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L'Assemblée arrête que le compte rendu par M. le président sera inséré au procès-verbal de ce jour.

M. le Président communique ensuite à la chambre un message parvenu le 8 de ce mois, et contenant envoi d'une résolution prise le 25 du mois dernier par la Chambre des députés, relativement au clergé. (Proposition de M. le vicomte de Castelbajac.)

Après avoir fait donner lecture, par un de MM. les secrétaires, tant du message que de la résolution dont il s'agit, M. le président en ordonne, conformément à l'article 15 du règlement, le renvoi aux bureaux, l'impression et la distribution.

L'Assemblée ajourne au samedi 10 de ce mois, à midi, l'examen de cette résolution, dans les bureaux, et, à deux heures, la discussion en Assemblée générale.

Un membre (M. le due de Doudeauville) obtient la parole pour faire une proposition à la Chambre conformément à l'article 22 du règlement.

Cette proposition a pour objet de faire partager à la Chambre des pairs le vœu émis par la Chambre des députés, dans son adresse relative au 21 janvier, et de supplier en conséquence Sa Majesté de permettre qu'au pied du monument expiatoire, destiné à transmettre à la postérité la protestation du peuple français contre l'attentat de ce malheureux jour, les noms des pairs de France et leur serment d'être à jamais fidèles au Roi et à son auguste famille, dans l'ordre de primogéniture des membres qui la composent, soient inscrits sur la même table d'airain, à côté des noms des députés.

L'auteur de la proposition, après en avoir exposé sommairement les motifs, la dépose, signée de lui, sur le bureau.

M. le Président consulte l'Assemblée sur la question de savoir s'il y a lieu de s'occuper de la proposition qui lui est soumise.

L'Assemblée décide qu'il y a lieu de s'en occuper. Elle en ajourue les développements à samedi prochain.

La séance est levée.

CHAMBRE DES DÉPUTÉS.

PRESIDENCE DE M. LAINÉ.

Séance du 6 février 1816.

Le procès-verbal de la dernière séance publique est lu par M. le marquis de la Maisonfort et sa rédaction approuvée par la Chambre.

De nombreuses pétitions sont renvoyées à l'examen de la commission qu'elles concernent.

L'ordre du jour appelle a la tribune le rapporteur de la commission centrale, chargée de l'examen du projet de loi concernant les élections.

M. de Villèle, député de la Haute-Garonne, au nom de la commission centrale (1). Messieurs, l'ordonnance du Roi, du 13 juillet 1815, portant dissolution de la précédente Chambre des députés et convocation des colléges électoraux, qui vous ont nom més, disposait dans son article 14, que plusieurs articles de la Charte seraient soumis a la révision du pouvoir législatif dans la présente session des Chambres; cette ordonnance portait

(1) Cette commission se compose de MM. de Villèle, Piet, Baert, de Bouville, de Folleville, Dussumier-Fonbrune, Feuillant, de Marandet, Clausel de Coussergues.

aussi que le pouvoir législatif, dans son ensemble, statuerait sur la loi des élections.

C'est par suite de cette ordonnance que les ministres de Sa Majesté vous ont présenté le projet de loi discuté dans vos bureaux et envoyé à la commission dont j'ai l'honneur d'être l'organe auprès de vous.

Les articles 12 et 15 du projet de loi confirment l'article 37 de la Charte, et prononcent la réforme des articles 36 et 38. Il a paru indispensable à la commission que la décision de la Chambre, sur ces articles fondamentaux, soumis à la révision, précédât le rapport complet qu'elle aura à lui faire sur la loi des élections dont ils font partie.

C'est en conséquence de cette opinion que nous venons appeler votre attention sur les trois articles de la Charte, dont doivent dépendre les articles 12 et 15 de la loi des élections, et par suite une partie des dispositions de cette loi.

