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Nous avons cru ne devoir pas vous entretenir non plus de la dépense relative à la Chambre des pairs.

Quant à celle de votre Chambre, nous la portons à la somme que vous avez fixé cette année, en arrêtant votre budget particulier. Nous vous rappellerons seulement, à cet égard, que cette dépense de 610,000 francs ne se trouve aussi forte que par une obligation bien légitime, sans doute, et que tous aiment à voir acquitter c'est la location du palais que la Chambre occupe.

Passons aux budgets des différents ministères. Nous avons cru devoir les examiner avec une attention particulière, moins par un sentiment de défiance personnelle, que parce que cet examen est un devoir pour la Chambre, dont elle ne peut jamais se dispenser. Au moment surtout où la France entière est soumise aux sacrifices les plus pénibles, il importe qu'elle apprenne que les dépenses ont été réduites avec sévère économie, que toutes ont été soumises à une discussion réfléchie, dans cette Chambre chargée spécialement des intérêts des contribuables. Elle est appelée la première à voter l'impôt, chaque année, et elle ne peut le faire qu'en prenant une connaissance exacte de l'emploi des fonds.

MINISTÈRE DE LA JUSTICE.

La commission a fait sur le budget de ce ministère les remarques suivantes qu'elle me charge de vous présenter:

1o On y trouve porté 20,000 francs de traitement pour chaque ministre d'Etat, au nombre de vingt-sept; cette dépense n'est présentée par le ministre qu'hypothétiquement, quoiqu'il n'y ait rien de statué à cet égard, et sauf, s'il y alieu, à la diminuer ou à la retrancher. On peut donc prévoir qu'elle fera un objet d'économie.

29 Neuf couseillers d'Etat, en service extraordinaire, sont employés pour un traitement de 12,000 francs chacun; ce service extraordinaire semble indiquer un autre traitement, à moins qu'il ne s'agisse d'un service gratuit, et il y en a peu aujourd'hui de cette nature; il y a donc lieu d'espérer une réduction sur cet article.

3° La secrétairerie d'Etat présente une dépense de 99,000 francs pour le personnel, soumis à la réduction progressive proposée sur tous les traitements, et de 24,000 francs, pour frais de bureaux. Cette dépense a paru forte, surtout si l'on considère que le conseil d'Etat a aussi son secrétariat, son personnel et ses frais de bureaux.

4° Il nous a été impossible de comprendre un article de 3,000 francs pour la sténographie de la Chambre des députés; les dépenses de la Chambre font partie de son budget, et non de celui de la justice, et il n'y a point ici de sténographie, du moins à notre connaissance; vous devez le voir assez à la manière dont en général vos opinions sont publiées. C'est un objet mo lique que nous présumons avoir passé par distraction des anciens budgets dans celui-ci.

5o La suppression des places de substituts près les cours d'assises, qui n'était pas prévue, lorsque M. le garde des sceaux a arrêté l'état des dépenses de son ministère, donnera lieu à une nouvelle économie.

6o Les traitements sont maintenus sur le taux fixé par le décret du 20 juin 1807; c'est alors qu'il se fit des augmentations dont quelques unes peuvent passer pour des profusions. Les traiteinents des tribunaux de première instance, et ceux des conseillers des cours, semblent réglés

avec toute la modération convenable. Mais il n'en est peut-être pas ainsi de ceux des premiers présidents et des procureur généraux.

Il est vrai que ces magistrats doivent, par leur caractère d'hommes publics, être assujettis à des dépenses autres que celles de la vie domestique, dont ils sacrifient les douceurs et l'indépendance au service de l'Etat.

Mais on doit présumer que ceux qui seront élevés aux premières fonctions de la magistrature, trouveront en général des ressources dans leur patrimoine, malgré la plaie de plus en plus effrayante du morcellement de la propriété.

Il n'est point sans doute de magistrat qui ne sente que la plus modeste bienséance a bien aussi sa dignité, lorsqu'un plus grand éclat serait une surcharge pour l'Etat.

