COLINETTE. Eh!bian, N'appellais-vous donc cela rian? De plus il eft l' fillot du Seigneur du village. LUBIN. Il en eft bian pus gras avec ç' bel avantage! COLINETTE.` LUBIN. Mais.... Tian, Si tu m'en parles davantage, J'affommerons Lucas, afin qu'il fe corrige, COLINETTE. Je n' li parlerons pus, mon pere. LUBIN. Ça t'afflige? COLINETTE. Nennin, mon pere. LUBIN. Oh! j' n'aurions qu'à voir ça. Occupe-toi du jardinage : Ces plantes languiffont par faute d'aroufage; Tian, ça t' port'ra guignon, ma fille, & c'est dom mage: Prends-y garde, ou tôt ou tard tu verras; SCENE VII. COLINETTE, feule: U'ENTEND-il donc?i' me fait prefque peur. Travaillons, arrofons pour éviter malheur. Jamais l'iau de ç'ruitfiau ne me parut fi claire ; Ce s'roit un mal de la troubler: Ma coëffure eft bian fimple! il y fauroit mêler Ah! qu'ça m' fait bian! alles m'embelliffont: Je fis jeune, & ces fleurs ne faifont que d'éclore Si j'en croyons ç' que nos Bargers disont, Deux jeuneffes qui s'approchont, Paroiffont pus jeunes encore. SCENE VIII. L'AMOUR, COLINETTE. L'AMOUR, tenant un bouquet. A&A part.) H! voici Colinette; il faut nous amuser; Développons fon cœur en la faisant jaser: Cette pauvre petite ignore Ce que c'eft que l'Amour; mais elle en fent l'effet. (A Colinette.) Il en faudroit auffi dans le corcet. COLINETTE. Ah! ne m'approchais pas. L'AMOUR. Qui vous rend fi peureuse? Vous devriez être plus courageufe; Vous fçavez que l'Amour me dit tout en fecret. COLINETTE. C'est pour ça, v'là justement l' fait. peur de l'Amour, & j' fçavons fa malice; Vous êt amis, ainfi j' vous croyons dangereux. J'avons L'AMOUR. Que voilà bien un difcours de novice! V'là-t-i' pas qu'i' me tiant des difcours outrageux! L'AMOUR. Quoi! ma vue Vous caufe de l'effroi ! vous détournez les yeux ! Souffrez.... COLINETTE. Laiffez-moi-là. L'AMOUR. Vous voilà toute émue! Je venois feulement vous offrir un bouquet. COLINETTE. Si ç' n'eft pas Lucas qui me l' donne, Que ce Lucas doit être fatisfait! COLINETTE. Mais c'eft un bon garçon. L'AMOUR. Et qui vous intéreffe? Qui trouvez-vous le plus beau de nous deux ? Vos traits avont pus de délicateffe ; (Il feint de s'en aller.) C'en eft affez; je dois céder à fon mérite. (Il revient.) Dans le fond, ce bouquet a bien de la fraîcheur. C'est vrai. COLINETTE. I L'AMOUR. Je veux le voir auprès de votre cœur : Mal à propos la crainte vous agite; Laiffez moi l'attacher. COLINETTE. Eh! mais.. mais... mais vraiment ! Laiffez-moi faire, ma petite. COLINETTE. Qu'avez-vous donc ? COLINETTE. Rian, rian; c'eft qu'il palpite. L'AMOUR. Bon! bon! c'eft une idée. COLINETTE. Oh! non, non ; je le sens : Mais ça me fait plaifir, & je vous en r'marcie. L'AMOUR. J'aime à trouver des cœurs reconnoiflans. COLINETTE. Je n'fçavons ç'que ça fignifie; Mais j'n'ons pus peur de vous, & j'fentons la de dans Queuqu'chofe qui parle, & qui nous çartifie Que vous n'voulais qu'mon bian. L'AMOUR. Oui vous avez raison ; Et je vous ferai favorable, Auffi-bien qu'à Lucas. COLINETTE. Ça s'roit bian agriable. Mais là, Monfieu, parlais tout d'bon; Dit' moi, j'vous prie, êt'-vous bien véritable? Dame, efcufais j'vous demande pardon; Mais n'feriais-vous pas queuqu'fripon? Vous riais. L'AMOUR. Ne craignez rien; pour vous je fuis fincere. COLINETTE. |