« Aucun de nous ne doit oublier, » a dit Sa Majesté dans le discours qu'elle vous adressa à l'ouverture des Chambres, « qu'auprès de l'avantage d'améliorer est le danger d'innover. » La sagesse du Roi dicta ces paroles; votre commission ne les a pas oubliées; elle vous propose de maintenir la disposition de l'article 38, qui veut que nul ne puisse siéger à la Chambre des députés, s'il n'est âgé de quarante ans. L'expérience de nos Assemblées délibérantes n'a que trop prouvé combien il était désirable que la maturité de l'âge y servit de contrepoids à la vivacité du caractère national; ce ne sera pas vous, Messieurs, qui détruirez une des garanties les plus importantes que le Roi et la nation puissent desirer, du bon choix des hommes destinés à exercer une aussi grande influence sur le sort de l'Etat.

Ce serait abuser inutilement des moments de la Chambre que de développer ici tous les motifs qui ont fait désirer la rectification apportée par l'article 12 du projet de la loi des élections, à l'article 36 de la Charte, qui fixait le nombre des députés à 262; ce changement n'a été combattu dans aucun de vos bureaux; tous ont senti qu'un plus grand nombre de députés était nécessaire pour que la Chambre fùt en proportion plus convenable avec la population du royaume, et devint plus sûrement l'organe de l'opinion la plus générale dans la nation. Il serait également inutile de défendre devant vous la suppression que vous propose votre commission de la disposition inserée dans le projet de loi à la suite de cet article, pour augmenter la députation du département dé la Seine. Votre commission n'a vu aucun motif pour que ce département, déjà si favorisé par le siege du gouvernement, qu'il a l'avantage de posséder, dùt l'être encore dans la répartition du nombre des députés de la Chambre entre les départements, en raison de leur population; cette opinion a été unanime dans vos bureaux; de plus longs développoments seraient donc superflus.

Mais la disposition la plus importante que la commission ait à vous proposer, celle qui nécessite par son influence plus directe sur la loi des élections, la décision préliminaire qu'elle vous demande en ce moment, est la substitution du renouvellement total de la Chambre, au mode du renouvellement par cinquième établi par la Charte. L'article 37, maintenu par l'article 15 de la loi qui vous est proposée, est ainsi conçu: Les députés seront élus pour cinq ans, et de manière que la Chambre soit renouvelée chaque année par cinquième. Mais comment les députés pourraientils être élus pour cinq ans, et de manière que la Chambre soft renouvelée par cinquième, lors

que le Roi jouit de la prérogative de la dissoudre en totalité, et de la faire réélire en totalité? Il est évident que, s'il use de cette prérogative, la Chambre sera composée de députés qui ne pourront être nommés pour cinq ans, puisqu'ils sortiront, selon leurs séries, au bout d'un, deux, trois et quatre ans; un autre inconvénient accompagnera celui-ci des départements auront l'avantage de procéder deux ans de suite au renouvellement de leurs députés, tandis que ceux des deux dernières séries ne nommeront les leurs qu'au bout de quatre et cinq ans; et si, dans l'intervalle, le Roi vient à dissoudre la Chambre, des départements pourront avoir renouvelé deux fois leurs députés, tandis que d'autres n'auront été appelés qu'à un seul tour d'élection. Ces différences, plus injustes qu'on ne l'a calculé, peutêtre, rendent tout à fait incompatibles, dans notre opinion, le renouvellement partiel de la Chambre et la prérogative royale de la dissoudre, à moins de se soumettre à une confusion tout à fait opposée à la régularité qui nous semble essentiellement indispensable en cette matière.

Le changement que vous propose votre commission est fondé sur des motifs encore plus importants. Le renouvellement partiel de la Chambré des députés, établit évidemment la permanence du corps qui représente la démocratie dans le système de gouvernement mixte qui nous a été donné. Or, cette permanence est contraire à la balance entre les divers pouvoirs, qui peut seule en préparer la durée. Elle nuit au pouvoir du Roi, puisqu'elle tend à gêner la prérogative qu'il a de dissoudre la Chambre, lorsqu'il importe, au contraire, qu'il puisse la mettre en usage assez souvent pour ne pas la laisser périmer, car c'est dans cette prérogative que nous avons tous notre plus sûre garantie contre les entreprises trop ordinaires au corps qui, nommé par le peuple, a plus de moyens de l'agiter et de l'intéresser à ses vues.