Nous pensons, Messieurs, que, si, dans le cours orageux des vingt-cinq années qui ont précédé la Restauration, tout a tendu à dévorer la propriété, en la surchargeant d'une nuée de salariés, nourris de sa substance, tout doit tendre aujourd'hui à alléger ce fardeau, mais cependant avec cette sage circonspection qu'exige la nécessité des temps, et qui caractérise essentiellement la marche d'un gouvernement réparateur.

Le fléau que nous indiquions a cela de particulier, qu'il porte en lui-même le principe de son accroissement. Lorsque, par l'excès des contributions publiques, la propriété du père de famille, détruite progressivement dans ses mains, n'est plus qu'un titre stérile, il songe à remplacer un revenu qui était à lui, par un salaire dépendant et précaire; l'augmentation des traitements amène à son tour celle des tributs. Ainsi s'établit un pernicieux échange, ainsi s'efface chaque jour, même dans la mémoire des peuples, cette garantie la plus sûre de toutes, et en même temps la moins dangereuse pour l'autorité, celle qui repose sur une propriété protégée par toutes les institutions, et favorisée par les mœurs publiques et les traditions héréditaires.

Cette réflexion générale, et qui ne doit tendre qu'à des réformes successives, pourrait se représenter également sur toutes les parties de l'état des dépenses publiques.

Quant au budget particulier du ministère de la justice, nous vous avons indiqué les bonifications dont il nous a paru susceptible.

Elles peuvent expliquer la réduction qu'il a éprouvée. La dépense, portée à 19,071,703 francs. n'est employée, dans l'état général joint au projet de loi, que pour 17 millions.

Il y aura encore à pourvoir à une autre dépense, pour laquelle il n'a pas été demandé de fonds, c'est celle relative aux traitements des prévôis. Nous avons pensé qu'il serait facile de faire face à cet objet, sans augmenter les fonds à faire pour le ministère de la justice; la sup pression des substituts près les cours d'assises, qui a été prononcée depuis la rédaction du budget, présente un moyen naturel de couvrir la depense de la nouvelle institution.

MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES.

Le ministre avait demandé 6,830,000 francs. Cette somme n'est portée dans l'état général que pour 6,500,000 francs; elle était de 9,500,000 francs dans le budget de l'année dernière; la réduction est de plus d'un tiers. Plus on entre dans les détails de chaque article de dépense, plus on est convaincu que l'économie ne pouvait être plus sévère.

MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR.

La dépense est réduite, dans le budget de ce ministère, à 70 millions, au lieu de 85, somme à laquelle elle était portée dans celui de l'année dernière.

Votre commission, après un examen très-détaillé de tous les articles dont se compose l'état qui les a remis, m'a chargé de vous présenter les observations suivantes :

1° Elle pense qu'il est nécessaire de décharger les communes de la moitié des traitements des préfets. Cette mesure, imaginée par le dernier gouvernement, tenait à un système constamment suivi dans tous les détails de son administration fiscale. Jamais il n'avait été fait d'aussi funestes découvertes dans l'art de s'emparer de tous les produits, pour les dispenser à son gré. Lorsque le despotisme, exercé sur un peuple sans défense, parce qu'il avait détruit toutes ses institutions, trouvait cependant des bornes dans la nature des choses, et était forcé de s'arrêter, la ruse venait à son aide. Après avoir laissé sans secours tous les établissements locaux, on présentait le tableau pertide de leurs besoins, pour disposer à y subvenir; on donnait ce qu'on appelait l'autorisation de faire à cet égard de nouveaux fonds, et dès qu'on en avait obtenu la levée, on ne manquait pas de s'en emparer, sous les prétextes les plus grossiers. Ainsi, cinq centimes par franc de contribution foncière, personnelle et mobilière avaient paru nécessaires aux communes, pour leurs besoins locaux; bientôt le gouvernement vint les absorber par diverses charges étrangères, dont la plus grevante fut le payement de la moitié du traitement des préfets; et, pour réparer les chemins vicinaux, les presbytères et les autres établissements communaux, il fallut recourir à des fonds extraordinaires, dressés arbitrairement, et rendus exécutoires par les préfets. Il est temps de faire cesser un abus aussi criant, et de rendre les centimes communaux à leur destination.

