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général de l'Égypte aura le droit d'édicter des règlements d'administration intérieure. Mais, comme ces règlements peuvent avoir le caractère d'un arrangement international, ou peuvent toucher la situation des étrangers résidant en Égypte, le firman prend soin de préciser dans quelles mesures le Khédive pourra user de son pouvoir règlementaire.

Cependant, l'administration intérieure de l'Égypte, c'est-à dire tout ce qui a rapport à ces intérêts locaux, étant de la compétence du Gouvernement Égyptien, nous vous permettons, pour la conservation, et en faveur de ses intérêts, de faire des règlements spéciaux ayant rapport à cette administration intérieure seulement, en continuant à observer en Égypte les traités de notre Empire tels quels. En résumé, vous êtes autorisé à faire des conventions pour les douanes, la police des sujets européens, le transit, la poste, à la condition que ces accords n'aient ni la forme, ni le caractère de traités internationaux ou politiques. Dans le cas contraire, si ces accords ne sont pas conformes aux bases ci-dessus et à nos droits fondamentaux de souveraineté, ils seront considérés comme nuls et

non avenus.

« Dans le cas où le Gouvernement égyptien aurait quelques doutes sur la conformité d'une convention de ce genre avec les lois fondamentales de notre Empire, il devra en référer à notre S. Porte avant de prendre aucune résolution définitive.

« Toutes les fois qu'il se fera, en Égypte, un règlement de douane spécial dans la forme voulue, avis en sera donné régulièrement à notre Gouvernement, de même que pour sauvegarder les intérêts commerciaux en Égypte dans les traités de commerce qui interviendront entre nous et les Gouvernements étrangers, l'administration égyptienne sera consultée.....

IV

FIRMAN DU 29 NOVEMBRE 18691

Tous ces privilèges supplémentaires accordés à IsmaïlPacha lui donnaient l'espoir de pouvoir agir en maître en Égypte. Il se souciait peu du gouvernement central. Il espérait que les riches cadeaux envoyés au GrandVizir et aux ministres influents suffiraient pour détourner toute immixtion de la Porte dans ses projets. Ainsi il augmenta le nombre de ses soldats, commanda des munitions de guerre aux pays industriels de l'Europe et de l'Amérique, fit construire des cuirassés et invita les Puissances à assister à l'inauguration du canal de Suez et entreprit un voyage en Europe sans demander l'autorisation du gouvernement souverain. Tous ces agissements du Khédive inquiétaient la Porte qui, par une tahrirat (dépêche), lui en demanda compte 2.

Il ne faut pas oublier que les privilèges de 1841 ainsi que ceux accordés postérieurement sont concédés, non pas à l'Égypte, mais au gouverneur de l'Égypte et ont un caractère purement contractuel. Contractuel d'abord entre la Turquie et son gouverneur en Égypte, contractuel ensuite vis-à-vis des Puissances signataires du traité de la Quadruple Alliance.

NOURADOUNGHIAN, op. cit., t. III, p. 292.

2 Archives diplomatiques de 1869, t. III, p. 1319.

Si donc le Khédive méconnaissait les engagements par lui pris vis-à-vis de la Porte, celle-ci serait parfaitement en droit de considérer comme nuls et non avenus les privilèges contenus dans les firmans et par suite révoquer le Khédive.

En supposant même que la Turquie veuille accorder à l'Égypte son entière indépendance, la situation ne changerait pas non plus; car la Turquie elle-même est liée par un contrat international vis-à-vis des Puissances. signataires du traité de la Quadruple Alliance. Il faudrait en outre leur consentement. Le Khédive se hâte de répondre au tahrirat du Grand-Vizir en protestant de sa fidélité et en disant que si en Europe il avait obtenu les honneurs des souverains, c'est parce qu'il était un fidèle serviteur du Sultan'.