L'intérêt particulier de la Chambre des pairs nous paraît également en opposition avec la permancice de la Chambre des députés; appelée à représenter l'aristocratie dans notre système, la Chambre des pairs doit se soutenir par l'exclusif de ses priviléges, et ne peut voir qu'avec crainte et méfiance s'établir auprès d'elle une autre permanence aussi dangereuse dans l'Etat que la sienne est utile.

La permanence de la Chambre des députés n'est pas plus dans l'intérêt de la nation, dont elle est particulièrement appelée à exprimer l'opinion; car les renouvellements partiels lui ôtent les moyens de la faire connaitre avec l'évidence et l'ensemble dont vos nominations ont fourni, Messieurs, un des résultats les plus importants et les plus heureux qui puissent être offerts comme exemple de l'utilité générale du renouvellement total de la Chambre des députés.

Quelle considération pourrait donc vous porter à conserver ce mode de renouvellement par séries, inventé par la Convention pour se perpétuer dans les conseils, et qui, pour premier bienfait, nous donna le 13 vendémiaire ? Ce mode, conservé depuis par Bonaparte, pour mieux assurer le despotisme qu'il voulait exercer toujours sur un corps représentatif muet, et qui n'existe chez aucune des nations dont vous devez nécessairement consulter l'expérience, si vous ne voulez vous exposer au danger d'en faire de nouvelles sur vous-mêmes.

On a dit en faveur du renouvellement par cin

che plus uniforme, et rendait le ministère m incertain dans ses relations avec une Chan qu'il connaissait mieux. Mais il est difficile de c prendre comment on peut se flatter de mi connaître une Chambre, parce que les élém qui la composent sont changés chaque année cinquième, et sont par conséquent dans une bilité perpétuelle. L'étude que les ministres raient à faire de la composition de la Cham serait annuelle dans ce système, et serait pour cinq ans dans le nôtre. La même observa est applicable à toutes les autres objections gées contre le renouvellement total, et qui t bent avec plus de force encore par le renouve ment partiel dans lequel elles se produisent les ans.

Une seule est particulière au renouvellen total, et nous devons la discuter c'est cell danger qu'on trouve à la réunion simultané tous les colléges électoraux du royaume. Nou pouvons négliger d'observer que cette objec suppose, comme toutes les précédentes, le crifice de la prérogative royale de dissoud Chambre; car, si le Roi en use comme croyons avoir prouvé qu'il devrait le faire retombe dans l'autre système, dans l'objec qu'on veut appliquer exclusivement au nôtre

Mais les dernières élections faites simulta ment et en totalité dans le royaume, ont ré sans réplique, ce nous semble, la question danger qu'on supposait à ce mode de renou lement de la Chambre. Jamais plus d'agita n'avait ébranlé les esprits; jamais l'anim entre les parties n'avait été plus grande; ja la France, à peine sortie de la crise révolut naire la plus violente qu'elle ait éprouvée s'était vue accablée sous le poids de si gr malheurs, et menacée de plus de dangers. N moins, aucun tumulte, aucune rixe n'a eu dans les colléges électoraux. Il est, au contra à remarquer qu'il n'a été fait aucune réclama contre la validité des, élections qui en ont ét résultat.

Qu'on ne cherche point, dans des circ tances particulières, les causes d'une telle monie. Un tiers de la France était occupé les troupes étrangères, un tiers par l'armé la Loire le reste était livré, sans aucune i militaire, à toute son indépendance. Si ces verses causes avaient pu exercer quelque influ sur le calme avec lequel ont été faites nos tions, on observerait nécessairement que différence dans les résultats obtenus; et n'en existe point, on est fondé à reconn que notre système est exempt du danger q lui avait supposé.