Ce retour à la justice pourra se faire aisément saus surcroit de dépense pour le département de l'intérieur; il suffira de reduire les traitements des préfets aux taux fixés par la loi de leur établissement, celle du 26 ventôse an VIII. Il n'est personne qui ne s'attende à voir réduire les dépenses d'une administration gigantesque, comme toutes les vues de celui qui l'avait créé, et hors de toute proportion avec notre situation actuelle.

Par la loi que nous venons de rappeler, les traitements des préfets des quatre-vingt-cinq dé partements qui composent aujourd'hui le royaume donne une somme de 930,000 francs. La moitié seulement portée dans le budget, sur le taux actuel, s'élève à 1,095,000 francs: l'économie, pour le Trésor, serait encore de 165,000 francs.

2o Les traitements des secrétaires généraux de préfecture sont un objet de 329,000 francs, et l'établissement de ces fonctionnaires a toujours paru assez inutile.

3 Votre commission a encore regardé comme très-désirable la suppression de vingt-deux inspecteurs des poids et mesures, pour lesquels on propose, pour cette année, une dépense de 88,000 francs.

4° Elle a pensé que la somme de 40,000 francs, et celle de 20,000 francs, pour supplément de traitements aux professeurs des écoles de médecine et à ceux des écoles de droit, étaient sans objet, attendu que le seul bienfait que ces profes

gouvernement est de les laisser disposer du produit des inscriptions de leurs élèves, ce qui semble de toute justice, et que les allocations dont il s'agit ont moins été employées jusqu'ici à leur destination apparente, qu'à des gratifications prodiguées à des hommes qui n'ont, dans l'instruction publique, que des titres inutiles et des rétributions lucratives.

50 Enfin votre commission n'a pas aperçu la nécessité d'employer 36,000 francs pour organiser des écoles de musique dans les principales villes du royaume; il ne s'agit pas du Conservatoire de Paris, placé dans les attributions du ministre de la maison du Roi; nous avons cru que nos départements avaient des besoins plus urgents.

Indépendamment de ces économies, et de quelques autres semblables, que la sagesse du ministre pourra lui faire découvrir, nous n'en sommes pas moins convaincus que la somme de 70 millions est loin d'être au delà des besoins. Il est un article surtout pour lequel une excessive parcimonie aurait, pour l'avenir, des conséquences bien fâcheuses: c'est l'entretien des diverses classes de routes publiques; il est à désirer qu'elles profitent des épargnes qu'il sera possible de faire sur d'autres parties.

Un autre objet d'une haute importance, qui se trouve dans les attributions du ministère de l'intérieur, c'est le traitement des ministres de la religion. Cette matière ne pouvait échapper à votre altention: déjà vous vous en êtes occupés avec tout l'intérêt qu'elle réclame. Il serait inutile de vous retracer de nouveau la position du clergé de France; d'autres l'ont fait avant nous, et mieux que nous ne pourrions le faire; votre zèle d'ailleurs n'a pas besoin d'être échauffé. Nous n'avons a vous entretenir que de ce qui est possible, dans les circonstances difficiles où nous nous trouvons. Nous proposons d'ajouter 5 millions aux 12 portés sur le budget, pour les dépenses du clergé, indépendamment de la mesure que présente le projet de loi sur les pensions ecclésiastiques, sur lequel vous aurez bientôt à

délibérer.

L'augmentation que nous proposons doit être employée, avant tout, à compléter le traitement des desservants et vicaires, pour qu'ils le reçoivent, sans déduction de leurs pensions.

A ce moyen, la dépense du ministère de l'inté rieur devrà s'élever å 75 millions. Mais dans cette somme se trouvent comprises les dépenses dêpartementales, ce qui est indispensable, depuis que le trésor public perçoit les centimes destinés originairement à ce genre de dépense.

