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D'un autre côté, nous avons vu que les articles 10, 11, 90, 91 du Code de procédure civile, peuvent, dans certains cas, leur être appliqués (1).

Ils peuvent aussi être passibles des articles 222 et suivants du Code pénal, et 181, 504, 505 du Code d'instruction criminelle (2).

Le décret du 30 mars 1808 et l'ordonnance du 20 novembre 1822, complètent l'ensemble des règles de discipline à leur égard.

A. Décret du 30 mars 1808.

351. L'article 103 vise les officiers ministériels (avoués, huissiers) et les avocats.

Le pouvoir disciplinaire de police et d'ordre est accordé à toutes les juridictions ordinaires ou d'exception (justices de paix, conseils de guerre, conseil d'Etat, de préfecture, tribunaux de commerce, civils, correctionnels, cours d'appel et d'assises), mais les tribunaux d'exception ne connaissent pas des fautes découvertes à l'audience.

Les avocats ayant le droit de plaider devant tous les tribunaux et toutes les Cours d'appel, les fautes par eux commises dans les audiences sont susceptibles de la répression disciplinaire, ailleurs que dans le tribunal de leur résidence (3).

Les fautes d'audience consistent, non seulement dans des paroles ou des écrits, mais encore en manquements de tout genre, par exemple en mauvaise tenue, défaut de déférence (4).

Les peines sont celles de l'injonction d'ètre plus exacts ou circonspects, la défense de récidiver, la condamnation aux dépens du procès, la suspension temporaire, l'impression et l'affiche du jugement. La destitution des officiers ministériels peut même être provoquée dans les cas les plus graves (article 102 du décret).

Généralement, et à moins que la faute ne soit grave, les tribunaux procèdent au préalable par avertissement et invitent à la rétractation ou à la modification dans l'attitude prise (5).

(1) V. suprà, nos 349 et 350.

(2) V. nos 99, 400. etc.

(3) Les tribunaux devant lesquels les fautes sont commises ou découvertes sont seuls compétents. C., 29 décembre 1845. Et ils ne le sont qu'à l'égard des avocats ou officiers ministériels qui exerceront devant eux ou seraient attachés à leur juridiction. Chassan, t. II, p. 569.

(4) Cpr. C., 18 novembre 1852. Morin, nos 157 bis, 158.

(5) Morin, no 154. Un avocat ne peut, sans s'exposer à une pénalité discipli naire, censurer dans sa plaidoirie soit les actions, soit les paroles, soit surtout

Si une faute est relevée, on procède sommairement; les témoins sont entendus s'il y a lieu, l'inculpé interrogé et admis à se défendre (1). Si l'infraction commise à l'audience par un avocat est un délit, il peut être condamné, cumulativement, aux peines de ce délit et aux peines disciplinaires (2).

L'appréciation des faits d'audience échappe à la censure de la Cour de cassation (3).

Les tribunaux doivent se prononcer, au plus tard, en statuant sur l'affaire même, à l'occasion de laquelle il y a lieu à répression disciplinaire. Leurs décisions sont susceptibles d'opposition, si elles sont par défaut, ou d'appel quand il y a interdiction temporaire ou radiation. Dans certains cas, pour violation de la loi, le pourvoi en cassation est permis (4).

Le droit accordé par l'article 103, § 1, du décret de 1808 peut être exercé de plano par le ministère public, et le tribunal peut aussi se saisir d'office (5).

La disposition du § 2 de l'article 103 permet encore aux tribunaux et aux Cours d'appel d'apprécier les faits extérieurs, les fautes des officiers ministériels, hors de l'audience (par exemple, les injures, diffamations, etc., proférées par eux) (6).

Mais quand il s'agit des avocats, les tribunaux de première instance ne peuvent en connaitre C'est alors au conseil de discipline de l'ordre ou à défaut à la Cour d'appel, siégeant toutes chambres réunies, en la Chambre du Conseil à en connaître. Si le eonseil de l'ordre refuse de statuer ou si la peine paraît insuffisante, les procureurs généraux relèvent appel. Ces magistrats ont le droit de poursuite.

les intentions du magistrat qui occupe à l'audience le siège du ministère public. Il ne peut pas prendre sa personne à partie, jeter sur lui le blame, etc. V. Paris, 17 février 1860. C., 7 avril 1860. Cpr. C., 29 juillet 1819, 25 janvier 1834.