A la suite de la soumission du Khédive, le Sultan lui accorda le firman du 29 novembre 1869 qui limite les pouvoirs du gouverneur de l'Égypte et lui trace une ligne de conduite.

Ce firman qui confirme les privilèges du Khédive nous montre également que ce pays est une province privilégiée :

<< Il est superflu de dire combien ma sollicitude est grande pour la prospérité de l'importante province d'Égypte et pour l'accomplissement du bien-être et de la sécurité de ses habi

tants.

<< Tout en consacrant une attention sérieuse au maintien

Archives diplomatiques de 1869, t. IV, p. 302.

intact des privilèges antérieurs accordés à l'administration égyptienne, il est de mon devoir de surveiller en même temps le strict accomplissement des obligations de cette administration, soit envers ma couronne, soit envers les habitants de la province.

V

FIRMAN DU IO SEPTEMBRE 18721

Le firman de 1869 gênait Ismaïl-Pacha dans sa liberté d'action. A force de sollicitations gracieuses, il parvint à obtenir le firman du 10 septembre 1872 qui abroge celui de 1869.

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Par mon Firman impérial en date du 5 Sefer 1284 (8 juin 1867), l'administration intérieure de l'Égyte, et, par conséquent ses intérêts financiers, matériels et autres, sont dévolus au Gouvernement égyptien.

<< Notre faveur impériale lui a accordé tout ce qui se rattache au développement de l'organisation intérieure et du progrès en général.

« Les choses étant ainsi, vous m'avez soumis que quelques restrictions et exceptions contenues dans mon firman du 24 Chaban 1286 (29 novembre 1869) créaient des entraves sérieuses au complet développement de la prospérité de l'Égypte..... Aussi, j'ai prescrit de maintenir tels quels les privilèges octroyés par mon firman en date du 5 Sefer 1284...2 »

NOURADOUNGHIAN, t. III, p. 342.

2 Voyez le firman du 25 novembre 1872 autorisant le Khédive à contracter des emprunts. Ce firman fut abrogé par celui de 1879. (NOURADOUNGHIAN, t. III, p. 343.) Voyez également, dans NOURADOUNGHIAN, t. III, p. 347, le firman du 8 juin 1873 réunissant toutes les dispositions antérieures.

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VI

FIRMAN D'INVESTITURE DE TEWFIK-PACHA

DU 26 JUIN 18791

« A mon Vizir éclairé Tewfik-Pacha, appelé au Khédiviat avec le haut rang de Sédaret effectif, décoré de mes ordres impériaux de l'Osmanié et du Medjidié en brillants; que le Tout-Puissant perpétue ta splendeur!

<< Ismaïl-Pacha, Khédive d'Égypte, ayant été relevé de ses fonctions, eu égard à tes services, à ta droiture et à ta loyauté, tant à ma personne qu'aux intérêts de mon Empire, à ton expérience des affaires de l'Égypte, à ta capacité pour réformer la mauvaise situation dont ce pays souffre depuis quelque temps et, conformément à la règle établie par le firman du 13 Mouharem 1283 (27 mai 1866) pour la transmission du Khédiviat, par ordre de primogéniture de fils aîné en fils aîné, nous avons conféré à toi, en ta qualité de fils aîné d'lsmaïl-Pacha, le Khédiviat d'Égypte tel qu'il se trouve formé par ses anciennes limites en y comprenant les territoires qui ont été annexés.

« Tous les impôts prélevés en Égypte le seront en mon nom. Les Égyptiens étant mes sujets, ils ne devront en aucun temps. subir la moindre oppression ni acte arbitraire. Le Khédive auquel est confiée l'administration civile, financière et judiciaire du pays aura la faculté d'établir d'une manière conforme à la justice tout règlement de loi intérieur à cet égard; il aura le droit de contracter et renouveler, sans porter atteinte

'L'Égypte et l'occupation anglaise (Revue des Deux-Mondes, 1er décembre 1888).

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