Nous croyons nécessaire de vous proposer, à cet égard, une mesure réclamée par tous les bons esprits.

Beaucoup d'entre vous, Messieurs, n'ont pas été étrangers aux administrations départementales; ils savent avec quelle cruelle industrie ou était parvenu à augmenter progressivement les centines affectés en apparence à leurs charges locales, tandis qu'on laissait souffrir de plus en plus cette partie du service.

Pour arriver à ce but, il fallait soustraire entièrement a la surveillance des conseils généraux l'emploi des fonds alloués pour les besoins de leurs départements.

Les préfets ne pouvaient se conformer aux allocations des conseils généraux, avant qu'elles eussent été approuvées par le gouvernement, qui devait arrêter définitivement les budgets des departements. Or, ces arrêtés n'étaient envoyés que

les dépenses se faisaient sur des crédits provisoirement ouverts par le ministre, sur des demandes particulières des préfets, et à ce moyen les fonds se trouvèrent entièrement à la disposition du gouvernement. L'approbation tardive qu'il donnait ensuite à l'état de proportion, n'était plus que dérisoire; l'examen du compte du préfet n'avait plus d'objet; on ne pouvait lui reprocher d'avoir ordonnancé les dépenses, sans consulter le budget que le ministre ne lui avait pas renvoyé à temps. C'est ainsi qu'on réussit à ne conserver des administrations départementales, que leurs réunions périodiques, et de leurs budgets, que les centimes qu'ils servaient à lever.

Quand les choses en furent à ce point, on eut recours à un autre piége. Les conseils généraux, dégoûtés de réclamations toujours sans réponse, comme sans succès, sentirent qu'ils n'avaient plus que le rôle passif d'allouer chaque année des centimes qu'ils pouvaient se borner à voter en masse, ou à répartir au hasard. Bien assurés d'avance de l'inutilité de leur travail, ils tâchaient au moins de ne pas augmenter un fardeau dont leurs administrés supportaient le poids sans en retirer aucun avantage. Ce fut alors qu'on imagina de nouveaux centimes, auxquels on donna le nom de facultatifs, et qui devaient être laissés à la disposition exclusive des conseils généraux.

On leur représenta, avec plus de force qu'ils ne l'avaient fait eux-mêmes, les besoins de leurs départements les cathédrales en ruines, les grandes routes impraticables, et les communications interrompues. Les centimes facultatifs furent adoptés, dans le plus grand nombre des départements dans ceux où l'exemple du passé avait excité la défiance, les préfets reçurent bientôt l'ordre de lever. Ils devinrent ce qu'étaient devenus les centimes variables. Les besoins du culte et l'entretien des routes furent transportés, sur les budgets, du chapitre des dépenses variables à celui des dépenses facultatives, et leur inscription fut toujours également stérile. Le taux des contributions fut élevé, ce fut là tout le résultat de la nouvelle invention; c'était aussi le seul qu'on s'en fût promis.

Il ne nous a pas paru inutile d'indiquer de pareils abus.

Le moyen de les réparer se présente de luimême, et tous les départements forment le même vou. Il s'agit de rendre aux administrations locales une indépendance sagement tempérée et qu'elles n'auraient jamais du perdre.

Malgré la difficulté des circonstances, cette importante amélioration nous a paru praticable, sans inconvénient pour le Trésor, dont les besoins vous

sont connus.

Un tableau des dépenses variables de chaque département joint aux pièces que le ministre de l'intérieur nous a adressées, porte la totalité de ces dépenses à 30,960,491 francs, ce qui donne 15 centimes 53 centièmes sur le principal des contributious foncière, personnelle et mobilière. Ces centimes sont levés directement au profit du Trésor, d'après la loi du 25 septembre, avec ceux pour les dépenses fixes et les dépenses accidentelles, telles que le cadastre, les canaux et autres objets, et qui ont été portés en totalité à 50 centimes. Ainsi, le gouvernement devrait employer 30.960,491 francs pour les dépenses variables, antérieurement à la charge des départements.

