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tents uniquement pour ceux qui intéressent le fonctionnement de la juridiction mixte.

Trois cas sont prévus dans lesquels la juridiction mixte sera compétente :

1o Les crimes et délits commis directement contre les magistrats, les jurés, les officiers de justice en exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions;

2o Crimes et délits commis directement contre l'exécution des sentences et des mandats de justice, attaques ou résistance avec violence ou voie de fait contre les magistrats en fonctions, bris de scellés, évasion de prisonniers, etc.;

3o Crimes et délits imputés aux jurés, juges, officiers de justice qui sont accusés de les avoir commis en exercice de leurs fonctions ou par suite d'un abus de ces fonctions.

La Cour d'Alexandrie est le seul tribunal d'appel de la juridiction mixte. Elle a en outre le droit de faire des règlements de simple police, d'accord avec le gouver

nement.

En 1880, la compétence des tribunaux fut étendue aux contestations entre l'administration et la commission de la dette publique. Depuis 1901, ils sont compétents en matière de banqueroute frauduleuse.

3° Renouvellement. Le renouvellement des tribunaux de la Réforme nous paraît inutile. En effet, le règlement du 28 juin 1875 institue cette juridiction mixte, à titre d'essai, pour une durée de cinq ans. Il n'est dit nulle part que ses pouvoirs feront l'objet d'un renouvellement

périodique. Pour nous un seul renouvellement était nécessaire celui de 1881, à l'expiration du délai fixé dans le règlement du 28 juin 1875.

C'est le gouvernement anglais qui, depuis son occupation s'évertuant de se rendre maître de l'Égypte, décida les Puissances à admettre cette pratique. Il espérait les mettre en désaccord et supprimer ainsi l'arme la plus redoutable qui pourrait contrecarrer ses desseins.

Il y a eu sept renouvellements à des périodes inégales ; quatre de ces prorogations ont été annales: 1881, 82, 83, 84 et trois quinquennales: 1889, 1894 et 1899.

Il est incontestable que la juridiction mixte a rendu à l'Égypte de nombreux services. Elle a accompli et continué d'accomplir sa tâche d'une façon régulière et raisonnée au milieu de tant d'intrigues de la part, soit du Khédive Ismaïl-Pacha, soit du gouvernement anglais. Elle a enlevé aux consuls la plus grande partie de leurs attributions judiciaires en matière civile et commerciale. Depuis 1860, une colonie européenne considérable s'est établie au Caire et à Alexandrie. Cette colonie a donné

à l'Égypte une vie nouvelle de progrès industriel et agricole. A cette activité économique, il fallait une institution judiciaire capable d'appliquer strictement les lois et en dehors de toute autre préoccupation. Or, ni les tribunaux indigènes, ni la juridiction consulaire ne présentaient ces qualités.

Cette organisation judiciaire mixte joue un rôle politique des plus importants. Elle s'oppose aux empiètements du gouvernement britannique dans l'administration.

judiciaire. Elle sera toujours un obstacle à l'établissement complet de la Grande-Bretagne en Égypte.

Mais il est regrettable qu'on n'ait pas élargi sa compétence en matière pénale.

Les Européens dans les deux grandes villes de l'Égypte sont presque aussi nombreux que les indigènes. Devant les dix-sept juridictions différentes des consuls, les crimes et délits commis par les Européens restent le plus souvent impunis. Cet état de choses est évidemment de nature à inquiéter aussi bien les indigènes que les Européens. La commission internationale réunie au Caire avait reconnu la nécessité d'attribuer également la compétence pénale à la juridiction mixte. C'est la France qui s'y opposa formellement de peur de voir s'effondrer les avantages résultant des capitulations'.

En 1880, nouvelle tentative. Une commission internationale, réunie sous la présidence de Riaz-Pacha, premier ministre, fut chargée de rédiger un code pénal. Les insurrections militaires et les troubles causés par Arabi, chef du parti d'opposition, empêchèrent la commission de mener à bonne fin ses travaux.

On reprit les négociations en 1884 et le 10 mars on réunit une commission composée de deux délégués de chaque Puissance. Une sous-commission rédigea un projet de code pénal qui fut voté par tous les membres de la commission.

Mais on avait donné au parquet des pouvoirs trop

Livre Jaune, 1875, p. 187.

larges et on avait exclu l'élément indigène. Cela effraya même Nubar-Pacha, le plus vaillant défenseur des tribunaux de la Réforme. L'organisation judiciaire mixte, qui avait été admise comme une juridiction d'exception, risquait de ruiner la juridiction intérieure du pays et de devenir une institution de droit commun. Sur l'opposition formelle du Khédive et de Nubar-Pacha, le projet de réforme de 1884 n'aboutit pas'.

En 1890, c'est la France qui s'opposa à l'adoption du projet du gouvernement égyptien inspiré par l'Angleterre. Elle trouvait insuffisantes les garanties accordées aux membres du parquet.

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Les dépenses singulièrement exagérées d'Ismaïl avaient donné lieu, en 1876, à l'institution du condominium anglo-français pour le contrôle de l'administration générale et à la création de la caisse de la dette publique chargée à la fois de recevoir les fonds nécessaires au service des intérêts et de l'amortissement de la dette, et d'employer ces fonds exclusivement à cet objet.

Le condominium a disparu dans les premières années de l'occupation anglaise. La commission de la dette

1 PATUREAU-MIRAND, Les Tribunaux mixtes en Égypte (Poitiers, 1899), pp. 139 et s.

existe toujours et, à l'exemple des tribunaux mixtes, empêche l'établissement définitif du gouvernement britannique.

C'est la loi de liquidation du 17 juillet 1880 qui règle la situation de l'Égypte vis-à-vis de sa dette publique'. Cette loi qui émane de la volonté des Puissances a pour l'Égypte le caractère d'un acte international.

La Caisse se compose de six membres représentant les six grandes Puissances, nommés par le Khédive sur la présentation de leurs gouvernements. Elle représente les créanciers de l'Égypte, régit la Dette publique, participe à l'administration générale des finances et y exerce son contrôle. Le gouvernement ne peut émettre un nouvel emprunt, ni modifier les impôts affectés au service de la Dette sans l'autorisation de la commission. Celle-ci a la garde des fonds de réserve provenant : 1o des revenus engagés sur le service annuel de la Dette et de la moitié des revenus non engagés qui restent après que le budget de la province est couvert (décret du 12 juillet 1888, art. I et 4); 2" de l'autre moitié également administrée par la caisse, mais mise à la disposition du gouvernement égyptien pour les dépenses administratives non prévues

La dette publique de l'Egypte se compose: 1o des sept principaux emprunts qu'elle avait contractés avant 1876; sa dette flottante ct celle du Dairaï-Sanieh furent réunis dans une dette unique et uniforme appelée unifiée, au taux de 7 %; la loi de 1880 réduisit l'intérêt à 4%; 2o de l'ancienne dette privilégiée 5 %, convertie en 1890 en nouvelle dette privilégiée 3 1/2 %; 3° de l'emprunt 5 % émis en 1884 sous la garantie des six Puissances. (POLITIS, Revue générale du Droit int. public, 1896, p. 245.)

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