Page images
PDF
EPUB

malheurs qui frappent la Turquie est la centralisation à outrance de l'administration.

La centralisation qui peut avoir des avantages pratiques dans un petit État dont la population est homogène, présente, au contraire, des inconvénients nombreux dans un pays où le peuple est composé de plusieurs races ayant des habitudes et des besoins différents.

Les révolutions et les carnages qui se sont déroulés et qui ensanglantent au moment où nous écrivons une partie de l'Empire, les institutions administratives anormales que nous avons indiquées plus haut sont les résultats indéniables de l'autocratie et de la centralisation administrative.

Le seul moyen pour régénérer la Turquie est, pour nous, d'en faire un Empire fédéral. Il faudrait, pour cela, la diviser en de vastes circonscriptions embrassant sous le noms d'Eyalets, plusieurs des provinces actuelles ; donner à ces Eyalets une vie administrative et même législative sous la souveraineté du Sultan. On pourrait, dans les lois organiques, indiquer les attributions du conseil délibérant et du pouvoir exécutif de chaque Eyalet.

On diviserait ainsi la Turquie en sept Eyalets : un en Europe, un en Arménie, trois dans l'Asie Mineure, un en Syrie et un en Égypte. On formerait, en outre, des territoires comprenant les possessions turques comme certaines parties de l'Arabie et de la Tripolitaine où l'application d'une pareille constitution serait impossible. Ces territoires dépendraient directement du pouvoir

central jusqu'à ce qu'ils deviennent aptes à former des Eyalets. On formerait à Constantinople un Sénat fédéral et une Chambre composée des représentants de toute la nation comme cela a lieu dans les autres États fédéraux. On donnerait ainsi une énergie vivante aux différentes parties de l'Empire qui agonisent actuellement dans la misère et dans l'ignorance.

Devant la nation régénérée, consciente de ses droits et de ses devoirs, l'Angleterre serait obligée de tenir ses promesses d'évacuation si souvent répétées, et l'Égypte, débarrassée de l'occupation anglaise, reconstituée dans ses finances et ses institutions essentielles deviendrait réellement en fait ce qu'elle est aujourd'hui en droit : une province de la nouvelle organisation ottomane que nous appelons de tous nos vœux pour le bien de notre pays.

La convention franco-anglaise, signée à Londres le 8 avril 1904, vient augmenter la portée de nos prévisions 1.

La France déclare dans l'article 1er qu'elle n'entravera pas l'action de l'Angleterre en demandant qu'un délai soit fixé à l'occupation anglaise ou de tout autre manière. Quoique le gouvernement britannique s'engage, au début de cet article 1er, à ne pas changer l'état politique de l'Égypte, tout porte à croire, au contraire, que la condition juridique de ce pays est sur le point de prendre un nouveau caractère.

1 V. supra, p. 27.

En effet, nous savons, d'après l'examen que nous avons fait de la politique européenne en Égypte, que la seule force qui s'opposait énergiquement à la suppression des institutions internationales, par conséquent à l'établissement définitif de l'Angleterre, c'était la France. D'après cette convention, la France s'engage, non seulement à ne pas entraver l'action britannique en Égypte, mais encore consent à prêter l'appui de sa diplomatie pour l'exécution de ces engagements. (Art. 9.)

Donc, cette force d'opposition devient pour le gouvernement anglais un point d'appui à l'établissement de son protectorat juridique.

Cet arrangement franco-anglais ne fait qu'augmenter l'intérêt de notre sujet, puisque nous pouvons considérer la condition internationale de l'Égypte comme se trouvant à la veille de subir un changement.

2 Dans l'article 4, le gouvernement anglais consent à la mise en vigueur du traité du 28 octobre 1888 concernant la condition juridique du Canal de Suez.

[blocks in formation]

Situation juridique de l'Égypte vis-à-vis de la Porte

[merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small]

SECTION IV.

Comparaison de la situation de l'Égypte avec les États vassaux et les provinces privilégiées de l'Empire....

[blocks in formation]

31

31

42

47

[blocks in formation]
« PreviousContinue »