Cependant le budget du ministre de l'intérieur, pour 1816, ne porte, pour les dépenses variables qui forment le chapitre VIII, qu'une somme de 20 mil

lions, et au chapitre IX 4 millions pour les routes départementales ou de quatrième classe.

C'est donc 24 millions seulement qui doivent être employés cette année, au lieu de 30,960,491 francs. Les besoins extraordinaires du Trésor lui font une nécessité de disposer autrement du restant. Mais on sent que lorsque ces besoins ne seront plus les mêmes, la somme entière doit retourner à sa destination propre.

Ainsi, en se conformant au budget du ministre, on peut, dès à présent, remettre à la disposition des conseils généraux 24 millions qui donnent environ 12 centimes. Il ne peut y avoir de danger pour les dépenses publiques assurées d'ailleurs; et il y a un avantage que vous apprécierez facilement, Messieurs, et qui sera senti par tout le royaume, à étalír les premiers principes d'une meilleure administration. C'est ce que nous vous proposons.

Il faut remarquer cependant que les besoins des différents départements ne sont pas dans la même proportion avec la quotité de leurs contributions. Depuis que les centimes, pour les dépenses variables, ont été à la disposition du gouvernement, il est venu au secours des plus pauvres, sur les fonds votés par ceux qui avaient plus de ressources; cette habitude, déjà longue, ne pourrait être changée subitement, sans des inconvénients graves pour les départements dont les besoins exigeraient un trop grand nombre de centimes.

Nous vous proposons un tempérament qui nous a paru nécessaire. Sur les 12 centimes, au moyen desquels les départements seront chargés des dépenses variables, telles qu'elles sont portées au chapitre VIII du budget du ministère de l'intérieur, et des routes de quatrième classe, qui se trouvent dans le chapitre IX, 10 centimes seulement serout levés séparément sur le principal des contributions foncière, personnelle et mobilière de chaque département, et laissés à la disposition de chacun d'eux; les deux autres centimes resteront dans les attributions du ministère de l'intérieur, pour les répartir entre les départements dont les dépenses variables sont les plus fortes, en proportion du principal de leurs contributions, et nécessiteraient ainsi l'établissement d'un trop grand nombre de centimes.

Pour second moyen, nous adoptons encore l'article 25 du projet de loi, qui autorise à voter 5 centimes de plus dans les départements dont les besoins l'exigeraient. Nous croyons qu'on peut s'en rapporter à la prudence des conseils généraux, pour n'ajouter cette charge à toutes les autres que dans le cas où elle sera indispensable.

Nous pensons, Messieurs, que la réduction à laquelle les départements seront soumis sur la somme nécessaire à leurs besoins sera compensée par tous les avantages d'une administration plus libre, et par les économies que les conseils généraux pourront être autorisés à faire.

L'abonnement consenti aux préfets pour les frais de bureaux est un des articles du budget de l'intérieur qui a fixé l'attention de votre commission. Indépendamment des causes qui ont fait porter ces abonnements bien au delà de la dépense réelle, il doivent être réduits du montant des frais qu'exigeait le travail de la conscription, puisque ce fléau a heureusement disparu. Nous aurions compris cet objet au nombre de ceux qui nous paraissent susceptibles d'économie, s'il ne se trouvait porté au chapitre des dépenses variables que nous vous proposons de retirer entièrement du budget du ministère de l'intérieur, pour

le replacer dans les attributions des administrations départementales.