En effet, Messieurs, en faisant procéder si tanément dans tout le royaume à de nouv élections, on diminue, en le divisant, le da des intrigues et des efforts particuliers: cha est retenu dans sa localité; s'il en sort, il chez lui ce qu'il cherche à gagner au deb ainsi l'iufluence de l'esprit de parti, toutes influences, hors celle de l'opinion générale nation et celle qu'exerce le gouvernement, réduites à leur plus simple expression, pa mode d'élections qui s'applique au renouv ment total que nous proposons. Par les élect annuelles et partielles, au contraire, on dim les influences utiles de tout ce qu'on donn facilité pour agir aux influences nuisibles. A l'opinion publique changée en opinion lo est exprimée moins réellement; ainsi, le gou

la part des influences particulières, perd en réalité ce qu'il semble gagner en facilité pour agir; car lui seul ayant une influence qui peut être exercée en même temps dans tout le royaume, doit gagner à ce que les élections soient faites dans tout le royaume en même temps.

La commission ne peut se flatter, Messieurs, d'avoir pénétré toute la profondeur d'une question qui se lie à de si hauts intérêts, et qui peut être envisagée sous tant de rapports; les lumières qui naîtront de la discussion qu'elle amènera dans la Chambre, suppléeront à l'insuffisance des motifs que je viens de vous exposer; mais avant d'abandonner un sujet si propre à fixer l'attention de tous les bons esprits, qu'il me soit permis d'inviter les orateurs qui voudront le traiter à le considérer surtout dans ses rapports avec l'ensemble de la forme de gouvernement établi par la Charte. J'ose espérer qu'alors leurs réflexions les porteront, comme les nôtres nous ont portés nousmêmes,à reconnaître que le renouvellement partiel de la Chambre des députés entraine inévitablement avec lui la perte de la précieuse prérogative qu'a le Roi de la dissoudre, et que les deux articles de la Charte dont nous demandons la réforme, auraient dù faire partie des articles transitoires nécessités par les circonstances dans lesquelles la France se trouvait à l'époque où elle nous fut octroyée, et être remplacée dans le corps de la Charte par ceux que nous allons avoir l'honneur de vous proposer.

«La Cliambre des députés, statuant sur les articles de la Charte soumis à la révision du pouvoir législatif, par l'ordonnance du Roi du 13 juillet 1815, et rapportés dans les articles 12 et 15 du projet de loi sur les élections actuellement en délibération dans la Chambre, a résolu que l'article 38 de la Charte sera maintenu; que l'article 36 sera réformé comme suit :

Chaque département nommera le nombre de députés porté dans le tableau annexé à l'ordonnance du 13 juillet 1815.

« L'article 37 sera réformé comme suit :

« Les députés seront élus pour cinq ans. La Chambre sera renouvelée en totalité soit au bout des cinq ans de sa durée constitutionnelle, soit lorsque le Roi usera de sa prérogative pour la dissoudre. »

La commission sera prête à terminer son rapport conformément à la détermination que prendra la Chambre sur les questions importantes qui viennent de lui être soumises.

La Chambre, consultée par M. le Président, fixe à lundi prochain l'ouverture de la discussion du rapport qu'elle vient d'entendre.

Un assez grand nombre de membres se présente au bureau et se fait inscrire pour parler dans cette discussion.

M. le Président. Avant de se former en comité général, la Chambre est invitée à entendre un rapport de la commission des pétitions.

M. le comte de Sainte-Aldegonde, rapporteur frappelle que la pétition du sieur Jouhanneau, de Poligny, a été renvoyée par décision de la Chambre à un nouvel examen de la commission, avec l'attribution spéciale de prendre sur la personne du pétitionnaire et les motifs de sa détention prolongée des renseignements auprès du ministre de la police générale. Voici le résultat des informations prises par la commission:

Aucune réclamation, dit le rapporteur, n'est parvenue au ministère de la police de la part du sieur Jouhanneau depuis le 3 août 1815, époque autérieure de deux mois à celle à laquelle Sa Majesté a confié le portefeuille de la police à M. de

T. XVI.

Cazes, de sorte que le ministre n'a pas eu à s'occuper de la position du pétitionnaire, qui ne lui était pas connu. L'examen du dossier qui lui est relatif a appris que le sieur Jouhanneau, arrêté pour fait d'inconduite et de vagabondage, abandonné de sa famille et de ses amis, ne fut séquestré de la société que pour lui épargner à luimême des erreurs graves qu'il avait donné sujet de redouter de sa part.

