Page images
PDF
EPUB

moire du cœur, la reconnaissance, de le voir déverser sur M. Nothomb, son ancien défenseur, les mêmes accusations, les mêmes paroles flé

C'est pour cela, Messieurs, que nous avons, non pas jeté une provocation à la Chambre, mais accepté le débat politique que l'opposition nous offrait; nous l'avons fait simplement, loyale-trissantes que M. Gendebien avait déversées sur ment, sans forfanterie comme sans réticence.

Messieurs, je ne connais que deux manières de combattre loyalement un ministère, c'est de l'attaquer dans la pensée politique qui a présidé à sa formation, dans les principes politiques de la majorité qui le soutient, dans les actes qu'il a posés, actes considérés dans leur valeur même, dans leur ensemble, dans les résultats qu'ils ont produits.

Je croyais n'avoir à me défendre que sur ce terrain des principes et des faits, et je m'y serai senti à l'aise, quelle que pût être la vivacité, la violence mème de l'opposition.

Mais c'est ce que l'opposition ne veut pas. Nos actes, elle ne les envisage pas en eux-mêmes dans leur signification vraie et générale, mais par le petit côté des incidents et des fausses interprétations. Quel est l'acte, Messieurs, auquel, avec un peu d'habileté de rhéteur, on ne puisse attacher une fausse interprétation?

L'opposition a trouvé un mot pour cette situation c'est ce qu'elle appelle examiner la moralité des actes, c'est ce que je nomme, moi, le côté personnel des actes que l'on décore de ce nom de moralité. (Interruption).

Ce que l'on veut, c'est passionner les esprits, c'est rendre la situation violente, afin d'en faire remonter la cause au ministère ou à quelques membres du ministère, c'est fatiguer ainsi et décourager la majorité.

Pour cela, il faut descendre aux accusations personnelles, comme vient de le faire l'honorable M. Verhaegen, il faut incriminer les intentions et toucher aux caractères. Il faut, non pas discuter, mais flétrir, non pas combattre des ministres, mais les déconsidérer, réduire des débats qui, dans l'intérêt de tous, devraient rester dignes, à une misérable question de personnes.

L'honorable M. Lebeau a semblé déplorer hier de devoir attaquer les ministres dans la loyauté de leurs intentions et dans leur probité politique. Il l'a fait en paroles amères auxquelles ses antécédents nous avaient peu habitués. J'ai à le regretter bien plus pour lui que pour nous.

N'avez-vous pas été affectés péniblement, Messieurs, pendant le discours de M. Lebeau, au souvenir de ce qui s'est passé en 1833? C'était un spectacle étrange de voir M. Lebeau, comme s'il avait perdu toute mémoire, même la mé

lui quand M. Nothomb le défendait. M. le Ministre de l'Intérieur aurait pu relire sa belle défense pour sa propre justification.

C'est la première fois, depuis la révolution, a dit M. Lebeau, qu'on a vu l'opposition devoir descendre jusqu'à incriminer ainsi les intentions et les caractères.

Ecoutez, Messieurs, ces quelques' paroles de M. Nothomb en 1833, et vous demanderez comment M. Lebeau a pu oublier le passé à ce point:

« Cet homme qui est à votre banc, disait-on en parlant de M. Lebeau, est celui sur qui, depuis deux ans, on appelle toutes les haines, à qui, dans nos grandes luttes parlementaires, on a imputé tous les crimes de haute trahison, que la presse a successivement condamné à parcourir toute l'échelle pénale. Est-il une accusation que la tribune, que la presse se soient interdite? Dans cette enceinte, les expressions les plus flétrissantes, les comparaisons les plus odieuses n'ont pas été punies par un rappel à l'ordre ; en dehors de cette enceinte, la presse s'est vautrée dans la calomnie, elle a épuisé, contre l'homme qu'on vous dénonce, toutes les ressources de la langue! »>

Le temps a fait justice de ces accusations personnelles contre M. Lebeau. Les haines sont tombées, et il est resté de cette époque le souvenir du talent que M. Lebeau a déployé et celui des faits qui lui ont valu la reconnaissance du pays.

Pense-t-on que le temps aussi ne fera pas justice à ceux ou à celui qu'on accuse aujourd'hui? Ces haines aussi tomberont, croyez-le, et l'avenir consolera des passions et de l'amertume du présent. (Sensation).