Un autre article important, sur lequel les conseils généraux auront à s'expliquer, est l'établissement assez récent des dépôts de mendicité. Ils ont été dotés aux dépens des autres administrations; les hospices même ont été forcés de contribuer, sous prétexte du soulagement qui devait résulter pour eux de la nouvelle institution; l'espérance qu'on voulait leur donner a été loin de se réaliser, mais la charge est restée. Depuis plusieurs années les centimes départementaux détournés pour des besoins plus urgents, n'ont fourni que peu de ressources aux dépôts de mendicité; dans beaucoup de départements, leur dépense se trouve presque réduite aux traitements des employés. Dans l'état de dépenses variables que nous avons déjà cité, cet article est porté pour 2,018,200 francs. Le ministre se propose, dans son budget, de réduire cette année cette dépense à un million; les conseils généraux jugeront, chacun suivant ses localités, s'il ne serait pas plus convenable de la supprimer entiè

rement.

MINISTÈRE DE LA GUERRE.

La commission s'est convaincue, par l'examen des différentes natures de dépenses de ce ministère, que la somme de 180 millions n'était susceptible d'aucune réduction. Si la réforme de quelques abus pouvait fournir des ressources, elles recevraient aussitôt une destination avantageuse.

Nous ne nous en sommes pas moins occupés de la recherche de toutes les réformes possibles, certains de trouver dans le ministre le désir d'exécuter toutes celles qui seront praticables.

Le chapitre 1er, qui comprend la dépense intérieure du ministère, et qui s'élève à 2,916,000 fr., avait d'abord paru susceptibles de réduction; mais nous nous sommes assurés que cette dépense avait été l'objet de l'examen particulier du ministre, et que si la multiplicité des travaux arriérés nécessite encore cette année un grand nombre d'employés, ce nombre serait cependant diminué, et qu'il serait pris des mesures pour le réduire l'année prochaine à celui strictement nécessaire.

Le chapitre II est celui qui a surtout fixé l'attention. On n'a pu voir sans une vive impression une dépense de 19,705,553 francs pour les étatsmajors, tandis que la dépense totale des troupes ne s'élève qu'à 30,596,448 francs.

On a dù chercher d'où pouvait provenir une disproportion si affligeante, et on en a trouvé la source dans la cumulation des traitements, dans la multiplicité des aides de camp, dans le grand nombre de rations de fourrage accordées sans

revue.

1o La cumulation de traitements fait l'objet d'une mesure générale que nous vous proposons.

2o Les aides de camp, officiers destinés à aider les généraux dans leurs fonctions, n'étaient, avant la Révolution, connus qu'en temps de guerre, ou au moins auprès des généraux employés activement. Si les habitudes actuelles peuvent apporter à cet égard quelque différence, le ministre sentira sans doute que l'état des finances fait un devoir de se rapprocher de l'ancien ordre de choses.

3° Quant aux rations de fourrage, la diminution de moitié des rations, pour les états-majors, jarait indispensable, jusqu'au grade de lieutenant, qui conserverait la ration allouée.

La réunion des corps d'inspecteurs aux revues

un objet de réforme très-avantageux, et qui nous paraît nécessaire on peut s'en promettre une diminution considérable dans les dépenses.

Enfin, on doit obtenir une grande économie en appliquant avec exactitude l'ordonnance du Roi du mois d'août dernier. En transformant en traitements de retraite, beaucoup moins coûteux, les demi-soldes ou traitements d'activité des officiers supérieurs ou subalternes, on parviendra à éviter l'encombrement dans tous les grades, et à assurer aux officiers subalternes et aux sous-officiers un espoir d'avancement propre à exciter l'emulation.

MINISTÈRE DE LA MARINE.

Le budget porte les dépenses de cette année à 48 millions, et cette somme a paru à votre commission devoir être à peine suffisante.

Ge ministère se charge de 1,900,000 francs pour compléter l'état des dépenses de la caisse des invalides de la marine: cette mesure est en même temps nécessaire et d'une justice rigoureuse. On a successivement puisé dans cette caisse pour compléter les crédits du département de la marine; il en résulte que ses ressources épuisées ne peuvent plus suffire à ses dépenses. Le secours à lui accorder n'est donc qu'une restitution qu'on ne peut ajourner plus longtemps.

MINISTERE DE LA POLICE GÉNÉRALE.