Le ministre s'est empressé d'ordonner sa mise en liberté et de lui faire donner un secours à l'aide duquel il pourra plus facilement atteindre des moyens positifs d'existence, et cesser le vagabondage qui a servi de motif à son arrestation. La pétition étant ainsi devenue sans objet, votre commission vous propose de passer à l'ordre du jour. M. Hyde de Neuville. Je ne crois pas que la Chambre doive passer légèrement à l'ordre du jour. Il s'agit d'une réclamation importante faite par un citoyen arrêté injustement, à une époque où aucune loi n'autorisait une pareille mesure. Ce citoyen languit depuis sept ans dans les fers. Le secours qu'on lui accorde sera-t-il une indemnité suffisante? Je demande le renvoi au ministre de la justice, afin que le pétitionnaire soit autorisé à poursuivre l'ex-ministre de la police générale, sur l'ordre illégal d'après lequel la liberté d'un citoyen a été compromise.

Le renvoi demandé est combattu par M. Pélissier de Feligonde, et attendu, la liberté rendue au pétitionnaire, la Chambre, adoptant l'avis de sa commission, passe à l'ordre du jour.

Elle renvoie à la commission chargée de l'examen du budget une pétition des tanneurs de Saumur, de Montpellier et de Lille, qui présentent des observations relatives à l'impôt sur les cuirs;

Et une autre, des manufacturiers blanchisseurs de Saint-Quentin, des brasseurs d'Abbeville, et des débitants de boissons de...., également relative aux nouvelles impositions.

MM. de Ponti, Fischer et Garnier, députés, disent-ils, de villes manufacturières, proposent comme moyen de salut et de prospérité nationale la création immédiate d'un milliard de papiermonnaie.

L'énoncé de cette pétition excite un mouvement de surprise très-marqué dans toute l'Assemblée.

Le rapporteur expose que cette demande a rappelé à la commission, lorsqu'elle en a pris connaissance, la douloureuse émission de ces milliards d'assignats créés au commencement de la Révolution, et les fatals résultats de cette opération financière sur la fortune publique et particulière. Il conclut en proposant de passer à l'ordre du jour sur la pétition et tout son contenu. L'avis de la commission est adopté unanime

ment.

Madame veuve Deville, de Paris, expose que son mari, officier d'artillerie dans nos colonies, préféra, en 1793, se brûler la cervelle plutôt que de rendre sa croix de Saint-Louis, qu'il avait méritée par ses services. Cette dame sollicite l'intervention de la Chambre pour obtenir des secours.

La pétition est renvoyée au ministre de la marine.

La chambre de commerce de Dunkerque sollicite l'intervention de la Chambre auprès du ministre des affaires étrangères, à l'effet de prévenir la décision de l'Amirauté de Londres, et d'obtenir la relaxation du bâtiment l'Emile, venant de Cette, pris par les Anglais, quoique naviguant sous pavillon blanc.

Le renvoi au ministre est ordonné.

M. Damotte, de Verne, département du Doubs, 6

ex-receveur de l enregistrement et des domaines à Albona, et ensuite à Monte-Falcone en Illyrie, privé de son emploi par suite de la reddition des Provinces Illyriennes, et alléguant que le ministre des finances aurait décidé que les employés ainsi dépossédés seraient assimilés, pour l'avancement, à ceux de l'intérieur, sollicite l'intervention de la Chambre pour être admis à concourir aux places qui pourraient vaquer dans la suite.

Les demandes de cette espèce étant du domaine exclusif de l'administration, la commission propose de passer à l'ordre du jour. Cette décision est prise par la Chambre.

Les maires de plusieurs communes du département de la Moselle se plaignent de ce qu'un grand nombre de citoyens, dans les mariages qu'ils contractent, se bornent à remplir les formalités civiles. Les pétitionnaires voient dans cette affectation, la preuve d'un attachement marqué à un ordre de choses qui n'est plus, et une fausse interprétation de l'article 199 du Code civil, portant prohibition de bénir les mariages avant qu'ils aient été contractés devant l'officier civil.