Messieurs, des circonstances que j'ai toujours regrettées m'ont placé, en 1840, dans l'opposition qui a amené la chute du cabinet alors aux affaires. J'ai combattu ce cabinet dans le principe même de sa formation. Je voyais en lui l'avénement d'une politique nouvelle, le signal d'un changement de majorité parlementaire que je considérais comme une révolution dans l'Etat et comme devant être fatale au pays. Mais jamais il ne m'est échappé une parole blessante contre eux; j'ai toujours témoigné pour leur talent et leur caractère le respect, j'allais dire la sympathie que je leur devais; et quand le ministère

dosa un acte important, celui de l'établissement | passions et de clameurs. Mais le pays ne savait d'une ligne de bateaux à vapeur, je leur prêtai | sincèrement le concours non-seulement d'un vote silencieux, mais de ma parole.

L'honorable M. Lebeau m'a remercié plusieurs fois dans les graves débats de 1840, de laloyauté de la convenance de l'opposition que je lui faisais; je regrette de ne pouvoir adresser aujourd'hui à l'honorable M. Lebeau les mêmes remerciments.

Je vous ai dit tout à l'heure, Messieurs, qu'on ne combattait au fond ni les actes essentiels que nous avons posés, ni les principes qui ont présidé à la formation du ministère, et qui ont dicté son programme.

En effet, parmi les lois importantes qui vous ont été présentées, et qu'une grande majorité a accueillies, deux faits sont dominants, deux actes out particulièrement marqué ces deux sessions : la loi des droits différentiels, base de notre politique commerciale future, et le traité du 1er septembre.

Nous fait-on un grief de la loi des droits différentiels? Nous fait-on un grief du traité du 1er septembre? Eh! mon Dieu! non. L'honorable

[ocr errors]

pas que tout ce bruit n'était pas soulevé contre le traité, dont M. Lebeau s'est félicité comme d'un fait heureux pour le pays, mais contre le ministère qui l'avait signé.

Il fallait trouver le moyen d'accueillir le fait comme heureux et de pouvoir en même temps blâmer le ministère.

Pour cela, on s'est emparé des incidents. L'incident sur la loi des droits différentiels, c'est l'exception en faveur de la Hollande. Or, on vous l'a déjà répété, cette exception a été admise par la Chambre à l'unanimité moins une voix. Pour ce grand grief, nous avons donc la Chambre presque tout entière pour complice.

L'incident du traité du 1er septembre, vous le connaissez bien, c'est la déclaration faite par M. le Ministre de l'Intérieur relativement à l'art. 19 du traité.

On a dit, Messieurs, que cette déclaration de M. le Ministre de l'Intérieur avait été téméraire, qu'elle avait été un mensonge pieux, qu'elle avait eu pour but de tromper la Chambre et d'enlever le vote sur le traité.

L'honorable M. Devaux, qui s'est fait l'organe

M. Delfosse a bien voulu reconnaître que la loi | principal de cette accusation contre M. le Mides droits différentiels était un acte important.

[blocks in formation]
[ocr errors]

nistre de l'Intérieur, a-t-il oublié un autre traité conclu à une autre époque et contre lequel l'opposition a formulé la même accusation?

Le Ministère de M. Lebeau, en 1831, avait posé aussi un grand acte qui restera comme le traité du 1er septembre restera. Il avait porté devant le Congrès le traité des 18 articles qui, malheureusement, n'a pas survécu à nos désastres du mois d'août. Eh bien, Messieurs, l'honorable M. Lebeau n'a-t-il pas été traqué, c'est le mot, par une opposition qui ne voyait dans ce traité que la manière dont il avait été négocié, que les déclarations que l'opposition d'alors ap

M. LE MINISTRE DES TRAVAUX PUBLICS. Soit donc un succès. Mais l'honorable membre n'a pas voulu faire honneur de ce succès au ministère, il a voulu en faire honneur à la Chambre, à l'auteur de la proposition d'enquête et à la commission d'enquête elle-même. Ici, je me permettrai de revendiquer, pour ma part, une partie de cet honneur, comme rapporteur du projet d'en-pelait aussi trompeuses et téméraires, comme le quête et comme membre de la commission.

N'avons-nous pas vu un chef de l'opposition?... PLUSIEURS MEMBRES. Il n'y a pas de chef de l'opposition.

Ministère est accusé aujourd'hui de la manière dont le traité du 1er septembre a été négocié, et de la déclaration relative à l'article 19? Lorsque l'honorable M. Gendebien fulminait, comme il M. LE MINISTRE DES TRAVAUX PUBLICS.-Si vous le disait, l'anathème de l'impopularité sur un l'aimez mieux, un membre considérable de l'op-grand coupable, quels étaient les griefs de poliposition, qui s'était, en 1811, vivement opposétique extérieure? aux principes de la loi des droits différentiels, venir en 1844 l'accepter de nos mains?