(1) Il n'est pas nécessaire que les paroles prononcées par l'avocat soient parvenues aux oreilles des juges, leur audition par le public suffit. C., 24 décembre 1836.

(2) Chassan, t. I, p. 90. Grenoble, 26 décembre 1828.

(3) C., 25 janvier 1834, 29 août 1844, 7 avril 1860.

Mais si l'arrêt attaqué se fondait uniquement sur des considérations de droit, il pourrait être revisé. C., 19 août 1844.

De même la décision serait annulable si elle n'affirmait que l'intention de l'inculpé et ne précisait pas en quoi consiste le manquement. C., 21 mai 1878. V. Morin, t. II, no 826.

(4) C., 6 août 1844.

(5) C., 28 avril 1820, 8 janvier 1838, 6 août 1844. Limoges, 3 février 1847. Bastia, 15 juillet 1857.

(6) Caen, 8 janvier 1830. C., 27 novembre 1838, 8 mars 1847. Contrà, les auteurs ci-après à la note qui suit.

Mais ils ne doivent et ne peuvent les faire qu'après que le conseil de l'ordre, mis en demeure, a refusé de statuer ou de prononcer une peine quelconque (1).

Quant aux avoués ou huissiers, il n'y a aucune difficulté (arrêté du Garde des sceaux du 14 juillet 1857). Ils peuvent être poursuivis sans être déférés, préalablement, à la Chambre de discipline (2).

352.

B. Ordonnance du 20 novembre 1822.

L'ordonnance du 20 novembre 1822, loin d'avoir introduit des règles nouvelles, a, au contraire, maintenu formellement celles du passé, en édictant dans son article 16 qu'il n'est point dérogé aux droits qu'ont les tribunaux de réprimer les fautes commises à leur audience par les avocats.

Les peines disciplinaires de l'ordonnance de 1822 sont celles de l'avertissement, de la réprimande, de l'interdiction temporaire, de la radiation (article 18 de l'ordonnance de 1822).

Lorsqu'il s'agit de manquements envers les magistrats, la suspension peut être portée à un an (3).

(1) C.. 22 juillet 1834, 8 juillet 1838, 15 décembre 1847, 12 mai 1858. Morin, Discipline judiciaire, t. I, p. 158. Molènes, p. 28.

Contrà, Falconnet, Barreau français, t. II, p. 518. Bioche, v° Avocat, no 277. Millot, De la profession d'avocat, t. 1, p. 375 et suiv. Liouville, idem. p. 345. Daviel, Observat, sur l'ordonnance de 1822, p. 26. Ch. Dupin, idem, no 103. Ces auteurs soutiennent que le conseil de l'ordre seul est compétent par interprétation du décret du 14 décembre 1810.

(2) C.. 24 avril 1875. Les articles 16 et 43 de l'ordonnance du 20 novembre 1822 font l'application de cette règle aux avocats pour toutes les juridictions civiles ou eriminelles, ordinaires ou exceptionnelles, devant lesquelles ils peuvent se présenter. Les juges de paix ont ce droit. Chassan, t. II, p. 565. C., 23 avril 1850. (3) V. article 18 de l'Ordonnance de 1822. C., 25 janvier 1834. Chassan, t. I, p. 87. Morin, nos 156 et 157.

Ces mesures ne peuvent étre l'objet ni de l'examen ni de la censure des conseils de discipline. Garçonnet. t. I. § 109, no 4. C. 12 mai 1858.

Nous n'entendons pas énumérer ici toutes les fautes d'audience. Les devoirs de l'avocat sont tracées par son serment (art. 38, ordonnance du 20 novembre 1822. V. aussi articles 14, 43). Cpr. article 311, Code d'Instruction. V. comme application: C. 28 avril 1820, 25 janvier 1834, 18 novembre 1852, 3 mars 1860, 5 avril 1889, 7 avril 1860. V. pour les avoués: Morin, t. II, p. 466.