M. de L'Ecusson, maire de Moiret, département de Lot-et-Garonne, demande que la législation ne reconnaisse la validité des mariages qu'autant qu'ils auront été soumis à la formalité des cérémonies religieuses et que les époux puissent, dans leurs libéralités, s'imposer la condition de viduité.

Ces deux pétitions sont renvoyées à la commission chargée d'examiner la proposition de M. Lachèze-Muret, concernant les officiers de l'état civil.

Une autre pétitionnaire, M. de Saint-Alphonse, appelle l'attention de la Chambre sur la loi qui ne permet aux créanciers des militaires de saisir que le cinquième de leur traitement.

La commission, en convenant que cette partie de la législation est insuffisante, espère que le Roi pourra présenter les modifications jugées convenables; elle propose l'ordre du jour, qui est adopté.

M. Dugay, maire de Touroure, département de l'Orne, se plaint de ce que les notaires ne fassent point essentiellement partie des colléges électo

raux.

L'Assemblée passe à l'ordre du jour, motivé sur la nouvelle loi proposée concernant les élections.

Madame Bouvet, de la Reynière, canton de Domfront, expose dans une pétition que son père a également signée, que, dans ces temps malheureux où l'on contractait des mariages sans penchant et même sans convenance, et uniquement pour échapper à la conscription, elle a été unie à un jeune homme avec lequel elle n'a jamais cohabité et qu'elle n'a pas revu depuis le moment de la cérémonie du mariage.

Le texte de cette réclamation excite un peu d'hilarité dans l'Assemblée, qui passe de suite à l'ordre du jour.

Le maire de Craon se plaint de l'imperfection que présente, depuis la Révolution, la tenue des registres de l'état civil, et propose un projet de loi pour réparer ces lacunes.

Renvoyé à la commission chargée d'examiner la proposition de M. Lachèze-Muret.

M. Durand, de Paris, demande que nul député ne puisse être élu que dans le département où il réside depuis un an et un jour, et que tout employé salarié soit exclu de la catégorie des personnes éligibles à cette fonction.

M. Mallard, chevalier de Saint-Louis, se plaint

pas de la prérogative d'être admis dans les collé ges électoraux sans condition de fortune, comm ceux de la Légion d'honneur. Il demande qu cette faculté soit rendue commune aux deux or dres.

La Chambre ordonne le renvoi des deux péti tions à sa commission des élections.

M. de La Martellière, autre chevalier de Saint Louis, propose de décerner aux villes de Bor deaux, Marseille, etc., le titre de villes royales et qu'elles soient autorisées à réunir les arme de France écartelées avec leur armoiries mu nicipales.

La commission se plaît à reconnaître combier ces villes se sont rendues recommandables pa leur fidélité et leur dévouement. Mais en considé rant que l'autorisation demandée se trouve dan l'attribution exclusive du monarque, elle propos de passer à l'ordre du jour.

Cet avis est adopté.

M. Le Roi, ancien juge de paix du canton d Bolsain, département de l'Aisne, dans un me moire très-étendu, argue de nullité la vente consommée par l'administration, d'une maiso appartenant jadis à son épouse.

La Chambre, sur l'avis de sa commission, pass à l'ordre du jour, attendu que le pétitionnaire la faculté de se pouvoir pour cause de nullit devant le comité contentieux du conseil d'Etat

Un nommé Tourly, ex-huissier, condamné pou crime de faux en écriture privée sur la déclara tion unanime du jury, par arrêt de la cour d'as sises de Rouen du 12 novembre 1815, demand à se justifier devant une commission de révision

L'ordre du jour sur cette pétition est adopt avec des signes qui manisfestent la désapproba tion d'une demande de cette nature.