L'opinion publique, il faut le dire, a été étonnée de voir le traité du 1er septembre accepté par la presque unanimité des deux Chambres, après qu'on avait soulevé contre ce traité tant de

Il accusait le Ministère d'avoir trompé le Congrès en négociant secrètement les 18 articles, à peu près comme nous avons été accusés d'avoir sourdement négocié le traité avec le Zollverein. Le deuxième grief, c'était d'avoir trompé le Congrès et le Pays par deux déclarations témé

Eh bien, sur ce principe, l'opposition n'a-t-elle pas été vaincue? Ce qu'elle avait déclaré une

raires et mensongères,c'était le langage de l'opposition: la première, le 17 février 1831, en déclarant que la carrière des protocoles était désor-impossibilité en 1840, ce qui avait été l'objet de mais fermée, tandis que 60 protocoles ont suivi cette déclaration. La seconde, qui a eu un si grand retentissement dans le pays, c'est lorsque M. le Ministre des Affaires étrangères promit à la tribune que la Belgique conserverait le Luxem bourg et qu'elle n'aurait pas la dette, qu'il en donnait pour garants et nos droits et la parole du prince.

Cette déclaration était, certes, autrement audacieuse, autremeut téméraire que celle de M. le Ministre de l'Intérieur, mais la différence c'est que le succès aura couronné la déclaration de M. le Ministre de l'Intérieur, tandis que, malheureusement, le succès n'a pas couronné la déclaration de l'honorable M. Lebeau.

Ce qui était arrivé pour le traité des 18 articles est arrivé, et cela devait être, pour le traité du 1er septembre. Eh bien, je le demande aux amis de l'honorable M. Lebeau, comment appelaientils alors l'opposition qui s'attaquait à l'auteur des 18'articles par le petit côté des incidents et des fausses interprétations? Ils l'appelaient une opposition mesquine, étroite, injuste; et de quel nom, Messieurs, me sera-t-il permis d'appeler l'opposition qui s'attaque aussi, par le petit côté des incidents et des fausses interprétations, aux ministres qui ont signé le traité du 1er septembre? Ainsi, Messieurs, je le répète, nos actes on ne les combat point en eux-mêmes; on les accepte; ils ont été adoptés non-seulement par la majorité ordinaire de la Chambre; mais ils ont obtenu le concours de ceux qui nous combattent avec le plus de passion. On attaque nos actes, comme je viens de le dire, par les incidents et non en face.

Oui, Messieurs, nous voulons bien être jugés sur nos actes considérés dans leur valeur mème et dans leur véritable portée. La situation financière et industrielle du pays, il nous est permis de croire que nous l'avons améliorée.

Mais à côté, ou plutôt au-dessus de nos actes, il y a des principes qui ont présidé à la constitution du ministère, qui ont présidé à la rédaction de son programme. Ce principe, Messieurs, vous le connaissez; M. Malou l'a exactement défini, dans une séance précédente; ce principe, c'est celui qui refuse de prendre pour point de départ de la formation des Ministères et du classement des majorités, la division des partis en catholiques et en libéraux.

tous ses défis, est cependant arrivé. Nous avons eu un renouvellement complet de la Chambre en 1841 et en 1843, et la majorité, malgré de regrettables échecs individuels, est restée debout. La majorité est restée au fond la même. Messieurs, la défaite de l'opposition sur le terrain des principes politiques qui ont été l'objet de si vives luttes pendant deux années, cette défaite est telle que, si demain le ministère actuel disparaissait, notre principe, notre programme ne tomberaient pas avec nous. Si demain le Ministère actuel disparaissait, vous n'auriez ni un ministère libéral, ni un ministère catholique, qui ne sont, ni l'un ni l'autre, en rapport avec la situation et les vœux du pays; vous auriez un ministère ayant le même programme que nous et s'appuyant comme nous sur la même majorité composée des fractions modérées des deux grandes opinions qui divisent le pays. L'opposition aurait à recommencer la même guerre contre d'autres hommes.

On nous a parlé de franchise politique, de sincérité politique, de probité politique; on a fait, à ce point de vue, l'histoire des deux ministères qui se sont succédé depuis 1841; la Chambre me permettra de faire, à mon tour, l'histoire de l'opposition, au même point de vue, pendant les quatre années qui viennent de s'écouler, et nous verrons, Messieurs, si la franchise politique, si la sincérité politique sont bien les vertus de l'opposition. Je n'aurai besoin pour cela ni de récriminations, ni d'incidents, ni de petits faits, ni d'insinuations blessantes pour personne. Non, Messieurs, j'irai au fond des choses, et pour examiner ce qu'on appelle la moralité des actes, je n'aurai qu'à rappeler les faits généraux incontestables pour tous.