Le ministre avait demandé, dans son bulget, 1,600,000 francs pour les dépenses de l'année; il n'a été porté dans l'état général que pour un million, comme pour 1815. Nous n'avons aucu e observation à vous soumettre à cet égard.

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1o La commission pense qu'on peut espérer des réductions sur les deux premiers chapitres qui comprennent les frais de bureaux pour le personnel et pour le matériel. Le montant de ces deux chapitres est de 5,052,000 francs.

20 La dépense de la cour des comptes, portée à 1,085,400 francs, pourra aussi donner lieu à des économies.

3° Le premier article de chapitre VI porte les dépenses de la direction des contributions a 1,950,0 0 francs.

On doit se rappeler que l'établissement de cette direction, par la loi du 3 frimaire an VIII, donna lieu à de nombreuses réclamations de la part des conseils généraux, et qu'ils les ont renouvelées au-si longtemps qu'ils ont conservé l'espoir de les faire accueillir. Il ne serait pas prudent, sans doute, de se priver dans le moment actuel du secours d'un établissement formé depuis longtemps. Mais dans la suite il sera possible de le remplacer par une administration moins dispendieuse, et plus conforme aux voux et aux besoins des peuples.

Nous pensons que cette importante réforme pourra trouver sa place dans une nouvelle organisation des administrations locales, dont la nécessité paraît aujourd'hui généralement sentie.

4o Le travail du cadastre est porté en dépense pour 1,500,000 francs. Nous ne croyons pas inuiile de fixer un instant votre attention sur celle grande entreprise.

On ne peut se dissimuler qu'en général elle a été peu favorablement accueillie. L'ancien gou

tes fondées sur des observations qui ne sont pas à dédaigner. Elles ont pu venir en partie du danger d'une inquisition redoutable de la part d'un gouvernement oppresseur. Sous ce rapport, elles disparaîtraient aujourd'hui.

Cepen lant plusieurs objections paraissent fondées sur la nature même de l'opération.

On a d'abord été frappé de la dépense qu'elle nécessiterait, et du temps qu'elle exigerait.

Les renseignements que nous avons demandés nous ont fourni les résultats suivants :

Les travaux du cadastre durent depuis treize ans; ils ont coûté de 1803 à 1807..... 20,972,355 fr. et de 1808 à 1815.............. 34,126,984

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Ce qui donne pour une année moyenne. 4,238,411 indépendamment de 8,863,303 francs qui ont été levés de plus pour cet objet, et qui ont été divertis pour d'autres usages.

Un septième à peu près des communes du royaume est entièrement cadastré; mais il y a beaucoup de travaux commencés et non terminés. On en a conclu, par approximation, qu'il ne restait guère que les trois quarts de l'ouvrage total.

Il faudrait donc tripler encore la dépense déjà faite et le temps qui y a été employé.

Et si l'on ne destinait à cette entreprise que 1,500,000 francs, comme on le propose pour cette année, elle ne serait pas terminée dans un siècle.

Quand on pourrait reporter pour l'avenir la dépense annuelle au temps où elle s'est élevée jusqu'ici, le temps serait encore bien long.

Ici se présente la première objection qui a été faite.

La valeur respective des biens fonds-varie perpétuellement, par beaucoup de causes générales et particulières.

Une branche d'industrie créée ou détruite, une communication ouverte ou négligée, une division plus ou moins grande de la propriété, un système différent d'agriculture, la population et la richesse d'une ville accrues où diminuées, élèvent dans un pays et font baisser dans un autre le produit des terres et des maisons, et la différence est quelquefois énorme et assez subite.

Ces variations doivent surtout être sensibles dans un Etat é'endu, composé de provinces qui ont une industrie particulière et des mœurs différentes.

D'un autre côté, le degré d'aisance du propriétaire, son administration plus ou moins bien réglée, l'industrie du cultivateur, les capitaux dont Tun et l'autre peuvent disposer pour l'amélioration du sol, ou ceux qu'ils en retirent en l'appauvrissant, ont également une grande influence sur la valeur des propriétés individuelles ces causes, toujours agissantes, changent incessamment la proportion que l'on cherche à connaître par le cadastre. Au moment même où l'on préiend la calculer, elle est déjà dérangée.