La Chambre ne témoigne pas beaucoup plu de faveur pour la pétition de M. Durieux, de 1 ville d'Hérissoan, département de l'Allier, qui pour motiver la demande d'être nommé che porteur de contraintes, fait valoir vingt-deux an de service militaire dans la garde nationale. L proposition faite par le rapporteur de passer l'ordre du jour sur cette pétition est adoptée, e le pétitionnaire renvoyé à l'autorité compétente

L'ordre du jour est également adopté sur 1 réclamation de M. Dubois, d'Arras, qui se plain d'avoir été trop taxé dans l'emprunt de 100 mil lions, et demande le mode de régularisation pro mis, dit-il, depuis si longtemps.

M. le comte de Sainte-Aldegonde, rappor teur. Messieurs, les habitants des Bouches-du Rhône exposent à la Chambre la conduite d maréchal Masséna, dans son gouvernement, à l'e poque du débarquement de Bonaparte, et de mandent qu'il soit signalé à la justice du Ro comme le plus coupable de tous les chefs.

L'importance d'une pareille pétition, déjà ren due publique et revêtue d'un nombre immens de signatures, nous a paru, ajoute le rapporteur devoir fixer l'attention de la Chambre. La com mission, dont je suis l'organe, vous propose d'or donner le renvoi de cette pièce au ministre de l guerre.

Plusieurs voix. Lisez la pétition.

M. Colomb, député des Hautes-Alpes. Messieurs vous n'attendez pas de moi que je vous entre tienne du fond de la pétition, et la raison e est bien simple, c'est que je ne la connais p encore; mais je viens m'opposer à ce qu'il en so donné lecture, et je me fonde sur l'existence d la loi de l'amnistie, solennellement déclarée pa

promulguée par le monarque. Cette loi a consacré des exceptions. Elles ont été déterminées par le Roi, par la Chambre des pairs, par celle des députés, par tous les pouvoirs réunis. Je ne vois figurer sur aucune liste le nom du militaire contre lequel est dirigée la pétition qui vous est adressée; il ne se trouve dans aucun des cas d'exception de l'amnistie; en conséquence je crois devoir m'opposer à la lecture demandée.

M. Reynaud de Trets, député des Bouchesdu-Rhône. La pétition qui vous est soumise est antérieure à la loi d'amnistie. Elle vous explique la manière dont les habitants de la Provence jugeaient leur commandant militaire, dans un moment où le silence de la loi permettait encore de s'expliquer sur sa conduite : ils jugeaient alors, comme nous en avions tous été persuadés, dans le moment du danger!... comme je l'avais été moimême, moi... témoin oculaire d'un partie des faits énoncés dans leur pétition !... Ils jugeaient qu'il les avait autorisés par la faiblesse de sa conduite et par l'astucieux mystère qui en avait couvert tous les détails; que c'était lui qui avait, au moment du débarquement de l'usurpateur, enchainé le courage et le royalisme des Marseillais;... pleins de zèle, animés par le plus vif attachement pour l'auguste maison des Bourbons, nous aurions volé au-devant des pas de leur ennemi et du nôtre, et nos pas ont été enchaînés trop longtemps par les mesures de lenteur qu'a prises celui dont le devoir était de se mettre à notre tête et de guider notre ardeur !... Je dirai plus, tous nous sommes restés persuadés et nous ne doutons pas qu'il n'en existe des preuves. Tous, nous croyons que ses rapports avec l'ile d'Elbe..... Des murmures s'élèvent.

Un grand nombre de membres s'écrient: A l'ordre! à l'ordre!

Beaucoup d'autres membres: Continuez, continuez.

Plusieurs voix : Et la loi d'amnistie!...

L'orateur continue. Tous, nous croyons que ses rapports avec l'ile d'Elbe avaient prévenu et peut-être contribué à préparer les funestes événements auxquels il nous a été interdit de mettre obstacle. Si aucune procédure n'avait été commencée contre l'ex-gouverneur Masséna, avant la proclamation de la loi d'amnistie, nous savons que le silence serait notre devoir; mais nous sommes informés que des instructions avaient été commencées; nous ignorons quel en a été le résultat et jusqu'à quel point elles sont parve. nues... C'est un fait qu'il est nécessaire d'éclaircir je vous demande donc, au nom des fidèles provençaux qui se flattent qu'ils auraient sauvé la France des malheurs qu'elle a éprouvés, si ce traître 'n'eût pas enchaîné leur courage, je vous demande que leur pétition soit renvoyée au ministre de la guerre, qui, mieux instruít que nous ne pouvons l'être du véritable état de cette affaire, sera plus à portée que personne de juger Ja direction qu'il doit lui donner, et pour l'intérêt du Roi et pour l'honneur de la population d'une cité, et même d'une province entière, à jamais fidèle à son Roi!