L'opposition, depuis quatre ans, a adopté deux thèmes différents, j'allais dire deux thèmes contradictoires.

Jusqu'aux élections de 1845, c'était la majorité qui était le but de ses attaques, l'objet direct de ses accusations; le Ministère n'était combattu que pour avoir sauvé la majorité en 1841, en évitant la dissolution, et pour avoir été son complice depuis. C'était alors, il vous en souvient, la majorité réactionnaire, la majorité rétrograde, la majorité cléricale qui voulait détruire une à une toutes les libertés politiques du pays, qui avait voté la loi communale, qui avait dicté

la loi du fractionnement, qui visait au monopole de l'enseignement, qui prétendait revenir à la main-morte et à la dîme, qui s'appuyait surtout sur le clergé politique dont l'action électorale excitait une grande irritation dans le pays tout entier. On nous rappelait alors à tous moments la restauration, la loi d'amour de M. de Peyronnet, le nom de M. de Villèle. On représentait la majorité comme étant sur la pente, au bas de laquelle la droite royaliste de la restauration avait trouvé une révolution.

N'était-ce pas là le thème de l'opposition pendant les années qui se sont écoulées, de 1841 à 1845? Les souvenirs ne sont pas si éloignés pour qu'on l'ait oublié.

Les discussions irritantes, passionnées, surgissaient à tous propos à cette tribune.

Ces discussions, Messieurs, ont subitement cessé après les élections de 1843. La majorité réactionnaire et rétrograde a complétement disparu des débats. La majorité n'a plus été cette grande coupable des années précédentes; on l'a complétement amnistiée pour ne plus attaquer que le Ministère.

Le pourquoi de ce que M. le Ministre de l'Intérieur appelait hier manœuvre parlementaire, mais ce pourquoi n'est ici une énigme pour personne. Ce pourquoi je vais vous le dire. (Mouvement.)

En 1841, la gauche s'était créée un moment la majorité. Nous sommes 49, disait-on. Elle n'a pas cru à la reconstitution de la majorité mixte, catholique-libérale en 1841. A chaque élection, on prophétisait avec une grande assurance la chute de la majorité, et l'avènement de la gauche libérale..

On se croyait fort; on était franc, et c'était la majorité que l'on voulait ouvertement ren

verser.

Chaque élection vint donner un démenti à ces prophéties et à ces espérances. La majorité dont on annonçait chaque jour la chute, n'a pas changé dans son ensemble et l'opposition l'a encore aujourd'hui devant elle !

La dissolution des Chambres que le Ministère de 1840 avait demandée dans le but avoué de modifier la majorité parlementaire, cette dissolution a eu lieu en fait. Le renouvellement complet des Chambres s'est effectué en 1841 et en 1843. Cette dissolution de fait n'a pas eu lieu à la faveur d'une tempête politique, mais par le jeu régulier de nos institutions. Cependant la majorité est restée debout; et les plus con

fiants désespèrent de la voir modifiée en 1845. Ces faits firent tomber beaucoup d'illusions. L'opposition s'était sentie moins forte, et comme je vous l'ai dit l'année dernière, elle devint moins franche; mais elle devint plus habile.

Elle comprit que ce n'était plus sur les ruines de la majorité qu'elle pouvait renverser le Ministère; elle changea de tactique parlementaire, passez-moi le mot. Elle voulut isoler de la majorité le Ministère ou quelques membres du Ministère.

C'est ce qu'elle essaya. Mais pour cela, Messieurs, il fallait nécessairement renoncer aux griefs de 1841 et de 1842. Pour jeter des défiances dans la majorité, on ne pouvait plus dire à M. le Ministre de l'Intérieur ce qu'elle lui a répété pendant deux ans : Nous voulons votre chute, parce que vous vous traînez à la remorque de l'opinion catholique, parce que vous êtes l'esclave de la majorité; nous voulons votre chute parce que vous avez sauvé la majorité en 1841, en évitant la dissolution, en vous mettant en travers du mouvement libéral qui se produisait; nous voulons votre chute, parce que vous avez fait la loi communale, parce que vous avez subi la loi du fractionnement, parce que vous avez fait des nominations politiques lors des renouvellements des conseils communaux, parce que vous avez fait la loi sur l'instruction primaire et que vous l'avez surtout organisée, dans l'inspectorat et dans les écoles normales, d'après les vues et les désirs du clergé, parce qu'en un mot. disait M. Devaux en 1841, vous vous êtes mis à la suite des passions d'un parti que vous n'avez pas même l'excuse de partager.