On sent que l'objection acquiert de la force, à raison de la durée de l'opération cadastrale.

On en a fait d'autres sur la manière dont cette opération s'est exécutée en France jusqu'à

sent. La principale porte sur le mode d'évé

tion; elle parait très-forte.

D'après les règlements qui sont suivis, on divise en plusieurs classes les différentes natures de terres de chaque commune.

Pour la première classe, on évalue d'abord le produit brut par experts; on déduit les frais de culture, calculés d'après chaque article de dé

pense; le re-tant forme le revenu imposable. Pour les autres classes, on continue d'estimer leur produit brut, mais la déduction des frais doit se faire suivant la proportion fixée pour la première classe. Cette base, essentiellement vicieuse, n'a pu donner jusqu'ici que des résultats également erronés. Si le produit d'un arpent de première qualité est, aux frais qu'il exige, dans le rapport de 5 à 1, ce rapport est très-différent pour les terres de qualités inférieures, dont les produits sont bien moindres, quoiqué les frais soient souvent plus considérables.

Quoi qu'il en soit, Messieurs, de ces observations, une opération aussi importante, et qui a déjà coûté tant de dépenses, ne doit pas être jugée légèrement. Les conseils généraux qui vont être convoqués seront enfin appelés à exprimer, avec une juste liberté, leurs vœux sur les améliorations dont l'administration intérieure leur paraîtra susceptible. Ils soumettront au gouvernement les observations que peuvent présenter leurs intérêts respectifs et leur situation locale. Cet objet pourra, comme plusieurs autres, appeler leur attention, leurs demandes seront écoutées, leurs motifs seront pesés. Jusque-là le gouvernement est fondé à ne rien précipiter. La somme de 1,500,000 francs portée cette année pour les frais du cadastre ne pourra pas en avancer beaucoup le travail, et ne servira guère qu'à entretenir une administration qu'on ne doit pas détruire, au moins quant à présent.

Vous sentirez sans doute comme nous, Messieurs, la prudence de cette détermination provisoire.

Les autres dépenses publiques ordinaires consistent dans l'intérêt des cautionnements porté à 8 millions, et les frais de négociation portés à 12 millions; ils l'avaient été à 10 millions l'année dernière, et il n'a été employé que 9,287,858 francs mais des retards dans les rentrées pourraient amener cette année un excédant de frais. De plus, nous portons en recette 35,942,000 francs, pour prix redù sur les biens communaux et les bois vendus en exécution de la loi du 23 septembre 1814; une modique portion de ces créances ne sera exigible qu'en 1817 et 1818, ce qui peut augmenter les frais de négociation.

Enfin, il faut ajouter aux dépenses de l'année le fonds d'amortissement que nous portons à 20 millions. Nous vous avons rendu compte de nos motifs, à l'article de la caisse d'amortissement, que nous avons traité après celui de la dette publique, parce que ces deux objets sont Parce nécessairement

La commission n'a pas cru devoir s'occuper de faire les fonds nécessaires au remboursement des 14 millions d'obligations royales, émises en vertu de la loi du 23 septembre 1814; l'échéance de ces obligations n'étant qu'à trois années, les fonds en devront être faits au budget de 1818. Mais elle a porté, au crédit du ministre des finances, l'intérêt dé ces obligations au taux fixé par cette loi.

Les dépenses extraordinaires sont établies dans le budget du gouvernement, et ne peuvent donner lieu à aucune observation.

Nous en retranchons 4,500,000 francs pour dépenses éventuelles, attendu que, pour tout ce qui peut être imprévu, nous vous proposons d'autoriser la création, s'il y a lieu, de 6 millions de rentes perpétuelles.

Nous ajoutons 10 millions pour le remboursement à faire cette année de la moitié des 20 millions avancés par quelques départements, pour

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