A l'appui, et pour l'intelligence de ce que j'ai eu l'honneur de vous avancer, je demande, Messieurs, que, préalablement, la lecture de la pétition vous soit faite en entier.

M. de Serre, député du Haut-Rhin. Messieurs, je vous supplie de croire que mon opinion est tout à fait indépendante des personnes et que je considère ici la question dans sa généralité.

Quelques habitants d'une contrée de la France

vous font parvenir leurs plaintes sur des faits politiques antérieurs à l'amnistie, sur la conduite d'un des chefs de l'armée à cette époque antérieure. La pétition, d'après l'opinant luimême, est un acte d'accusation circonstancié. J'accorde que tous les faits imputés sont vrais ; cependant, vrais ou faux, ils sont couverts par l'amnistie. (Quelques voix : C'est ce que l'on contredit.....) J'admets que l'auteur des faits allégués fût déjà poursuivi judiciairement, il faudrait les prouver. Mais la présomption de droit est que les faits n'existent pas. Or, la question est de savoir si nous devons reporter notre attention sur des faits amnistiés et contre un homme qui n'est point excepté de l'amnistie; si nous devons détruire notre propre ouvrage, perdre de vue que le but d'une loi d'amnistie est l'oubli, le profond oubli du passé; que le premier bienfait qu'elle se propose est le retour de la tranquillité publique ; que nous ravirions à la France ce bienfait par un ressentiment continué des actes, des crimes, si l'on veut, qui ont été remis à leurs auteurs, en donnant une publicité solennelle à un acte d'accusation qui ne peut tendre qu'à accroître les animosités. Au surplus, rien ne prouve qu'une poursuite judiciaire excepte de l'amnistie le maréchal Masséna.

M. Raynaud de Trets. J'ai été moi-même appelé en témoignage.

M. de Serre. Eh bien! si une instruction a été commencée, nous devons abandonner aux juges le soin d'éclaircir les faits. C'est un motif de plus pour nous abstenir, et qu'une branche de la puissance législative se garde de jeter un poids dans la balance de la justice. L'affaire est absolument sortie de notre domaine, et, rentrée dans celui de l'autorité judiciaire, elle ne peut plus faire partie de nos attributions.

M. Forbin des Issarts, député de Vaucluse, reconnaît, dit-il, la justesse des raisonnements de l'orateur qu'il remplace à la tribune, mais sa discussion lui parait étrangère à la question, et c'est à son vrai point qu'il croit devoir la ramener. Il est présenté à la Chambre une pétition qui contient des accusations graves. La Chambre a le droit d'en prendre connaissance, puisque sa commission a non-seulement le droit mais le devoir de l'éclairer sur les pétitions dont l'examen lui est confié. On ne peut donc refuser d'entendre la lecture de la pétition.

Quant à la proposition du renvoi, continue M. des Issarts, elle est parfaitement dans les convenances. La Chambre n'a rien à préjuger; elle ne doit ni inculper ni amnistier, soit sous le rapport judiciaire, soit sous le rapport militaire. J'appuie donc la proposition du renvoi et de la lecture de la pétition.

On demande à aller aux voix.

M. de Catelan trouve l'un et l'autre sans objet Ou Masséna, dit-il, est sur la liste des exceptions, ou il n'y est point placé.....

M. Hyde de Neuville. Il ne s'agit point d'appliquer les exceptions, mais de savoir si la pétition doit être lue.

La discussion est fermée.

La Chambre, consultée par M. le Président, décide que le rapporteur fera lecture de la pétition. En voici le texte :

A Messieurs de la Chambre des députés. Messieurs, enfin le triomphe des lois et le retour de l'ordre ne sont plus un problème.

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