TITRE SEPTIÈME

(1)

DE LA DÉNONCIATION CALOMNIEUSE "D

ARTICLE 373 DU CODE PÉNAL.

Quiconque aura fait par écrit une dénonciation calomnieuse contre un ou plusieurs individus, aux officiers de justice ou de police administrative ou judiciaire, sera puni d'un emprisonnement d'un mois à un an, et d'une amende de 100 francs à 3.000 francs.

(1) Sur l'historique, V. Tissot, Droit pénal, 2o édition, t. II, p. 137 et suiv Guyot, Répertoire, vo Calomniateur, livre I, §§ 1 et 3: Digeste, de verborum significatione; livre III, au Code, de calomniatoribus; Ordonnances de janvier 1303, article 12; 1339, article 88; 1670, titre 3, article 7; articles 426 et 432 du Code du 3 brumaire an IV. V. Introduction p. 113, 131.

L'article 374 du Code pénal a été abrogé par la loi du 17 mai 1819. Cet article privait de ses droits civiques le condamné pour dénonciation calomnieuse.

CHAPITRE PREMIER

DISTINCTION ENTRE LA DIFFAMATION, L'OUTRAGE
LE CHANTAGE ET LA DÉNONCIATION CALOMNIEUSE

353.

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La loi du 29 juillet 1881 (pas plus que les lois des 17 et 26 mai 1819) n'a point abrogé l'article 373 du Code pénal (4).

Il n'y a pas lieu de rechercher si la dénonciation calomnieuse a été dirigée contre des personnes privées ou contre des fonctionnaires publics (2).

Si les faits servant de base à la dénonciation calomnieuse, peuvent motiver une poursuite en diffamation, à raison de la publicité qui leur a été donnée, cette circonstance ne saurait être un obstacle légal à la poursuite, pour le délit spécial et distinct de dénonciation calomnieuse (3).

(1) La prescription de trois mois édictée par l'article 65 de la loi de 1881 s'applique exclusivement aux crimes, délits et contraventions prévus par cette loi. Elle n'est pas applicable au délit de dénonciation calomnieuse qui est prévu non par la loi de 1881, mais par l'article 373 du Code pénal, et qui, par conséquent, constitue un délit de droit commun non soumis à la prescription de trois mois. Trib. paix, Paris, 8 juillet 1897, La Loi, 26 juillet 1897.

(2) Ce ne sont pas seulement les fonctionnaires ou les officiers ministériels que l'article 373 a pour but de protéger, mais encore les particuliers, les simples citoyens. Toutefois, si pour ces derniers comme pour les autres la dénonciation peut même s'entendre de la divulgation de faits de nature à exposer simplement le dénoncé au mépris des honnêtes gens, néanmoins, il eût été peut-être plus rationnel d'exiger qu'ils soient susceptibles de donner ouverture à poursuites répressives. En effet, le délit de calomnie n'existe plus aujourd'hui: l'article 367 du Code pénal a été abrogé. Cpr. Dalloz, v0 Dénonciation calomnieuse, no 22. Chauveau et Hélie, article 373, no 1671. Blanche, no 418. Colmar, 3 février 1863. C., 29 juin 1838, 9 novembre 1860. Cpr. C., 25 février 1826.

Blanche, t. V, no 443. Carnot, sur l'article 373, t. II, p. 227, no 1. De Grattier, t. I, p. 181. Chassan. t. I. nos 300 et 501. Morin, vo Dénonciation calomnieuse, n° 15. D'après ces auteurs, la dénonciation est alors une diffamation.

(3) C., 29 juin 1838, 9 novembre 1860. Alger, 6 juillet 1882. Trib. de la Seine (9 chambre), 6 septembre 1886, affaire Brousse c. Amagat.

Dans cette dernière affaire, Me Robinet de Cléry, au nom de M. Amagat a déposé les conclusions suivantes que nous reproduisons, parce qu'elles résument la question, bien qu'on les ait, avec raison, rejetées :

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