Président donne lecture de cet amendement, rédigé sous la forme d'un article séparé. La Chambre en vote l'adoption.

M. Michel Saglio, député du Bas-Rhin, obtient un congé.

M. Chiflet est appelé à la tribune pour faire un rapport au nom de la commission (1) chargée d'examiner la proposition de M. le vicomte de Castelbajac, pour autoriser les donations et legs en faveur du clergé et les acquisitions qu'il ferait par

contrat.

M. Chiflet. Messieurs, dans une assemblée telle que la vôtre, composée de personnes dont les principes sont sûrs, et la raison éclairée par l'expérience, je n'ai pas besoin de développer longuement la nécessité de la religion dans un Etat.

Au milieu des affreuses convulsions qui ont bouleversé la France, au milieu des malheurs qui nous ont accablés, nous avons tous éprouvé (et les vérités de sentiment sont bien plus persuasives que les calculs et les raisonnements de l'esprit), nous avons tous éprouvé que la religion seule était la source des vraies consolations.

Nous nous sommes, en même temps, convaincus qu'elle est la véritable source de la morale. Les idées abstraites ne sont pas à la portée du peuple des principes raisonnés ne peuvent pas s'inculquer profondément dans les esprits simples, et dont les facultés sont peu développées. Il faut au peuple une morale liée à des actes extérieurs qui frappent les sens; et, comme le besoin de la morale est de tous les instants, il faut au peuple des pratiques journalières en quelques sorte, qui le rappellent continuellement aux principes de morale. C'est cet ensemble d'actes et de principes, de devoirs envers Dieu, et de devoirs envers ses semblables, qui constitue la religion. Les devoirs du cœur envers Dieu rappellent le peuple à l'amour de l'homme; les devoirs extérieurs envers Dieu le ramènent à la bienfaisance. Admirable ensemble dans son principe! admirable dans ses résultats!

Je le répète, nous savons, par une cruelle expérience, que le peuple qu'on a dispensé de ses devoirs envers Dieu, se croyait promptement dégagé de tous autres devoirs et finissait par les oublier.

Si la morale est nécessairement liée à la religion et à une religion pratique, il faut des ministres à cette religion.

Point de morale sans religion; point de religion sans culte; point de culte sans ministres.

J'ajoute point de ministres sans une juste liberté, sans une juste indépendance sous les ports de besoins et de secours.

rap

Je n'entends point supposer comme possible l'existence d'une classe de citoyens qui serait ou prétendrait être isolée dans l'Etat; je ne parle que de l'indépendance pour les besoins physiques. Sous ce rapport, les ministres de la religion peuvent être dépendants soit du gouvernement, soit des individus.

(1) Cette commission est composée de MM. Daldeguier, Pardessus, le vicomte de Castelbajac, Barthe-Labastide, le comte de Perrien, le comte de Rougé, le comte Dan

Une dépendance trop entière du gouvern entraînerait nécessairement d'abord des var dans la religion, et enfin sa ruine enti puissant sur le faible, le riche sur le pauvre. insensiblement une forte influence. Tel est de l'humanité, et les fonctions sublimes de ligion n'en préservent pas ses ministres. Si vernement tient dans ses mains leur exi physique, ne peut-il pas un jour substitu caprices de l'homme à la vérité immuable mettre la morale éternelle, la morale pure o aux essais d'un perfectionnement idéal, e par altérer même le dogme toujours essen ment lié à la morale, dont il est la base? I rait autant de variétés que d'Etats différen tant de systèmes religieux que de gouverne successifs, et pour la morale comme p dogme, la religion deviendrait tout hun toute terrestre; elle cesserait d'être la religi ciel.

Voilà l'effet, l'effet plus ou moins prompt inévitable, d'une dépendance trop gran clergé à l'égard du gouvernement, pour le soins physiques. Et un gouvernement sag veut stabilité dans les institutions, fixité da principes, constance dans la conduite, évit germe de versatilité et de variations funeste l'homme trop dépendant ne peut se garanti

La dépendance où le clergé serait des indi n'aurait pas de moins graves inconvénie serait plus choquante encore. Il est contre ture des choses que le supérieur dépende subordonnés, de ceux qu'il doit diriger, de qu'il est destiné à reprendre et à ramener d voie du devoir quand ils s'en écartent. Il est de toute nécessité que les ministres de la rel ces magistrats de la morale publique et pa lière, soient au-dessus du besoin; qu'ils n' dent pas journellement des secours, soit du vernement, soit des particuliers. Il est de néc absolue que cette indépendance leur soit as d'une manière stable pour l'avenir; c'est-à qu'il est nécessaire que le clergé soit pr taire.

Sans parler de l'inconvenance d'abaisser au de salariés les ministres de la religion et morale, lorsque vous désirez tous rétablir morale et la religion; sans parler de cette quante comparaison entre leurs chétifs t ments et ceux de cette multitude d'employ pense, Messieurs, que l'influence, l'import tiennent parmi nous à la propriété; le cler prendra donc l'influence qui lui est néce pour le bonbeur commun, qu'en devenant priétaire. En principe, dans une nation esse lement propriétaire, le clergé doit être pro taire et ne doit pas être salarié.

Je ne prétends pas dissimuler les abus qu taient introduits, suite trop ordinaire des gr richesses, dont on avait trop longtemps l'accroissement. Mais l'époque fatale était v où l'on ne savait pas réformer, on trouvait court de détruire. Que de moyens de rend richesses utiles à l'Etat, sans les enlever à ligion! Des colléges, des séminaires, des mis des hôpitaux, étaient tenus déjà par des me du clergé; on pouvait les charger de l'ent d'un plus grand nombre. Aux défrichemen anciens couvents avaient succédé les reche d'érudition; il était possible de donner à l'e de leurs biens une direction utile aux scien aux arts. Mais on voulait détruire, et l'i public a été sacrifié.

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