Ressusciter ces griefs, Messieurs, mais c'était attaquer le Ministère dans la majorité;mais c'était forcer la majorité à se lever, à répondre à l'opposition et à soutenir le Ministère; mais c'était lier le sort du Ministère à celui de la majorité!

Or, c'était le contraire que l'on voulait. Il a donc fallu ménager la majorité, laisser là tous ces griefs que l'on avait si hautement, si ouvertement articulés; il a donc fallu, comme on l'a dit hier, cacher son drapeau sous son banc, sourire à la majorité, feindre l'oubli et la réconciliation, et n'avoir plus de haine et de colère que contre le cabinet ou quelques membres du cabinet.

Il a fallu pour cela trouver un thème nouveau, adopté pour le but nouveau qu'on voulait atteindre.

Ce thème, Messieurs, dont on avait besoin, on ne l'a pas inventé. Ce thème, on l'a trouvé

tout fait dans des souvenirs parlementaires. Il n'a fallu pour cela que se reporter à 1833. Alors, l'opposition, par l'organe de M. Gendebien, et plus tard, par l'organe de M., Ernst, n'accusaitelle pas le Ministère de M. Lebeau d'être un Ministère de bascule, caressant et jouant tour à tour les partis, n'ayant ni drapeau ni couleur ? Mais, Messieurs, tous les griefs de l'opposition à cette époque, et qui se résumaient, il vous en souvient, dans les mots de juste milieu et de doctrinaires, tous ces griefs, ne sont-ils pas les mêmes au fond que ceux que l'on jette maintenant au Ministère et à M. le Ministre de l'Intérieur en particulier, sous le nom d'absence de franchise politique, de scepticisme politique?

Ce thème, Messieurs, est adroit; il est habile j'en conviens; c'était le seul possible pour parvenir au but auquel on tendait. Mais après cela, comment l'opposition peut-elle avoir la prétention de nous donner, en phrases vertueuses, des leçons de moralité, de sincérité et de probité politique?

Dans un pays voisin, Messieurs, vous savez comment on a appelé, comment on appelle les tentatives de l'opposition pour former une coalition que je ne me permettrais certes pas de juger ici, mais dont le but serait, non pas de changer les principes du gouvernement, mais de substituer des noms propres à d'autres noms propres. On les a appelées intrigues! Eh bien, ce nom aurait dû être inventé pour la situation, telle que l'opposition voudrait la faire chez nous; mais cette tentative de l'opposition sera vaine et ne trouvera pas de réponse sur d'autres bancs.

Messieurs, il ne faut pas ici entre nous de

malentendu. On a parlé de loyauté; eh bien, qu'on en use du moins. On laisse croire que l'obstacle à une réconciliation plus réelle réside dans le Ministère actuel ou dans quelque-uns des membres du Ministère actuel. On nous dit que d'autres noms serviront mieux à l'exécution fidèle de notre programme, que les défiances s'adressent plutôt à certains hommes qu'aux principes mêmes; que la mission que nous avons acceptée, la mission d'asseoir le gouvernement du pays sur une majorité conciliatrice au point de vue des partis, pourra mieux être accomplie par d'autres que par nous.

Eh bien! Messieurs, qu'on le déclare hautement à cette tribune. S'il est vrai que des membres considérables de l'opposition ne veulent rendre, permettez-moi ce mot, ne veulent rendre leur épée qu'à d'autres qu'à nous; s'il est vrai quela chute du cabinet doit ramener à la majorité et au gouvernement des hommes qui en font la gloire et la force; oh! dites-le, et je déclare pour ma part, que demain je me retirerai, que je sacrifierai ma position, si tant est qu'on puisse appeler cela un sacrifice, et que je le ferai de grand cœur pour obtenir un tel résultat.

Mais si c'est la situation parlementaire ellemême que l'on veut miner et détruire; si c'est le système qu'on a défendu depuis quatre ans, je me trompe, depuis quatorze ans, que l'on veut renverser sous des noms propres, si c'est pour renouveler demain contre la majorité la guerre de 1841 à 1843, plus vive, plus violente, avec moins d'obstacles, qu'on ait la franchise de le déclarer. Il n'y aura plus d'équivoque entre nous, personne du moins ne pourra se plaindre d'avoir été trompé. (Très-bien ! très-bien !)

« PreviousContinue »